Jazz live
Publié le 14 Juil 2015

Têtes de Jazz, Avignon. Un autre regard sur Ozma

Avignon est dédiée au théâtre en juillet mais l’on y entend aussi du jazz et des musiques improvisées lors de la 3 ème édition de Têtes de Jazz qui se termine le 16 juillet. Philippe Méziat était présent pour Jazz Magazine dès l’ouverture. Nous y sommes à notre tour …

2014, le centenaire de la première guerre mondiale. L’ensemble OZMA (nom inspiré des recherches sur les signaux d’intelligence extraterrestre SETI) continue à travailler le rapport à l’image, après des ciné-concerts sur des films de Buster Keaton, et commémore à sa façon l’événement en créant un répertoire original sur des photographes d’archives, clichés toujours expressifs, truculents, bouleversants de cette guerre qui nous fit basculer dans le XXème siècle.

 

 

 

 

OZMA – Photo-concert. 1914-1918 «D’autres regards».

Tam de Villiers (g), Edouard Séro-Guillaume (b), Stéphane Scharlé (dm, sound design)

Cela commence par des portraits de nos « pioupious », des appelés vaillants, toutes classes et couleurs confondues.  La musique finit en un crescendo éblouissant de pair avec le montage. On entend siffler les obus, gronder la mitraille, tout comme Jimi Hendrix faisait crépiter sa Fender sur « Machine gun » à Woodstock, plus tard, lors d’ une autre guerre.

Alternant composition et improvisation très équitablement, avec une belle interaction entre ces deux pratiques, le trio OZMA compose les voix avec un sens efficace des masses, de la dynamique bruitiste, de l’occupation de l’espace et du temps du récit. Car il s’agit d’illustrer près de 400 photographies réparties en dix thèmes ( Portraits, Au pas, Dans l’air, Combats, Propagande, Paysages, Tranchées, Le Front arrière, Scènes de vie et le dernier en 3D, Anaglyphes). Les images sont extraites des centres d’archives du CIL (Centre Image Lorraine), des archives départementales des Vosges et de Saône et Loire, cartes postales sépia qu’il a fallu numériser avant d’être montées avec dextérité par Jean François Pey.

Et Ozma, au fait ? C’est un groupe rock et post jazz, une nébuleuse de près de quinze ans d’existence avec cinq albums à son actif : le noyau dur est constitué du batteur Stéphane Scharlé qui joue aussi des effets électroniques, présente le projet et lit une lettre d’un poilu sur la vie des tranchées, dans ces boyaux labyrinthiques, avec ces latrines à 200 mètres des lignes ennemies, jonchées de cadavres, avec le bruit persistant de l’eau qui s’écoule, propre ou sale. Le bassiste Edouard Séro-Guillaume, tête baissée, est le « contrôleur visuel » de la vidéo, envoyée depuis un ordinateur sur scène. Maniant un logiciel spécifique, qui joue le rôle de « playlist » il module la longueur des morceaux et des interventions respectives comme dans la section « propagande » qui met à mal « l’aigle boche »,  craint les Russes qui ne sont pas forcément amis, et prévient avec la formule devenue célèbre :« Méfiez-vous ! Taisez-vous ! Les oreilles ennemies vous écoutent ». Le guitariste, gaucher,  à présent intégré au projet, qui fait donc partie de « la famille agrandie » Ozma, est Tam de Villiers, par ailleurs, leader d’un quartet original remarqué (Panacea est son dernier album, Choc Jazzmagazine mai 2015). Sans prendre de solo, il apporte sa contribution, non négligeable, au service des images qu’il fixe souvent, à la recherche du déclic qui alimentera son inspiration. C’est qu’il est plutôt adepte de formes fluides, de développements répétitifs, de variations englobant des contraintes, et joue finement d’une certaine imprévisibilité.

On le voit, le travail est réparti équitablement au sein du trio. Jusqu’à cinq minutes avant le concert qui débute à 15h30, le trio répète encore certains thèmes et transitions sur la séquence qu’ils nomment entre eux joliment, « femmes libérées », et qui présente en fait « le front arrière » où les femmes remplacèrent leurs hommes au travail, dans les usines et les transports. 

