Jazz live
Publié le 2 Juil 2013

Marcus Miller et ses histoires de basse à Jazz à Vienne

Samedi 29 juin, Jazz à Vienne a invité Marcus Miller à dialoguer autour d’un sélection de titres de grands maîtres de la basse électrique préparée par Fréderic Goaty. Quelques minutes avant son grand concert du soir au Théâtre Antique, Marcus Miller a généreusement consacré près de quatre-vingt-dix minutes à cette rencontre exceptionnelle.

En avril 2012, au siège de l’Unesco, lors du premier International Jazz Day, Frédéric Goaty, directeur de la rédaction de notre magazine, avait animé une rencontre musicale avec Marcus Miller, qui était – faut-il le rappeler ? – le rédac’ chef invité de notre numéro de juin… Samedi dernier, un peu plus d’un an après leur première “Bass Story”, FG a de nouveau fait écouter à MM quelques-uns de ses confrères les plus prestigieux. Une centaine de personnes eurent la chance incroyable, dans le superbe auditorium du musée gallo-romain de Vienne, de savourer des échanges chaleureux, drôles et brillants.
Le principe était donc simple : une sélection de grands moments de l’histoire de la basse électrique funky est présentée à Miller, qui doit les reconnaître (facile !), jouer par-dessus si bon lui semble, les prolonger, les commenter… Sur les douze extraits qui lui furent proposés Miller a réalisé un incroyable sans faute. Il a reconnu chaque fois, en une micro-seconde, le musicien et le morceau proposés. Puis il jouait, en synchro parfaite et avec une virtuosité incroyable chaque ligne de basse, tout en commentant les apports et les (r)évolutions de ses confrères… Tout ça avec le sourire et sans effort apparent !
Lorsque Larry Graham joue avec Sly and Family Stone en 1970… Miller avait onze ans mais il le considère toujours comme un géant incontournable. L’évocation d’un autre grand bassiste d’Oakland, Francis “Rocco” Prestia (de Tower Of Power) ne fut pas moins savoureuse. Les anecdotes de Marcus sur Paul Jackson, “le” bassiste d’Herbie Hancock, furent hilarantes : pour lui, le secret de sa sonorité peut s’expliquer par le fait que Jackson mangeait beaucoup de poulet et de frites avec les doigts et que, peut-être [rires] il ne se lavait pas les mains avant le concert… d’où un son “graisseux” !
Emouvante séquence sur Jaco Pastorius, que Miller aimait et admirait beaucoup. Au passage, explications très pédagogiques (avec démonstration lumineuse) sur les conséquences de l’utilisation d’un ou de deux micros de la guitare basse – celui d’en haut ou celui d’en bas – ce qui peut donner selon l’option choisie, un son projeté chez Stanley Clarke ou chaud, étouffé, profond chez Jaco. Toujours à propos de Jaco, Marcus expliqua qu’il trouva vraiment sa voie quand il décida de ne pas se contenter d’être un clone du génie de Fort Lauderdale…
Après l’évocation de plusieurs moments importants dans la progression de sa carrière vint une superbe, drôle et émouvante séquence consacrée à ses rapports avec Miles Davis. Le récit de de sa rencontre avec Miles, que l’on croyait pourtant connaître par cœur, surprend toujours.
Miles lui fit passer de nombreux messages pour qu’il vienne jouer avec lui… De quoi perturber un jeune homme (un peu) timide et (un peu) réservé et encore peu connu du grand public. Au téléphone, Marcus lui demanda même: « Heu, vous êtes vraiment Miles Davis ? »… Oui, c’était bien lui, et Miller se retrouve le lendemain dans le grand studio Columbia pour enregistrer. Une fois, Miles trouve son jeu « trop simple », et pour la prise suivante… « trop compliqué » ! Marcus est un peu déstabilisé mais, lorsqu’il quitte le studio, en passant près de lui, Miles lui fait un petit clin d’œil amical qui le rassure… Un peu plus tard, Marcus est convoqué chez Miles, et une belle jeune femme l’accueille avant de l’inviter à monter à l’étage. Miles est avec une autre femme et lui demande : « Comment es-tu arrivé là ? – Euh cette femme m’a ouvert la porte et m’a fait monter. » Miles, râle et s’adresse en bougonnant avec sa voix incroyable à la dame : « Vous avez baisé ou quoi ?! Je t’avais dit de ne pas baiser avec mes musiciens »… Miller gêné. On le comprend ! C’était sa première visite chez Miles…
A la question de Frédéric Goaty, « Comment avez-vous réagi ? », Miller répond sobrement et avec beaucoup d’humour : « Ce jour-là, j’ai compris que la drogue n’était pas une bonne chose… »
Enfin, vient le petit moment des questions du public. Entre autres : « Que pensez-vous du trompettiste Woody Shaw ? » Miller répond longuement en disant la grande admiration qu’il lui portait depuis longtemps [cf. “son” numéro de Jazzmag, où le trompettiste était à l’honneur, NDR], et en citant dans la foulée une kyrielle de grands trompettistes de l’histoire du jazz (avec une petite phrase juste et précise pour présenter chacun d’entre eux). Cette belle et agréable rencontre se terminait ainsi avec cet étonnant passage encyclopédique, démontrant que la réponse qu’il apporta à un interviewer lui demandant un jour de se présenter en quelques mots – « Je suis un bassiste funk avec une grande connaissance du jazz » – était parfaitement pertinente.
Pierre-Henri Ardonceau

