Jazz live
Publié le 9 Déc 2013

Martinique Jazz Festival : Monty, le jazz dans la simplicité

Attablé au restaurant Ti Balcon sur les hauteurs de Fort de France Monty Alexander écoute très attentif les trois musiciens de l’orchestre maison égrener biguine et mazurka. Lorsque soudain de son sac il sort un mélodica, se lève pour se joindre au trio local. Sur un air de quadrille il flatte la mélodie de petits contrechants inédits. Le chanteur-guitariste n’en revient pas, les autres musiciens venus eux aussi se retaurer après le concert n’en perdent pas une miette. Monty esquisse maintenant quelques pas de danse le mélodica toujours fiché entre les lèvres. Les clients applaudissent, ravis. Les smartphones crépitent de photos flashés. Portraitisés au mur les icones du piano jazz antillais, de Francisco jusqu’à Alain Jean-Marie en passant par Marius Cultier et Paulo Rosine s’en étonneraient presque…

 

Martinique Jazz Festival, L’Atrium, Fort de France, 6 et 7 décembre

Sonny Troupé (dm, ka, voc), Grégory Privat (p, el p, voc), Mike Amoguu (b), Olivier Juste (ka)

Monty Alexnder (p, melod), Hassan Shakur (b), Neal Smith (dm)

Charlie Sepulveda (tp), Norberto Ortiz (ts), Bienvenido Dinzey (p), Gabriel Rodriguez (b), Raoul Madonado (dm), Gadwin Vargas (conga)

Etienne Mbappé (b, voc), Cédric Baud (g), Hervé Gourdikian (ts, ss), Nicolas Viccaro (dm), Catherine Petit (voc, danse)

Ibeyi: Lisa-Kaindé Diaz (p, voc), Naomi Diaz (cajon, voc)

 

Le jazz peut se jouer simplement. Notamment lorsque le swing s’invite en bagage accompagné, le piano se ballade sans aucun complexe à travers les âges du jazz. Du blues, du stride, du bop, du groove, de la ballade, quelques traits de Debussy ou Ravel au passage plus du reggae bien entendu : les standards s’offrent au toucher délicat mais ferme du pianiste américain d’origine jamaïcaine. S’imbriquent successivement et sans aucun effort apparent Duke Ellington (Love you Madly), John Lewis (Too Bass Hit), Stevie Wonder (Higher ground), Bob Marley (No woman no cry, Rédemption Song) La basse joue  les temps fondamentaux, la batterie les souligne sans forcer le trait.

Les Voyages et rêves (Musicast/Antilles Chabine Prod) du quartet de Sonny Troupé révèlent, appliqués à la scène,  une musique très dense, très construite, porteuse d’un impact fort appuyé. Sans doute parce que le musicien guadeloupéen est un batteur très tambour question frappes et sonorités. Témoin cette longue séquence à deux « kas » portée en duo avec Olivier Juste. De quoi produire des sonorités tantôt électriques tantôt très nature (souvent nourries de bois, de peaux (Gwakaladja) du métal brut des cordes du piano (Ki Koté) et des voix comme un rituel (Balansé a péyi là) Derrière son piano, acoustique ou électrique, Grégory Privat est un développeur, d’idées, de riffs et d’espaces pour improviser. On sent d’ailleurs derrières ces bornages, ces métriques très serrées pour guider l’orchestre au plus juste que la part des anges de l’improvisation pourrait se voir un jour plus davantage diffusée. Lâcher les chevaux du goût vers des arômes plus boisés encore.

C’est rond, c’est plein et la musique tourne presque d’elle-même. De quoi faire dire à Charlie Sepulveda presque agacé « Je ne comprends pas pourquoi je ne viens jamais jouer en France avec mon orchestre » Le trompettiste portoricain de New York joue une musique au moins autant jazz que latin jazz si tant est que ce vocable que Chucho Valdes abhorre recouvre quelque réalité. Certes, question instrumentistes l’orchestre ne recèle sans doute aucun champion du monde. Ce qui n’empêche nullement le collectif de livrer au passage une véritable pépite : la reprise du Come Together des Beatles, version habillée légère mais tonique ô combien d’une polyrythmie caraïbe sur la base du riff de basse inoubliable de Paul Mc Cartney.

