Jazz live
Publié le 30 Juil 2014

Hancock/Shorter et Corea/Clarke à Marciac

Ce n’est pas très facile à imaginer, mais deux duos de jazz peuvent remplir le grand chapiteau de Marciac (près de 6000 places), et sans chanteuse… Ces deux-là, en tout cas, l’ont fait. Et pas grâce à la Dépêche du Midi, qui s’est tellement dépêché qu’elle a titré en une sur les « deux monstres sacrés du jazz » réunis à Marciac – Chick Corea et Stanley Clarke, le second apparaissant même sur une photo en compagnie d’un partenaire non identifié. Exit Herbie et Wayne pas même mentionnés en première partie : n’est pas monstre sacré qui veut ! La presse régionale préparerait t-elle le jazz à son effacement programmé du service public ?

 

Herbie Hancock & Wayne Shorter / Chick Corea & Stanley Clarke

Mardi 29 juillet, Chapiteau de Jazz in Marciac (32)


Revenons à la musique. Une introduction lunaire, presque raréfiée, soutenant une exploration modale pointilliste du soprano, a contraint en quelques minutes l’auditoire à une qualité de concentration et de silence rarement atteint dans un pareil espace. Là où on n’aurait pu s’attendre à entendre défiler un « répertoire » de compositions de l’un comme de l’autre, c’est sur le fil d’une improvisation permanente que s’est jouée la rencontre. Impressionnante palette dynamique et harmonique d’un côté, riche de toutes les nuances de la musique française du siècle passé, riche aussi par son art du silence. Intonation parfaitement imprévisible chez le saxophoniste, ici pointilliste voire hésitante, là plus confiante dans la plénitude du registre aigü. Au synthétiseur Korg, qui alternera dès lors avec le piano Fazioli ou s’y superposera, Hancock proposera rapidement à son partenaire d’inouïes textures difficiles à décrire sans verser dans l’accumulation de métaphores ou de références technologiques – du Synclavier cher à Zappa à des environnements pouvant rappeler les recherches menées à l’IRCAM dans les années 1980 et 1990. Herbie semble avoir conçu ses programmations pour faire jouer Wayne dans des contextes variés, lequel semble parfois, en creux, repoussé aux franges du silence, par le souffle ou par le cri. Il est impossible de donner à l’écrit la mesure de la richesse sonore qui s’est pourtant déployée avec une rare exigence en pareille situation. Jouant souvent sur la frustration accumulée en ce domaine, les deux musiciens n’en ont que mieux tiré parti des épisodes développant l’élément rythmique par la pulsation ou le groove. Il faudrait encore décrire la douce lumière dans laquelle a baigné la fin du programme, une forme de retour sur l’introduction qui a condensé la manière shortérienne de distendre et d’épuiser de très brefs motifs, sans jamais les dupliquer à l’identique, tendant toujours plus une perception qui ne peut jamais totalement distinguer le composé de l’improvisé. A de rares manifestations d’impatience près, auquel le pianiste a calmement répondu – « I simply want to explore for the rest of my life » – le public resté présent a répondu par une étonnante capacité d’écoute à l’exigence et au sens du risque qu’ont manifesté pour eux deux grands artistes.

Je devine la frustration du lecteur parvenu à ce stade de mon compte-rendu, mais voilà… J’ai dû quitter les lieux après seulement un quart d’heure du duo Corea/Clarke – en cause la violente migraine de mon fils Jean – dont l’entrée en matière m’a seulement permis d’imaginer la suite. Imaginer, c’est bien aussi, d’ailleurs (je ne résiste pas !) c’est l’anagramme de…migraine. En l’occurrence, le début de ce programme consacré à une relecture des Return to Forever a dévoilé une belle sonorité acoustique, ronde et équilibrée, et un évident plaisir de revisiter ensemble le dyptique de 1972 Some Time Ago – La Fiesta. Un simple régal d’entendre les solutions nouvelles que trouve le pianiste face au parcours dansant et sinueux de sa plus célèbre espagnolade. Et un étonnement qui peut nourrir la réflexion, devant la symétrie offerte par cette soirée et dont je n’ai eu qu’un aperçu : deux visages complices mais différents du jazz dans sa relation au passé qui renforcent, s’il était possible, l’ombre d’un certain Miles Davis.

A suivre.