 Une heure stimulante que l’on passe à harmoniser ce que l’oreille entend et que l’oeil perçoit, dans ce documentaire captivant qui n’est pas de la fiction. Suivre images et sons attentivement est parfois ardu, avouons-le. La musique peut vite devenir inutile, par trop illustrative, voire intrusive, ou alors ce sont les vidéos qui n’apportent rien à ce qui se fabrique sur scène. Rien de tout cela dans ce temps fort  de musique à l’image, de notre histoire sociale et politique.  Comme les Regards de Breizh de Guy Le Querrec, formidable reconstitution insolite et humoristique de la Bretagne des années 70, présentée l’an dernier, toujours à Têtes de Jazz. C’est que les ciné-concerts  ou autres projections-concerts ont le vent en poupe. Et à Avignon, le vent, on connaît,  mais le public, il faut aller le chercher : si TDJ est, pendant le festival, une formidable vitrine d’exposition des musiques et des productions actuelles, avec plus de 1400 spectacles dans le « off », les sollicitations sont inépuisables. Donc, à l’exemple de Journal Intime qui allait se présenter, en fanfare, dans les rues, le trio part courageusement  « tracter » sous le soleil, avant le concert et rejoue peu de temps après , devant la Manutention, un petit répertoire « maison », des morceaux funk, du John Scofield,  en compagnie de Jean Baptiste Berger, saxophoniste du Cadillac Palace, Prix du public au Tremplin Jazz 2014. Attirer le public et ensuite laisser faire le « bouche à oreille ». Ozma s’est installé pour une semaine, au pied du rocher des Doms. La vie d’artiste a aussi du bon …

 

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Avignon est dédiée au théâtre en juillet mais l’on y entend aussi du jazz et des musiques improvisées lors de la 3 ème édition de Têtes de Jazz qui se termine le 16 juillet. Philippe Méziat était présent pour Jazz Magazine dès l’ouverture. Nous y sommes à notre tour …

2014, le centenaire de la première guerre mondiale. L’ensemble OZMA (nom inspiré des recherches sur les signaux d’intelligence extraterrestre SETI) continue à travailler le rapport à l’image, après des ciné-concerts sur des films de Buster Keaton, et commémore à sa façon l’événement en créant un répertoire original sur des photographes d’archives, clichés toujours expressifs, truculents, bouleversants de cette guerre qui nous fit basculer dans le XXème siècle.

 

 

 

 

OZMA – Photo-concert. 1914-1918 «D’autres regards».

Tam de Villiers (g), Edouard Séro-Guillaume (b), Stéphane Scharlé (dm, sound design)

Cela commence par des portraits de nos « pioupious », des appelés vaillants, toutes classes et couleurs confondues.  La musique finit en un crescendo éblouissant de pair avec le montage. On entend siffler les obus, gronder la mitraille, tout comme Jimi Hendrix faisait crépiter sa Fender sur « Machine gun » à Woodstock, plus tard, lors d’ une autre guerre.

Alternant composition et improvisation très équitablement, avec une belle interaction entre ces deux pratiques, le trio OZMA compose les voix avec un sens efficace des masses, de la dynamique bruitiste, de l’occupation de l’espace et du temps du récit. Car il s’agit d’illustrer près de 400 photographies réparties en dix thèmes ( Portraits, Au pas, Dans l’air, Combats, Propagande, Paysages, Tranchées, Le Front arrière, Scènes de vie et le dernier en 3D, Anaglyphes). Les images sont extraites des centres d’archives du CIL (Centre Image Lorraine), des archives départementales des Vosges et de Saône et Loire, cartes postales sépia qu’il a fallu numériser avant d’être montées avec dextérité par Jean François Pey.

Et Ozma, au fait ? C’est un groupe rock et post jazz, une nébuleuse de près de quinze ans d’existence avec cinq albums à son actif : le noyau dur est constitué du batteur Stéphane Scharlé qui joue aussi des effets électroniques, présente le projet et lit une lettre d’un poilu sur la vie des tranchées, dans ces boyaux labyrinthiques, avec ces latrines à 200 mètres des lignes ennemies, jonchées de cadavres, avec le bruit persistant de l’eau qui s’écoule, propre ou sale. Le bassiste Edouard Séro-Guillaume, tête baissée, est le « contrôleur visuel » de la vidéo, envoyée depuis un ordinateur sur scène. Maniant un logiciel spécifique, qui joue le rôle de « playlist » il module la longueur des morceaux et des interventions respectives comme dans la section « propagande » qui met à mal « l’aigle boche »,  craint les Russes qui ne sont pas forcément amis, et prévient avec la formule devenue célèbre :« Méfiez-vous ! Taisez-vous ! Les oreilles ennemies vous écoutent ». Le guitariste, gaucher,  à présent intégré au projet, qui fait donc partie de « la famille agrandie » Ozma, est Tam de Villiers, par ailleurs, leader d’un quartet original remarqué (Panacea est son dernier album, Choc Jazzmagazine mai 2015). Sans prendre de solo, il apporte sa contribution, non négligeable, au service des images qu’il fixe souvent, à la recherche du déclic qui alimentera son inspiration. C’est qu’il est plutôt adepte de formes fluides, de développements répétitifs, de variations englobant des contraintes, et joue finement d’une certaine imprévisibilité.

