Jazz live
Publié le 16 Août 2014

Jazz em Agosto : MMM Quartet

On retrouve-là deux des artistes qui se produisaient la veille en trio avec Hamid Drake : Fred Frith et Joëlle Léandre. Le quartette, mis sur pied par la contrebassiste, opte pour un début astringent, coupant court aux conversations dans l’assistance et recentrant l’attention de chacun. Celle-ci ne connaîtra aucun fléchissement au cours de l’heure suivante. Place à la Mills Music Mafia…

Vendredi 8 Août, Amphithéâtre du Musée Gulbenkian, Lisbonne.

Joëlle Léandre (b, voc), Fred Frith (elg), Urs Leimgruber (ts, ss), Alvin Curran (p, elec, voc)

Fred Frith est plus animé que la veille, la guitare bien en main ou posée sur une table jonchée d’objets, maniant l’archet à l’instar de sa complice ou triturant son instrument de diverses manières, selon des techniques transversales peaufinées depuis des décennies (pièces de métal et de bois logées derrière les cordes, pinceaux, torchons et peignes appliquées sur elles, etc.) en alternance avec un jeu plus « traditionnel » (encore que le mot ne lui convienne guère) trouvant ses racines dans le rock progressif anglais du début des années 70, resurgissant ici sous la forme de solos puissants mais abordés avec décontraction et humour. Je l’avais déjà apprécié sur disque (avec le premier album de MMM ou le trio avec Jacques Demierre et Barre Phillips, pour rester sur des épisodes récents), mais la prestation d’Urs Leimgruber ce soir dépasse toutes mes attentes : son cristallin au ténor comme au soprano, interventions toujours empreintes de poésie, maniement expert des méthodes en usage dans la musique improvisée – à-coups, aspirations, pépiements, souffle dans l’instrument sans production de notes, le tout sans dévier du cap de la cohérence du propos collectif. Le soprano parfois tourné vers le ciel, il se révèle d’une acuité à toute épreuve.

Démultiplié entre le piano, son ordinateur et un clavier MIDI, Alvin Curran génère des sons préenregistrés (parmi lesquels des onomatopées vocales et bribes de discours) impossibles à tirer d’un instrument acoustique. Bondissant dans les aigus, affectionnant les mouvements saccadés et attaques bouffantes via une utilisation originale du sampler, il produit des effets pittoresques qui aiguillonnent fréquemment ses partenaires, électrisent le débat, ouvrent des portes vers de nouveaux espaces que le quartette ne se prive pas d’arpenter. Il devient homme-orchestre atteint de schizophrénie : alors qu’il joue de la main gauche une berceuse au piano, la main droite occasionne des éclairs sonores au synthétiseur. Il suscite aussi des effets de larsen, souffle dans une conque, et prend fréquemment le micro pour faire naître divers bruitages n’ayant rien à voir avec le chant. Sa chemise blanche et son aspect docte lui confèrent un air de médecin, le côté expérimental de son entreprise accréditant la thèse du savant fou. Il est au piano le temps d’un vigoureux duo avec Frith, qui s’emploie alors à désaccorder sauvagement son instrument. Joëlle Léandre les rejoint dans les notes les plus basses de son instrument. Plus tard, cette dernière et Leimgruber (facteur d’équilibre et de modération, dans une démarche opposée à celle du facétieux et néanmoins sérieux Curran, mais ne se privant pas d’échappées éperdues ici et là) s’expriment également en paire pendant quelques minutes. Dans cette formation, la musicienne fait montre d’un lyrisme épuré la plupart du temps, à l’instar du saxophoniste, mais habitée du même esprit libertaire, houspille parfois les cordes, pousse des grognements, chante de sa voix opératique et flanque des coups de pied à sa contrebasse lorsque la situation semble l’exiger.

Un rappel initialement rythmique s’achève dans une ambiance de relative mansuétude. Ce concert est l’un des plus réussis de cette édition du festival, intense de la première à la dernière seconde, dans les moments de douceur comme dans les stages enflammés. Tout sourire, les quatre artistes quittent la scène sous de franches acclamations.

Cette soirée fera l’objet d’une publication en CD sous les bons auspices de RogueArt. Elle fera suite au “Live at the Metz’ Arsenal” publié par le quartette sur Leo en 2012.

