Jazz live
Publié le 8 Juin 2012

Jazzdor, Strasbourg-Berlin (4)

Une dernière soirée emplie d’émotions, évidemment : d’abord c’est la dernière, ensuite le nouveau groupe de Marc Ducret (« Real Thing # 1 ») clôture le festival sur une note tellement forte que tous en sont bouleversés, et comme auparavant Daniel Humair et son « New Reunion » quartet ont joué le jeu crânement et en beauté, la coupe est pleine. On n’oubliera pas de dire aussi que les premières notes sont revenues à un sextet(t) réunissant des élèves de Strasbourg (Conservatoire) et de Berlin (Jazz-Institut), qu’ils ont fort bien joué des compositions de chacun, qu’ils avaient travaillé toute la semaine, et qu’ils ont nom : Musina Ekobissé (ts), Markus Ehrlich (ts), Chris Karantzas (g), Tom Georgel (p), Igor Spalatti (b) et Arthur Vonfelt (dm). Il se dit que les strasbourgeois, séduits par les perspectives de la capitale allemande en matière d’enseignement (et autre…) aimeraient s’installer ici dès l’an prochain. Pour ça, il faut rentrer au « Jazz-Institut » dont les professeurs ont nom (entre autres) David Friedman, Jon Hollenbeck, Greg Cohen…


Revenons au concert du groupe de Daniel Humair, qui fut splendide, et donna lieu à un rappel qui pouvait en amener d’autres tellement le public en aurait repris. Emile Parisien (ts, ss) et Vincent Peirani (acc, voix) semblent (depuis Nantes en septembre 2011, où déjà les choses s’amorçaient) avoir pris les choses en main, et de fort intelligente manière. D’abord ils jouent leurs compositions (ou parfois celles de Jane Ira Bloom, ou de Joachim Kühn), ensuite ils montrent une complicité totale dans l’énoncé des thèmes (unissons ou poursuites), dans leur développement, dans leur construction mélodique aussi, qui a le parfum d’une valse musette qui serait passée au Conservatoire, et en aurait pris de la graine sans perdre rien de son fruit. Il faut les voir de près, en façade, l’un à droite et l’autre à gauche, rivaliser amicalement de « stop-chorus », de petites phrases découpées au chalumeau, suspendues, reprises, amenant des conclusions à tiroir, dévoilant soudain des émotions cachées, le tout bien sûr avec l’assurance que derrière, avec les deux monstres de musique que sont Jérôme Regard (b) et Daniel Humair (dm) ça suivra de toutes façons au cordeau. CD en septembre, concert du même groupe au Parc Floral demain.

 

Annoncée parfois comme « du lourd », une expression que je cite sans la revendiquer car je ne l’aime pas, la musique de Marc Ducret (g) a vraiment marqué les spectateurs restés jusqu’au bout. Elle n’est pas lourde du tout, évidemment – mais je sais que l’expression veut dire que c’est du sérieux, que ça ne rigole pas, que ce n’est pas de la « musique légère » comme on disait naguère. Il ne faut pas exagérer non plus, ça s’écoute bien même si c’est complexe. Quelqu’un disait à la fin du concert que « ça de débandait jamais ». Là encore, je cite sans reprendre à mon compte, mais il y a de ça en effet. C’est une musique qui avance, qui chemine, qui parvient à des sommets dont on suppose qu’ils vont marquer une fin, et puis non elle reprend un autre chemin, elle trouve d’autres espaces, elle atteint d’autres paliers, se suspend elle-même (mystérieux et admirable dialogue quasi tibétain entre guitare et trompette), éclate – formidable section de cuivres réduite à deux éléments, Mathias Mahler (tb) et le fantastique Kasper Tranberg (1) (tp, bugle, cornet) – semble se résoudre dans un fracas, et finit sur trois accords de guitare dans l’extrême douceur. « La force a la douceur » (Nietzsche). Et puis en rappel Marc Ducret vient tout seul pour nous distiller un Good Night Irene inspiré de la version qu’en donna Kelly Joe Phelps. Avec ça Irene a du passer en effet une bonne nuit, et nous de même qui sommes repartis avec du grain à moudre. Voilà, c’est bien sur le versant du désir que ça se passe. Mais comment peut-on se passer d’un tel musicien et d’une telle musique en France ?

