Installé pour deux soirs au Pavillon de la Sirène à Paris 14e, l’Orchestre des Jeunes 3ème édition – que l’on retrouvera ce soir 13 juillet pour une restitution de l’Académie de composition de l’ONJ – et son chef Claude Barthélémy donnaient leur dernier concert.

J’ose affirmer que j’ai entendu là, sur un pot-pourri des répertoires qu’il dirigea par le passé à la tête de l’ONJ, le meilleurs des concerts en grande formation dirigés par Claude Barthélémy, auxquels il m’ait été donné d’assister. Il est vrai que j’ai beaucoup boudé les éditions 1989-1990 et 2002-2005 donnés par celui qui était alors l’enfant gâté d’un réseau associatif qui avait la main sur ce qu’il qualifiait d’innovant au point d’ignorer ou dédaigner de larges pans de l’actualité du jazz français de l’époque.

Or, l’enfant gâté hier, c’était les jeunes de cet Orchestre des Jeunes tournant, conçu par Fred Maurin pour passer sous la direction tournante d’anciens chefs de l’ONJ. Il y avait une forme de tendresse dans le don que Barthélémy a fait à ces jeunes musiciens de son répertoire qu’ils lui restituèrent magnifiés. Certes, je n’ai pas oublié les éclats fous du premier album de l’ONJ 1989-1990, notamment tels que je les avais reçus à Jazz sous les Pommiers au début de son premier exercice. Mais les anciens répertoires du guitariste-chef, semblent avoir vieilli comme un vin de garde, comme un bel assemblage des trois crûs de l’ONJ-Barthélémy, des répertoires qui nous laissaient le souvenir de démentiels kaléidoscopes ici devenus, pour poursuivre dans la facilité métaphorique, de somptueux assemblages, somptueux non par la noblesse des arômes, mais par ce mélange d’excitation des papilles et d’ivresse qui après tout sont bien les deux objectifs recherchés par les amateurs de vieux flacons. Assemblage ? Du blues façon Jef Beck à la collective néo-orléanaise, de Brahms (c’est le chef qui le dit, n’ayant moi aucune compétence dans ce domaine) au bebop, des Balkans à Charlie Parker (ses premières notes sur Parker’s Mood soudain citées), du Coltrane de Giant Steps au funk, avec quelque chose de Frank Zappa dans cet art encyclopédique.

Autant d’occasion de magnifier les talents prometteurs réunis au sein de ce troisième Orchestre des jeunes, parmi lesquels se glissait, en remplaçante, la tromboniste Jessica Simon, qui a déjà son pupitre au sein de l’ONJ de Fred Maurin. J’ose à peine citer les autres, parce qu’il faudrait les mentionner tous (voir ci-dessous), mais l’expérience d’un orchestre des jeunes, c’est aussi faire l’expérience de l’injustice et de la mauvaise foi de la critique. Privilégions donc quatre noms que nous gardons dores et déjà en mémoire pour leurs solos : les trompettistes Dmitriy Loginov et Johannes Knoll, la tubiste (joueuse d’euphonium pour être exact, le ténor de la famille des tubas) Amélie Ratle et les deux saxophonistes : Liam Szymonik (alto) et Pierre Carbonneaux (ténor)… J’aimerais encore citer la contrebassiste Léna Aubert, dont la singularité m’avait laissé circonspect dans mes comptes rendus de Respire Jazz 2023 où elle présentait sa propre formation, mais qui m’avait suffisamment intrigué pour que j’en garde le souvenir, avec quelque chose dans le son et le jeu m’évoquant Charlie Haden, et autre chose encore qui n’appartient qu’à elle et que l’on a hâte de voir s’épanouir, comme s’était déjà le cas hier… jusqu’au moment où je réalisai que certaines de ces parties de basse étaient doublées par la bassiste électrique Joana Lazzarotto qui dégagea sur certains morceaux une appétente singularité, le tout en formidable intelligence avec le batteur Loup Godfroy.