L’enfant autoproclamé « du pays » et légitimé par une chaude réaction du public de l’Auditorium fait le buzz dès ses premiers mots prononcés en créole. Le pari d’Etienne Mbappé c’est bien de transporter son Afrique de cœur –les musiques de Douala, sa ville en particulier- dans une île qui l’a accueilli lui, jeune musicien de vingt ans fraichement débarqué alors à Fort de France. A l’image de son dernier album (Pater Noster) une architecture de lignes de basse dessine un univers de couleurs sous ses doigts gantés de noir. Un écho de voix moelleux au chocolat ou blanc mangé coco vient en permanence en nimber les rythmes et les mélodies. Au besoin sax et guitares souvent mixées très saturées déchirent les surfaces trop lisses. dédie son concert à Nelson Mandela .

Comme un bijou artisanal tout beau tout neuf posé dans un écrin de soie. la surprise qne devait pas paraître dans l’immense salle un peu froide multi siglée des mots et images d’Aimé Césaire. Et puis voilà ces deux jeunes filles modèles franco-cubaines à moins que ce ne soit l’inverse lancées dans un petit récital de voix piano et percussion (cajon), chansons bâties à partit d’incantations en yoruba, langue africaine de l’ouest transmise par les esclaves africains dans les îles de la Caraïbes, Cuba en particulier. Dix huit ans tout justes, jumelles, filles du percussionniste cubain Anga Diaz, mignonnes à croquer, elles livrent sans fard une musique très fraiche, très nature. Comme si Joni Mitchell avait eu en effet miroir instantané les voix de Nina Simone et Omar Portuondo . Un horizon plein de promesses.

 

Robert Latxague

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Attablé au restaurant Ti Balcon sur les hauteurs de Fort de France Monty Alexander écoute très attentif les trois musiciens de l’orchestre maison égrener biguine et mazurka. Lorsque soudain de son sac il sort un mélodica, se lève pour se joindre au trio local. Sur un air de quadrille il flatte la mélodie de petits contrechants inédits. Le chanteur-guitariste n’en revient pas, les autres musiciens venus eux aussi se retaurer après le concert n’en perdent pas une miette. Monty esquisse maintenant quelques pas de danse le mélodica toujours fiché entre les lèvres. Les clients applaudissent, ravis. Les smartphones crépitent de photos flashés. Portraitisés au mur les icones du piano jazz antillais, de Francisco jusqu’à Alain Jean-Marie en passant par Marius Cultier et Paulo Rosine s’en étonneraient presque…

 

Martinique Jazz Festival, L’Atrium, Fort de France, 6 et 7 décembre

Sonny Troupé (dm, ka, voc), Grégory Privat (p, el p, voc), Mike Amoguu (b), Olivier Juste (ka)

Monty Alexnder (p, melod), Hassan Shakur (b), Neal Smith (dm)

Charlie Sepulveda (tp), Norberto Ortiz (ts), Bienvenido Dinzey (p), Gabriel Rodriguez (b), Raoul Madonado (dm), Gadwin Vargas (conga)

Etienne Mbappé (b, voc), Cédric Baud (g), Hervé Gourdikian (ts, ss), Nicolas Viccaro (dm), Catherine Petit (voc, danse)

Ibeyi: Lisa-Kaindé Diaz (p, voc), Naomi Diaz (cajon, voc)

 

Le jazz peut se jouer simplement. Notamment lorsque le swing s’invite en bagage accompagné, le piano se ballade sans aucun complexe à travers les âges du jazz. Du blues, du stride, du bop, du groove, de la ballade, quelques traits de Debussy ou Ravel au passage plus du reggae bien entendu : les standards s’offrent au toucher délicat mais ferme du pianiste américain d’origine jamaïcaine. S’imbriquent successivement et sans aucun effort apparent Duke Ellington (Love you Madly), John Lewis (Too Bass Hit), Stevie Wonder (Higher ground), Bob Marley (No woman no cry, Rédemption Song) La basse joue  les temps fondamentaux, la batterie les souligne sans forcer le trait.

