Jazz live
Publié le 7 Avr 2014

Jazz et Littérature : "Escale du livre" à Bordeaux, avec Marie Richeux et Jean Thévenin

A chacun son lecteur. Une amie (qui suit attentivement ce blog et mes aventures musicales ou extra-musicales) me fait observer que depuis une quinzaine de jours, les chiens sont régulièrement présents dans mes comptes-rendus. Hier c’était celui de Ly Thanh Tyên, aujourd’hui il pourrait être celui de la Voix de son Maître, qui écoute – ou semble écouter –  ce qui sort du pavillon. Etiquette de disques, fascinante, mais aussi image de cette voix qui s’entend à la radio, grosse voix du surmoi politique, ou voix qui s’impose par sa familiarité, sa proximité. Je me souviens de la voix d’André Francis, de celle de Lucien Malson, de la voix d’André Clergeat, et de celle de Philippe Carles. Et Claude Carrière ! Et Jean-Robert Masson !! Et même (ça ne date pas d’hier) la voix de Raymond Mouly. Par eux, tant de musiques, tant de désirs sont passés. Quand on les croise enfin dans la réalité physique, les hommes de ces voix, on hésite entre conserver leur seule image acoustique, ou y associer une image du corps rencontré dans le réel. J’allais donc voir et écouter Marie Richeux encore pris dans cette division.

 

Marie Richeux ne présente aucune émission de jazz, et donc, « pas la peine de crier ». Sur France-Culture, elle produit depuis 2010 une séquence d’une heure sous ce titre. Avec un indicatif écrit par le compositeur et percussionniste Jean Thévenin. Incrustée dans l’émission, la séquence dite des « Polaroïds » offre à Marie Richeux l’occasion répétée cinq fois par semaine d’écrire un texte, court, qu’elle lit elle-même à l’antenne. Au fil des mois et des années s’est ainsi constitué un corpus, qui, au prix d’une sélection sévère, a pu être publié (Sabine Wespieser ed.), avec une préface de Georges Didi-Huberman, celui-là même qui est l’invité de Bernard Lubat chaque année à Uzeste. Avec Jean Thévenin comme partenaire, et dans une démarche largement improvisée, Marie Richeux lit donc un certain nombre de ses « Polaroïds » à l’occasion de l’Escale du livre de Bordeaux. Une première, à ce qu’il semble.

 

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     Marie Richeux, Escale du Livre à Bordeaux

 

Donc cette voix, quotidienne ou presque : une voix d’une rare clarté. Enonciation quasi parfaite dans son rythme, son articulation, sa modulation, qui sait éviter les contrastes trop marqués. La voix de Marie Richeux éclaire, elle fait fuir les ombres, ou n’en conserve que celles qui remontent du texte lui-même. On a pu dire à son propos : illumination(s). Un peu (avec quel tremblement !) comme celles publiées sous ce titre par A. Rimbaud. Sauf que la construction obéit ici à une règle (souple mais présente) qui est celle du « Polaroïd » : l’image (mentale) doit se révéler lentement, dans le moment même de son énonciation, voire de son inscription. On peut supposer qu’une fois le déclenchement effectué, il faut en déduire l’image latente dans un temps déterminé. On imagine le narrateur, comme le photographe, assistant avec stupéfaction chaque jour au dévoilement des images qui naissent dans l’ombre. De l’ombre, vers la lumière. Latence et manifestation. On y est. Contrainte et liberté. Tous les jours à la même heure, un déclic s’impose, et la révélation qui s’ensuit.

 

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     Marie Richeux, Escale du livre à Bordeaux

 

Jean Thévenin travaille à partir d’un ordinateur, et sur des motifs répétitifs discrets, il brode avec mailloches et balais des commentaires rythmés, au service de la récitante. Sur les plusieurs centaines de textes écrits en trois ans, Marie Richeux en a sélectionné une soixantaine pour l’édition. Elle en lit quelques uns. Elle aurait pu choisir aussi d’en relire certains, qui n’ont pas eu la permission de sortie. Avec le commentaire de son partenaire, c’est une nouvelle vie phonique pour ces écrits. Même clarté, même énonciation, même brise propre à effacer les nuées. Et le même charme qui opère, que ce soit pas la peine de crier, ou pas. Quand l’auteure vous offre en dédicace sur le livre un voeu de longue vie formulé avec un tact exquis, il faudrait être un roc pour ne pas se laisser toucher. Tilt.

