Jazz live
Publié le 22 Juil 2014

Suds en Arles (19éme édition) Surprenante rencontre "klezmero/afro-cubaine"…

Vendredi 18 juillet, Suds en Arles avait programmé David Krakauer et Chucho Valdes… Surprise : ils ont « boeuffé » sur la scène du Théâtre Antique. Musique Klezmer et Jazz Afro-cubain: étonnante rencontre.


Qui a commencé à « ouvrir » les festivals de jazz hexagonaux aux musiques cousines, voisines et… « métisses »? Assurément Christian Mousset et Claude-Jean Antoine dit « Tito ». Le premier, après avoir créé, en 1976, le superbe « Jazz en France » à Angoulême l’a, dès 1988, transformé en « Musiques Métisses », pionnier des festivals de « World Music ». Le nancéen « Tito » fondateur, en 1973, du « Nancy Jazz Pulsations » a très vite programmé des groupes de « world », mais sans modifier l’intitulé jazz de la manifestation. Aujourd’hui pratiquement tous les festivals de jazz en France ouvrent largement leurs programmations aux musiques du monde et aux styles voisins et cousins de l’idiome jazziste. Ce qui suscite moult débats complexes et paradoxaux (rappelons pour mémoire que le jazz est né dans les années 20 d’un immense métissage…) que nous n’évoquerons pas ici… Car ils ne concernent pas « Suds en Arles »! « Suds en Arles », fondé en 1996, par Marie-José Justamond est un festival de « world music »… Son champ programmatique est donc immense, par définition…

Suds en Arles est devenue en 19 ans une très importante manifestation multiforme: concerts au Théâtre Antique, « Instants précieux » dans la Cour de l’Archevêché, apéros musicaux, afters, créations dans les musées, stages… Tout cela dans les nombreux et superbes sites patrimoniaux de la ville, fréquentés par près de 60000 personnes en une semaine.

 

Le 18 juillet une rencontre professionnelle a réuni le gotha du petit monde de la world music (la plupart d’ailleurs jazzfans « premium »). Présents, entre autres, au concert du soir : Pascal Bussy, ancien directeur de Warner France, qui dirige désormais les labels « World Village » et « Jazz Village » chez Harmonia Mundi (dont le siège est à Arles), RKK de Nova, « Tito » le nancéen et Christian Mousset (cités supra), André Cayot (Inspecteur musiques actuelles au Ministère de la Culture), Christian Girardin (directeur de la production du label Harmonia Mundi)… Les professionnels ont remis le prix « Bravo des Suds » (créé cette année et destiné à rendre hommage aux professionnels de la world music) à Christian Mousset.

Dans le cadre du soutien à la lutte des intermittents Pascal Bussy a fait une belle et vibrante intervention en début de concert. La veille RKK avait poussé un incroyable cri pour marquer sa solidarité avec ce mouvement revendicatif (étonnante séquence à visionner sur le journal vidéo du festival: http://www.youtube.com/watch?v=FnmenOnPnRE#t=52).

 

Chucho Valdes & The Afro Cuban Ensemble : Rodney Barreto (dr), Angel Gaston Joya Perellada (b, voc), Dreiser Durruthy Bombalé (perc, voc), Yaroldy Abreu Robles (perc, voc), Reynaldo Melian Alvarez (tp, buggle). Chucho Valdes (p) plus Mayra Valdes, special guest (voc).


Krakauers’s Ancestral Groove : Sheryl Bailey (g), Jérôme Harris (gb), Michael Sarin (dr), KeepAlive (sampler), David Krakauer (cl)

 

La musique klezmer et la musique afro-cubaine entretiennent, séparément et depuis fort longtemps, d’étroites relations passionnées avec le jazz: « naturelles » (car liées aux métissages originels de la période pré-historique du jazz au début du 20ème siècle) ? illégitimes? adultérines? ou ancillaires? Difficile de répondre! Quoi qu’il en soit… dans le magnifique Théâtre Antique d’Arles en cette belle nuit du 18 juillet David Krakauer et Chucho Valdes étaient programmés avec leurs groupes actuels. Le Krakauer’s Ancestral Groove en Quintet et les Afro Cuban Messengers de Chucho Valdes en sextet.

