Jazz live
Publié le 5 Juil 2025

Dexter Goldberg et Louise Akhili, l’entente parfaite

Une rencontre rare, fraîche, gracieuse entre deux pianistes : Dexter Goldberg (pianiste du versant jazz) et Louise Akhili (pianiste versant classique). Studio de l’Ermitage, 26 juin 2025

Ils s’aiment à la ville, ils ont décidé d’être ensemble aussi sur la scène. Cela donne un duo frais, spontané, inventif et joyeux qui vient de sortir son premier disque intitulé « Faits pour s’entendre ».

Le premier plaisir, quand on découvre ces deux instrumentistes de sphères si différentes, est celui des contrastes. Celui de Louise Akhili (interprète notamment de Ravel et d’Alexis Roland-Manuel dans un très beau disque sorti en 2021) est une merveille. On s’en rend compte dès le début du concert qu’elle entame par la Toccata de la Partita N°6 de Bach, dont elle fait se lever toutes les ombres. Elle applique ses doigts plus qu’elle ne les enfonce, avec beaucoup de décision dans la douceur. Dexter, bien connu des amateurs de jazz pour son travail en trio (voir son disque Caliboudja) est son exact contraire. Il reprend le même morceau avec son toucher si percussif, avec son sens du swing, des glissades capricieuses, des réminiscences (Caravan de Duke Ellington-Juan Tizol est tout près de ses doigts) et aussi quelques moments d’introspection. Ainsi s’organise la plus grande partie du concert: Louise joue un morceau du répertoire (Jeux d’eau de Ravel, la première Arabesque de Debussy) et Dexter en donne sa version jazzée. Mais Dexter ne se contente pas de jazzifier ces classiques du classique, il les réinvente, les décompose, les recompose avec autant d’humour que de conviction. Il y fait son nid. C’est ainsi que, après un magnifique et introspectif Jeux d’eau de Louise Akhili, Dexter Goldberg donne sa version du chef d’œuvre de Ravel avec Le chatouillement de l’eau. Belle et très délicate réussite. De temps en temps les deux musiciens se retrouvent pour des quatre mains. L’hommage à Satie, où vient s’incruster le Misterioso de Thelonious Monk est ravissant. Beaucoup de grâce, beaucoup de charme, mais aussi de la profondeur avec deux musiciens, Louise et Dexter, qui font mieux que s’entendre : ils s’écoutent.

Texte: JF Mondot

Photo: jean-François Carreau