Jazz live
Publié le 30 Juin 2013

Les Victoires du Jazz à Vienne (11éme édition)

Vendredi en prélude à l’ouverture officielle de la 33éme édition de Jazz à Vienne, les Victoires du Jazz ont offert aux 5000 invités présents un plateau riche et éclectique avec des musiciens de toutes générations. 7500 personnes avaient réservé leurs invitations mais la fraîcheur de la température et la pluie ont dissuadé un bon tiers du public potentiel.



Logistique impressionnante dans les petites ruelles autour du Théâtre Antique de Vienne : France 3, FIP et France Inter sont là avec de gros moyens. Matos haut de gamme : son, lumières, caméras high tech. Enormes camions. Equipes techniques au grand complet : des animateurs aux hauts responsables institutionnels en passant par tous les membres de la « prod », sans oublier le maquilleur (TV oblige). Plus tous les musiciens programmés, leurs agents, leurs ami(e)s, les journalistes accrédités, les invités…

Résultat, bien sûr, un backstage fourmilière, plein comme un œuf et bien « vivant » (euphémisme) ! Le spectacle n’était pas que sur scène… Beaucoup de zigs (attention ce n’est pas péjoratif : le Petit Robert nous dit que le mot zig est une déformation du vieux français gigue : personne enjouée… zigoto pareil) vanneurs et sacrés déconneurs ont animé la soirée sur le plateau et derrière la scène. Sans jamais faiblir pendant les 4 heures de ce marathon jazziste.

Le monde de la télévision aime la précision. Les conducteurs de la soirée étaient donc prévus à la seconde près ! Affiché partout backstage, comme pense-bêtes pour tous les protagonistes de la cérémonie, le déroulé précisait par exemple que Bernard Lubat devait entrer en scène à 23 heures 24 minutes et 25 secondes ! Ce sont ces 25 secondes qui étaient impressionnantes… Résultat : il entra en scène à 0 h et 33 minutes. Désolé, je n’ai pas noté les secondes… Comme m’a dit l’air consterné une chargée de prod de France 3 : « Avec les jazzmen on ne peut pas respecter les plannings… ils débordent toujours ! ». C’est peut-être cela, entre autres, le jazz : un débordement permanent. Et depuis plus d’un siècle maintenant. Peut-on imaginer un assistant de « prod » de la télé américaine à Newport en 1956 demandant à Paul Gonsalves, chronomètre à la main, d’arrêter son improvisation alors qu’il attaque son 31éme chorus…

Quoi qu’il en soit, ce fut une bien belle et stimulante soirée. Avec juste quelques séquences un peu longuettes. Les étonnants danseurs de Pokemon Crew sont, par exemple, passés 3 fois. Un passage unique aurait amplement permis de montrer leurs talents et… la « prod » aurait gagné quelques précieuses secondes.

Eric Legnini (p) avec son programme Afro Jazz Beat a démarré la soirée de manière tonique en accompagnant successivement les vocalistes Kellylee Evans, Mamami Keita et Hugh Coltman. Bingo : public réchauffé d’entrée. Pierrick Pedron (as) Trio avec son projet Kubic’s Monk démontra de manière étincelante qu’on peut jouer du Monk sans piano. En live sur Trinkle Tinkle ce fut fulgurant et radieux. Bernard Lubat, qui pète le feu ces temps-ci, fut invité par Sebastien Follin (présentateur de la soirée, que moult spectateurs de la soirée ne connaissaient que pour ses prestations TV de prévisions météo) à s’installer dans les gradins, au milieu du public, pour une leçon de scat. Impressionnant : plusieurs milliers de personnes scattèrent, hilares, avec le jazzgascogneur Uzestois. F. Bearzati (ts) pas impressionné par ces milliers de spectateurs (en Italie lorsqu’il accompagnait des vedettes du rock transalpin il jouait dans des stades devant 20 à 30000 personnes), fit un malheur avec son quartet sur des thèmes de Monk : « In Walked Bud, Bemsha Swing… ». Vive Monk. L’incroyable Thomas de Pourquery avait concocté la veille un impromptu, surréaliste et drôle, avec Lubat (en hommage à Pierre Desproges). Pas prévu dans le programme de départ cette séquence étonnante fut rajoutée le matin du concert.