Les prestations des deux groupes furent sans surprise. « Regular » comme disent les chroniqueurs espagnols… La rythmique de Chucho est puissante et précise. Le trompettiste, soliste assez banal, aurait bien besoin d’un second souffleur, un saxophoniste, pour l’épauler entre autres, pour l’exposé des thèmes. Chucho toujours aussi brillant et facile multiplie les citations. « De Scriabine à Ravel en passant par Monk et la java, tout y passe« . Roboratif. Sa soeur Mayra enflamme l’amphithéâtre à la fin du set.

David Krakauer fait partie des agitateurs remarquables qui s’amuse depuis 2 décennies à ébouriffer le klezmer, la musique juive ashkénaze d’Europe de l’Est. Une musique qui après avoir croisé le jazz dès les années 70, se décline depuis en voies multiples, rock, funk, hip-hop, électro… Cet incroyable virtuose de la clarinette « ouvre sa porte » depuis quelques années à de nombreux idiomes: des plus traditionnels aux plus « branchés ». Son intégration actuelle des « samples » électroniques est particulièrement réussie. Débutée avec le Québécois Socalled (créateur du klezmer-hip hop) poursuivie actuellement avec KeepAlive. Tout récemment il a aussi enregistré et tourné avec Fred Wesley, le tromboniste funky. Krakauaer dit retrouver dans le klezmer les mêmes feelings que chez Bechet, Coltrane ou James Brown.

Pas étonnant donc qu’il ait accepté à la demande de Marie-José Justamond, directrice artistique de Suds en Arles, une nouvelle expérience: une rencontre avec le groupe de Valdes à la fin de la première partie du concert.

Dans un français parfait, après avoir longuement dit le plaisir qu’il avait eu à déambuler dans la magnifique ville d’Arles pendant deux jours il exprima aussi son émotion et sa joie de pouvoir dialoguer avec un très grand maître de la musique cubaine. Pas mal de « professionnels de la profession » présents devant la scène étaient, pourtant, pour le moins, dubitatifs. Tant les univ
ers des 2 leaders leur paraissaient très (trop?) éloignés.

C’est Krakauer qui propose qu’on joue « sur son terrain » avec le thème Heyser Bulgar, typique de l’univers klezmer. Il a donné dans l’après midi la ligne mélodique et les accords à Chucho. Il débute à fond la caisse avec ses lignes ultra virtuoses de clarinette. Le sonorisateur est pris de court et patauge un peu au début (son trop sec et trop étriqué sur les premières mesures). Chucho aussi. Mais, la rythmique cubaine assure d’entrée sans problème. Très vite un superbe feeling s’installe. Le sonorisateur trouve de meilleurs réglages et Chucho entre très vite pleinement dans le jeu. Enorme solo du pianiste. Quelques échanges (4/4, 8/8) très jazz sur la fin… Pari réussi. Public ravi. Un bel exemple de ce que Suds à Arles propose en matière d’échanges culturels et musicaux depuis 19 ans.

Pierre-Henri Ardonceau

 

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Vendredi 18 juillet, Suds en Arles avait programmé David Krakauer et Chucho Valdes… Surprise : ils ont « boeuffé » sur la scène du Théâtre Antique. Musique Klezmer et Jazz Afro-cubain: étonnante rencontre.


Qui a commencé à « ouvrir » les festivals de jazz hexagonaux aux musiques cousines, voisines et… « métisses »? Assurément Christian Mousset et Claude-Jean Antoine dit « Tito ». Le premier, après avoir créé, en 1976, le superbe « Jazz en France » à Angoulême l’a, dès 1988, transformé en « Musiques Métisses », pionnier des festivals de « World Music ». Le nancéen « Tito » fondateur, en 1973, du « Nancy Jazz Pulsations » a très vite programmé des groupes de « world », mais sans modifier l’intitulé jazz de la manifestation. Aujourd’hui pratiquement tous les festivals de jazz en France ouvrent largement leurs programmations aux musiques du monde et aux styles voisins et cousins de l’idiome jazziste. Ce qui suscite moult débats complexes et paradoxaux (rappelons pour mémoire que le jazz est né dans les années 20 d’un immense métissage…) que nous n’évoquerons pas ici… Car ils ne concernent pas « Suds en Arles »! « Suds en Arles », fondé en 1996, par Marie-José Justamond est un festival de « world music »… Son champ programmatique est donc immense, par définition…

