Jazz live
Publié le 29 Jan 2019

Yves Rousseau et Jean-Marc Larché, l’art de l’épure

Lundi dernier, dans le cadre intimiste de la galerie Paul Fort, le duo Continuum, composé de Jean-Marc Larché et Yves Rousseau a donné un concert où la mélodie était reine.

 


Jean-marc Larché (saxophone soprano, et alto), Yves Rousseau (contrebasse), galerie Paul Fort, 75 014 Paris, Lundi 21 janvier 2019

 

Voici un duo, le duo Continuum, qui ne dévie pas de l’essentiel: la mélodie. La mélodie reine, mais la mélodie nue, sans fards, sans paillettes, sans oripeaux. Chacun des morceaux joués ce soir (uniquement des compositions signées des deux musiciens) possède l’évidence de folk songs . C’est en particulier le cas de Ambre, le premier morceau du concert, que l’on doit à la plume de JM Larché. Dès ce premier morceau, les deux musiciens communient à haute altitude dans un lyrisme aimanté par ligne claire. L’évidence chantante de ce qu’ils jouent est particulièrement sensible dans les unissons ou dans les passages en contrepoint (l’ombre tutélaire de Bach, à qui ils dédient une suite n’est bien sûr jamais très loin).
La réussite du duo tient aussi à la complémentarité de leurs deux sonorités. Celle de Jean-Marc Larché est pure et cristalline, particulièrement au soprano. A l’alto il trouve le moyen de l’altérer et de la froisser légèrement par de délicats effets de timbre. Chez Yves Rousseau je perçois un son puissant, vrombissant , tellurique. Il donne le sentiment qu’il peut faire à volonté sortir un orage de la caisse de sa contrebasse. Je ne sais s’il s’agit d’une de ses influences avérées, mais j’entends dans son approche un cousinage avec la sonorité et l’esthétique du grand NHOP. En tous cas sa sonorité fauve et mordante apporte une énergie vitale qui complète à merveille tout ce qu’il y a de diaphane chez Jean-Marc Larché. C’est ainsi que le duo trouve son équilibre.
Parmi les compositions jouées ce soir, les plus réussies me semblent celles qu’Yves Rousseau a dédiées à certains de ses peintres favoris: Hundertwasser, ou encore Miro (avec un double sens puisque Miro est aussi le surnom du grand Miroslav Vitous). Le concert se termine par la bouleversante musique qu’Yves Rousseau a composée pour habiller un texte non moins poignant,  les stances galantes de Jean-Baptiste Poquelin dit Molière. Même sans la voix de Jeanne Added, qui avait initialement interprété ce texte, cette musique reste sublime. En relisant mes notes, quelques jours plus tard, j’ai la curiosité de compter toutes les fois où j’ai griffé le mot « sublime » dans mon carnet de notes en réagissant spontanément à la musique. Sur cette échelle de Richter de l’enthousiasme qui m’est propre, on est pas loin du maximum. Magnifique duo.

texte: JF Mondot

Photo: Jeff Humbert