 

Philippe Méziat


(1) que je conseille vivement au directeur de festival qui veut bien accepter que je lui désigne parfois des trompettistes : en voilà un, qui a ses propres groupes aussi. Quant à ce « Real Thing # 1 » c’est l’évidence, il faut faire entendre ça !!!

|

Une dernière soirée emplie d’émotions, évidemment : d’abord c’est la dernière, ensuite le nouveau groupe de Marc Ducret (« Real Thing # 1 ») clôture le festival sur une note tellement forte que tous en sont bouleversés, et comme auparavant Daniel Humair et son « New Reunion » quartet ont joué le jeu crânement et en beauté, la coupe est pleine. On n’oubliera pas de dire aussi que les premières notes sont revenues à un sextet(t) réunissant des élèves de Strasbourg (Conservatoire) et de Berlin (Jazz-Institut), qu’ils ont fort bien joué des compositions de chacun, qu’ils avaient travaillé toute la semaine, et qu’ils ont nom : Musina Ekobissé (ts), Markus Ehrlich (ts), Chris Karantzas (g), Tom Georgel (p), Igor Spalatti (b) et Arthur Vonfelt (dm). Il se dit que les strasbourgeois, séduits par les perspectives de la capitale allemande en matière d’enseignement (et autre…) aimeraient s’installer ici dès l’an prochain. Pour ça, il faut rentrer au « Jazz-Institut » dont les professeurs ont nom (entre autres) David Friedman, Jon Hollenbeck, Greg Cohen…


Revenons au concert du groupe de Daniel Humair, qui fut splendide, et donna lieu à un rappel qui pouvait en amener d’autres tellement le public en aurait repris. Emile Parisien (ts, ss) et Vincent Peirani (acc, voix) semblent (depuis Nantes en septembre 2011, où déjà les choses s’amorçaient) avoir pris les choses en main, et de fort intelligente manière. D’abord ils jouent leurs compositions (ou parfois celles de Jane Ira Bloom, ou de Joachim Kühn), ensuite ils montrent une complicité totale dans l’énoncé des thèmes (unissons ou poursuites), dans leur développement, dans leur construction mélodique aussi, qui a le parfum d’une valse musette qui serait passée au Conservatoire, et en aurait pris de la graine sans perdre rien de son fruit. Il faut les voir de près, en façade, l’un à droite et l’autre à gauche, rivaliser amicalement de « stop-chorus », de petites phrases découpées au chalumeau, suspendues, reprises, amenant des conclusions à tiroir, dévoilant soudain des émotions cachées, le tout bien sûr avec l’assurance que derrière, avec les deux monstres de musique que sont Jérôme Regard (b) et Daniel Humair (dm) ça suivra de toutes façons au cordeau. CD en septembre, concert du même groupe au Parc Floral demain.

 

Annoncée parfois comme « du lourd », une expression que je cite sans la revendiquer car je ne l’aime pas, la musique de Marc Ducret (g) a vraiment marqué les spectateurs restés jusqu’au bout. Elle n’est pas lourde du tout, évidemment – mais je sais que l’expression veut dire que c’est du sérieux, que ça ne rigole pas, que ce n’est pas de la « musique légère » comme on disait naguère. Il ne faut pas exagérer non plus, ça s’écoute bien même si c’est complexe. Quelqu’un disait à la fin du concert que « ça de débandait jamais ». Là encore, je cite sans reprendre à mon compte, mais il y a de ça en effet. C’est une musique qui avance, qui chemine, qui parvient à des sommets dont on suppose qu’ils vont marquer une fin, et puis non elle reprend un autre chemin, elle trouve d’autres espaces, elle atteint d’autres paliers, se suspend elle-même (mystérieux et admirable dialogue quasi tibétain entre guitare et trompette), éclate – formidable section de cuivres réduite à deux éléments, Mathias Mahler (tb) et le fantastique Kasper Tranberg (1) (tp, bugle, cornet) – semble se résoudre dans un fracas, et finit sur trois accords de guitare dans l’extrême douceur. « La force a la douceur » (Nietzsche). Et puis en rappel Marc Ducret vient tout seul pour nous distiller un Good Night Irene inspiré de la version qu’en donna Kelly Joe Phelps. Avec ça Irene a du passer en effet une bonne nuit, et nous de même qui sommes repartis avec du grain à moudre. Voilà, c’est bien sur le versant du désir que ça se passe. Mais comment peut-on se passer d’un tel musicien et d’une telle musique en France ?

