Festival Radio France Occitanie Montpellier : Alexandra Grimal, Besson-Moussay-Burgwinkel & Poets of Forest

Soirée riche en contrastes, avec à 18h30 Alexandra Grimal en solo, et à 20h30 un trio rassemblé autour d’Airelle Besson, puis le groupe suscité par le batteur Arnaud Dolmen

ALEXANDRA GRIMAL solo
Alexandra Grimal (saxophones soprano & sopranino, nōkan, voix)
Montpellier, Musée Fabre, 11 juillet 2025, 18h30

Le concert se tient dans la salle du musée consacrée aux peintures de Pierre Soulages. La musicienne nous présente, en création, une œuvre inspirée par les jardins japonais. Au soprano, puis au sopranino et au nōkan (flûte traditionnelle liée au théâtre Nô), elle construit pas à pas un univers singulier devant un public probablement surpris, mais très réceptif. Des modes de jeu extrêmes (harmoniques inouïes, surgissement de sonorités nées du silence….), et une sorte de rituel qui sied à l’univers évoqué. Sa voix parfois alterne, comme en écho, ou même se superpose, car elle chante dans le bec du saxophone. L’auditeur que je suis est ignare quant aux jardins japonais, mais j’entends là comme la rencontre de la matière (le sol, les arbres, plantes et fleurs) et de l’abstraction formelle à quoi l’art du jardin, comme de la musique, ne saurait échapper. Le caractère concret des sons se conjugue, dans la musique, avec les contours de la forme. C’est une sorte d’abstraction sensuelle. C’est ce que je ressens. Comme lorsque j’écoute Bach : l’art du contrepoint dépasse mes compétences de mélomane de base, mais la musique parle directement à mes sens, comme si l’émotion était directement reliée à cette forme dont la subtilité parfois m’échappe. Comme, je crois, beaucoup des personnes présentes, c’est cela que j’ai éprouvé en écoutant le solo d‘Alexandra Grimal

BESSON – MOUSSAY – BURGWINKEL
Airelle Besson (trompette), Benjamin Moussay (piano, piano électrique, synthétiseur basse), Jonas Burgwinkel (batterie & petites percussions)
Montpellier, Théâtre de l’Agora, 11 juillet 2025, 20h30

Le pianiste régulier du groupe, Sebastian Sternal, a été retenu en Allemagne par une urgence familiale. Il est remplacé au pied levé par Benjamin Moussay. Ils sont l’un et l’autre pour la trompettiste des partenaires familiers ; et ils ont tous deux, à 12 ans d’intervalles, figuré en bonne place au palmarès du concours international de piano jazz Martial Solal. La musique est celle de l’album ‘Surprise !’, publié à l’automne dernier. La trompette ouvre seule ; elle sonne un peu comme un bugle : c’est rond, charnu. Et le trio se complète. La musique est riche de mille détails subtils, tissée aussi de vigueur incisive. Certaines compositions, de la plume du pianiste absent, redoublent ce caractère anguleux, sur quoi Benjamin Moussay manifestement jubile. Puis lors d’un thème qui est un miracle de mélancolie, un avion (un hélicoptère ?) passe à basse altitude. Airelle Besson développe instantanément une improvisation foisonnante pour effacer l’importun ; miracle du jazz : dans le mouvement lent d’un concerto de Mozart, on pourrait difficilement faire de même…. La trompettiste peaufine, sans oublier l’inspiration et l’expressivité. Le batteur circule sans entraves, du ténu à l’explosif : Plaisir manifeste des artistes, et le public se régale. En rappel viendra un thème qui, me semble-t-il, ouvrait l’album : Time To Say Goodbye. Idéal pour conclure !

POETS OF FOREST
Arnaud Dolmen (batterie, voix), Michel Alibo (contrebasse, voix), Jowee Omicil (saxophones alto et soprano, clarinette basse, piccolo, voix)
Montpellier, Théâtre de l’Agora, 11 juillet 2025, 22h
Sous l’impulsion du batteur, la réunion de trois fortes personnalités musicales de l’Arc caribéen. Une musique qui semble sourdre des murmures de la forêt tropicale pour s’épanouir dans l’effervescence d’un jouage très interactif. J’avais récemment écouté Arnaud Dolmen et Miche Alibo dans le trio de Mario Canonge. Les retrouver dans ce groupe qui vient de publier un disque est un vrai plaisir. Jowee Omicil nous la joue vif-argent, envoyant des phrases comme des salves, en conjuguant musique et divertissement. Ça chauffe, ça étincelle, et même si le chenu chroniqueur ne s’exécute pas aux injonctions de frapper dans les mains, son for intérieur vibre de ces rythmes vertigineux, dans lesquels le batteur et le bassiste excellent ; et il partage intensément le plaisir collectif. Chaude et belle fin de soirée.
Xavier Prévost
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Les deux partie du concert du Théâtre de l’Agora seront diffusées le dimanche 10 août à 20h sur France Musique.