Les Voyages et rêves (Musicast/Antilles Chabine Prod) du quartet de Sonny Troupé révèlent, appliqués à la scène,  une musique très dense, très construite, porteuse d’un impact fort appuyé. Sans doute parce que le musicien guadeloupéen est un batteur très tambour question frappes et sonorités. Témoin cette longue séquence à deux « kas » portée en duo avec Olivier Juste. De quoi produire des sonorités tantôt électriques tantôt très nature (souvent nourries de bois, de peaux (Gwakaladja) du métal brut des cordes du piano (Ki Koté) et des voix comme un rituel (Balansé a péyi là) Derrière son piano, acoustique ou électrique, Grégory Privat est un développeur, d’idées, de riffs et d’espaces pour improviser. On sent d’ailleurs derrières ces bornages, ces métriques très serrées pour guider l’orchestre au plus juste que la part des anges de l’improvisation pourrait se voir un jour plus davantage diffusée. Lâcher les chevaux du goût vers des arômes plus boisés encore.

C’est rond, c’est plein et la musique tourne presque d’elle-même. De quoi faire dire à Charlie Sepulveda presque agacé « Je ne comprends pas pourquoi je ne viens jamais jouer en France avec mon orchestre » Le trompettiste portoricain de New York joue une musique au moins autant jazz que latin jazz si tant est que ce vocable que Chucho Valdes abhorre recouvre quelque réalité. Certes, question instrumentistes l’orchestre ne recèle sans doute aucun champion du monde. Ce qui n’empêche nullement le collectif de livrer au passage une véritable pépite : la reprise du Come Together des Beatles, version habillée légère mais tonique ô combien d’une polyrythmie caraïbe sur la base du riff de basse inoubliable de Paul Mc Cartney.

L’enfant autoproclamé « du pays » et légitimé par une chaude réaction du public de l’Auditorium fait le buzz dès ses premiers mots prononcés en créole. Le pari d’Etienne Mbappé c’est bien de transporter son Afrique de cœur –les musiques de Douala, sa ville en particulier- dans une île qui l’a accueilli lui, jeune musicien de vingt ans fraichement débarqué alors à Fort de France. A l’image de son dernier album (Pater Noster) une architecture de lignes de basse dessine un univers de couleurs sous ses doigts gantés de noir. Un écho de voix moelleux au chocolat ou blanc mangé coco vient en permanence en nimber les rythmes et les mélodies. Au besoin sax et guitares souvent mixées très saturées déchirent les surfaces trop lisses. dédie son concert à Nelson Mandela .

Comme un bijou artisanal tout beau tout neuf posé dans un écrin de soie. la surprise qne devait pas paraître dans l’immense salle un peu froide multi siglée des mots et images d’Aimé Césaire. Et puis voilà ces deux jeunes filles modèles franco-cubaines à moins que ce ne soit l’inverse lancées dans un petit récital de voix piano et percussion (cajon), chansons bâties à partit d’incantations en yoruba, langue africaine de l’ouest transmise par les esclaves africains dans les îles de la Caraïbes, Cuba en particulier. Dix huit ans tout justes, jumelles, filles du percussionniste cubain Anga Diaz, mignonnes à croquer, elles livrent sans fard une musique très fraiche, très nature. Comme si Joni Mitchell avait eu en effet miroir instantané les voix de Nina Simone et Omar Portuondo . Un horizon plein de promesses.