 

Philippe Méziat


(1) que je conseille vivement au directeur de festival qui veut bien accepter que je lui désigne parfois des trompettistes : en voilà un, qui a ses propres groupes aussi. Quant à ce « Real Thing # 1 » c’est l’évidence, il faut faire entendre ça !!!

|

Une dernière soirée emplie d’émotions, évidemment : d’abord c’est la dernière, ensuite le nouveau groupe de Marc Ducret (« Real Thing # 1 ») clôture le festival sur une note tellement forte que tous en sont bouleversés, et comme auparavant Daniel Humair et son « New Reunion » quartet ont joué le jeu crânement et en beauté, la coupe est pleine. On n’oubliera pas de dire aussi que les premières notes sont revenues à un sextet(t) réunissant des élèves de Strasbourg (Conservatoire) et de Berlin (Jazz-Institut), qu’ils ont fort bien joué des compositions de chacun, qu’ils avaient travaillé toute la semaine, et qu’ils ont nom : Musina Ekobissé (ts), Markus Ehrlich (ts), Chris Karantzas (g), Tom Georgel (p), Igor Spalatti (b) et Arthur Vonfelt (dm). Il se dit que les strasbourgeois, séduits par les perspectives de la capitale allemande en matière d’enseignement (et autre…) aimeraient s’installer ici dès l’an prochain. Pour ça, il faut rentrer au « Jazz-Institut » dont les professeurs ont nom (entre autres) David Friedman, Jon Hollenbeck, Greg Cohen…


Revenons au concert du groupe de Daniel Humair, qui fut splendide, et donna lieu à un rappel qui pouvait en amener d’autres tellement le public en aurait repris. Emile Parisien (ts, ss) et Vincent Peirani (acc, voix) semblent (depuis Nantes en septembre 2011, où déjà les choses s’amorçaient) avoir pris les choses en main, et de fort intelligente manière. D’abord ils jouent leurs compositions (ou parfois celles de Jane Ira Bloom, ou de Joachim Kühn), ensuite ils montrent une complicité totale dans l’énoncé des thèmes (unissons ou poursuites), dans leur développement, dans leur construction mélodique aussi, qui a le parfum d’une valse musette qui serait passée au Conservatoire, et en aurait pris de la graine sans perdre rien de son fruit. Il faut les voir de près, en façade, l’un à droite et l’autre à gauche, rivaliser amicalement de « stop-chorus », de petites phrases découpées au chalumeau, suspendues, reprises, amenant des conclusions à tiroir, dévoilant soudain des émotions cachées, le tout bien sûr avec l’assurance que derrière, avec les deux monstres de musique que sont Jérôme Regard (b) et Daniel Humair (dm) ça suivra de toutes façons au cordeau. CD en septembre, concert du même groupe au Parc Floral demain.

 

Annoncée parfois comme « du lourd », une expression que je cite sans la revendiquer car je ne l’aime pas, la musique de Marc Ducret (g) a vraiment marqué les spectateurs restés jusqu’au bout. Elle n’est pas lourde du tout, évidemment – mais je sais que l’expression veut dire que c’est du sérieux, que ça ne rigole pas, que ce n’est pas de la « musique légère » comme on disait naguère. Il ne faut pas exagérer non plus, ça s’écoute bien même si c’est complexe. Quelqu’un disait à la fin du concert que « ça de débandait jamais ». Là encore, je cite sans reprendre à mon compte, mais il y a de ça en effet. C’est une musique qui avance, qui chemine, qui parvient à des sommets dont on suppose qu’ils vont marquer une fin, et puis non elle reprend un autre chemin, elle trouve d’autres espaces, elle atteint d’autres paliers, se suspend elle-même (mystérieux et admirable dialogue quasi tibétain entre guitare et trompette), éclate – formidable section de cuivres réduite à deux éléments, Mathias Mahler (tb) et le fantastique Kasper Tranberg (1) (tp, bugle, cornet) – semble se résoudre dans un fracas, et finit sur trois accords de guitare dans l’extrême douceur. « La force a la douceur » (Nietzsche). Et puis en rappel Marc Ducret vient tout seul pour nous distiller un Good Night Irene inspiré de la version qu’en donna Kelly Joe Phelps. Avec ça Irene a du passer en effet une bonne nuit, et nous de même qui sommes repartis avec du grain à moudre. Voilà, c’est bien sur le versant du désir que ça se passe. Mais comment peut-on se passer d’un tel musicien et d’une telle musique en France ?