A 67 ans André Ceccarelli sait toujours généreusement mettre son talent au service de jeunes gens brillants, au potentiel exceptionnel, comme le saxophoniste alto Baptiste Herbin (25 ans). B. Herbin, visiblement déçu lors de l’annonce des Victoires « Révélation de l’année » de ne pas avoir décroché le prix. On le comprend. Médéric Collignon & Jus de Bocse à la tête d’une armada de jeunes et belles violonistes hyper motivées par son projet « King Crimson » a mis le feu au Théatre Antique. Gestuelle spectaculaire comme toujours mais aussi, son hyper activisme à la Tex Avery peut parfois le faire oublier, soliste de très haut niveau à la trompette. Philippe Gleyzes (dr) déchaîné a réussi à faire taire les bavards du backstage, visiblement fascinés par la vision, transmise par les écrans de contrôle, de son jeu hyper-puissant, efficace, stimulant et spectaculaire. Avec le DPZ de Thomas de Pourquery la température, musicale seulement (car une pluie glaciale tombait sur Vienne), monta, encore, d’un cran. De Pourquery a « en réserve » un projet « Nino Ferrer », qu’il a, m’a t-il dit, « du mal à faire tourner », mais on peut imaginer que ce doit être assez surprenant et flamboyant. Laurent de Wilde (p) avec Laurent Robin (dr) et Jérôme Regard (b) sur « Fe Fe naa Efe » de Fela Kuti, malgré l’heure tardive et la météo toujours aussi déprimante, alterna « plages de grand calme » et séquences hautement énergétiques. Contrastes excitants.

Belle idée de programmer La Compagnie Lubat et ses Chansons enjazzées pour clore la soirée. Lubat avec ses jeunes musiciens (dont son fils Louis, dr) formés à l’ « Académie d’Uzeste », académie hyper excentrique (à tous les, bons, sens du terme). Les intergénér’actions uzestiennes et ses « rebelles » intentions fonctionnent « à fond les manettes ». Tous les musiciens présents sont venus sur scène pour le final (sans leurs instruments) et Lubat les a fait danser…Ultime vision, assez incroyable, d’une soirée épatante.

Pierre-Henri Ardonceau

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Vendredi en prélude à l’ouverture officielle de la 33éme édition de Jazz à Vienne, les Victoires du Jazz ont offert aux 5000 invités présents un plateau riche et éclectique avec des musiciens de toutes générations. 7500 personnes avaient réservé leurs invitations mais la fraîcheur de la température et la pluie ont dissuadé un bon tiers du public potentiel.



Logistique impressionnante dans les petites ruelles autour du Théâtre Antique de Vienne : France 3, FIP et France Inter sont là avec de gros moyens. Matos haut de gamme : son, lumières, caméras high tech. Enormes camions. Equipes techniques au grand complet : des animateurs aux hauts responsables institutionnels en passant par tous les membres de la « prod », sans oublier le maquilleur (TV oblige). Plus tous les musiciens programmés, leurs agents, leurs ami(e)s, les journalistes accrédités, les invités…

Résultat, bien sûr, un backstage fourmilière, plein comme un œuf et bien « vivant » (euphémisme) ! Le spectacle n’était pas que sur scène… Beaucoup de zigs (attention ce n’est pas péjoratif : le Petit Robert nous dit que le mot zig est une déformation du vieux français gigue : personne enjouée… zigoto pareil) vanneurs et sacrés déconneurs ont animé la soirée sur le plateau et derrière la scène. Sans jamais faiblir pendant les 4 heures de ce marathon jazziste.

Le monde de la télévision aime la précision. Les conducteurs de la soirée étaient donc prévus à la seconde près ! Affiché partout backstage, comme pense-bêtes pour tous les protagonistes de la cérémonie, le déroulé précisait par exemple que Bernard Lubat devait entrer en scène à 23 heures 24 minutes et 25 secondes ! Ce sont ces 25 secondes qui étaient impressionnantes… Résultat : il entra en scène à 0 h et 33 minutes. Désolé, je n’ai pas noté les secondes… Comme m’a dit l’air consterné une chargée de prod de France 3 : « Avec les jazzmen on ne peut pas respecter les plannings… ils débordent toujours ! ». C’est peut-être cela, entre autres, le jazz : un débordement permanent. Et depuis plus d’un siècle maintenant. Peut-on imaginer un assistant de « prod » de la télé américaine à Newport en 1956 demandant à Paul Gonsalves, chronomètre à la main, d’arrêter son improvisation alors qu’il attaque son 31éme chorus…