 

Robert Latxague

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Attablé au restaurant Ti Balcon sur les hauteurs de Fort de France Monty Alexander écoute très attentif les trois musiciens de l’orchestre maison égrener biguine et mazurka. Lorsque soudain de son sac il sort un mélodica, se lève pour se joindre au trio local. Sur un air de quadrille il flatte la mélodie de petits contrechants inédits. Le chanteur-guitariste n’en revient pas, les autres musiciens venus eux aussi se retaurer après le concert n’en perdent pas une miette. Monty esquisse maintenant quelques pas de danse le mélodica toujours fiché entre les lèvres. Les clients applaudissent, ravis. Les smartphones crépitent de photos flashés. Portraitisés au mur les icones du piano jazz antillais, de Francisco jusqu’à Alain Jean-Marie en passant par Marius Cultier et Paulo Rosine s’en étonneraient presque…

 

Martinique Jazz Festival, L’Atrium, Fort de France, 6 et 7 décembre

Sonny Troupé (dm, ka, voc), Grégory Privat (p, el p, voc), Mike Amoguu (b), Olivier Juste (ka)

Monty Alexnder (p, melod), Hassan Shakur (b), Neal Smith (dm)

Charlie Sepulveda (tp), Norberto Ortiz (ts), Bienvenido Dinzey (p), Gabriel Rodriguez (b), Raoul Madonado (dm), Gadwin Vargas (conga)

Etienne Mbappé (b, voc), Cédric Baud (g), Hervé Gourdikian (ts, ss), Nicolas Viccaro (dm), Catherine Petit (voc, danse)

Ibeyi: Lisa-Kaindé Diaz (p, voc), Naomi Diaz (cajon, voc)

 

Le jazz peut se jouer simplement. Notamment lorsque le swing s’invite en bagage accompagné, le piano se ballade sans aucun complexe à travers les âges du jazz. Du blues, du stride, du bop, du groove, de la ballade, quelques traits de Debussy ou Ravel au passage plus du reggae bien entendu : les standards s’offrent au toucher délicat mais ferme du pianiste américain d’origine jamaïcaine. S’imbriquent successivement et sans aucun effort apparent Duke Ellington (Love you Madly), John Lewis (Too Bass Hit), Stevie Wonder (Higher ground), Bob Marley (No woman no cry, Rédemption Song) La basse joue  les temps fondamentaux, la batterie les souligne sans forcer le trait.

Les Voyages et rêves (Musicast/Antilles Chabine Prod) du quartet de Sonny Troupé révèlent, appliqués à la scène,  une musique très dense, très construite, porteuse d’un impact fort appuyé. Sans doute parce que le musicien guadeloupéen est un batteur très tambour question frappes et sonorités. Témoin cette longue séquence à deux « kas » portée en duo avec Olivier Juste. De quoi produire des sonorités tantôt électriques tantôt très nature (souvent nourries de bois, de peaux (Gwakaladja) du métal brut des cordes du piano (Ki Koté) et des voix comme un rituel (Balansé a péyi là) Derrière son piano, acoustique ou électrique, Grégory Privat est un développeur, d’idées, de riffs et d’espaces pour improviser. On sent d’ailleurs derrières ces bornages, ces métriques très serrées pour guider l’orchestre au plus juste que la part des anges de l’improvisation pourrait se voir un jour plus davantage diffusée. Lâcher les chevaux du goût vers des arômes plus boisés encore.

C’est rond, c’est plein et la musique tourne presque d’elle-même. De quoi faire dire à Charlie Sepulveda presque agacé « Je ne comprends pas pourquoi je ne viens jamais jouer en France avec mon orchestre » Le trompettiste portoricain de New York joue une musique au moins autant jazz que latin jazz si tant est que ce vocable que Chucho Valdes abhorre recouvre quelque réalité. Certes, question instrumentistes l’orchestre ne recèle sans doute aucun champion du monde. Ce qui n’empêche nullement le collectif de livrer au passage une véritable pépite : la reprise du Come Together des Beatles, version habillée légère mais tonique ô combien d’une polyrythmie caraïbe sur la base du riff de basse inoubliable de Paul Mc Cartney.