Suds en Arles est devenue en 19 ans une très importante manifestation multiforme: concerts au Théâtre Antique, « Instants précieux » dans la Cour de l’Archevêché, apéros musicaux, afters, créations dans les musées, stages… Tout cela dans les nombreux et superbes sites patrimoniaux de la ville, fréquentés par près de 60000 personnes en une semaine.

 

Le 18 juillet une rencontre professionnelle a réuni le gotha du petit monde de la world music (la plupart d’ailleurs jazzfans « premium »). Présents, entre autres, au concert du soir : Pascal Bussy, ancien directeur de Warner France, qui dirige désormais les labels « World Village » et « Jazz Village » chez Harmonia Mundi (dont le siège est à Arles), RKK de Nova, « Tito » le nancéen et Christian Mousset (cités supra), André Cayot (Inspecteur musiques actuelles au Ministère de la Culture), Christian Girardin (directeur de la production du label Harmonia Mundi)… Les professionnels ont remis le prix « Bravo des Suds » (créé cette année et destiné à rendre hommage aux professionnels de la world music) à Christian Mousset.

Dans le cadre du soutien à la lutte des intermittents Pascal Bussy a fait une belle et vibrante intervention en début de concert. La veille RKK avait poussé un incroyable cri pour marquer sa solidarité avec ce mouvement revendicatif (étonnante séquence à visionner sur le journal vidéo du festival: http://www.youtube.com/watch?v=FnmenOnPnRE#t=52).

 

Chucho Valdes & The Afro Cuban Ensemble : Rodney Barreto (dr), Angel Gaston Joya Perellada (b, voc), Dreiser Durruthy Bombalé (perc, voc), Yaroldy Abreu Robles (perc, voc), Reynaldo Melian Alvarez (tp, buggle). Chucho Valdes (p) plus Mayra Valdes, special guest (voc).


Krakauers’s Ancestral Groove : Sheryl Bailey (g), Jérôme Harris (gb), Michael Sarin (dr), KeepAlive (sampler), David Krakauer (cl)

 

La musique klezmer et la musique afro-cubaine entretiennent, séparément et depuis fort longtemps, d’étroites relations passionnées avec le jazz: « naturelles » (car liées aux métissages originels de la période pré-historique du jazz au début du 20ème siècle) ? illégitimes? adultérines? ou ancillaires? Difficile de répondre! Quoi qu’il en soit… dans le magnifique Théâtre Antique d’Arles en cette belle nuit du 18 juillet David Krakauer et Chucho Valdes étaient programmés avec leurs groupes actuels. Le Krakauer’s Ancestral Groove en Quintet et les Afro Cuban Messengers de Chucho Valdes en sextet.

Les prestations des deux groupes furent sans surprise. « Regular » comme disent les chroniqueurs espagnols… La rythmique de Chucho est puissante et précise. Le trompettiste, soliste assez banal, aurait bien besoin d’un second souffleur, un saxophoniste, pour l’épauler entre autres, pour l’exposé des thèmes. Chucho toujours aussi brillant et facile multiplie les citations. « De Scriabine à Ravel en passant par Monk et la java, tout y passe« . Roboratif. Sa soeur Mayra enflamme l’amphithéâtre à la fin du set.