Mercredi 30 juillet


Chapiteau 21h : 

Christian Scott with special guest Isadora Scott

Ibrahim Maalouf « Illusions »

Astrada 21h30 :

Martin Tingvall Trio

Giovanni Mirabassi Trio with special guest Pascal Neveu




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Ce n’est pas très facile à imaginer, mais deux duos de jazz peuvent remplir le grand chapiteau de Marciac (près de 6000 places), et sans chanteuse… Ces deux-là, en tout cas, l’ont fait. Et pas grâce à la Dépêche du Midi, qui s’est tellement dépêché qu’elle a titré en une sur les « deux monstres sacrés du jazz » réunis à Marciac – Chick Corea et Stanley Clarke, le second apparaissant même sur une photo en compagnie d’un partenaire non identifié. Exit Herbie et Wayne pas même mentionnés en première partie : n’est pas monstre sacré qui veut ! La presse régionale préparerait t-elle le jazz à son effacement programmé du service public ?

 

Herbie Hancock & Wayne Shorter / Chick Corea & Stanley Clarke

Mardi 29 juillet, Chapiteau de Jazz in Marciac (32)


Revenons à la musique. Une introduction lunaire, presque raréfiée, soutenant une exploration modale pointilliste du soprano, a contraint en quelques minutes l’auditoire à une qualité de concentration et de silence rarement atteint dans un pareil espace. Là où on n’aurait pu s’attendre à entendre défiler un « répertoire » de compositions de l’un comme de l’autre, c’est sur le fil d’une improvisation permanente que s’est jouée la rencontre. Impressionnante palette dynamique et harmonique d’un côté, riche de toutes les nuances de la musique française du siècle passé, riche aussi par son art du silence. Intonation parfaitement imprévisible chez le saxophoniste, ici pointilliste voire hésitante, là plus confiante dans la plénitude du registre aigü. Au synthétiseur Korg, qui alternera dès lors avec le piano Fazioli ou s’y superposera, Hancock proposera rapidement à son partenaire d’inouïes textures difficiles à décrire sans verser dans l’accumulation de métaphores ou de références technologiques – du Synclavier cher à Zappa à des environnements pouvant rappeler les recherches menées à l’IRCAM dans les années 1980 et 1990. Herbie semble avoir conçu ses programmations pour faire jouer Wayne dans des contextes variés, lequel semble parfois, en creux, repoussé aux franges du silence, par le souffle ou par le cri. Il est impossible de donner à l’écrit la mesure de la richesse sonore qui s’est pourtant déployée avec une rare exigence en pareille situation. Jouant souvent sur la frustration accumulée en ce domaine, les deux musiciens n’en ont que mieux tiré parti des épisodes développant l’élément rythmique par la pulsation ou le groove. Il faudrait encore décrire la douce lumière dans laquelle a baigné la fin du programme, une forme de retour sur l’introduction qui a condensé la manière shortérienne de distendre et d’épuiser de très brefs motifs, sans jamais les dupliquer à l’identique, tendant toujours plus une perception qui ne peut jamais totalement distinguer le composé de l’improvisé. A de rares manifestations d’impatience près, auquel le pianiste a calmement répondu – « I simply want to explore for the rest of my life » – le public resté présent a répondu par une étonnante capacité d’écoute à l’exigence et au sens du risque qu’ont manifesté pour eux deux grands artistes.

Je devine la frustration du lecteur parvenu à ce stade de mon compte-rendu, mais voilà… J’ai dû quitter les lieux après seulement un quart d’heure du duo Corea/Clarke – en cause la violente migraine de mon fils Jean – dont l’entrée en matière m’a seulement permis d’imaginer la suite. Imaginer, c’est bien aussi, d’ailleurs (je ne résiste pas !) c’est l’anagramme de…migraine. En l’occurrence, le début de ce programme consacré à une relecture des Return to Forever a dévoilé une belle sonorité acoustique, ronde et équilibrée, et un évident plaisir de revisiter ensemble le dyptique de 1972 Some Time Ago – La Fiesta. Un simple régal d’entendre les solutions nouvelles que trouve le pianiste face au parcours dansant et sinueux de sa plus célèbre espagnolade. Et un étonnement qui peut nourrir la réflexion, devant la symétrie offerte par cette soirée et dont je n’ai eu qu’un aperçu : deux visages complices mais différents du jazz dans sa relation au passé qui renforcent, s’il était possible, l’ombre d’un certain Miles Davis.

A suivre.