L’enfant autoproclamé « du pays » et légitimé par une chaude réaction du public de l’Auditorium fait le buzz dès ses premiers mots prononcés en créole. Le pari d’Etienne Mbappé c’est bien de transporter son Afrique de cœur –les musiques de Douala, sa ville en particulier- dans une île qui l’a accueilli lui, jeune musicien de vingt ans fraichement débarqué alors à Fort de France. A l’image de son dernier album (Pater Noster) une architecture de lignes de basse dessine un univers de couleurs sous ses doigts gantés de noir. Un écho de voix moelleux au chocolat ou blanc mangé coco vient en permanence en nimber les rythmes et les mélodies. Au besoin sax et guitares souvent mixées très saturées déchirent les surfaces trop lisses. dédie son concert à Nelson Mandela .

Comme un bijou artisanal tout beau tout neuf posé dans un écrin de soie. la surprise qne devait pas paraître dans l’immense salle un peu froide multi siglée des mots et images d’Aimé Césaire. Et puis voilà ces deux jeunes filles modèles franco-cubaines à moins que ce ne soit l’inverse lancées dans un petit récital de voix piano et percussion (cajon), chansons bâties à partit d’incantations en yoruba, langue africaine de l’ouest transmise par les esclaves africains dans les îles de la Caraïbes, Cuba en particulier. Dix huit ans tout justes, jumelles, filles du percussionniste cubain Anga Diaz, mignonnes à croquer, elles livrent sans fard une musique très fraiche, très nature. Comme si Joni Mitchell avait eu en effet miroir instantané les voix de Nina Simone et Omar Portuondo . Un horizon plein de promesses.

 

Robert Latxague

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Attablé au restaurant Ti Balcon sur les hauteurs de Fort de France Monty Alexander écoute très attentif les trois musiciens de l’orchestre maison égrener biguine et mazurka. Lorsque soudain de son sac il sort un mélodica, se lève pour se joindre au trio local. Sur un air de quadrille il flatte la mélodie de petits contrechants inédits. Le chanteur-guitariste n’en revient pas, les autres musiciens venus eux aussi se retaurer après le concert n’en perdent pas une miette. Monty esquisse maintenant quelques pas de danse le mélodica toujours fiché entre les lèvres. Les clients applaudissent, ravis. Les smartphones crépitent de photos flashés. Portraitisés au mur les icones du piano jazz antillais, de Francisco jusqu’à Alain Jean-Marie en passant par Marius Cultier et Paulo Rosine s’en étonneraient presque…

 

Martinique Jazz Festival, L’Atrium, Fort de France, 6 et 7 décembre

Sonny Troupé (dm, ka, voc), Grégory Privat (p, el p, voc), Mike Amoguu (b), Olivier Juste (ka)

Monty Alexnder (p, melod), Hassan Shakur (b), Neal Smith (dm)

Charlie Sepulveda (tp), Norberto Ortiz (ts), Bienvenido Dinzey (p), Gabriel Rodriguez (b), Raoul Madonado (dm), Gadwin Vargas (conga)

Etienne Mbappé (b, voc), Cédric Baud (g), Hervé Gourdikian (ts, ss), Nicolas Viccaro (dm), Catherine Petit (voc, danse)

Ibeyi: Lisa-Kaindé Diaz (p, voc), Naomi Diaz (cajon, voc)

 

Le jazz peut se jouer simplement. Notamment lorsque le swing s’invite en bagage accompagné, le piano se ballade sans aucun complexe à travers les âges du jazz. Du blues, du stride, du bop, du groove, de la ballade, quelques traits de Debussy ou Ravel au passage plus du reggae bien entendu : les standards s’offrent au toucher délicat mais ferme du pianiste américain d’origine jamaïcaine. S’imbriquent successivement et sans aucun effort apparent Duke Ellington (Love you Madly), John Lewis (Too Bass Hit), Stevie Wonder (Higher ground), Bob Marley (No woman no cry, Rédemption Song) La basse joue  les temps fondamentaux, la batterie les souligne sans forcer le trait.