Quoi qu’il en soit, ce fut une bien belle et stimulante soirée. Avec juste quelques séquences un peu longuettes. Les étonnants danseurs de Pokemon Crew sont, par exemple, passés 3 fois. Un passage unique aurait amplement permis de montrer leurs talents et… la « prod » aurait gagné quelques précieuses secondes.

Eric Legnini (p) avec son programme Afro Jazz Beat a démarré la soirée de manière tonique en accompagnant successivement les vocalistes Kellylee Evans, Mamami Keita et Hugh Coltman. Bingo : public réchauffé d’entrée. Pierrick Pedron (as) Trio avec son projet Kubic’s Monk démontra de manière étincelante qu’on peut jouer du Monk sans piano. En live sur Trinkle Tinkle ce fut fulgurant et radieux. Bernard Lubat, qui pète le feu ces temps-ci, fut invité par Sebastien Follin (présentateur de la soirée, que moult spectateurs de la soirée ne connaissaient que pour ses prestations TV de prévisions météo) à s’installer dans les gradins, au milieu du public, pour une leçon de scat. Impressionnant : plusieurs milliers de personnes scattèrent, hilares, avec le jazzgascogneur Uzestois. F. Bearzati (ts) pas impressionné par ces milliers de spectateurs (en Italie lorsqu’il accompagnait des vedettes du rock transalpin il jouait dans des stades devant 20 à 30000 personnes), fit un malheur avec son quartet sur des thèmes de Monk : « In Walked Bud, Bemsha Swing… ». Vive Monk. L’incroyable Thomas de Pourquery avait concocté la veille un impromptu, surréaliste et drôle, avec Lubat (en hommage à Pierre Desproges). Pas prévu dans le programme de départ cette séquence étonnante fut rajoutée le matin du concert.

A 67 ans André Ceccarelli sait toujours généreusement mettre son talent au service de jeunes gens brillants, au potentiel exceptionnel, comme le saxophoniste alto Baptiste Herbin (25 ans). B. Herbin, visiblement déçu lors de l’annonce des Victoires « Révélation de l’année » de ne pas avoir décroché le prix. On le comprend. Médéric Collignon & Jus de Bocse à la tête d’une armada de jeunes et belles violonistes hyper motivées par son projet « King Crimson » a mis le feu au Théatre Antique. Gestuelle spectaculaire comme toujours mais aussi, son hyper activisme à la Tex Avery peut parfois le faire oublier, soliste de très haut niveau à la trompette. Philippe Gleyzes (dr) déchaîné a réussi à faire taire les bavards du backstage, visiblement fascinés par la vision, transmise par les écrans de contrôle, de son jeu hyper-puissant, efficace, stimulant et spectaculaire. Avec le DPZ de Thomas de Pourquery la température, musicale seulement (car une pluie glaciale tombait sur Vienne), monta, encore, d’un cran. De Pourquery a « en réserve » un projet « Nino Ferrer », qu’il a, m’a t-il dit, « du mal à faire tourner », mais on peut imaginer que ce doit être assez surprenant et flamboyant. Laurent de Wilde (p) avec Laurent Robin (dr) et Jérôme Regard (b) sur « Fe Fe naa Efe » de Fela Kuti, malgré l’heure tardive et la météo toujours aussi déprimante, alterna « plages de grand calme » et séquences hautement énergétiques. Contrastes excitants.

Belle idée de programmer La Compagnie Lubat et ses Chansons enjazzées pour clore la soirée. Lubat avec ses jeunes musiciens (dont son fils Louis, dr) formés à l’ « Académie d’Uzeste », académie hyper excentrique (à tous les, bons, sens du terme). Les intergénér’actions uzestiennes et ses « rebelles » intentions fonctionnent « à fond les manettes ». Tous les musiciens présents sont venus sur scène pour le final (sans leurs instruments) et Lubat les a fait danser…Ultime vision, assez incroyable, d’une soirée épatante.

