Jazz live
Publié le 21 Juil 2025

Hernani: Bascolombia sculpte ses notes chez Chillida

Bascolombia  : Oreka T.X: Harkaitz Mtez de San Vicente ( txalaparta bois, pierre, bambou), Mikel Ugarte (txalaparta bois, pierre, bambous), Michel Ducau ( ss, alboka fl), Angel Unzu (g) + Phonoclórica: Leonel Merchán (marimba, elb voc), Leonardo Peña (perc), Isabel Reyes (voc, perc)

Chilida Leku; Hernani (Guipuzcoa, Euskadi, Espagne), 19 juillet

Chillida Leku est un musée de forme originale, consacré à l’oeuvre du sculpteur basque Eduardo Chillida (1924-2002) spécialiste des oeuvres monumentales. Un lieu abrité d’abord destiné aux oeuvres de petit gabarit: une ferme restaurée dans un grand parc, à Hernani, à l’ouest de San Sebastian. Plus un vaste espace ouvert sur plusieurs hectares peuplé de sculptures de métal, de pierres et autres matières agrégées diverses. De par la grande taille de certaines de ses ouvres Gaston Bachelard avait sur nommé le sculpteur né à San Sebastian -lequel  avait paradoxalement commencé sa carrière comme footballeur, gardien de but dans l’équipe locale de la Real Sociedad !- : « Le forgeron » .Dans le cadre d’un tel décor totalement ouvert sur une nature vive, verdure, troncs, feuillages, les grosses pièces de fer nées de l’inspiration originale du sculpteur basque mondialement reconnu ont paru accueillir sur scène en cette soirée lumineuse de juillet celles d’une musique de fusion tout aussi naturellement travaillée. Soit une série de tableaux sonores aptes à illustrer ces monuments de métal plantés là dans cet espace  habituellement plongé en un silence absolu.

En préambule à Jazzaldia, 60e anniversaire du Festival de Jazz de San Sebastian le groupe basque Oreka TX et le trio colombien Phonolcórica ont décidé de travailler ensemble à un projet fusionnel appelé » Bascolombia » Motivés et unis par leur attrait pour leurs racines rplongeant dans les musiques traditionnelles de leurs terres respectives, par un mêê souci d’utiliser des instruments originels autant qu’originaux. De par la volonté d’ouvrir ces musiques et chants aux sonorités contemporaines. Et à l’improvisation.

Oreka TX (Euskadi)

Un travail que l’on perçoit de prime abord essentiellement d’ordre rythmique effectué sur des lames, des planches, des lattes, des peaux,…on ne sait trop comment les caractériser précisément. Le marimba « de la côte colombienne pacifique », les congas traces d’Afrique,  les « planches »  de pierres et de bois de la txalaparta, instrument emblématique du Pays Basque…Tous ces instruments de percussions  prennent possession du tempo en croisant leurs lignes rythmiques sous les frappes diverses, mains nues, baguettes, petits rondins… La flûte de bois, sonorité claire, accroche les notes de la mélodie. Leonel Merchán, leader du trio sud américain justifie la démarche  collective auprès d’un public local que l’on sent curieux de découvrir : « Nous sommes le véhicule et le support de musiques de nos ancêtres colombiens. Nous venons ici à la rencontre des musiques basques avec en symbole mon marmba typique de notre côte Pacifique,  et votre txalaparta, deux instruments géniteurs de rythmes riches »

Phonoclórica (Colombia)

Il s’agit bien effectivement d’une question de matière: la pierre et le bois construisent ensemble une architecture de musiques, un tissage de mélodies fortement imprimées. Les voix colombiennes puis l’alboka, vieil instrument basque typique ( associant corne et bois ) à la sonorité de cornemuse valorisée dans le souffle de Mixel Ducau, offrent des couleurs fortes aux lignes de chant. 

Alboka

Nées en  Euskadi ou made in Colombia  ces musiques font aussi à l’évidence, appel à la danse. Dans tous les registres distillés par les  instruments présents sur la petite scène immergée au beau milieu du parc, la polyrythmie innervée par les congas, prend systématiquement le dessus. Ainsi les riffs soutenus par la basse plus les traits d’improvisation sur le sax soprano ou même l’alboka accentuent le mouvement. Enfin, on ne prête qu’aux rythmes riches, les palmas (mains en battements) prennent le relai, généreusement générées par un public pleinement intégré dans ce champ de verdure douce où poussent les sculptures monumentales d’Edouard Chillida.

Txalaparta

Ainsi de la sonorité minérale des lames de pierres à celles plus mat, plus sèche de la txalaparta version bois ces tours tours de mains tout de rythmique composés finissent par lancer une rumba(sque ?) introduite initialement suis generis, rythme et chant, via le joyeux savoir faire du triangle colombien « Je suis le pouvoir du courant, je suis le maître des marées » chante in fine Leonel Merchán en guise de message.

« Bascolombia » : de la côte Pacifique à celle du Golfe Cantabrique la boucle musicale est ainsi  bouclée. Mode trans-courant.

Chillida Leku

Robert Latxague