 

Tiens, voilà Barney Wilen qui revient. Allez savoir.

 

Philippe Méziat

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A chacun son lecteur. Une amie (qui suit attentivement ce blog et mes aventures musicales ou extra-musicales) me fait observer que depuis une quinzaine de jours, les chiens sont régulièrement présents dans mes comptes-rendus. Hier c’était celui de Ly Thanh Tyên, aujourd’hui il pourrait être celui de la Voix de son Maître, qui écoute – ou semble écouter –  ce qui sort du pavillon. Etiquette de disques, fascinante, mais aussi image de cette voix qui s’entend à la radio, grosse voix du surmoi politique, ou voix qui s’impose par sa familiarité, sa proximité. Je me souviens de la voix d’André Francis, de celle de Lucien Malson, de la voix d’André Clergeat, et de celle de Philippe Carles. Et Claude Carrière ! Et Jean-Robert Masson !! Et même (ça ne date pas d’hier) la voix de Raymond Mouly. Par eux, tant de musiques, tant de désirs sont passés. Quand on les croise enfin dans la réalité physique, les hommes de ces voix, on hésite entre conserver leur seule image acoustique, ou y associer une image du corps rencontré dans le réel. J’allais donc voir et écouter Marie Richeux encore pris dans cette division.

 

Marie Richeux ne présente aucune émission de jazz, et donc, « pas la peine de crier ». Sur France-Culture, elle produit depuis 2010 une séquence d’une heure sous ce titre. Avec un indicatif écrit par le compositeur et percussionniste Jean Thévenin. Incrustée dans l’émission, la séquence dite des « Polaroïds » offre à Marie Richeux l’occasion répétée cinq fois par semaine d’écrire un texte, court, qu’elle lit elle-même à l’antenne. Au fil des mois et des années s’est ainsi constitué un corpus, qui, au prix d’une sélection sévère, a pu être publié (Sabine Wespieser ed.), avec une préface de Georges Didi-Huberman, celui-là même qui est l’invité de Bernard Lubat chaque année à Uzeste. Avec Jean Thévenin comme partenaire, et dans une démarche largement improvisée, Marie Richeux lit donc un certain nombre de ses « Polaroïds » à l’occasion de l’Escale du livre de Bordeaux. Une première, à ce qu’il semble.

 

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     Marie Richeux, Escale du Livre à Bordeaux

 

Donc cette voix, quotidienne ou presque : une voix d’une rare clarté. Enonciation quasi parfaite dans son rythme, son articulation, sa modulation, qui sait éviter les contrastes trop marqués. La voix de Marie Richeux éclaire, elle fait fuir les ombres, ou n’en conserve que celles qui remontent du texte lui-même. On a pu dire à son propos : illumination(s). Un peu (avec quel tremblement !) comme celles publiées sous ce titre par A. Rimbaud. Sauf que la construction obéit ici à une règle (souple mais présente) qui est celle du « Polaroïd » : l’image (mentale) doit se révéler lentement, dans le moment même de son énonciation, voire de son inscription. On peut supposer qu’une fois le déclenchement effectué, il faut en déduire l’image latente dans un temps déterminé. On imagine le narrateur, comme le photographe, assistant avec stupéfaction chaque jour au dévoilement des images qui naissent dans l’ombre. De l’ombre, vers la lumière. Latence et manifestation. On y est. Contrainte et liberté. Tous les jours à la même heure, un déclic s’impose, et la révélation qui s’ensuit.

 

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     Marie Richeux, Escale du livre à Bordeaux

 

Jean Thévenin travaille à partir d’un ordinateur, et sur des motifs répétitifs discrets, il brode avec mailloches et balais des commentaires rythmés, au service de la récitante. Sur les plusieurs centaines de textes écrits en trois ans, Marie Richeux en a sélectionné une soixantaine pour l’édition. Elle en lit quelques uns. Elle aurait pu choisir aussi d’en relire certains, qui n’ont pas eu la permission de sortie. Avec le commentaire de son partenaire, c’est une nouvelle vie phonique pour ces écrits. Même clarté, même énonciation, même brise propre à effacer les nuées. Et le même charme qui opère, que ce soit pas la peine de crier, ou pas. Quand l’auteure vous offre en dédicace sur le livre un voeu de longue vie formulé avec un tact exquis, il faudrait être un roc pour ne pas se laisser toucher. Tilt.