David Krakauer fait partie des agitateurs remarquables qui s’amuse depuis 2 décennies à ébouriffer le klezmer, la musique juive ashkénaze d’Europe de l’Est. Une musique qui après avoir croisé le jazz dès les années 70, se décline depuis en voies multiples, rock, funk, hip-hop, électro… Cet incroyable virtuose de la clarinette « ouvre sa porte » depuis quelques années à de nombreux idiomes: des plus traditionnels aux plus « branchés ». Son intégration actuelle des « samples » électroniques est particulièrement réussie. Débutée avec le Québécois Socalled (créateur du klezmer-hip hop) poursuivie actuellement avec KeepAlive. Tout récemment il a aussi enregistré et tourné avec Fred Wesley, le tromboniste funky. Krakauaer dit retrouver dans le klezmer les mêmes feelings que chez Bechet, Coltrane ou James Brown.

Pas étonnant donc qu’il ait accepté à la demande de Marie-José Justamond, directrice artistique de Suds en Arles, une nouvelle expérience: une rencontre avec le groupe de Valdes à la fin de la première partie du concert.

Dans un français parfait, après avoir longuement dit le plaisir qu’il avait eu à déambuler dans la magnifique ville d’Arles pendant deux jours il exprima aussi son émotion et sa joie de pouvoir dialoguer avec un très grand maître de la musique cubaine. Pas mal de « professionnels de la profession » présents devant la scène étaient, pourtant, pour le moins, dubitatifs. Tant les univ
ers des 2 leaders leur paraissaient très (trop?) éloignés.

C’est Krakauer qui propose qu’on joue « sur son terrain » avec le thème Heyser Bulgar, typique de l’univers klezmer. Il a donné dans l’après midi la ligne mélodique et les accords à Chucho. Il débute à fond la caisse avec ses lignes ultra virtuoses de clarinette. Le sonorisateur est pris de court et patauge un peu au début (son trop sec et trop étriqué sur les premières mesures). Chucho aussi. Mais, la rythmique cubaine assure d’entrée sans problème. Très vite un superbe feeling s’installe. Le sonorisateur trouve de meilleurs réglages et Chucho entre très vite pleinement dans le jeu. Enorme solo du pianiste. Quelques échanges (4/4, 8/8) très jazz sur la fin… Pari réussi. Public ravi. Un bel exemple de ce que Suds à Arles propose en matière d’échanges culturels et musicaux depuis 19 ans.

Pierre-Henri Ardonceau

 

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Vendredi 18 juillet, Suds en Arles avait programmé David Krakauer et Chucho Valdes… Surprise : ils ont « boeuffé » sur la scène du Théâtre Antique. Musique Klezmer et Jazz Afro-cubain: étonnante rencontre.


Qui a commencé à « ouvrir » les festivals de jazz hexagonaux aux musiques cousines, voisines et… « métisses »? Assurément Christian Mousset et Claude-Jean Antoine dit « Tito ». Le premier, après avoir créé, en 1976, le superbe « Jazz en France » à Angoulême l’a, dès 1988, transformé en « Musiques Métisses », pionnier des festivals de « World Music ». Le nancéen « Tito » fondateur, en 1973, du « Nancy Jazz Pulsations » a très vite programmé des groupes de « world », mais sans modifier l’intitulé jazz de la manifestation. Aujourd’hui pratiquement tous les festivals de jazz en France ouvrent largement leurs programmations aux musiques du monde et aux styles voisins et cousins de l’idiome jazziste. Ce qui suscite moult débats complexes et paradoxaux (rappelons pour mémoire que le jazz est né dans les années 20 d’un immense métissage…) que nous n’évoquerons pas ici… Car ils ne concernent pas « Suds en Arles »! « Suds en Arles », fondé en 1996, par Marie-José Justamond est un festival de « world music »… Son champ programmatique est donc immense, par définition…

Suds en Arles est devenue en 19 ans une très importante manifestation multiforme: concerts au Théâtre Antique, « Instants précieux » dans la Cour de l’Archevêché, apéros musicaux, afters, créations dans les musées, stages… Tout cela dans les nombreux et superbes sites patrimoniaux de la ville, fréquentés par près de 60000 personnes en une semaine.