Nous les retrouverons tous ce soir 13 juillet au même endroit, au Pavillon de la Sirène, 20 rue Dareau, près de Denfert-Rochereau. Quant à Claude Barthélémy, en guise d’adieu, il émit le vœu, teinté d’une sincère émotion, “de s’en faire des amis”. Franck Bergerot

Claude Barthélémy (oud et guitare électrique, direction) avec Dmitriy Loginov, Johannes Knoll (trompette), Gaspard Moglia, Jessica Simon (trombone), Amélie Ratle (euphonium), Liam Szymonik (saxes alto et sopranino), Pierre Carbonneaux (saxes ténor et soprano), Selma Benlarbi (accordéon), Lélo Laurent (vibraphone), Raphaël Gautier (guitare électrique), Joana Lazzarotto (basse électrique), Léna Aubert (contrebasse), Loup Godfroy (batterie)… et le sonorisateur de cet Orchestre des jeunes : Tom Fougedoire.

Les peupliers du bord de l’Ill, les trios de Samuel Blaser et Andreas Schaerer, l’Ex Machina de Steve Lehmann et Frédéric Maurin avec l’ONJ ! Tout l’or de Jazzdor

Daniel Filipacchi, m’a-t-on rapporté lorsque je suis entré à Jazz Magazine, disait : “Mieux vaut un journal qui sort à l’heure avec des coquilles qu’un journal sans coquille qui sort après l’actualité. » C’est une réalité que j’ai souvent éprouvée en publiant mes comptes rendus de concert dans la nuit ou au petit matin du jour suivant. J’ai terminé et publié le papier ci-dessous sur les chapeaux de roue ce 12 novembre vers 14h pour me rendre coudes aux corps sans avoir déjeuné au premier concert de la journée dont vous trouverez le compte rendu au cours de cette nouvelle journée du 13 qui commence. Entre temps, j’ai pris le temps de corriger quelques coquilles et bévues dans le papier ci-desous dans une nouvelle version retouchée à 0h57 puis à nouveau à 7h avant de me rendre à la masterclass de Samuel Blaser, au risque de nouvelles bévues et coquilles, chaque relecture m’amenant souvent plus à récrire et compléter qu’à corriger.

15h : dans la belle acoustique d’une grande salle de répétition d’orchestre du Conservatoire de Strasbourg, Samuel Blaser – pour faire court –, en fait une identité tricéphale, Triple Dip, dont Samuel Blaser est le tromboniste, Billy Mintz le batteur, Russ Lossing le pianiste. Russ Lossing d’abord, une note énorme, profonde, une profondeur d’où tout va surgir et s’épanouir, comme au début de la Sonate en si mineur de Liszt. Lossing connaît probablement son Liszt, mais il en connaît bien d’autres et s’il faut lui supposer quelque héritage pianistique, il se s’arrête certainement pas aux gracieusetés que le piano jazz retient trop souvent de Ravel et Debussy. On pense à Bartok, Messiaen, Stockhausen… On pense aussi à Ran Blake pour l’angularité parfois brutale, à Paul Bley pour cette façon de faire sonner les entrailles du piano aux frontières du lyrisme et de l’abstraction.

Par quel hasard, quelle intuition, quelle préméditation, quelle télépathie le trombone jouera-t-il sa première note pile sur telle note finale d’un long développement solo du piano? Le grain du son, la palette timbrale, la virtuosité combinée des lèvres et de la coulisse, le vieil héritage ellingtonien qui le place au juste milieu entre la souplesse de Lawrence Brown et son trombone-violoncelle et l’expressivité fauve de Tricky Sam Nanton, ses growls et ses wha wha. Mais c’était au siècle dernier, et Samuel Blaser joue l’aujourd’hui, un aujourd’hui enraciné mais sans effet “photo souvenir” (et quand il s’y livre, c’est du côté de ses vieille amours pour Don Drummond, le tromboniste du ska, mais au sein de ce Triple Dip, il n’en laisse rien paraître).