 

Tiens, voilà Barney Wilen qui revient. Allez savoir.

 

Philippe Méziat

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A chacun son lecteur. Une amie (qui suit attentivement ce blog et mes aventures musicales ou extra-musicales) me fait observer que depuis une quinzaine de jours, les chiens sont régulièrement présents dans mes comptes-rendus. Hier c’était celui de Ly Thanh Tyên, aujourd’hui il pourrait être celui de la Voix de son Maître, qui écoute – ou semble écouter –  ce qui sort du pavillon. Etiquette de disques, fascinante, mais aussi image de cette voix qui s’entend à la radio, grosse voix du surmoi politique, ou voix qui s’impose par sa familiarité, sa proximité. Je me souviens de la voix d’André Francis, de celle de Lucien Malson, de la voix d’André Clergeat, et de celle de Philippe Carles. Et Claude Carrière ! Et Jean-Robert Masson !! Et même (ça ne date pas d’hier) la voix de Raymond Mouly. Par eux, tant de musiques, tant de désirs sont passés. Quand on les croise enfin dans la réalité physique, les hommes de ces voix, on hésite entre conserver leur seule image acoustique, ou y associer une image du corps rencontré dans le réel. J’allais donc voir et écouter Marie Richeux encore pris dans cette division.

 

Marie Richeux ne présente aucune émission de jazz, et donc, « pas la peine de crier ». Sur France-Culture, elle produit depuis 2010 une séquence d’une heure sous ce titre. Avec un indicatif écrit par le compositeur et percussionniste Jean Thévenin. Incrustée dans l’émission, la séquence dite des « Polaroïds » offre à Marie Richeux l’occasion répétée cinq fois par semaine d’écrire un texte, court, qu’elle lit elle-même à l’antenne. Au fil des mois et des années s’est ainsi constitué un corpus, qui, au prix d’une sélection sévère, a pu être publié (Sabine Wespieser ed.), avec une préface de Georges Didi-Huberman, celui-là même qui est l’invité de Bernard Lubat chaque année à Uzeste. Avec Jean Thévenin comme partenaire, et dans une démarche largement improvisée, Marie Richeux lit donc un certain nombre de ses « Polaroïds » à l’occasion de l’Escale du livre de Bordeaux. Une première, à ce qu’il semble.

 

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     Marie Richeux, Escale du Livre à Bordeaux

 

Donc cette voix, quotidienne ou presque : une voix d’une rare clarté. Enonciation quasi parfaite dans son rythme, son articulation, sa modulation, qui sait éviter les contrastes trop marqués. La voix de Marie Richeux éclaire, elle fait fuir les ombres, ou n’en conserve que celles qui remontent du texte lui-même. On a pu dire à son propos : illumination(s). Un peu (avec quel tremblement !) comme celles publiées sous ce titre par A. Rimbaud. Sauf que la construction obéit ici à une règle (souple mais présente) qui est celle du « Polaroïd » : l’image (mentale) doit se révéler lentement, dans le moment même de son énonciation, voire de son inscription. On peut supposer qu’une fois le déclenchement effectué, il faut en déduire l’image latente dans un temps déterminé. On imagine le narrateur, comme le photographe, assistant avec stupéfaction chaque jour au dévoilement des images qui naissent dans l’ombre. De l’ombre, vers la lumière. Latence et manifestation. On y est. Contrainte et liberté. Tous les jours à la même heure, un déclic s’impose, et la révélation qui s’ensuit.

 

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     Marie Richeux, Escale du livre à Bordeaux

 

Jean Thévenin travaille à partir d’un ordinateur, et sur des motifs répétitifs discrets, il brode avec mailloches et balais des commentaires rythmés, au service de la récitante. Sur les plusieurs centaines de textes écrits en trois ans, Marie Richeux en a sélectionné une soixantaine pour l’édition. Elle en lit quelques uns. Elle aurait pu choisir aussi d’en relire certains, qui n’ont pas eu la permission de sortie. Avec le commentaire de son partenaire, c’est une nouvelle vie phonique pour ces écrits. Même clarté, même énonciation, même brise propre à effacer les nuées. Et le même charme qui opère, que ce soit pas la peine de crier, ou pas. Quand l’auteure vous offre en dédicace sur le livre un voeu de longue vie formulé avec un tact exquis, il faudrait être un roc pour ne pas se laisser toucher. Tilt.

 

Tiens, voilà Barney Wilen qui revient. Allez savoir.