Mercredi 30 juillet


Chapiteau 21h : 

Christian Scott with special guest Isadora Scott

Ibrahim Maalouf « Illusions »

Astrada 21h30 :

Martin Tingvall Trio

Giovanni Mirabassi Trio with special guest Pascal Neveu




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Ce n’est pas très facile à imaginer, mais deux duos de jazz peuvent remplir le grand chapiteau de Marciac (près de 6000 places), et sans chanteuse… Ces deux-là, en tout cas, l’ont fait. Et pas grâce à la Dépêche du Midi, qui s’est tellement dépêché qu’elle a titré en une sur les « deux monstres sacrés du jazz » réunis à Marciac – Chick Corea et Stanley Clarke, le second apparaissant même sur une photo en compagnie d’un partenaire non identifié. Exit Herbie et Wayne pas même mentionnés en première partie : n’est pas monstre sacré qui veut ! La presse régionale préparerait t-elle le jazz à son effacement programmé du service public ?

 

Herbie Hancock & Wayne Shorter / Chick Corea & Stanley Clarke

Mardi 29 juillet, Chapiteau de Jazz in Marciac (32)


Revenons à la musique. Une introduction lunaire, presque raréfiée, soutenant une exploration modale pointilliste du soprano, a contraint en quelques minutes l’auditoire à une qualité de concentration et de silence rarement atteint dans un pareil espace. Là où on n’aurait pu s’attendre à entendre défiler un « répertoire » de compositions de l’un comme de l’autre, c’est sur le fil d’une improvisation permanente que s’est jouée la rencontre. Impressionnante palette dynamique et harmonique d’un côté, riche de toutes les nuances de la musique française du siècle passé, riche aussi par son art du silence. Intonation parfaitement imprévisible chez le saxophoniste, ici pointilliste voire hésitante, là plus confiante dans la plénitude du registre aigü. Au synthétiseur Korg, qui alternera dès lors avec le piano Fazioli ou s’y superposera, Hancock proposera rapidement à son partenaire d’inouïes textures difficiles à décrire sans verser dans l’accumulation de métaphores ou de références technologiques – du Synclavier cher à Zappa à des environnements pouvant rappeler les recherches menées à l’IRCAM dans les années 1980 et 1990. Herbie semble avoir conçu ses programmations pour faire jouer Wayne dans des contextes variés, lequel semble parfois, en creux, repoussé aux franges du silence, par le souffle ou par le cri. Il est impossible de donner à l’écrit la mesure de la richesse sonore qui s’est pourtant déployée avec une rare exigence en pareille situation. Jouant souvent sur la frustration accumulée en ce domaine, les deux musiciens n’en ont que mieux tiré parti des épisodes développant l’élément rythmique par la pulsation ou le groove. Il faudrait encore décrire la douce lumière dans laquelle a baigné la fin du programme, une forme de retour sur l’introduction qui a condensé la manière shortérienne de distendre et d’épuiser de très brefs motifs, sans jamais les dupliquer à l’identique, tendant toujours plus une perception qui ne peut jamais totalement distinguer le composé de l’improvisé. A de rares manifestations d’impatience près, auquel le pianiste a calmement répondu – « I simply want to explore for the rest of my life » – le public resté présent a répondu par une étonnante capacité d’écoute à l’exigence et au sens du risque qu’ont manifesté pour eux deux grands artistes.

Je devine la frustration du lecteur parvenu à ce stade de mon compte-rendu, mais voilà… J’ai dû quitter les lieux après seulement un quart d’heure du duo Corea/Clarke – en cause la violente migraine de mon fils Jean – dont l’entrée en matière m’a seulement permis d’imaginer la suite. Imaginer, c’est bien aussi, d’ailleurs (je ne résiste pas !) c’est l’anagramme de…migraine. En l’occurrence, le début de ce programme consacré à une relecture des Return to Forever a dévoilé une belle sonorité acoustique, ronde et équilibrée, et un évident plaisir de revisiter ensemble le dyptique de 1972 Some Time Ago – La Fiesta. Un simple régal d’entendre les solutions nouvelles que trouve le pianiste face au parcours dansant et sinueux de sa plus célèbre espagnolade. Et un étonnement qui peut nourrir la réflexion, devant la symétrie offerte par cette soirée et dont je n’ai eu qu’un aperçu : deux visages complices mais différents du jazz dans sa relation au passé qui renforcent, s’il était possible, l’ombre d’un certain Miles Davis.

A suivre.


