Jazz live
Publié le 11 Mai 2019

JAZZ in ARLES 2019, Acte 2 : RÉMI GAUDILLAT-JEAN PHILIPPE VIRET

 

Seconde journée du prélude au festival, avant les concerts en soirée de la semaine suivante : le festival fait escale à la Médiathèque d’Arles, sise en l’Espace Van Gogh, dans l’ancien Hôtel-Dieu

DUO RÉMI GAUDILLAT – JEAN PHILIPPE VIRET

Rémi Gaudillat (trompette & bugle), Jean-Philippe Viret (contrebasse)

Arles, Médiathèque, 10 mai 2019, 18h

Dans une salle de lecture entourée de rayons chargés d’usuels, et baptisée ‘Café la nuit’, un peu moins de 100 places, pour un public où se mêlent esprits curieux et amateurs avérés. Les usuels sont nombreux et choisis, on y trouve même une édition récente du dictionnaire de Furetière. En attendant le début du concert, je me livre à mon test favori : dans le Trésor de la langue française, en 16 volume, je cherche assuétude, autre expression de l’addiction. Inconnu au bataillon. Pour avoir participé à des dictionnaires et encyclopédies, je sais qu’il n’existe pas d’ouvrage exhaustif. J’aurais pu tout aussi bien chercher gunophobie, mot inventé par Balzac….

Le concert commence. Le duo joue le répertoire de son disque «D’une aube à l’autre» (IMR/Muséa) publié l’an dernier. Même répertoire, mais enrichi des apports de l’instant présent : comme chacun sait, le jazz est une musique augmentée. Début en douceur, en percussions très ténues de l’archet sur les cordes. La trompette entre dans la danse, crescendo : c’est une sorte de tango sur un ostinato de la basse harmoniquement tendu. C’est riche et jouissif. Ça commence fort, c’est de bon augure, le public est attentif et sent que, si cette instrumentation et cette musique ne sont pas forcément pour lui des plus familières, il se passe quelque chose de fort. Le téléphone importun qui a sonné de manière intempestive n’a pas nuit à la concentration des musiciens et du public. Un remarque humoristique du trompettiste a suffi à détendre l’atmosphère. Vient ensuite un thème très segmenté, sorte de contrepoint ensauvagé de rythmes syncopés. La trompette me rappelle l’Histoire du soldat, de Stravinski. Puis ce sont trois thèmes inspirés par le Canto General de Pablo Neruda. La pièce centrale relève de ce que les italiens appellent tempo di jazz, rythme marqué, swing et tempo medium-fast. La musique est très libre, la basse divisant le temps à volonté, dans un mélange oxymorique de rigueur et de fantaisie. Voici des sons saturés de trompette, vers une fin ardente du troisième poème musical. Vient alors un hommage à Paul Motian et à son talent de coloriste, mélodie étrange jouée au bugle, qui ne déparerait pas dans l’univers compositionnel du batteur américain. Retour au tempo vif avec Petite Danse, qui me rappelle à la fois Ornette Coleman et Don Cherry. Puis après Rien en face, qui se termine par un très beau contrechant de la basse à l’archet, c’est le thème conclusif, danse mélancolique du bugle sur une jeu subtil d’harmoniques par la contrebasse. Belle cohésion du duo, très beau concert salué avec enthousiasme par le public, chroniqueur inclus. La semaine prochaine mes camarades du Sud prendront le relais pour vous narrer d’autres soirées arlésiennes.

Xavier Prévost

Détail du programme à venir ci-dessous

http://www.lemejan.com/24e-jazz-in-arles-e-1435.htm