Valentin Ceccaldi : « Bonbon Flamme a des influences très larges »
Photo : Istvan Huszti / Tricollectif.com
Le violoncelliste a imaginé un groupe pour qui contrastes et libre expression ne sont pas de vains mots. Rencontre à l’occasion de leur concert à la Dynamo de Banlieues Bleues dans le cadre du dispositif Jazz With, dont c’est la deuxième édition cette année.
Comment a commencé l’aventure de Bonbon Flamme ?
Le groupe est né à l’été 2022 avec l’idée regrouper trois musiciens que j’avais rencontrés dans diverses aventures en Europe les années précédentes : Étienne Ziemniak à la batterie, qui habite à Tour, Fulco Ottervanger aux claviers et au chant, qui lui est néerlandais et habite à Gaand en Belgique, et Luis Lopes, un guitariste portugais, qui habite à Lisbonne. Chez chacun d’eux je sentais un feu, une énergie très spéciale, très généreuse et solaire, avec une vision très ouverte de la musique. Tous sont de grands mangeurs de musique, et ce sont des personnalités qui m’ont marqué, comme l’intensité dans leur jeu, leur façon de faire corps avec leur instrument. Certains ont presque des chorégraphies, même si rien n’est calculé. Le concept du groupe était un peu déjà dans le nom : Bonbon Flamme mêle cette intensité brute, brûlante, celle d’un free jazz qu’on aime tous les quatre, extrême dans notre façon de saturer l’espace de son, et puis ce côté bonbon, sucré, avec des mélodies minimalistes, naïves, voire parfois enfantines. On s’est réunis la première fois en Autriche dans un festival qui s’appelle Bezau Beatz, très ouvert esthétiquement, dans un hangar à côté d’une magnifique locomotive à vapeur. J’avais apporté une partition remplie de dessins et tout un scénario qu’on devait suivre, quelques mélodies qui s’inséraient ici et là dans cette grande pièce ininterrompue tout en contrastes. Depuis on a enregistré deux albums dont le dernier pour le label BMC, à Budapest, qui a un peu été notre maison ces dernières années.
On entend souvent dire que les collaborations musicales internationales sont rares et difficiles. Qu’en pensez-vous ?
C’est compliqué, ça coûte cher, notamment parce qu’on n’a pas de grandes périodes de tournée. C’est aussi parce que la musique a sa singularité et ne rentre pas partout, et il y a pour les programmateurs une contrainte de renouvellement permanent de leur offre. On se retrouve donc des fois pour un festival ici, 3 mois plus tard pour 3 jours de plus ailleurs, évidemment c’est une difficulté. Pour l’évolution de la musique comme pour l’écologie, ce serait super de pouvoir rester plus longtemps au même endroit. Les groupes qui durent ne sont pas très valorisés mais ça crée des choses qui sont impossibles avec des formations créées sur le moment. J’adore faire des rencontres mais quand quelque chose fonctionne avec des gens, j’ai envie que ça continue et de développer cette affinité. Jazz With est super pour ça, pour que quand on se retrouve ça dure plus longtemps qu’une journée. Cette rareté génère aussi une grande excitation pour nous, à chaque fois il y a l’enjeu de refaire notre musique, assez improvisée mais en même temps très structurée, ce qui sans se voir régulièrement n’est pas simple. Mais avec les années, on se connaît de mieux en mieux, les choses deviennent plus faciles.
Selon vous, y a-t-il quelque chose d’”européen” dans votre musique ?
Je pense qu’on ne pourrait pas faire cette musique aux États-Unis, à part peut-être dans le rock indé où on trouve des choses un peu plus “délirantes” disons. Le côté européen vient de Luis Lopes qui vit à Lisbonne où on trouve une scène de musiques improvisées très dynamique, peut-être moins attachée au jazz et au blues afro-américains qu’on a beaucoup écouté, notamment du free qui marqué par cette urgence. La marque de l’Europe, et de la France en particulier, ce sont aussi les résidences précieuses dont on a bénéficié, qui permettent d’autres façons de travailler. Musicalement, même si nos influences sont très larges, il y a des choses qui viennent parfois de compositeurs comme Claude Debussy ou Igor Stravinsky, peut-être même que ça réside dans l’enseignement qu’on a reçu avec une certaine proximité aux musiques dites “savantes”. Mais on vit à une belle époque pour découvrir de la musique, on a accès à beaucoup de choses, on peut s’y perdre mais aussi s’y trouver ! Au micro : Yazid Kouloughli
A écouter Bonbon Flamme “Cavaleras y Boom Boom Chupitos” (BMC Records)