On le voit, le travail est réparti équitablement au sein du trio. Jusqu’à cinq minutes avant le concert qui débute à 15h30, le trio répète encore certains thèmes et transitions sur la séquence qu’ils nomment entre eux joliment, « femmes libérées », et qui présente en fait « le front arrière » où les femmes remplacèrent leurs hommes au travail, dans les usines et les transports. 

 Une heure stimulante que l’on passe à harmoniser ce que l’oreille entend et que l’oeil perçoit, dans ce documentaire captivant qui n’est pas de la fiction. Suivre images et sons attentivement est parfois ardu, avouons-le. La musique peut vite devenir inutile, par trop illustrative, voire intrusive, ou alors ce sont les vidéos qui n’apportent rien à ce qui se fabrique sur scène. Rien de tout cela dans ce temps fort  de musique à l’image, de notre histoire sociale et politique.  Comme les Regards de Breizh de Guy Le Querrec, formidable reconstitution insolite et humoristique de la Bretagne des années 70, présentée l’an dernier, toujours à Têtes de Jazz. C’est que les ciné-concerts  ou autres projections-concerts ont le vent en poupe. Et à Avignon, le vent, on connaît,  mais le public, il faut aller le chercher : si TDJ est, pendant le festival, une formidable vitrine d’exposition des musiques et des productions actuelles, avec plus de 1400 spectacles dans le « off », les sollicitations sont inépuisables. Donc, à l’exemple de Journal Intime qui allait se présenter, en fanfare, dans les rues, le trio part courageusement  « tracter » sous le soleil, avant le concert et rejoue peu de temps après , devant la Manutention, un petit répertoire « maison », des morceaux funk, du John Scofield,  en compagnie de Jean Baptiste Berger, saxophoniste du Cadillac Palace, Prix du public au Tremplin Jazz 2014. Attirer le public et ensuite laisser faire le « bouche à oreille ». Ozma s’est installé pour une semaine, au pied du rocher des Doms. La vie d’artiste a aussi du bon …

 

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Avignon est dédiée au théâtre en juillet mais l’on y entend aussi du jazz et des musiques improvisées lors de la 3 ème édition de Têtes de Jazz qui se termine le 16 juillet. Philippe Méziat était présent pour Jazz Magazine dès l’ouverture. Nous y sommes à notre tour …

2014, le centenaire de la première guerre mondiale. L’ensemble OZMA (nom inspiré des recherches sur les signaux d’intelligence extraterrestre SETI) continue à travailler le rapport à l’image, après des ciné-concerts sur des films de Buster Keaton, et commémore à sa façon l’événement en créant un répertoire original sur des photographes d’archives, clichés toujours expressifs, truculents, bouleversants de cette guerre qui nous fit basculer dans le XXème siècle.

 

 

 

 

OZMA – Photo-concert. 1914-1918 «D’autres regards».

Tam de Villiers (g), Edouard Séro-Guillaume (b), Stéphane Scharlé (dm, sound design)

Cela commence par des portraits de nos « pioupious », des appelés vaillants, toutes classes et couleurs confondues.  La musique finit en un crescendo éblouissant de pair avec le montage. On entend siffler les obus, gronder la mitraille, tout comme Jimi Hendrix faisait crépiter sa Fender sur « Machine gun » à Woodstock, plus tard, lors d’ une autre guerre.

Alternant composition et improvisation très équitablement, avec une belle interaction entre ces deux pratiques, le trio OZMA compose les voix avec un sens efficace des masses, de la dynamique bruitiste, de l’occupation de l’espace et du temps du récit. Car il s’agit d’illustrer près de 400 photographies réparties en dix thèmes ( Portraits, Au pas, Dans l’air, Combats, Propagande, Paysages, Tranchées, Le Front arrière, Scènes de vie et le dernier en 3D, Anaglyphes). Les images sont extraites des centres d’archives du CIL (Centre Image Lorraine), des archives départementales des Vosges et de Saône et Loire, cartes postales sépia qu’il a fallu numériser avant d’être montées avec dextérité par Jean François Pey.