David Cristol

Actualité discographique:

Joëlle Léandre/Nicole Mitchell/Thomas Buckner “Flowing Stream” (Leo, 2014)

Urs Leimgruber & Vinny Golia “Empiricism in the West” (Relative Pitch, 2014)

Fred Frith/Helen Mirra “Kwangsi-Quail” (Sshpuma, 2014, vinyle)

Alvin Curran “Shofar Rags” (Tzadik, 2013)|On retrouve-là deux des artistes qui se produisaient la veille en trio avec Hamid Drake : Fred Frith et Joëlle Léandre. Le quartette, mis sur pied par la contrebassiste, opte pour un début astringent, coupant court aux conversations dans l’assistance et recentrant l’attention de chacun. Celle-ci ne connaîtra aucun fléchissement au cours de l’heure suivante. Place à la Mills Music Mafia…

Vendredi 8 Août, Amphithéâtre du Musée Gulbenkian, Lisbonne.

Joëlle Léandre (b, voc), Fred Frith (elg), Urs Leimgruber (ts, ss), Alvin Curran (p, elec, voc)

Fred Frith est plus animé que la veille, la guitare bien en main ou posée sur une table jonchée d’objets, maniant l’archet à l’instar de sa complice ou triturant son instrument de diverses manières, selon des techniques transversales peaufinées depuis des décennies (pièces de métal et de bois logées derrière les cordes, pinceaux, torchons et peignes appliquées sur elles, etc.) en alternance avec un jeu plus « traditionnel » (encore que le mot ne lui convienne guère) trouvant ses racines dans le rock progressif anglais du début des années 70, resurgissant ici sous la forme de solos puissants mais abordés avec décontraction et humour. Je l’avais déjà apprécié sur disque (avec le premier album de MMM ou le trio avec Jacques Demierre et Barre Phillips, pour rester sur des épisodes récents), mais la prestation d’Urs Leimgruber ce soir dépasse toutes mes attentes : son cristallin au ténor comme au soprano, interventions toujours empreintes de poésie, maniement expert des méthodes en usage dans la musique improvisée – à-coups, aspirations, pépiements, souffle dans l’instrument sans production de notes, le tout sans dévier du cap de la cohérence du propos collectif. Le soprano parfois tourné vers le ciel, il se révèle d’une acuité à toute épreuve.

Démultiplié entre le piano, son ordinateur et un clavier MIDI, Alvin Curran génère des sons préenregistrés (parmi lesquels des onomatopées vocales et bribes de discours) impossibles à tirer d’un instrument acoustique. Bondissant dans les aigus, affectionnant les mouvements saccadés et attaques bouffantes via une utilisation originale du sampler, il produit des effets pittoresques qui aiguillonnent fréquemment ses partenaires, électrisent le débat, ouvrent des portes vers de nouveaux espaces que le quartette ne se prive pas d’arpenter. Il devient homme-orchestre atteint de schizophrénie : alors qu’il joue de la main gauche une berceuse au piano, la main droite occasionne des éclairs sonores au synthétiseur. Il suscite aussi des effets de larsen, souffle dans une conque, et prend fréquemment le micro pour faire naître divers bruitages n’ayant rien à voir avec le chant. Sa chemise blanche et son aspect docte lui confèrent un air de médecin, le côté expérimental de son entreprise accréditant la thèse du savant fou. Il est au piano le temps d’un vigoureux duo avec Frith, qui s’emploie alors à désaccorder sauvagement son instrument. Joëlle Léandre les rejoint dans les notes les plus basses de son instrument. Plus tard, cette dernière et Leimgruber (facteur d’équilibre et de modération, dans une démarche opposée à celle du facétieux et néanmoins sérieux Curran, mais ne se privant pas d’échappées éperdues ici et là) s’expriment également en paire pendant quelques minutes. Dans cette formation, la musicienne fait montre d’un lyrisme épuré la plupart du temps, à l’instar du saxophoniste, mais habitée du même esprit libertaire, houspille parfois les cordes, pousse des grognements, chante de sa voix opératique et flanque des coups de pied à sa contrebasse lorsque la situation semble l’exiger.

Un rappel initialement rythmique s’achève dans une ambiance de relative mansuétude. Ce concert est l’un des plus réussis de cette édition du festival, intense de la première à la dernière seconde, dans les moments de douceur comme dans les stages enflammés. Tout sourire, les quatre artistes quittent la scène sous de franches acclamations.

Cette soirée fera l’objet d’une publication en CD sous les bons auspices de RogueArt. Elle fera suite au “Live at the Metz’ Arsenal” publié par le quartette sur Leo en 2012.

