Jazz live
Publié le 12 Jan 2021

Howard Johnson: une voix grave s’est éteinte

Tubiste, clarinettiste basse et saxophoniste baryton, Howard Johnson est mort ce 11 janvier des suites d’une longue maladie.

Il était né le 7 août 1941 à Montgomery, dans l’Alabama. Il avait commencé en autodidacte par le saxophone baryton, en 1954, avant de se mettre au tuba un an plus tard. Il fut le premier à faire du tuba un instrument soliste virtuose, ce qui lui valut dès 1964 d’être accueilli dans le workshop de Charles Mingus et dans le septette de Bill Dixon. À partir de 1965, c’est un musicien polyvalent que l’on rencontre au tuba chez Hank Crawford (“After Hours”), Hank Mobley  (“A Slice of Top”) ou Archie Shepp (“Mama Too Tight”). En pupitre chez George Benson (“Benson Burner”), Gerald Wilson (“Live and Swinging”), Oliver Nelson (“Live from Los Angeles”), voire dans le contexte de la liberté dirigée du Jazz Composers Orchestra de Michael Mantler, c’est auprès de Carla Bley (dès “Escalator Over the Hill”, ), puis de Gil Evans (dès “Blues in Orbit”) qu’il se fait le plus largement et longuement connaître, ce dernier profitant même de ses compétences multi-instrumentales pour lui confier également des parties de clarinette basse et de saxophone baryton. Mais c’est au tuba (et comme arrangeur) qu’il  apporte à Gil Evans sa contribution probablement la plus marquante, avec son interprétation du Voodoo Chile Jimi Hendrix.

Tout en restant très sollicité par les grandes formations et en studio, de Buddy Rich à Charles Tolliver, de Quincy Jones à George Gruntz, c’est en petite ou moyenne formation que l’on l’entendra le plus précisément auprès de Michel Portal (“Splendi Yzlment”, 1971), Jack DeJohnette (“Album Album”), Abdullah Ibrahim (“African River”, 1989), Pete Levin (“Party in the Basement”).

En 1971, il avait arrangé pour  “The Real Thing” de Taj Mahal une section de cuivres comprenant ses collègues tubistes Earl McIntyre et Joseph Daley (écouter notamment Big kneed Gal et Diving Duck) avec lesquels il avait par la suite fondé un ensemble des cinq à six tubas plus rythmique baptisé Substructure, puis Gravity.

Dans Jazz Magazine en mars 1976, ce natif d’Alabama déclarait à Philippe Carles:  » Il y a toujours eu ans la communauté noire une sorte de vénération pour les sons graves. Dans les groupes de gospel, la voix de basse  a toujours eu un statut particulier. L’origine de cela remonte au temps de l’esclavage, quand les propriétaires d’esclaves ne supportaient pas que les hommes noirs leur parlent avec une voix grave. Et les esclaves savaient que cela irritait les maîtres. Aussi, même après l’esclavage, les Noirs qui n’avaient pas peur des Blancs parlaient souvent ainsi d’une voix grave. D’où cette attitude respectueuse de la société noire pour les sons noirs. Et c’est ce que manifeste mon choix instrumental. » 

Franck Bergerot