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Samedi 29 juin, Jazz à Vienne a invité Marcus Miller à dialoguer autour d’un sélection de titres de grands maîtres de la basse électrique préparée par Fréderic Goaty. Quelques minutes avant son grand concert du soir au Théâtre Antique, Marcus Miller a généreusement consacré près de quatre-vingt-dix minutes à cette rencontre exceptionnelle.

En avril 2012, au siège de l’Unesco, lors du premier International Jazz Day, Frédéric Goaty, directeur de la rédaction de notre magazine, avait animé une rencontre musicale avec Marcus Miller, qui était – faut-il le rappeler ? – le rédac’ chef invité de notre numéro de juin… Samedi dernier, un peu plus d’un an après leur première “Bass Story”, FG a de nouveau fait écouter à MM quelques-uns de ses confrères les plus prestigieux. Une centaine de personnes eurent la chance incroyable, dans le superbe auditorium du musée gallo-romain de Vienne, de savourer des échanges chaleureux, drôles et brillants.
Le principe était donc simple : une sélection de grands moments de l’histoire de la basse électrique funky est présentée à Miller, qui doit les reconnaître (facile !), jouer par-dessus si bon lui semble, les prolonger, les commenter… Sur les douze extraits qui lui furent proposés Miller a réalisé un incroyable sans faute. Il a reconnu chaque fois, en une micro-seconde, le musicien et le morceau proposés. Puis il jouait, en synchro parfaite et avec une virtuosité incroyable chaque ligne de basse, tout en commentant les apports et les (r)évolutions de ses confrères… Tout ça avec le sourire et sans effort apparent !
Lorsque Larry Graham joue avec Sly and Family Stone en 1970… Miller avait onze ans mais il le considère toujours comme un géant incontournable. L’évocation d’un autre grand bassiste d’Oakland, Francis “Rocco” Prestia (de Tower Of Power) ne fut pas moins savoureuse. Les anecdotes de Marcus sur Paul Jackson, “le” bassiste d’Herbie Hancock, furent hilarantes : pour lui, le secret de sa sonorité peut s’expliquer par le fait que Jackson mangeait beaucoup de poulet et de frites avec les doigts et que, peut-être [rires] il ne se lavait pas les mains avant le concert… d’où un son “graisseux” !
Emouvante séquence sur Jaco Pastorius, que Miller aimait et admirait beaucoup. Au passage, explications très pédagogiques (avec démonstration lumineuse) sur les conséquences de l’utilisation d’un ou de deux micros de la guitare basse – celui d’en haut ou celui d’en bas – ce qui peut donner selon l’option choisie, un son projeté chez Stanley Clarke ou chaud, étouffé, profond chez Jaco. Toujours à propos de Jaco, Marcus expliqua qu’il trouva vraiment sa voie quand il décida de ne pas se contenter d’être un clone du génie de Fort Lauderdale…
Après l’évocation de plusieurs moments importants dans la progression de sa carrière vint une superbe, drôle et émouvante séquence consacrée à ses rapports avec Miles Davis. Le récit de de sa rencontre avec Miles, que l’on croyait pourtant connaître par cœur, surprend toujours.
Miles lui fit passer de nombreux messages pour qu’il vienne jouer avec lui… De quoi perturber un jeune homme (un peu) timide et (un peu) réservé et encore peu connu du grand public. Au téléphone, Marcus lui demanda même: « Heu, vous êtes vraiment Miles Davis ? »… Oui, c’était bien lui, et Miller se retrouve le lendemain dans le grand studio Columbia pour enregistrer. Une fois, Miles trouve son jeu « trop simple », et pour la prise suivante… « trop compliqué » ! Marcus est un peu déstabilisé mais, lorsqu’il quitte le studio, en passant près de lui, Miles lui fait un petit clin d’œil amical qui le rassure… Un peu plus tard, Marcus est convoqué chez Miles, et une belle jeune femme l’accueille avant de l’inviter à monter à l’étage. Miles est avec une autre femme et lui demande : « Comment es-tu arrivé là ? – Euh cette femme m’a ouvert la porte et m’a fait monter. » Miles, râle et s’adresse en bougonnant avec sa voix incroyable à la dame : « Vous avez baisé ou quoi ?! Je t’avais dit de ne pas baiser avec mes musiciens »… Miller gêné. On le comprend ! C’était sa première visite chez Miles…
A la question de Frédéric Goaty, « Comment avez-vous réagi ? », Miller répond sobrement et avec beaucoup d’humour : « Ce jour-là, j’ai compris que la drogue n’était pas une bonne chose… »
Enfin, vient le petit moment des questions du public. Entre autres : « Que pensez-vous du trompettiste Woody Shaw ? » Miller répond longuement en disant la grande admiration qu’il lui portait depuis longtemps [cf. “son” numéro de Jazzmag, où le trompettiste était à l’honneur, NDR], et en citant dans la foulée une kyrielle de grands trompettistes de l’histoire du jazz (avec une petite phrase juste et précise pour présenter chacun d’entre eux). Cette belle et agréable rencontre se terminait ainsi avec cet étonnant passage encyclopédique, démontrant que la réponse qu’il apporta à un interviewer lui demandant un jour de se présenter en quelques mots – « Je suis un bassiste funk avec une grande connaissance du jazz » – était parfaitement pertinente.
Pierre-Henri Ardonceau