Ping ! Nouvelle coïncidence ou transmission de pensée : c’est Billy Mintz qui fait son entrée sur un accent qu’ils ont pensé tous trois au même endroit sans concertation apparente. Billy qui ? Mintz, 76 ans, une carrière aussi bien remplie qu’elle est discrète, de Lee Konitz à Vinny Golia, d’Eddie Daniels à Perry Robinson, de Gloria Gaynor à Mark Murphy. On n’avait pas encore remarqué sa présence, un peu ronchon côté cour, l’œil clos. Ou peut-être seulement demi-clos, le regard aux aguets sous la paupière, le pavillon auriculaire déployé. Il fait penser à ce bruiteur que j’avais croisé dans le studio d’une dramatique radiophonique, arrivé en blouse grise avec un seau d’eau pour faire la mer, quelques ustensiles pour l’agiter, et d’autres pour simuler une porte que l’on ferme, que l’on frappe, que l’on cloue ou qui grince. On oublie sa batterie, on pense au seau; on oublie en tout cas ce que la batterie peut avoir de gracieux sous les frappes de Jo Jones ou Max Roach. La caisse claire est méchamment timbrée – il saura la détimbrer si nécessaire – la charleston demi-fermée ferraille, les balais utilisés comme cette collection de brosse que trimballait avec lui mon bruiteur. Ça me rappelle Sam Woodyard “clouant des planches” sur ce prodigieux Summertime de Duke Ellington (“Piano in the Foreground”) qui aurait pu servir de B.O. aux premières pages de Tandis que j’agonise de Williams Faulkner et ça colle à la perfection avec les côtés Ran Blake du piano de Russ Lossing. Et lorsque soudain, le swing apparaît dans le cours du concert, soutenu à la main gauche du piano d’une authentique walking bass, Mintz tire un merveilleux tapis de balais sur la caisse claire, ou fait admirablement dialoguer celle-ci avec le chabada alerte et un peu farceur de sa charleston, tardant à faire entrer la grosse caisse dans la danse avant de se livrer à un authentique solo de batterie.

Le reste du temps peut-on parler de solos. Et comment s’y prennent-ils pour se retrouver ensemble constamment dans ces dédales où ils s’aventurent. Ces dédales ? Des lignes rythmico-mélodiques plus ou moins longues, évoquant les lignes brisées de l’Anthony Braxton des années 1970, qui semblent s’allonger et se développer au fil des reprises, parfois de courtes formules mais qui pourraient bien provenir de compostions plus longues. Déjà jouées dans leur entièreté ? Une impression de déjà entendu que Blaser me confirmera après le concert, des fragments de partitions pouvant se mêler à des morceaux dont elles sont étrangères. Fragments constamment transfigurés par des changements de couleurs, de tempo, de phrasé… Avec toujours cet ensemble dont on ne sait toujours pas s’il relève de l’intuition, de l’anticipation, de la télépathie ou d’un scénario précis, appris par cœur, sans une partition visible sur scène (ça n’est jamais que leur cinquième concert sur ce programme). Une chose me sera confirmée plus tard : pas de scénario pré-établi. Tout peut arriver.

Et de ces dédales où ils nous entrainent derrière eux, on sort émerveillés. On rappellera le trio deux fois, dont la reprise de Love Song From Apache (la chanson d’amour du film Apache de 1954, composée par David Raskin et reprise en 1962 par Coleman Hawkins avec Tommy Flannagan sur “Today and Now”). Émerveillement que l’on poursuivra sur disque avec la sortie sur le label du festival, les Jazzdor Series, “Roundabout / Triple Dip”, deux groupes en un : le duo Blaser/Lossing et le trio Triple Dip.

20h30 : sur la scène de la grande salle de concerts, le chanteur suisse Andreas Schaerer (révélé dans les années 2010 avec le sextette Hildegard Lernt Fliegen) présente son nouveau programme “Evolution” avec un vieux complice, le guitariste finlandais Kalle Kalima, et le contrebassiste-bassiste électrique américain Tim Lefèbvre qui du haut de sa réputation acquise auprès de personnalités aussi diverses et prestigieuses que David Bowie, Wayne Krantz ou Donny McCaslin, s’implique corps et âme dans ce “tour de chant”. Car il s’agit de chansons, de chansons pop, affranchies cependant des formats orchestraux conventionnels, osant le dynamisme et les contours grossièrement ébarbés proposés par ces deux comparses, plus acteurs de plein droit qu’accompagnateurs, chansons portées par une voix à la virtuosité jamais gratuite, polymorphe, aux possibilités extrêmes. À retrouver ce mardi 14 novembre à D’jazz Nevers, et le 15 à Paris au Studio de l’Ermitage.