David Cristol

Actualité discographique:

Joëlle Léandre/Nicole Mitchell/Thomas Buckner “Flowing Stream” (Leo, 2014)

Urs Leimgruber & Vinny Golia “Empiricism in the West” (Relative Pitch, 2014)

Fred Frith/Helen Mirra “Kwangsi-Quail” (Sshpuma, 2014, vinyle)

Alvin Curran “Shofar Rags” (Tzadik, 2013)|On retrouve-là deux des artistes qui se produisaient la veille en trio avec Hamid Drake : Fred Frith et Joëlle Léandre. Le quartette, mis sur pied par la contrebassiste, opte pour un début astringent, coupant court aux conversations dans l’assistance et recentrant l’attention de chacun. Celle-ci ne connaîtra aucun fléchissement au cours de l’heure suivante. Place à la Mills Music Mafia…

Vendredi 8 Août, Amphithéâtre du Musée Gulbenkian, Lisbonne.

Joëlle Léandre (b, voc), Fred Frith (elg), Urs Leimgruber (ts, ss), Alvin Curran (p, elec, voc)

Fred Frith est plus animé que la veille, la guitare bien en main ou posée sur une table jonchée d’objets, maniant l’archet à l’instar de sa complice ou triturant son instrument de diverses manières, selon des techniques transversales peaufinées depuis des décennies (pièces de métal et de bois logées derrière les cordes, pinceaux, torchons et peignes appliquées sur elles, etc.) en alternance avec un jeu plus « traditionnel » (encore que le mot ne lui convienne guère) trouvant ses racines dans le rock progressif anglais du début des années 70, resurgissant ici sous la forme de solos puissants mais abordés avec décontraction et humour. Je l’avais déjà apprécié sur disque (avec le premier album de MMM ou le trio avec Jacques Demierre et Barre Phillips, pour rester sur des épisodes récents), mais la prestation d’Urs Leimgruber ce soir dépasse toutes mes attentes : son cristallin au ténor comme au soprano, interventions toujours empreintes de poésie, maniement expert des méthodes en usage dans la musique improvisée – à-coups, aspirations, pépiements, souffle dans l’instrument sans production de notes, le tout sans dévier du cap de la cohérence du propos collectif. Le soprano parfois tourné vers le ciel, il se révèle d’une acuité à toute épreuve.

Démultiplié entre le piano, son ordinateur et un clavier MIDI, Alvin Curran génère des sons préenregistrés (parmi lesquels des onomatopées vocales et bribes de discours) impossibles à tirer d’un instrument acoustique. Bondissant dans les aigus, affectionnant les mouvements saccadés et attaques bouffantes via une utilisation originale du sampler, il produit des effets pittoresques qui aiguillonnent fréquemment ses partenaires, électrisent le débat, ouvrent des portes vers de nouveaux espaces que le quartette ne se prive pas d’arpenter. Il devient homme-orchestre atteint de schizophrénie : alors qu’il joue de la main gauche une berceuse au piano, la main droite occasionne des éclairs sonores au synthétiseur. Il suscite aussi des effets de larsen, souffle dans une conque, et prend fréquemment le micro pour faire naître divers bruitages n’ayant rien à voir avec le chant. Sa chemise blanche et son aspect docte lui confèrent un air de médecin, le côté expérimental de son entreprise accréditant la thèse du savant fou. Il est au piano le temps d’un vigoureux duo avec Frith, qui s’emploie alors à désaccorder sauvagement son instrument. Joëlle Léandre les rejoint dans les notes les plus basses de son instrument. Plus tard, cette dernière et Leimgruber (facteur d’équilibre et de modération, dans une démarche opposée à celle du facétieux et néanmoins sérieux Curran, mais ne se privant pas d’échappées éperdues ici et là) s’expriment également en paire pendant quelques minutes. Dans cette formation, la musicienne fait montre d’un lyrisme épuré la plupart du temps, à l’instar du saxophoniste, mais habitée du même esprit libertaire, houspille parfois les cordes, pousse des grognements, chante de sa voix opératique et flanque des coups de pied à sa contrebasse lorsque la situation semble l’exiger.

Un rappel initialement rythmique s’achève dans une ambiance de relative mansuétude. Ce concert est l’un des plus réussis de cette édition du festival, intense de la première à la dernière seconde, dans les moments de douceur comme dans les stages enflammés. Tout sourire, les quatre artistes quittent la scène sous de franches acclamations.

Cette soirée fera l’objet d’une publication en CD sous les bons auspices de RogueArt. Elle fera suite au “Live at the Metz’ Arsenal” publié par le quartette sur Leo en 2012.

