Rue des Lombards : jazz à tous les étages - Jazz Magazine
Jazz live
Publié le 6 Déc 2025

Rue des Lombards : jazz à tous les étages

C’était hier : David Linx au Sunside dans un programme sud-américain inédit “Trama latina” et le trio d’Emmanuel Bex au Sunset avec Céline Bonacina en invitée. On les retrouvera ce soir, chacun pour un programme différent d’hier.

Au Sunside, à 19h30, la grandeur de David Linx, la silhouette immense et filiforme, mais surtout la voix, la projection, l’ambitus, la dynamique, le placement rythmique, l’imagination, la culture musicale et littéraire… Il prend son public comme il ouvre grand ses bras. Hier soir, répertoire sud-américian pas très connu de moi – Laurent Valéro survenu à côté de moi, saura m’apporter quelques lumières. Mais pas toutes, car Linx navigue large vers l’inattendu, de l’espagnol original à ses propres textes originaux an anglais, de l’argentin Astor Piazzolla au cubain Pablo Milanes, en passant par Hermeto Pascoal avec cet étrange, légendaire mais peu fréquenté, Nem Um Talvez* que Miles Davis reprit en 1970 au cours de deux chaotiques séances, pour lequel Linx a écrit ses propres paroles, et une sorte de valse rapide avec une mélodie acrobatique dont les paroles tout en croches gravissent et dévalent des montagne russes pour aboutir à un étrange et désertique plateau, textes de Linx sur la musique de Gustavo Beytelman (ce pianiste que l’on découvrait à Paris il y a quarante ans associé à Juan José Mosalini et Patrice Caratini). Et il faut saluer encore David Linx pour n’être pas tombé dans les facilités d’un programme “typique” et avoir su rester sur les hauteurs auxquelles il nous a habitués, en choisissant d’associer le piano et les arrangements chambristes de ce dernier à la trompette et au bugle de Paolo Fresu qui sait nous offrir la lune lorsqu’il ne s’encombre pas, ce qui lui arrive ici et là dans ce programme, d’artifices électroniques d’une modernité désuète. La veille, dans ce programme de trois soirées consécutives au Sunside imaginées et présentées par l’agente Juliette Poitrenaud, il chantait son disque “Real Man Cry” paru au printemps dernier, avec un personnel depuis quelque peu modifié : Leonardo Montana auprès d’Hermon Mehari, Jérôme Regard et Stéphane Galland. Ce soir, on retrouvera ce formidable duo avec Diederik Wissels que l’on découvrit en 1995 sur “Up Close” puis, trois ans plus tard “Bandarkha”.

Au sous-sol, à 20h30, l’historique Sunset accueillait le premier de deux soirs consacrés à Emmanuel Bex et ses deux “fistons”, le fils batteur (Tristan Bex) et le copain guitariste (Antonin Fresson). L’orgue Hammond se prête à la grandeur et Bex s’y plonge avec démesure y entrainant ses comparses réguliers et invité·es, ce soir Céline Bonacina (saxes baryton et soprano) qui n’a pas froid aux yeux pour donner la réplique à « l’ogre Hammond » tel que Bex sait le diaboliser ; demain le tromboniste Fidel Fourneyron qui contribua à la réussite du dernier disque de l’organiste, “Eddy m’a dit”. À noter, ce soir c’est Bex qui commence la soirée à 20h30 toujours au Sunset, le sous-sol réservée aux musiques amplifiées, Linx montant sur la scène du Sunside à 21h30.

Post-scriptum : hier au bar du Sunset, un visage que nous n’avions pas croisé depuis le début de ce siècle lorsqu’il avait abandonné le Duc des Lombards dont il avait pris possession en 1989 : Didier Nouyrigat. Histoires d’une rue à son âge d’or, au sens premier du terme. Franck Bergerot