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Samedi 29 juin, Jazz à Vienne a invité Marcus Miller à dialoguer autour d’un sélection de titres de grands maîtres de la basse électrique préparée par Fréderic Goaty. Quelques minutes avant son grand concert du soir au Théâtre Antique, Marcus Miller a généreusement consacré près de quatre-vingt-dix minutes à cette rencontre exceptionnelle.

En avril 2012, au siège de l’Unesco, lors du premier International Jazz Day, Frédéric Goaty, directeur de la rédaction de notre magazine, avait animé une rencontre musicale avec Marcus Miller, qui était – faut-il le rappeler ? – le rédac’ chef invité de notre numéro de juin… Samedi dernier, un peu plus d’un an après leur première “Bass Story”, FG a de nouveau fait écouter à MM quelques-uns de ses confrères les plus prestigieux. Une centaine de personnes eurent la chance incroyable, dans le superbe auditorium du musée gallo-romain de Vienne, de savourer des échanges chaleureux, drôles et brillants.
Le principe était donc simple : une sélection de grands moments de l’histoire de la basse électrique funky est présentée à Miller, qui doit les reconnaître (facile !), jouer par-dessus si bon lui semble, les prolonger, les commenter… Sur les douze extraits qui lui furent proposés Miller a réalisé un incroyable sans faute. Il a reconnu chaque fois, en une micro-seconde, le musicien et le morceau proposés. Puis il jouait, en synchro parfaite et avec une virtuosité incroyable chaque ligne de basse, tout en commentant les apports et les (r)évolutions de ses confrères… Tout ça avec le sourire et sans effort apparent !
Lorsque Larry Graham joue avec Sly and Family Stone en 1970… Miller avait onze ans mais il le considère toujours comme un géant incontournable. L’évocation d’un autre grand bassiste d’Oakland, Francis “Rocco” Prestia (de Tower Of Power) ne fut pas moins savoureuse. Les anecdotes de Marcus sur Paul Jackson, “le” bassiste d’Herbie Hancock, furent hilarantes : pour lui, le secret de sa sonorité peut s’expliquer par le fait que Jackson mangeait beaucoup de poulet et de frites avec les doigts et que, peut-être [rires] il ne se lavait pas les mains avant le concert… d’où un son “graisseux” !
Emouvante séquence sur Jaco Pastorius, que Miller aimait et admirait beaucoup. Au passage, explications très pédagogiques (avec démonstration lumineuse) sur les conséquences de l’utilisation d’un ou de deux micros de la guitare basse – celui d’en haut ou celui d’en bas – ce qui peut donner selon l’option choisie, un son projeté chez Stanley Clarke ou chaud, étouffé, profond chez Jaco. Toujours à propos de Jaco, Marcus expliqua qu’il trouva vraiment sa voie quand il décida de ne pas se contenter d’être un clone du génie de Fort Lauderdale…