Pierre-Henri Ardonceau

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Vendredi en prélude à l’ouverture officielle de la 33éme édition de Jazz à Vienne, les Victoires du Jazz ont offert aux 5000 invités présents un plateau riche et éclectique avec des musiciens de toutes générations. 7500 personnes avaient réservé leurs invitations mais la fraîcheur de la température et la pluie ont dissuadé un bon tiers du public potentiel.



Logistique impressionnante dans les petites ruelles autour du Théâtre Antique de Vienne : France 3, FIP et France Inter sont là avec de gros moyens. Matos haut de gamme : son, lumières, caméras high tech. Enormes camions. Equipes techniques au grand complet : des animateurs aux hauts responsables institutionnels en passant par tous les membres de la « prod », sans oublier le maquilleur (TV oblige). Plus tous les musiciens programmés, leurs agents, leurs ami(e)s, les journalistes accrédités, les invités…

Résultat, bien sûr, un backstage fourmilière, plein comme un œuf et bien « vivant » (euphémisme) ! Le spectacle n’était pas que sur scène… Beaucoup de zigs (attention ce n’est pas péjoratif : le Petit Robert nous dit que le mot zig est une déformation du vieux français gigue : personne enjouée… zigoto pareil) vanneurs et sacrés déconneurs ont animé la soirée sur le plateau et derrière la scène. Sans jamais faiblir pendant les 4 heures de ce marathon jazziste.

Le monde de la télévision aime la précision. Les conducteurs de la soirée étaient donc prévus à la seconde près ! Affiché partout backstage, comme pense-bêtes pour tous les protagonistes de la cérémonie, le déroulé précisait par exemple que Bernard Lubat devait entrer en scène à 23 heures 24 minutes et 25 secondes ! Ce sont ces 25 secondes qui étaient impressionnantes… Résultat : il entra en scène à 0 h et 33 minutes. Désolé, je n’ai pas noté les secondes… Comme m’a dit l’air consterné une chargée de prod de France 3 : « Avec les jazzmen on ne peut pas respecter les plannings… ils débordent toujours ! ». C’est peut-être cela, entre autres, le jazz : un débordement permanent. Et depuis plus d’un siècle maintenant. Peut-on imaginer un assistant de « prod » de la télé américaine à Newport en 1956 demandant à Paul Gonsalves, chronomètre à la main, d’arrêter son improvisation alors qu’il attaque son 31éme chorus…

Quoi qu’il en soit, ce fut une bien belle et stimulante soirée. Avec juste quelques séquences un peu longuettes. Les étonnants danseurs de Pokemon Crew sont, par exemple, passés 3 fois. Un passage unique aurait amplement permis de montrer leurs talents et… la « prod » aurait gagné quelques précieuses secondes.

Eric Legnini (p) avec son programme Afro Jazz Beat a démarré la soirée de manière tonique en accompagnant successivement les vocalistes Kellylee Evans, Mamami Keita et Hugh Coltman. Bingo : public réchauffé d’entrée. Pierrick Pedron (as) Trio avec son projet Kubic’s Monk démontra de manière étincelante qu’on peut jouer du Monk sans piano. En live sur Trinkle Tinkle ce fut fulgurant et radieux. Bernard Lubat, qui pète le feu ces temps-ci, fut invité par Sebastien Follin (présentateur de la soirée, que moult spectateurs de la soirée ne connaissaient que pour ses prestations TV de prévisions météo) à s’installer dans les gradins, au milieu du public, pour une leçon de scat. Impressionnant : plusieurs milliers de personnes scattèrent, hilares, avec le jazzgascogneur Uzestois. F. Bearzati (ts) pas impressionné par ces milliers de spectateurs (en Italie lorsqu’il accompagnait des vedettes du rock transalpin il jouait dans des stades devant 20 à 30000 personnes), fit un malheur avec son quartet sur des thèmes de Monk : « In Walked Bud, Bemsha Swing… ». Vive Monk. L’incroyable Thomas de Pourquery avait concocté la veille un impromptu, surréaliste et drôle, avec Lubat (en hommage à Pierre Desproges). Pas prévu dans le programme de départ cette séquence étonnante fut rajoutée le matin du concert.