 

Philippe Méziat

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A chacun son lecteur. Une amie (qui suit attentivement ce blog et mes aventures musicales ou extra-musicales) me fait observer que depuis une quinzaine de jours, les chiens sont régulièrement présents dans mes comptes-rendus. Hier c’était celui de Ly Thanh Tyên, aujourd’hui il pourrait être celui de la Voix de son Maître, qui écoute – ou semble écouter –  ce qui sort du pavillon. Etiquette de disques, fascinante, mais aussi image de cette voix qui s’entend à la radio, grosse voix du surmoi politique, ou voix qui s’impose par sa familiarité, sa proximité. Je me souviens de la voix d’André Francis, de celle de Lucien Malson, de la voix d’André Clergeat, et de celle de Philippe Carles. Et Claude Carrière ! Et Jean-Robert Masson !! Et même (ça ne date pas d’hier) la voix de Raymond Mouly. Par eux, tant de musiques, tant de désirs sont passés. Quand on les croise enfin dans la réalité physique, les hommes de ces voix, on hésite entre conserver leur seule image acoustique, ou y associer une image du corps rencontré dans le réel. J’allais donc voir et écouter Marie Richeux encore pris dans cette division.

 

Marie Richeux ne présente aucune émission de jazz, et donc, « pas la peine de crier ». Sur France-Culture, elle produit depuis 2010 une séquence d’une heure sous ce titre. Avec un indicatif écrit par le compositeur et percussionniste Jean Thévenin. Incrustée dans l’émission, la séquence dite des « Polaroïds » offre à Marie Richeux l’occasion répétée cinq fois par semaine d’écrire un texte, court, qu’elle lit elle-même à l’antenne. Au fil des mois et des années s’est ainsi constitué un corpus, qui, au prix d’une sélection sévère, a pu être publié (Sabine Wespieser ed.), avec une préface de Georges Didi-Huberman, celui-là même qui est l’invité de Bernard Lubat chaque année à Uzeste. Avec Jean Thévenin comme partenaire, et dans une démarche largement improvisée, Marie Richeux lit donc un certain nombre de ses « Polaroïds » à l’occasion de l’Escale du livre de Bordeaux. Une première, à ce qu’il semble.

 

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     Marie Richeux, Escale du Livre à Bordeaux

 

Donc cette voix, quotidienne ou presque : une voix d’une rare clarté. Enonciation quasi parfaite dans son rythme, son articulation, sa modulation, qui sait éviter les contrastes trop marqués. La voix de Marie Richeux éclaire, elle fait fuir les ombres, ou n’en conserve que celles qui remontent du texte lui-même. On a pu dire à son propos : illumination(s). Un peu (avec quel tremblement !) comme celles publiées sous ce titre par A. Rimbaud. Sauf que la construction obéit ici à une règle (souple mais présente) qui est celle du « Polaroïd » : l’image (mentale) doit se révéler lentement, dans le moment même de son énonciation, voire de son inscription. On peut supposer qu’une fois le déclenchement effectué, il faut en déduire l’image latente dans un temps déterminé. On imagine le narrateur, comme le photographe, assistant avec stupéfaction chaque jour au dévoilement des images qui naissent dans l’ombre. De l’ombre, vers la lumière. Latence et manifestation. On y est. Contrainte et liberté. Tous les jours à la même heure, un déclic s’impose, et la révélation qui s’ensuit.

 

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     Marie Richeux, Escale du livre à Bordeaux

 

Jean Thévenin travaille à partir d’un ordinateur, et sur des motifs répétitifs discrets, il brode avec mailloches et balais des commentaires rythmés, au service de la récitante. Sur les plusieurs centaines de textes écrits en trois ans, Marie Richeux en a sélectionné une soixantaine pour l’édition. Elle en lit quelques uns. Elle aurait pu choisir aussi d’en relire certains, qui n’ont pas eu la permission de sortie. Avec le commentaire de son partenaire, c’est une nouvelle vie phonique pour ces écrits. Même clarté, même énonciation, même brise propre à effacer les nuées. Et le même charme qui opère, que ce soit pas la peine de crier, ou pas. Quand l’auteure vous offre en dédicace sur le livre un voeu de longue vie formulé avec un tact exquis, il faudrait être un roc pour ne pas se laisser toucher. Tilt.

 

Tiens, voilà Barney Wilen qui revient. Allez savoir.

 

Philippe Méziat