David Cristol

Actualité discographique:

Joëlle Léandre/Nicole Mitchell/Thomas Buckner “Flowing Stream” (Leo, 2014)

Urs Leimgruber & Vinny Golia “Empiricism in the West” (Relative Pitch, 2014)

Fred Frith/Helen Mirra “Kwangsi-Quail” (Sshpuma, 2014, vinyle)

Alvin Curran “Shofar Rags” (Tzadik, 2013)|On retrouve-là deux des artistes qui se produisaient la veille en trio avec Hamid Drake : Fred Frith et Joëlle Léandre. Le quartette, mis sur pied par la contrebassiste, opte pour un début astringent, coupant court aux conversations dans l’assistance et recentrant l’attention de chacun. Celle-ci ne connaîtra aucun fléchissement au cours de l’heure suivante. Place à la Mills Music Mafia…

Vendredi 8 Août, Amphithéâtre du Musée Gulbenkian, Lisbonne.

Joëlle Léandre (b, voc), Fred Frith (elg), Urs Leimgruber (ts, ss), Alvin Curran (p, elec, voc)

Fred Frith est plus animé que la veille, la guitare bien en main ou posée sur une table jonchée d’objets, maniant l’archet à l’instar de sa complice ou triturant son instrument de diverses manières, selon des techniques transversales peaufinées depuis des décennies (pièces de métal et de bois logées derrière les cordes, pinceaux, torchons et peignes appliquées sur elles, etc.) en alternance avec un jeu plus « traditionnel » (encore que le mot ne lui convienne guère) trouvant ses racines dans le rock progressif anglais du début des années 70, resurgissant ici sous la forme de solos puissants mais abordés avec décontraction et humour. Je l’avais déjà apprécié sur disque (avec le premier album de MMM ou le trio avec Jacques Demierre et Barre Phillips, pour rester sur des épisodes récents), mais la prestation d’Urs Leimgruber ce soir dépasse toutes mes attentes : son cristallin au ténor comme au soprano, interventions toujours empreintes de poésie, maniement expert des méthodes en usage dans la musique improvisée – à-coups, aspirations, pépiements, souffle dans l’instrument sans production de notes, le tout sans dévier du cap de la cohérence du propos collectif. Le soprano parfois tourné vers le ciel, il se révèle d’une acuité à toute épreuve.

Démultiplié entre le piano, son ordinateur et un clavier MIDI, Alvin Curran génère des sons préenregistrés (parmi lesquels des onomatopées vocales et bribes de discours) impossibles à tirer d’un instrument acoustique. Bondissant dans les aigus, affectionnant les mouvements saccadés et attaques bouffantes via une utilisation originale du sampler, il produit des effets pittoresques qui aiguillonnent fréquemment ses partenaires, électrisent le débat, ouvrent des portes vers de nouveaux espaces que le quartette ne se prive pas d’arpenter. Il devient homme-orchestre atteint de schizophrénie : alors qu’il joue de la main gauche une berceuse au piano, la main droite occasionne des éclairs sonores au synthétiseur. Il suscite aussi des effets de larsen, souffle dans une conque, et prend fréquemment le micro pour faire naître divers bruitages n’ayant rien à voir avec le chant. Sa chemise blanche et son aspect docte lui confèrent un air de médecin, le côté expérimental de son entreprise accréditant la thèse du savant fou. Il est au piano le temps d’un vigoureux duo avec Frith, qui s’emploie alors à désaccorder sauvagement son instrument. Joëlle Léandre les rejoint dans les notes les plus basses de son instrument. Plus tard, cette dernière et Leimgruber (facteur d’équilibre et de modération, dans une démarche opposée à celle du facétieux et néanmoins sérieux Curran, mais ne se privant pas d’échappées éperdues ici et là) s’expriment également en paire pendant quelques minutes. Dans cette formation, la musicienne fait montre d’un lyrisme épuré la plupart du temps, à l’instar du saxophoniste, mais habitée du même esprit libertaire, houspille parfois les cordes, pousse des grognements, chante de sa voix opératique et flanque des coups de pied à sa contrebasse lorsque la situation semble l’exiger.

Un rappel initialement rythmique s’achève dans une ambiance de relative mansuétude. Ce concert est l’un des plus réussis de cette édition du festival, intense de la première à la dernière seconde, dans les moments de douceur comme dans les stages enflammés. Tout sourire, les quatre artistes quittent la scène sous de franches acclamations.

Cette soirée fera l’objet d’une publication en CD sous les bons auspices de RogueArt. Elle fera suite au “Live at the Metz’ Arsenal” publié par le quartette sur Leo en 2012.

David Cristol

Actualité discographique:

Joëlle Léandre/Nicole Mitchell/Thomas Buckner “Flowing Stream” (Leo, 2014)

Urs Leimgruber & Vinny Golia “Empiricism in the West” (Relative Pitch, 2014)

Fred Frith/Helen Mirra “Kwangsi-Quail” (Sshpuma, 2014, vinyle)

Alvin Curran “Shofar Rags” (Tzadik, 2013)