Jazz live
Publié le 27 Juin 2018

Le quintet d’Alexis Avakian à la péniche Anako

Le quintet d’Alexis Avakian, donnait mardi soir, de la péniche Anako un très beau concert à valeur de répétition générale avant son troisième disque en cours d’enregistrement.

Alexis Avakian (sax ténor), Mauro Gargano (contrebasse), Fabrice Moreau (batterie), Ludovic Allainmat (piano), Artyom Minasyan (duduk) , Péniche Anako, 61 quai de Loire,  5 juin 2018

 

J’aime beaucoup le saxophoniste Alexis Avakian. Quand il joue, il va à l’essentiel. Il ne s’acharne pas dans la trituration des harmoniques ou dans l’écartèlement des arpèges, grammaire obligée de tant de saxophonistes actuels. Il est clair, direct, et ne perd jamais de vue son étoile polaire, la mélodie. Il possède par ailleurs un son de ténor puissant, grave, bien timbré. Bref, c’est du robuste. En l’écoutant dans le cadre intime de cette péniche l’Anako, je me disais que comme compositeur, Alexis Avakian possède à peu près les mêmes qualités que comme instrumentiste. Ses compositions ont un caractère de simplicité et d’évidence mélodique. On a envie  de les chanter. Les meilleures (comme Boulevard des Grands Pins) sont marquées par une nostalgie qui n’est pas déchirante mais apaisée, comme filtrée et adoucie par un lyrisme  pudique.

Ce soir-là, sur la péniche Anako donc, le groupe d’Alexis Avakian est au grand complet. Ce sont les mêmes musiciens depuis son premier disque, Diggin Chami. Et à voir les sourires, les blagues, les regards échangés entre Fabrice Moreau, Mauro Gargano, Ludovic Allainmat, et Alexis Avakian, on sent à quel point leur entente humaine est profonde. Musicalement, leur complémentarité est frappante. La contrebasse de Mauro Gargano est minérale, puissante, incroyablement présente. Avec une blanche, ou une ronde, il sait remplir  l’espace. Ce côté terrien et enraciné  que l’on retrouve aussi chez Avakian, est contrebalancé par le piano discret mais essentiel de Ludovic Allainmat. Il apporte des volutes gracieuses, swingantes, romantiques, aériennes qui équilibrent la robustesse des lignes mélodiques d’Avakian et de Gargano.  Un cinquième homme vient enrichir la trame sonore du groupe tout en lui apportant un surcroît d’émotion: C’est le joueur de duduk Artyom Minasyan.

On sait que le duduk, instrument à anche double en bois d’abricotier, symbolise à lui tout seul la musique et la culture arméniennes. Alexis Avakian a réussi à l’intégrer au cœur de sa musique (magnifiques unissons ténor-duduk) sans basculer dans un ersatz de musique traditionnelle, et sans en faire non plus une sorte d’épice folklorique. Cette intégration du duduk dans le groupe est aussi à mettre au crédit d’Artyom Minasyan, qui se coule avec délice et maîtrise dans le lyrisme d’Alexis Avakian. Il délivre au cours de la soirée quelques solos d’émotion pure. Il semble, en même temps qu’il joue, ouvrir son cœur.

 

Les morceaux joués ce soir sont essentiellement des compositions qui figureront sur le prochain disque du quintet, en cours d’enregistrement. Elles n’ont pas encore leurs noms de baptême (Avakian les désigne comme « sans Titre numéro1 », « sans Titre numéro 3 »). Mais il joue aussi quelques uns des plus beaux morceaux de son disque précédent Hi Dream, avec notamment Boulevard des Grands Pins, et aussi Adieu mon drôle, dédié à Philippe Conord, peintre et amateur de jazz qui a laissé un souvenir tendre et chaleureux à tous ceux qui ont eu le bonheur de croiser sa route.

Texte : JF Mondot

Dessins : AC Alvoët (autres dessins, peintures, gravures à découvrir sur son site www.annie-claire.com)

On peut acheter un des dessins figurant sur ce blog en s’adressant à l’artiste, annie_claire@hotmail.com.