 

Le 18 juillet une rencontre professionnelle a réuni le gotha du petit monde de la world music (la plupart d’ailleurs jazzfans « premium »). Présents, entre autres, au concert du soir : Pascal Bussy, ancien directeur de Warner France, qui dirige désormais les labels « World Village » et « Jazz Village » chez Harmonia Mundi (dont le siège est à Arles), RKK de Nova, « Tito » le nancéen et Christian Mousset (cités supra), André Cayot (Inspecteur musiques actuelles au Ministère de la Culture), Christian Girardin (directeur de la production du label Harmonia Mundi)… Les professionnels ont remis le prix « Bravo des Suds » (créé cette année et destiné à rendre hommage aux professionnels de la world music) à Christian Mousset.

Dans le cadre du soutien à la lutte des intermittents Pascal Bussy a fait une belle et vibrante intervention en début de concert. La veille RKK avait poussé un incroyable cri pour marquer sa solidarité avec ce mouvement revendicatif (étonnante séquence à visionner sur le journal vidéo du festival: http://www.youtube.com/watch?v=FnmenOnPnRE#t=52).

 

Chucho Valdes & The Afro Cuban Ensemble : Rodney Barreto (dr), Angel Gaston Joya Perellada (b, voc), Dreiser Durruthy Bombalé (perc, voc), Yaroldy Abreu Robles (perc, voc), Reynaldo Melian Alvarez (tp, buggle). Chucho Valdes (p) plus Mayra Valdes, special guest (voc).


Krakauers’s Ancestral Groove : Sheryl Bailey (g), Jérôme Harris (gb), Michael Sarin (dr), KeepAlive (sampler), David Krakauer (cl)

 

La musique klezmer et la musique afro-cubaine entretiennent, séparément et depuis fort longtemps, d’étroites relations passionnées avec le jazz: « naturelles » (car liées aux métissages originels de la période pré-historique du jazz au début du 20ème siècle) ? illégitimes? adultérines? ou ancillaires? Difficile de répondre! Quoi qu’il en soit… dans le magnifique Théâtre Antique d’Arles en cette belle nuit du 18 juillet David Krakauer et Chucho Valdes étaient programmés avec leurs groupes actuels. Le Krakauer’s Ancestral Groove en Quintet et les Afro Cuban Messengers de Chucho Valdes en sextet.

Les prestations des deux groupes furent sans surprise. « Regular » comme disent les chroniqueurs espagnols… La rythmique de Chucho est puissante et précise. Le trompettiste, soliste assez banal, aurait bien besoin d’un second souffleur, un saxophoniste, pour l’épauler entre autres, pour l’exposé des thèmes. Chucho toujours aussi brillant et facile multiplie les citations. « De Scriabine à Ravel en passant par Monk et la java, tout y passe« . Roboratif. Sa soeur Mayra enflamme l’amphithéâtre à la fin du set.

David Krakauer fait partie des agitateurs remarquables qui s’amuse depuis 2 décennies à ébouriffer le klezmer, la musique juive ashkénaze d’Europe de l’Est. Une musique qui après avoir croisé le jazz dès les années 70, se décline depuis en voies multiples, rock, funk, hip-hop, électro… Cet incroyable virtuose de la clarinette « ouvre sa porte » depuis quelques années à de nombreux idiomes: des plus traditionnels aux plus « branchés ». Son intégration actuelle des « samples » électroniques est particulièrement réussie. Débutée avec le Québécois Socalled (créateur du klezmer-hip hop) poursuivie actuellement avec KeepAlive. Tout récemment il a aussi enregistré et tourné avec Fred Wesley, le tromboniste funky. Krakauaer dit retrouver dans le klezmer les mêmes feelings que chez Bechet, Coltrane ou James Brown.

Pas étonnant donc qu’il ait accepté à la demande de Marie-José Justamond, directrice artistique de Suds en Arles, une nouvelle expérience: une rencontre avec le groupe de Valdes à la fin de la première partie du concert.

Dans un français parfait, après avoir longuement dit le plaisir qu’il avait eu à déambuler dans la magnifique ville d’Arles pendant deux jours il exprima aussi son émotion et sa joie de pouvoir dialoguer avec un très grand maître de la musique cubaine. Pas mal de « professionnels de la profession » présents devant la scène étaient, pourtant, pour le moins, dubitatifs. Tant les univ
ers des 2 leaders leur paraissaient très (trop?) éloignés.