Après l’évocation de plusieurs moments importants dans la progression de sa carrière vint une superbe, drôle et émouvante séquence consacrée à ses rapports avec Miles Davis. Le récit de de sa rencontre avec Miles, que l’on croyait pourtant connaître par cœur, surprend toujours.
Miles lui fit passer de nombreux messages pour qu’il vienne jouer avec lui… De quoi perturber un jeune homme (un peu) timide et (un peu) réservé et encore peu connu du grand public. Au téléphone, Marcus lui demanda même: « Heu, vous êtes vraiment Miles Davis ? »… Oui, c’était bien lui, et Miller se retrouve le lendemain dans le grand studio Columbia pour enregistrer. Une fois, Miles trouve son jeu « trop simple », et pour la prise suivante… « trop compliqué » ! Marcus est un peu déstabilisé mais, lorsqu’il quitte le studio, en passant près de lui, Miles lui fait un petit clin d’œil amical qui le rassure… Un peu plus tard, Marcus est convoqué chez Miles, et une belle jeune femme l’accueille avant de l’inviter à monter à l’étage. Miles est avec une autre femme et lui demande : « Comment es-tu arrivé là ? – Euh cette femme m’a ouvert la porte et m’a fait monter. » Miles, râle et s’adresse en bougonnant avec sa voix incroyable à la dame : « Vous avez baisé ou quoi ?! Je t’avais dit de ne pas baiser avec mes musiciens »… Miller gêné. On le comprend ! C’était sa première visite chez Miles…
A la question de Frédéric Goaty, « Comment avez-vous réagi ? », Miller répond sobrement et avec beaucoup d’humour : « Ce jour-là, j’ai compris que la drogue n’était pas une bonne chose… »
Enfin, vient le petit moment des questions du public. Entre autres : « Que pensez-vous du trompettiste Woody Shaw ? » Miller répond longuement en disant la grande admiration qu’il lui portait depuis longtemps [cf. “son” numéro de Jazzmag, où le trompettiste était à l’honneur, NDR], et en citant dans la foulée une kyrielle de grands trompettistes de l’histoire du jazz (avec une petite phrase juste et précise pour présenter chacun d’entre eux). Cette belle et agréable rencontre se terminait ainsi avec cet étonnant passage encyclopédique, démontrant que la réponse qu’il apporta à un interviewer lui demandant un jour de se présenter en quelques mots – « Je suis un bassiste funk avec une grande connaissance du jazz » – était parfaitement pertinente.
Pierre-Henri Ardonceau

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Samedi 29 juin, Jazz à Vienne a invité Marcus Miller à dialoguer autour d’un sélection de titres de grands maîtres de la basse électrique préparée par Fréderic Goaty. Quelques minutes avant son grand concert du soir au Théâtre Antique, Marcus Miller a généreusement consacré près de quatre-vingt-dix minutes à cette rencontre exceptionnelle.