 

Philippe Méziat


(1) que je conseille vivement au directeur de festival qui veut bien accepter que je lui désigne parfois des trompettistes : en voilà un, qui a ses propres groupes aussi. Quant à ce « Real Thing # 1 » c’est l’évidence, il faut faire entendre ça !!!

|

Une dernière soirée emplie d’émotions, évidemment : d’abord c’est la dernière, ensuite le nouveau groupe de Marc Ducret (« Real Thing # 1 ») clôture le festival sur une note tellement forte que tous en sont bouleversés, et comme auparavant Daniel Humair et son « New Reunion » quartet ont joué le jeu crânement et en beauté, la coupe est pleine. On n’oubliera pas de dire aussi que les premières notes sont revenues à un sextet(t) réunissant des élèves de Strasbourg (Conservatoire) et de Berlin (Jazz-Institut), qu’ils ont fort bien joué des compositions de chacun, qu’ils avaient travaillé toute la semaine, et qu’ils ont nom : Musina Ekobissé (ts), Markus Ehrlich (ts), Chris Karantzas (g), Tom Georgel (p), Igor Spalatti (b) et Arthur Vonfelt (dm). Il se dit que les strasbourgeois, séduits par les perspectives de la capitale allemande en matière d’enseignement (et autre…) aimeraient s’installer ici dès l’an prochain. Pour ça, il faut rentrer au « Jazz-Institut » dont les professeurs ont nom (entre autres) David Friedman, Jon Hollenbeck, Greg Cohen…


Revenons au concert du groupe de Daniel Humair, qui fut splendide, et donna lieu à un rappel qui pouvait en amener d’autres tellement le public en aurait repris. Emile Parisien (ts, ss) et Vincent Peirani (acc, voix) semblent (depuis Nantes en septembre 2011, où déjà les choses s’amorçaient) avoir pris les choses en main, et de fort intelligente manière. D’abord ils jouent leurs compositions (ou parfois celles de Jane Ira Bloom, ou de Joachim Kühn), ensuite ils montrent une complicité totale dans l’énoncé des thèmes (unissons ou poursuites), dans leur développement, dans leur construction mélodique aussi, qui a le parfum d’une valse musette qui serait passée au Conservatoire, et en aurait pris de la graine sans perdre rien de son fruit. Il faut les voir de près, en façade, l’un à droite et l’autre à gauche, rivaliser amicalement de « stop-chorus », de petites phrases découpées au chalumeau, suspendues, reprises, amenant des conclusions à tiroir, dévoilant soudain des émotions cachées, le tout bien sûr avec l’assurance que derrière, avec les deux monstres de musique que sont Jérôme Regard (b) et Daniel Humair (dm) ça suivra de toutes façons au cordeau. CD en septembre, concert du même groupe au Parc Floral demain.

 

Annoncée parfois comme « du lourd », une expression que je cite sans la revendiquer car je ne l’aime pas, la musique de Marc Ducret (g) a vraiment marqué les spectateurs restés jusqu’au bout. Elle n’est pas lourde du tout, évidemment – mais je sais que l’expression veut dire que c’est du sérieux, que ça ne rigole pas, que ce n’est pas de la « musique légère » comme on disait naguère. Il ne faut pas exagérer non plus, ça s’écoute bien même si c’est complexe. Quelqu’un disait à la fin du concert que « ça de débandait jamais ». Là encore, je cite sans reprendre à mon compte, mais il y a de ça en effet. C’est une musique qui avance, qui chemine, qui parvient à des sommets dont on suppose qu’ils vont marquer une fin, et puis non elle reprend un autre chemin, elle trouve d’autres espaces, elle atteint d’autres paliers, se suspend elle-même (mystérieux et admirable dialogue quasi tibétain entre guitare et trompette), éclate – formidable section de cuivres réduite à deux éléments, Mathias Mahler (tb) et le fantastique Kasper Tranberg (1) (tp, bugle, cornet) – semble se résoudre dans un fracas, et finit sur trois accords de guitare dans l’extrême douceur. « La force a la douceur » (Nietzsche). Et puis en rappel Marc Ducret vient tout seul pour nous distiller un Good Night Irene inspiré de la version qu’en donna Kelly Joe Phelps. Avec ça Irene a du passer en effet une bonne nuit, et nous de même qui sommes repartis avec du grain à moudre. Voilà, c’est bien sur le versant du désir que ça se passe. Mais comment peut-on se passer d’un tel musicien et d’une telle musique en France ?

 

Philippe Méziat


(1) que je conseille vivement au directeur de festival qui veut bien accepter que je lui désigne parfois des trompettistes : en voilà un, qui a ses propres groupes aussi. Quant à ce « Real Thing # 1 » c’est l’évidence, il faut faire entendre ça !!!