C’est Krakauer qui propose qu’on joue « sur son terrain » avec le thème Heyser Bulgar, typique de l’univers klezmer. Il a donné dans l’après midi la ligne mélodique et les accords à Chucho. Il débute à fond la caisse avec ses lignes ultra virtuoses de clarinette. Le sonorisateur est pris de court et patauge un peu au début (son trop sec et trop étriqué sur les premières mesures). Chucho aussi. Mais, la rythmique cubaine assure d’entrée sans problème. Très vite un superbe feeling s’installe. Le sonorisateur trouve de meilleurs réglages et Chucho entre très vite pleinement dans le jeu. Enorme solo du pianiste. Quelques échanges (4/4, 8/8) très jazz sur la fin… Pari réussi. Public ravi. Un bel exemple de ce que Suds à Arles propose en matière d’échanges culturels et musicaux depuis 19 ans.

Pierre-Henri Ardonceau

 

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Vendredi 18 juillet, Suds en Arles avait programmé David Krakauer et Chucho Valdes… Surprise : ils ont « boeuffé » sur la scène du Théâtre Antique. Musique Klezmer et Jazz Afro-cubain: étonnante rencontre.


Qui a commencé à « ouvrir » les festivals de jazz hexagonaux aux musiques cousines, voisines et… « métisses »? Assurément Christian Mousset et Claude-Jean Antoine dit « Tito ». Le premier, après avoir créé, en 1976, le superbe « Jazz en France » à Angoulême l’a, dès 1988, transformé en « Musiques Métisses », pionnier des festivals de « World Music ». Le nancéen « Tito » fondateur, en 1973, du « Nancy Jazz Pulsations » a très vite programmé des groupes de « world », mais sans modifier l’intitulé jazz de la manifestation. Aujourd’hui pratiquement tous les festivals de jazz en France ouvrent largement leurs programmations aux musiques du monde et aux styles voisins et cousins de l’idiome jazziste. Ce qui suscite moult débats complexes et paradoxaux (rappelons pour mémoire que le jazz est né dans les années 20 d’un immense métissage…) que nous n’évoquerons pas ici… Car ils ne concernent pas « Suds en Arles »! « Suds en Arles », fondé en 1996, par Marie-José Justamond est un festival de « world music »… Son champ programmatique est donc immense, par définition…

Suds en Arles est devenue en 19 ans une très importante manifestation multiforme: concerts au Théâtre Antique, « Instants précieux » dans la Cour de l’Archevêché, apéros musicaux, afters, créations dans les musées, stages… Tout cela dans les nombreux et superbes sites patrimoniaux de la ville, fréquentés par près de 60000 personnes en une semaine.

 

Le 18 juillet une rencontre professionnelle a réuni le gotha du petit monde de la world music (la plupart d’ailleurs jazzfans « premium »). Présents, entre autres, au concert du soir : Pascal Bussy, ancien directeur de Warner France, qui dirige désormais les labels « World Village » et « Jazz Village » chez Harmonia Mundi (dont le siège est à Arles), RKK de Nova, « Tito » le nancéen et Christian Mousset (cités supra), André Cayot (Inspecteur musiques actuelles au Ministère de la Culture), Christian Girardin (directeur de la production du label Harmonia Mundi)… Les professionnels ont remis le prix « Bravo des Suds » (créé cette année et destiné à rendre hommage aux professionnels de la world music) à Christian Mousset.

Dans le cadre du soutien à la lutte des intermittents Pascal Bussy a fait une belle et vibrante intervention en début de concert. La veille RKK avait poussé un incroyable cri pour marquer sa solidarité avec ce mouvement revendicatif (étonnante séquence à visionner sur le journal vidéo du festival: http://www.youtube.com/watch?v=FnmenOnPnRE#t=52).