Mercredi 30 juillet


Chapiteau 21h : 

Christian Scott with special guest Isadora Scott

Ibrahim Maalouf « Illusions »

Astrada 21h30 :

Martin Tingvall Trio

Giovanni Mirabassi Trio with special guest Pascal Neveu




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Ce n’est pas très facile à imaginer, mais deux duos de jazz peuvent remplir le grand chapiteau de Marciac (près de 6000 places), et sans chanteuse… Ces deux-là, en tout cas, l’ont fait. Et pas grâce à la Dépêche du Midi, qui s’est tellement dépêché qu’elle a titré en une sur les « deux monstres sacrés du jazz » réunis à Marciac – Chick Corea et Stanley Clarke, le second apparaissant même sur une photo en compagnie d’un partenaire non identifié. Exit Herbie et Wayne pas même mentionnés en première partie : n’est pas monstre sacré qui veut ! La presse régionale préparerait t-elle le jazz à son effacement programmé du service public ?

 

Herbie Hancock & Wayne Shorter / Chick Corea & Stanley Clarke

Mardi 29 juillet, Chapiteau de Jazz in Marciac (32)


Revenons à la musique. Une introduction lunaire, presque raréfiée, soutenant une exploration modale pointilliste du soprano, a contraint en quelques minutes l’auditoire à une qualité de concentration et de silence rarement atteint dans un pareil espace. Là où on n’aurait pu s’attendre à entendre défiler un « répertoire » de compositions de l’un comme de l’autre, c’est sur le fil d’une improvisation permanente que s’est jouée la rencontre. Impressionnante palette dynamique et harmonique d’un côté, riche de toutes les nuances de la musique française du siècle passé, riche aussi par son art du silence. Intonation parfaitement imprévisible chez le saxophoniste, ici pointilliste voire hésitante, là plus confiante dans la plénitude du registre aigü. Au synthétiseur Korg, qui alternera dès lors avec le piano Fazioli ou s’y superposera, Hancock proposera rapidement à son partenaire d’inouïes textures difficiles à décrire sans verser dans l’accumulation de métaphores ou de références technologiques – du Synclavier cher à Zappa à des environnements pouvant rappeler les recherches menées à l’IRCAM dans les années 1980 et 1990. Herbie semble avoir conçu ses programmations pour faire jouer Wayne dans des contextes variés, lequel semble parfois, en creux, repoussé aux franges du silence, par le souffle ou par le cri. Il est impossible de donner à l’écrit la mesure de la richesse sonore qui s’est pourtant déployée avec une rare exigence en pareille situation. Jouant souvent sur la frustration accumulée en ce domaine, les deux musiciens n’en ont que mieux tiré parti des épisodes développant l’élément rythmique par la pulsation ou le groove. Il faudrait encore décrire la douce lumière dans laquelle a baigné la fin du programme, une forme de retour sur l’introduction qui a condensé la manière shortérienne de distendre et d’épuiser de très brefs motifs, sans jamais les dupliquer à l’identique, tendant toujours plus une perception qui ne peut jamais totalement distinguer le composé de l’improvisé. A de rares manifestations d’impatience près, auquel le pianiste a calmement répondu – « I simply want to explore for the rest of my life » – le public resté présent a répondu par une étonnante capacité d’écoute à l’exigence et au sens du risque qu’ont manifesté pour eux deux grands artistes.

Je devine la frustration du lecteur parvenu à ce stade de mon compte-rendu, mais voilà… J’ai dû quitter les lieux après seulement un quart d’heure du duo Corea/Clarke – en cause la violente migraine de mon fils Jean – dont l’entrée en matière m’a seulement permis d’imaginer la suite. Imaginer, c’est bien aussi, d’ailleurs (je ne résiste pas !) c’est l’anagramme de…migraine. En l’occurrence, le début de ce programme consacré à une relecture des Return to Forever a dévoilé une belle sonorité acoustique, ronde et équilibrée, et un évident plaisir de revisiter ensemble le dyptique de 1972 Some Time Ago – La Fiesta. Un simple régal d’entendre les solutions nouvelles que trouve le pianiste face au parcours dansant et sinueux de sa plus célèbre espagnolade. Et un étonnement qui peut nourrir la réflexion, devant la symétrie offerte par cette soirée et dont je n’ai eu qu’un aperçu : deux visages complices mais différents du jazz dans sa relation au passé qui renforcent, s’il était possible, l’ombre d’un certain Miles Davis.

A suivre.


Mercredi 30 juillet


Chapiteau 21h : 

Christian Scott with special guest Isadora Scott

Ibrahim Maalouf « Illusions »

Astrada 21h30 :

Martin Tingvall Trio

Giovanni Mirabassi Trio with special guest Pascal Neveu