Jazz live
Publié le 21 Mai 2024 • Par Xavier Prévost

Jazz à Saint-Germain-des-Prés : Gautier Garrigue, Émile Parisien

Ultime concert de l’édition 2024 du festival, concert qui célèbre la naissance du jeune groupe d’un batteur extrêmement sollicité, puis le vingtième anniversaire du quartette d’un saxophoniste soprano qui suscite l’enthousiasme dans tous les contextes

GAUTIER GARRIGUE Quartet

Gautier Garrigue (batterie, composition), Federico Casagrande (guitares électrique & électro-acoustique), Maxime Sanchez (piano), Stéphane Kerecki (contrebasse)

invité : Émile Parisien (saxophone soprano)

Paris, Théâtre de l’Alliance Française, 20 mai 2024, 19h

Naissance d’un groupe dont on annonce un premier disque pour l‘automne. La première fois que j’ai écouté son leader sur scène, voici largement plus de dix ans, j’ai su que ce batteur était, au-delà du rythme, totalement musique. Et cela se confirme avec ce groupe et son répertoire. Un ‘groupe de luxe’ pourrait-on dire, avec le trop rare Federico Casagrande à la guitare, et un pianiste qui est le partenaire de Gautier Garrigue dans le groupe Flash Pig ; un pianiste qui impressionne constamment par la richesse de son jeu. Quant au contrebassiste, c’est un musicien d’exception, déjà auréolé de grandes réussites artistiques et de prestigieuses collaborations. La musique est d’une finesse qui s’impose dès les premières mesures. Dans le premier titre, où la guitare occupe une place de choix, je pense au Pat Metheny que j’aime, celui du côté plus acoustique. Federico Casagrande possède au plus haut point cette faculté de faire chanter la nuance, de rendre l’intervalle palpable par la force de l’interprétation. Un autre thème me rappellera l’univers de Paul Motian, pas parce que le compositeur est batteur, mais parce que, sur une marche harmonique que l’on croirait familière, nous allons parcourir tout un spectre de sensations et d’émotions, par la sinuosité du cheminement et la distillation progressive de surprises. Les thèmes s’enchaînent par de subtiles passerelles, et l’un d’elles permet à Émile Parisien (qui sera parmi les invité du disque à venir) de s’introduire dans le collectif. Ce sera l’occasion d’une explosion expressive et d’un vertige qui conduira à un solo de batterie où, talent du soliste, la musique parle bien au-delà du rythme. Parmi les nombreux plaisirs offerts par ce groupe, je garde le souvenir d’une parfait connivence du piano et de la guitare, mystère d’un alliage difficile à concevoir car ces deux instruments évoluent sur le même terrain. Bref ce groupe m’a enchanté, et j’attends avec impatience le disque, et d’autres concerts

ÉMILE PARISIEN Quartet ‘Let Them Cook’

Emile Parisien (saxophone soprano, électronique), Julien Touéry (piano), Ivan Gélugne (contrebasse), Julien Loutelier (batterie, électronique)

Paris, Théâtre de l’Alliance Française, 20 mai 2024, 20h30

Ce concert célèbre la sortie d’un disque publié en mars dernier : ‘Let Them Cook’, sous le label Act (Choc Jazz Magazine en avril). Le groupe joue ce soir le répertoire de ce disque, qui marque les vingt ans de cette formation dont seul le batteur a changé, voici une dizaine d’années. C’est le grand retour du quartette, avec des compositions de chacun de ses membres. La constante, c’est tout à la fois la fine dramaturgie, avec des explosions récurrentes, des nuances et des surprises, et la formidable expressivité du leader, mais aussi de ses partenaires : cette musique nous parle, au plexus comme au creux de l’oreille, au gré des instants. Comme le récent disque, le concert nous offre son épisode de son traité sur le saxophone, pour un titre piloté par un clic électronique qui devient constitutif de l’art musical. Et bien sûr l’intensité expressive sera le fil conducteur, mais dans une délicatesse où le vertige des phrases torrentielles n’oblitère jamais l’espace de la confidence. Bref, une fois de plus, le quartette d’Émile Parisien aura provoqué mon enthousiasme, comme celui du public de l‘Alliance Française.

Xavier Prévost

Le quartette est en concert à Vitrolles (Charlie Free) le 24 mai, et à Tarbes (Le Parvis) le 25