A 67 ans André Ceccarelli sait toujours généreusement mettre son talent au service de jeunes gens brillants, au potentiel exceptionnel, comme le saxophoniste alto Baptiste Herbin (25 ans). B. Herbin, visiblement déçu lors de l’annonce des Victoires « Révélation de l’année » de ne pas avoir décroché le prix. On le comprend. Médéric Collignon & Jus de Bocse à la tête d’une armada de jeunes et belles violonistes hyper motivées par son projet « King Crimson » a mis le feu au Théatre Antique. Gestuelle spectaculaire comme toujours mais aussi, son hyper activisme à la Tex Avery peut parfois le faire oublier, soliste de très haut niveau à la trompette. Philippe Gleyzes (dr) déchaîné a réussi à faire taire les bavards du backstage, visiblement fascinés par la vision, transmise par les écrans de contrôle, de son jeu hyper-puissant, efficace, stimulant et spectaculaire. Avec le DPZ de Thomas de Pourquery la température, musicale seulement (car une pluie glaciale tombait sur Vienne), monta, encore, d’un cran. De Pourquery a « en réserve » un projet « Nino Ferrer », qu’il a, m’a t-il dit, « du mal à faire tourner », mais on peut imaginer que ce doit être assez surprenant et flamboyant. Laurent de Wilde (p) avec Laurent Robin (dr) et Jérôme Regard (b) sur « Fe Fe naa Efe » de Fela Kuti, malgré l’heure tardive et la météo toujours aussi déprimante, alterna « plages de grand calme » et séquences hautement énergétiques. Contrastes excitants.

Belle idée de programmer La Compagnie Lubat et ses Chansons enjazzées pour clore la soirée. Lubat avec ses jeunes musiciens (dont son fils Louis, dr) formés à l’ « Académie d’Uzeste », académie hyper excentrique (à tous les, bons, sens du terme). Les intergénér’actions uzestiennes et ses « rebelles » intentions fonctionnent « à fond les manettes ». Tous les musiciens présents sont venus sur scène pour le final (sans leurs instruments) et Lubat les a fait danser…Ultime vision, assez incroyable, d’une soirée épatante.

Pierre-Henri Ardonceau

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Vendredi en prélude à l’ouverture officielle de la 33éme édition de Jazz à Vienne, les Victoires du Jazz ont offert aux 5000 invités présents un plateau riche et éclectique avec des musiciens de toutes générations. 7500 personnes avaient réservé leurs invitations mais la fraîcheur de la température et la pluie ont dissuadé un bon tiers du public potentiel.



Logistique impressionnante dans les petites ruelles autour du Théâtre Antique de Vienne : France 3, FIP et France Inter sont là avec de gros moyens. Matos haut de gamme : son, lumières, caméras high tech. Enormes camions. Equipes techniques au grand complet : des animateurs aux hauts responsables institutionnels en passant par tous les membres de la « prod », sans oublier le maquilleur (TV oblige). Plus tous les musiciens programmés, leurs agents, leurs ami(e)s, les journalistes accrédités, les invités…

Résultat, bien sûr, un backstage fourmilière, plein comme un œuf et bien « vivant » (euphémisme) ! Le spectacle n’était pas que sur scène… Beaucoup de zigs (attention ce n’est pas péjoratif : le Petit Robert nous dit que le mot zig est une déformation du vieux français gigue : personne enjouée… zigoto pareil) vanneurs et sacrés déconneurs ont animé la soirée sur le plateau et derrière la scène. Sans jamais faiblir pendant les 4 heures de ce marathon jazziste.

Le monde de la télévision aime la précision. Les conducteurs de la soirée étaient donc prévus à la seconde près ! Affiché partout backstage, comme pense-bêtes pour tous les protagonistes de la cérémonie, le déroulé précisait par exemple que Bernard Lubat devait entrer en scène à 23 heures 24 minutes et 25 secondes ! Ce sont ces 25 secondes qui étaient impressionnantes… Résultat : il entra en scène à 0 h et 33 minutes. Désolé, je n’ai pas noté les secondes… Comme m’a dit l’air consterné une chargée de prod de France 3 : « Avec les jazzmen on ne peut pas respecter les plannings… ils débordent toujours ! ». C’est peut-être cela, entre autres, le jazz : un débordement permanent. Et depuis plus d’un siècle maintenant. Peut-on imaginer un assistant de « prod » de la télé américaine à Newport en 1956 demandant à Paul Gonsalves, chronomètre à la main, d’arrêter son improvisation alors qu’il attaque son 31éme chorus…

Quoi qu’il en soit, ce fut une bien belle et stimulante soirée. Avec juste quelques séquences un peu longuettes. Les étonnants danseurs de Pokemon Crew sont, par exemple, passés 3 fois. Un passage unique aurait amplement permis de montrer leurs talents et… la « prod » aurait gagné quelques précieuses secondes.