Les Voyages et rêves (Musicast/Antilles Chabine Prod) du quartet de Sonny Troupé révèlent, appliqués à la scène,  une musique très dense, très construite, porteuse d’un impact fort appuyé. Sans doute parce que le musicien guadeloupéen est un batteur très tambour question frappes et sonorités. Témoin cette longue séquence à deux « kas » portée en duo avec Olivier Juste. De quoi produire des sonorités tantôt électriques tantôt très nature (souvent nourries de bois, de peaux (Gwakaladja) du métal brut des cordes du piano (Ki Koté) et des voix comme un rituel (Balansé a péyi là) Derrière son piano, acoustique ou électrique, Grégory Privat est un développeur, d’idées, de riffs et d’espaces pour improviser. On sent d’ailleurs derrières ces bornages, ces métriques très serrées pour guider l’orchestre au plus juste que la part des anges de l’improvisation pourrait se voir un jour plus davantage diffusée. Lâcher les chevaux du goût vers des arômes plus boisés encore.

C’est rond, c’est plein et la musique tourne presque d’elle-même. De quoi faire dire à Charlie Sepulveda presque agacé « Je ne comprends pas pourquoi je ne viens jamais jouer en France avec mon orchestre » Le trompettiste portoricain de New York joue une musique au moins autant jazz que latin jazz si tant est que ce vocable que Chucho Valdes abhorre recouvre quelque réalité. Certes, question instrumentistes l’orchestre ne recèle sans doute aucun champion du monde. Ce qui n’empêche nullement le collectif de livrer au passage une véritable pépite : la reprise du Come Together des Beatles, version habillée légère mais tonique ô combien d’une polyrythmie caraïbe sur la base du riff de basse inoubliable de Paul Mc Cartney.

L’enfant autoproclamé « du pays » et légitimé par une chaude réaction du public de l’Auditorium fait le buzz dès ses premiers mots prononcés en créole. Le pari d’Etienne Mbappé c’est bien de transporter son Afrique de cœur –les musiques de Douala, sa ville en particulier- dans une île qui l’a accueilli lui, jeune musicien de vingt ans fraichement débarqué alors à Fort de France. A l’image de son dernier album (Pater Noster) une architecture de lignes de basse dessine un univers de couleurs sous ses doigts gantés de noir. Un écho de voix moelleux au chocolat ou blanc mangé coco vient en permanence en nimber les rythmes et les mélodies. Au besoin sax et guitares souvent mixées très saturées déchirent les surfaces trop lisses. dédie son concert à Nelson Mandela .

Comme un bijou artisanal tout beau tout neuf posé dans un écrin de soie. la surprise qne devait pas paraître dans l’immense salle un peu froide multi siglée des mots et images d’Aimé Césaire. Et puis voilà ces deux jeunes filles modèles franco-cubaines à moins que ce ne soit l’inverse lancées dans un petit récital de voix piano et percussion (cajon), chansons bâties à partit d’incantations en yoruba, langue africaine de l’ouest transmise par les esclaves africains dans les îles de la Caraïbes, Cuba en particulier. Dix huit ans tout justes, jumelles, filles du percussionniste cubain Anga Diaz, mignonnes à croquer, elles livrent sans fard une musique très fraiche, très nature. Comme si Joni Mitchell avait eu en effet miroir instantané les voix de Nina Simone et Omar Portuondo . Un horizon plein de promesses.

 

Robert Latxague