Et Ozma, au fait ? C’est un groupe rock et post jazz, une nébuleuse de près de quinze ans d’existence avec cinq albums à son actif : le noyau dur est constitué du batteur Stéphane Scharlé qui joue aussi des effets électroniques, présente le projet et lit une lettre d’un poilu sur la vie des tranchées, dans ces boyaux labyrinthiques, avec ces latrines à 200 mètres des lignes ennemies, jonchées de cadavres, avec le bruit persistant de l’eau qui s’écoule, propre ou sale. Le bassiste Edouard Séro-Guillaume, tête baissée, est le « contrôleur visuel » de la vidéo, envoyée depuis un ordinateur sur scène. Maniant un logiciel spécifique, qui joue le rôle de « playlist » il module la longueur des morceaux et des interventions respectives comme dans la section « propagande » qui met à mal « l’aigle boche »,  craint les Russes qui ne sont pas forcément amis, et prévient avec la formule devenue célèbre :« Méfiez-vous ! Taisez-vous ! Les oreilles ennemies vous écoutent ». Le guitariste, gaucher,  à présent intégré au projet, qui fait donc partie de « la famille agrandie » Ozma, est Tam de Villiers, par ailleurs, leader d’un quartet original remarqué (Panacea est son dernier album, Choc Jazzmagazine mai 2015). Sans prendre de solo, il apporte sa contribution, non négligeable, au service des images qu’il fixe souvent, à la recherche du déclic qui alimentera son inspiration. C’est qu’il est plutôt adepte de formes fluides, de développements répétitifs, de variations englobant des contraintes, et joue finement d’une certaine imprévisibilité.

On le voit, le travail est réparti équitablement au sein du trio. Jusqu’à cinq minutes avant le concert qui débute à 15h30, le trio répète encore certains thèmes et transitions sur la séquence qu’ils nomment entre eux joliment, « femmes libérées », et qui présente en fait « le front arrière » où les femmes remplacèrent leurs hommes au travail, dans les usines et les transports. 

 Une heure stimulante que l’on passe à harmoniser ce que l’oreille entend et que l’oeil perçoit, dans ce documentaire captivant qui n’est pas de la fiction. Suivre images et sons attentivement est parfois ardu, avouons-le. La musique peut vite devenir inutile, par trop illustrative, voire intrusive, ou alors ce sont les vidéos qui n’apportent rien à ce qui se fabrique sur scène. Rien de tout cela dans ce temps fort  de musique à l’image, de notre histoire sociale et politique.  Comme les Regards de Breizh de Guy Le Querrec, formidable reconstitution insolite et humoristique de la Bretagne des années 70, présentée l’an dernier, toujours à Têtes de Jazz. C’est que les ciné-concerts  ou autres projections-concerts ont le vent en poupe. Et à Avignon, le vent, on connaît,  mais le public, il faut aller le chercher : si TDJ est, pendant le festival, une formidable vitrine d’exposition des musiques et des productions actuelles, avec plus de 1400 spectacles dans le « off », les sollicitations sont inépuisables. Donc, à l’exemple de Journal Intime qui allait se présenter, en fanfare, dans les rues, le trio part courageusement  « tracter » sous le soleil, avant le concert et rejoue peu de temps après , devant la Manutention, un petit répertoire « maison », des morceaux funk, du John Scofield,  en compagnie de Jean Baptiste Berger, saxophoniste du Cadillac Palace, Prix du public au Tremplin Jazz 2014. Attirer le public et ensuite laisser faire le « bouche à oreille ». Ozma s’est installé pour une semaine, au pied du rocher des Doms. La vie d’artiste a aussi du bon …

 

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Avignon est dédiée au théâtre en juillet mais l’on y entend aussi du jazz et des musiques improvisées lors de la 3 ème édition de Têtes de Jazz qui se termine le 16 juillet. Philippe Méziat était présent pour Jazz Magazine dès l’ouverture. Nous y sommes à notre tour …

2014, le centenaire de la première guerre mondiale. L’ensemble OZMA (nom inspiré des recherches sur les signaux d’intelligence extraterrestre SETI) continue à travailler le rapport à l’image, après des ciné-concerts sur des films de Buster Keaton, et commémore à sa façon l’événement en créant un répertoire original sur des photographes d’archives, clichés toujours expressifs, truculents, bouleversants de cette guerre qui nous fit basculer dans le XXème siècle.

 

 

 

 

OZMA – Photo-concert. 1914-1918 «D’autres regards».

Tam de Villiers (g), Edouard Séro-Guillaume (b), Stéphane Scharlé (dm, sound design)

Cela commence par des portraits de nos « pioupious », des appelés vaillants, toutes classes et couleurs confondues.  La musique finit en un crescendo éblouissant de pair avec le montage. On entend siffler les obus, gronder la mitraille, tout comme Jimi Hendrix faisait crépiter sa Fender sur « Machine gun » à Woodstock, plus tard, lors d’ une autre guerre.