Eric Legnini (p) avec son programme Afro Jazz Beat a démarré la soirée de manière tonique en accompagnant successivement les vocalistes Kellylee Evans, Mamami Keita et Hugh Coltman. Bingo : public réchauffé d’entrée. Pierrick Pedron (as) Trio avec son projet Kubic’s Monk démontra de manière étincelante qu’on peut jouer du Monk sans piano. En live sur Trinkle Tinkle ce fut fulgurant et radieux. Bernard Lubat, qui pète le feu ces temps-ci, fut invité par Sebastien Follin (présentateur de la soirée, que moult spectateurs de la soirée ne connaissaient que pour ses prestations TV de prévisions météo) à s’installer dans les gradins, au milieu du public, pour une leçon de scat. Impressionnant : plusieurs milliers de personnes scattèrent, hilares, avec le jazzgascogneur Uzestois. F. Bearzati (ts) pas impressionné par ces milliers de spectateurs (en Italie lorsqu’il accompagnait des vedettes du rock transalpin il jouait dans des stades devant 20 à 30000 personnes), fit un malheur avec son quartet sur des thèmes de Monk : « In Walked Bud, Bemsha Swing… ». Vive Monk. L’incroyable Thomas de Pourquery avait concocté la veille un impromptu, surréaliste et drôle, avec Lubat (en hommage à Pierre Desproges). Pas prévu dans le programme de départ cette séquence étonnante fut rajoutée le matin du concert.

A 67 ans André Ceccarelli sait toujours généreusement mettre son talent au service de jeunes gens brillants, au potentiel exceptionnel, comme le saxophoniste alto Baptiste Herbin (25 ans). B. Herbin, visiblement déçu lors de l’annonce des Victoires « Révélation de l’année » de ne pas avoir décroché le prix. On le comprend. Médéric Collignon & Jus de Bocse à la tête d’une armada de jeunes et belles violonistes hyper motivées par son projet « King Crimson » a mis le feu au Théatre Antique. Gestuelle spectaculaire comme toujours mais aussi, son hyper activisme à la Tex Avery peut parfois le faire oublier, soliste de très haut niveau à la trompette. Philippe Gleyzes (dr) déchaîné a réussi à faire taire les bavards du backstage, visiblement fascinés par la vision, transmise par les écrans de contrôle, de son jeu hyper-puissant, efficace, stimulant et spectaculaire. Avec le DPZ de Thomas de Pourquery la température, musicale seulement (car une pluie glaciale tombait sur Vienne), monta, encore, d’un cran. De Pourquery a « en réserve » un projet « Nino Ferrer », qu’il a, m’a t-il dit, « du mal à faire tourner », mais on peut imaginer que ce doit être assez surprenant et flamboyant. Laurent de Wilde (p) avec Laurent Robin (dr) et Jérôme Regard (b) sur « Fe Fe naa Efe » de Fela Kuti, malgré l’heure tardive et la météo toujours aussi déprimante, alterna « plages de grand calme » et séquences hautement énergétiques. Contrastes excitants.

Belle idée de programmer La Compagnie Lubat et ses Chansons enjazzées pour clore la soirée. Lubat avec ses jeunes musiciens (dont son fils Louis, dr) formés à l’ « Académie d’Uzeste », académie hyper excentrique (à tous les, bons, sens du terme). Les intergénér’actions uzestiennes et ses « rebelles » intentions fonctionnent « à fond les manettes ». Tous les musiciens présents sont venus sur scène pour le final (sans leurs instruments) et Lubat les a fait danser…Ultime vision, assez incroyable, d’une soirée épatante.

Pierre-Henri Ardonceau