 

Chucho Valdes & The Afro Cuban Ensemble : Rodney Barreto (dr), Angel Gaston Joya Perellada (b, voc), Dreiser Durruthy Bombalé (perc, voc), Yaroldy Abreu Robles (perc, voc), Reynaldo Melian Alvarez (tp, buggle). Chucho Valdes (p) plus Mayra Valdes, special guest (voc).


Krakauers’s Ancestral Groove : Sheryl Bailey (g), Jérôme Harris (gb), Michael Sarin (dr), KeepAlive (sampler), David Krakauer (cl)

 

La musique klezmer et la musique afro-cubaine entretiennent, séparément et depuis fort longtemps, d’étroites relations passionnées avec le jazz: « naturelles » (car liées aux métissages originels de la période pré-historique du jazz au début du 20ème siècle) ? illégitimes? adultérines? ou ancillaires? Difficile de répondre! Quoi qu’il en soit… dans le magnifique Théâtre Antique d’Arles en cette belle nuit du 18 juillet David Krakauer et Chucho Valdes étaient programmés avec leurs groupes actuels. Le Krakauer’s Ancestral Groove en Quintet et les Afro Cuban Messengers de Chucho Valdes en sextet.

Les prestations des deux groupes furent sans surprise. « Regular » comme disent les chroniqueurs espagnols… La rythmique de Chucho est puissante et précise. Le trompettiste, soliste assez banal, aurait bien besoin d’un second souffleur, un saxophoniste, pour l’épauler entre autres, pour l’exposé des thèmes. Chucho toujours aussi brillant et facile multiplie les citations. « De Scriabine à Ravel en passant par Monk et la java, tout y passe« . Roboratif. Sa soeur Mayra enflamme l’amphithéâtre à la fin du set.

David Krakauer fait partie des agitateurs remarquables qui s’amuse depuis 2 décennies à ébouriffer le klezmer, la musique juive ashkénaze d’Europe de l’Est. Une musique qui après avoir croisé le jazz dès les années 70, se décline depuis en voies multiples, rock, funk, hip-hop, électro… Cet incroyable virtuose de la clarinette « ouvre sa porte » depuis quelques années à de nombreux idiomes: des plus traditionnels aux plus « branchés ». Son intégration actuelle des « samples » électroniques est particulièrement réussie. Débutée avec le Québécois Socalled (créateur du klezmer-hip hop) poursuivie actuellement avec KeepAlive. Tout récemment il a aussi enregistré et tourné avec Fred Wesley, le tromboniste funky. Krakauaer dit retrouver dans le klezmer les mêmes feelings que chez Bechet, Coltrane ou James Brown.

Pas étonnant donc qu’il ait accepté à la demande de Marie-José Justamond, directrice artistique de Suds en Arles, une nouvelle expérience: une rencontre avec le groupe de Valdes à la fin de la première partie du concert.

Dans un français parfait, après avoir longuement dit le plaisir qu’il avait eu à déambuler dans la magnifique ville d’Arles pendant deux jours il exprima aussi son émotion et sa joie de pouvoir dialoguer avec un très grand maître de la musique cubaine. Pas mal de « professionnels de la profession » présents devant la scène étaient, pourtant, pour le moins, dubitatifs. Tant les univ
ers des 2 leaders leur paraissaient très (trop?) éloignés.

C’est Krakauer qui propose qu’on joue « sur son terrain » avec le thème Heyser Bulgar, typique de l’univers klezmer. Il a donné dans l’après midi la ligne mélodique et les accords à Chucho. Il débute à fond la caisse avec ses lignes ultra virtuoses de clarinette. Le sonorisateur est pris de court et patauge un peu au début (son trop sec et trop étriqué sur les premières mesures). Chucho aussi. Mais, la rythmique cubaine assure d’entrée sans problème. Très vite un superbe feeling s’installe. Le sonorisateur trouve de meilleurs réglages et Chucho entre très vite pleinement dans le jeu. Enorme solo du pianiste. Quelques échanges (4/4, 8/8) très jazz sur la fin… Pari réussi. Public ravi. Un bel exemple de ce que Suds à Arles propose en matière d’échanges culturels et musicaux depuis 19 ans.

Pierre-Henri Ardonceau