En avril 2012, au siège de l’Unesco, lors du premier International Jazz Day, Frédéric Goaty, directeur de la rédaction de notre magazine, avait animé une rencontre musicale avec Marcus Miller, qui était – faut-il le rappeler ? – le rédac’ chef invité de notre numéro de juin… Samedi dernier, un peu plus d’un an après leur première “Bass Story”, FG a de nouveau fait écouter à MM quelques-uns de ses confrères les plus prestigieux. Une centaine de personnes eurent la chance incroyable, dans le superbe auditorium du musée gallo-romain de Vienne, de savourer des échanges chaleureux, drôles et brillants.
Le principe était donc simple : une sélection de grands moments de l’histoire de la basse électrique funky est présentée à Miller, qui doit les reconnaître (facile !), jouer par-dessus si bon lui semble, les prolonger, les commenter… Sur les douze extraits qui lui furent proposés Miller a réalisé un incroyable sans faute. Il a reconnu chaque fois, en une micro-seconde, le musicien et le morceau proposés. Puis il jouait, en synchro parfaite et avec une virtuosité incroyable chaque ligne de basse, tout en commentant les apports et les (r)évolutions de ses confrères… Tout ça avec le sourire et sans effort apparent !
Lorsque Larry Graham joue avec Sly and Family Stone en 1970… Miller avait onze ans mais il le considère toujours comme un géant incontournable. L’évocation d’un autre grand bassiste d’Oakland, Francis “Rocco” Prestia (de Tower Of Power) ne fut pas moins savoureuse. Les anecdotes de Marcus sur Paul Jackson, “le” bassiste d’Herbie Hancock, furent hilarantes : pour lui, le secret de sa sonorité peut s’expliquer par le fait que Jackson mangeait beaucoup de poulet et de frites avec les doigts et que, peut-être [rires] il ne se lavait pas les mains avant le concert… d’où un son “graisseux” !
Emouvante séquence sur Jaco Pastorius, que Miller aimait et admirait beaucoup. Au passage, explications très pédagogiques (avec démonstration lumineuse) sur les conséquences de l’utilisation d’un ou de deux micros de la guitare basse – celui d’en haut ou celui d’en bas – ce qui peut donner selon l’option choisie, un son projeté chez Stanley Clarke ou chaud, étouffé, profond chez Jaco. Toujours à propos de Jaco, Marcus expliqua qu’il trouva vraiment sa voie quand il décida de ne pas se contenter d’être un clone du génie de Fort Lauderdale…
Après l’évocation de plusieurs moments importants dans la progression de sa carrière vint une superbe, drôle et émouvante séquence consacrée à ses rapports avec Miles Davis. Le récit de de sa rencontre avec Miles, que l’on croyait pourtant connaître par cœur, surprend toujours.
Miles lui fit passer de nombreux messages pour qu’il vienne jouer avec lui… De quoi perturber un jeune homme (un peu) timide et (un peu) réservé et encore peu connu du grand public. Au téléphone, Marcus lui demanda même: « Heu, vous êtes vraiment Miles Davis ? »… Oui, c’était bien lui, et Miller se retrouve le lendemain dans le grand studio Columbia pour enregistrer. Une fois, Miles trouve son jeu « trop simple », et pour la prise suivante… « trop compliqué » ! Marcus est un peu déstabilisé mais, lorsqu’il quitte le studio, en passant près de lui, Miles lui fait un petit clin d’œil amical qui le rassure… Un peu plus tard, Marcus est convoqué chez Miles, et une belle jeune femme l’accueille avant de l’inviter à monter à l’étage. Miles est avec une autre femme et lui demande : « Comment es-tu arrivé là ? – Euh cette femme m’a ouvert la porte et m’a fait monter. » Miles, râle et s’adresse en bougonnant avec sa voix incroyable à la dame : « Vous avez baisé ou quoi ?! Je t’avais dit de ne pas baiser avec mes musiciens »… Miller gêné. On le comprend ! C’était sa première visite chez Miles…
A la question de Frédéric Goaty, « Comment avez-vous réagi ? », Miller répond sobrement et avec beaucoup d’humour : « Ce jour-là, j’ai compris que la drogue n’était pas une bonne chose… »
Enfin, vient le petit moment des questions du public. Entre autres : « Que pensez-vous du trompettiste Woody Shaw ? » Miller répond longuement en disant la grande admiration qu’il lui portait depuis longtemps [cf. “son” numéro de Jazzmag, où le trompettiste était à l’honneur, NDR], et en citant dans la foulée une kyrielle de grands trompettistes de l’histoire du jazz (avec une petite phrase juste et précise pour présenter chacun d’entre eux). Cette belle et agréable rencontre se terminait ainsi avec cet étonnant passage encyclopédique, démontrant que la réponse qu’il apporta à un interviewer lui demandant un jour de se présenter en quelques mots – « Je suis un bassiste funk avec une grande connaissance du jazz » – était parfaitement pertinente.
Pierre-Henri Ardonceau