22h : sur la même scène, l’ONJ dans le programme conçu par Frédéric Maurin (direction compositions) avec Steve Lehmann (sax alto, compositions) et l’informaticien de l’Ircam Serge Lemouton, plus le personnel de cet ONJ à géométrie variable : Jonathan Finlayson et Fabien Norbert (trompette), Christiane Bopp et Robinson Khoury, ce dernier remplaçant au pied levé Daniel Zimmermann (trombone), Fanny Meteier (tuba), Fanny Ménégoz (flûtes), Catherine Delaunay (clarinette, cor de basset), Julien Soro (sax ténor, clarinette), Fabien Debellefontaine (flûte, clarinette, saxophone baryton), Stéphan Caracci (marimba, vibraphone, glockenspiel), Chris Dingman (vibraphone), Bruno Ruder (piano, synthétiseur), Sarah Murcia (contrebasse), Rafaël Koerner (batterie). Un début de concert très affecté par une panne de sonorisation. Elle nous a privé de la lisibilité des vents qui d’emblée sur le disque déploie la splendeur de cette extraordinaire palette orchestrale, et en particulier de la section d’anches à un moment où Steve Lehmann est en première ligne et à cet autre où il se livre à une chase haletante avec Julien Soro dont témoigne le disque. On n’en portera que mieux son attention sur la première soliste de l’orchestre après Lehmann, la grande contrebassiste Sarah Murcia, sur le formidable pupitres de xylo-vibraphone (Caracci et Dingman), sur le solo Bruno Ruder qu’il ne jouerait pas plus intensément si l’on venait de lui apprendre que c’est le dernier de sa vie, et sur l’élégance permanente de la frappe de Rafaël Koerner dans ce parcours rythmique et formel semé d’embûches.

Par chance, les choses sont revenues à la normale et l’on put jouir de la diversité des textures où les timbres acoustiques se mêlent aux écritures préalables et aux réactions de l’informatique selon un double dispositif que notre confrère Nicolas Dourlhès de Citizen Jazz a très bien dans un rapport d’entretien très éclairant avec Jérôme Nika, concepteur dans le cadre de l’Ircam du logiciel de traitement du son baptisé Dicy2. Les deux moments les plus spectaculaire, et totalement assumés, de cette rencontre entre la machine et l’instrument traditionnel auront été les entrées de morceaux confiées à Christiane Bopp et Fanny Ménégoz. Si j’avais déjà remarqué la pertinence de cette dernière lors de la répétition générale avant création le 11 février 2022 , je me prête à citer les propos de Jérôme Nika relevés par Dourlhès :

« Je me souviens de Fanny Ménégoz qui a compris très vite, et de manière non formalisée, comment jouer pour amener le système à ralentir le tempo afin d’initier la séquence orchestrale suivante. De toutes manières, le logiciel dépend à la fois du musicien qui capte le type de jeu qui va amener dans telle direction et de la personne qui le paramètre (en l’occurrence Steve Lehman, Frédéric Maurin, Dionysios Papanikolaou, ingénieur du son en live – en l’occurrence, à Strasbourg, Serge Lemouton – ou moi). C’est nous qui indiquons le comportement que le logiciel doit avoir. En soi, il ne prend des décisions locales que parce qu’on lui a demandé d’avoir tel comportement. Mal nourri, il ne donnera rien. »

”Coup de bluff ? Se conjuguent ici les aspirations de longue date de Steve Lehman et Frédéric Maurin. Pour ce dernier qui a su faire de l’ONJ un outil orchestral à la disposition d’autres compositeurs, bâtir un répertoire largement ouvert et élargir les missions de l’institution à travers notamment la création d’un Orchestre des jeunes destiné à rejouer le répertoire français “historique” selon un bel échange intergénérationnel, Ex Machina est tout à la fois l’œuvre maîtresse de son ONJ et l’aboutissement d’un travail commencé au début du siècle avec Ping Machine et qui l’a conduit non à s’emparer du gadget électro pour une vaine gesticulation, mais à approcher patiemment de ce double objectif consistant à interagir avec la machine et à pénétrer au cœur du son, sur les pas des pionniers de la musique spectrale, Gérard Grisey et Tristan Murail ; démarche où l’avait précédé Lehman qui a étudié avec ce dernier à la Columbia University et qui a expérimenté dans ce domaine avec “Travail, Transformation and Flow” (2009, avec déjà Jonathan Finlayson et Chris Dingman) et “Mise en Abîme“ (2014). Et cette matière vibratile, conflictuelle et diaprée, Ex Machina réussit à la mettre en mouvement, en musique. Ce que fera l’ONJ encore ces jeudi et vendredi prochains au Petit Faucheux de Tours, après avoir joué le 10 à Vincennes… et c’est tout!