Alternant composition et improvisation très équitablement, avec une belle interaction entre ces deux pratiques, le trio OZMA compose les voix avec un sens efficace des masses, de la dynamique bruitiste, de l’occupation de l’espace et du temps du récit. Car il s’agit d’illustrer près de 400 photographies réparties en dix thèmes ( Portraits, Au pas, Dans l’air, Combats, Propagande, Paysages, Tranchées, Le Front arrière, Scènes de vie et le dernier en 3D, Anaglyphes). Les images sont extraites des centres d’archives du CIL (Centre Image Lorraine), des archives départementales des Vosges et de Saône et Loire, cartes postales sépia qu’il a fallu numériser avant d’être montées avec dextérité par Jean François Pey.

Et Ozma, au fait ? C’est un groupe rock et post jazz, une nébuleuse de près de quinze ans d’existence avec cinq albums à son actif : le noyau dur est constitué du batteur Stéphane Scharlé qui joue aussi des effets électroniques, présente le projet et lit une lettre d’un poilu sur la vie des tranchées, dans ces boyaux labyrinthiques, avec ces latrines à 200 mètres des lignes ennemies, jonchées de cadavres, avec le bruit persistant de l’eau qui s’écoule, propre ou sale. Le bassiste Edouard Séro-Guillaume, tête baissée, est le « contrôleur visuel » de la vidéo, envoyée depuis un ordinateur sur scène. Maniant un logiciel spécifique, qui joue le rôle de « playlist » il module la longueur des morceaux et des interventions respectives comme dans la section « propagande » qui met à mal « l’aigle boche »,  craint les Russes qui ne sont pas forcément amis, et prévient avec la formule devenue célèbre :« Méfiez-vous ! Taisez-vous ! Les oreilles ennemies vous écoutent ». Le guitariste, gaucher,  à présent intégré au projet, qui fait donc partie de « la famille agrandie » Ozma, est Tam de Villiers, par ailleurs, leader d’un quartet original remarqué (Panacea est son dernier album, Choc Jazzmagazine mai 2015). Sans prendre de solo, il apporte sa contribution, non négligeable, au service des images qu’il fixe souvent, à la recherche du déclic qui alimentera son inspiration. C’est qu’il est plutôt adepte de formes fluides, de développements répétitifs, de variations englobant des contraintes, et joue finement d’une certaine imprévisibilité.

On le voit, le travail est réparti équitablement au sein du trio. Jusqu’à cinq minutes avant le concert qui débute à 15h30, le trio répète encore certains thèmes et transitions sur la séquence qu’ils nomment entre eux joliment, « femmes libérées », et qui présente en fait « le front arrière » où les femmes remplacèrent leurs hommes au travail, dans les usines et les transports. 

 Une heure stimulante que l’on passe à harmoniser ce que l’oreille entend et que l’oeil perçoit, dans ce documentaire captivant qui n’est pas de la fiction. Suivre images et sons attentivement est parfois ardu, avouons-le. La musique peut vite devenir inutile, par trop illustrative, voire intrusive, ou alors ce sont les vidéos qui n’apportent rien à ce qui se fabrique sur scène. Rien de tout cela dans ce temps fort  de musique à l’image, de notre histoire sociale et politique.  Comme les Regards de Breizh de Guy Le Querrec, formidable reconstitution insolite et humoristique de la Bretagne des années 70, présentée l’an dernier, toujours à Têtes de Jazz. C’est que les ciné-concerts  ou autres projections-concerts ont le vent en poupe. Et à Avignon, le vent, on connaît,  mais le public, il faut aller le chercher : si TDJ est, pendant le festival, une formidable vitrine d’exposition des musiques et des productions actuelles, avec plus de 1400 spectacles dans le « off », les sollicitations sont inépuisables. Donc, à l’exemple de Journal Intime qui allait se présenter, en fanfare, dans les rues, le trio part courageusement  « tracter » sous le soleil, avant le concert et rejoue peu de temps après , devant la Manutention, un petit répertoire « maison », des morceaux funk, du John Scofield,  en compagnie de Jean Baptiste Berger, saxophoniste du Cadillac Palace, Prix du public au Tremplin Jazz 2014. Attirer le public et ensuite laisser faire le « bouche à oreille ». Ozma s’est installé pour une semaine, au pied du rocher des Doms. La vie d’artiste a aussi du bon …