Jazzdor aura été le seul festival français à programmer Ex Machina. En pleine tendance “electro”, en plein questionnement sur l’intelligence artificielle (ce à quoi Jérôme Nika n’aspire d’ailleurs absolument pas, voir l’article de Dourlhès, l’enjeu étant ailleurs), l’indifférence qui aura accompagné ce projet, tant parmi les organisateurs que dans les médias (en France, voir l’accueil enthousiaste de Downbeat aux États-Unis, et les concerts programmés hors de l’Hexagone) participe de la grande aberration du monde contemporain. En cette époque où, comme le chantait Andreas Schaerer, l’être humain est sensé être capable de surveiller les cours de la bourse sur son portable tout en téléphonant et en tendant sa carte bleue à la serveuse du supermarché, la part de cerveau disponible pour l’écoute musicale n’est peut-être plus suffisante pour accueillir autre chose qu’un couplet-refrain, calibré par le métronome d’une grosse caisse, des mélodies et des harmonies élémentaires. Du moins les organisateurs et les médias, l’œil sur la billetterie et l’audimat, se sont-ils épargné tout effort d’imagination. Franck Bergerot“

Ce soir, ouverture du festival Jazzdor avec Bill Frisel. « Dernières places », annonce le site. Foncez! On vous raconte demain.

La première fois que je suis venu à Strasbourg, il y a une soixantaine d’années, j’avais été conduit là de Cologne où mes parents séjournaient, pour prendre un train et rejoindre un camp de louveteaux, lorsque mes parent réalisèrent, sur le quai de la gare de Strasbourg, que j’étais en pantoufles, l’un des premiers témoignages d’une distraction endémique qui a laissé quelques souvenirs dans les bureaux de Jazz Magazine et vaut encore aux lecteurs de ces pages quelques coquilles plus ou moins pitoyables plus ou moins savoureuses.

La deuxième fois, c’était il y a bientôt vingt ans. À la nouvelle de la reformation du quartette Quest (David Liebman, Richard Beirach, Ron McClure, Billy Hart), Martine Palmé et moi-même avions sauté dans la voiture du saxophone Éric Séva pour aller l’entendre à Strasbourg où Philippe Ochem, avait voulu avoir la primeur de cette renaissance.

Puis, les bouclages des numéros de Jazz Magazine étant peu propices à courir les festivals, je m’étais contenté de relire avec envie les programmes de Jazzdor sur la maquette des pages concerts du numéro de novembre. J’y trouvais beaucoup de ce que j’ai aimé sur les scènes de ces vingt dernières années et, lorsque j’ai pris ma retraite, si une fidélité ancienne m’a attiré à D’Jazz Nevers, programmé à la même période, il me fallait aller voir ce qui se passe sur les bords du Rhin. Ce que je fais cet automne, à compter de ce soir 10 novembre jusqu’au 15 où je prendrai train et autocar pour me rendre à D’Jazz Nevers.

Avant de quitter mon domicile ce matin, j’ai ressorti le numéro de Jazz Magazine  576 décembre 2006 – je travaillais encore à l’époque à Jazzman – pour relire dans le train Paris-Strasbourg, le portrait qu’avait brossé Robert Latxague de Philippe Ochem dans sa rubrique patron de Festival. Y était rappelé la vocation initiale du “patron”, pianiste se produisant à l’époque avec Jean-Michel Foltz et Michele Rabia. On sent chez ce programmateur-musicien, qui dirigea un club très actif à Strasboug (le Lazy Bird) avant de créer le festival en 1989, cette proximité avec l’actualité musicale que lui confère cette double casquette, que j’ai pu renifler lors du festival hors les murs, Jazzdor à Budapest au printemps dernier, que j’avais devinée à cette enthousiasme avec lequel il avait programmé le retour de Quest. Loin des choix idéologiques, au plus près du geste musical, avec un gourmandise qui donne faim. Et voici le menu qui m’attend dès ce soir, le trio de Bill Frisell avec Thomas Morgan et Rudy Royston; dès demain, le trio de Samuel Blaser, Russ Lossing et Billy Mintz, suivi du programme Ex Machina de Steve Lehmann et Fred Maurin à la tête de l’ONJ. Et pour ces trois formations, je serais venu à Strasbourg même en pantoufles. Franck Bergerot