Jazz live
Publié le 3 Oct 2016

Les nébuleuses , un soir d'automne à Vitrolles

Une semaine après la sortie de l’album Les Nébuleuses sur le label participatif  Jazz &People, le concert du quintet de Christophe Dal Sasso ouvre la saison du Moulin à Jazz de  Vitrolles où il est toujours agréable de retrouver la fine équipe de l’association.

 

Samedi 1er Octobre : Les Nébuleuses , Moulin à Jazz, Vitrolles (13)

Christophe Dal Sasso ( flûtes), David El-Malek (saxophone ténor), Pierre de Bethmann (Fender Rhodes), Manuel Marchès (contrebasse), Lukmil Perez Herrera ( batterie).

Un concert dont je ne sais pas grand-chose, hormis l’extrait présenté dans Open Jazz,  le 22 septembre dernier, intitulé « La nébuleuse d’Orion », un morceau tout à fait hypnotique, d’une beauté sidérale évidemment, qui se construit sur un crescendo que démarre au Fender Pierre de Bethmann (membre de Prysm, puis leader du quintet Ilium … qui a souvent accompagné le flûtiste et en l’occurrence, dans son album Ressac dont nous entendrons « Terre de Naissance » qui souligne les origines méridionales du leader, varois, de la Londe très précisément.)

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L’accroche radiophonique était suffisante pour venir découvrir la beauté des nébuleuses, un samedi soir orageux. Un programme ambitieux, orchestral qui tourne, dans le CD, autour d’un quintet de jazz et d’un trio de cordes pour « refléter le caractère instable et diffus de ces objets célestes ». En tournée, l’orchestre est réduit au quintet jazz, ce qui suffit au bonheur de l’écoute, tant les phénomènes d’interaction et de tension propres à la dynamique de groupe sont perceptibles,  dans le Moulin à Jazz, plein comme un œuf. Il fait chaud, étouffant même en ce premier octobre.

Mais  au fait, qu’est-ce qu’une nébuleuse? Du latin «nebula» (nuage),  c’est un objet céleste composé de gaz raréfiés et de poussières interstellaires. Ces formes instables, à l’origine de la formation des étoiles, ont des contours et des couleurs impressionnantes, la NASA en ayant capturé les plus belles images grâce à ses télescopes dont le célèbre Hubble. Et si vous cherchez à savoir comment passer de la théorie du big band à celle du big bang, allez sur le site https://www.kisskissbankbank.com/christophe-dal-sasso-les-nebuleuses

Vous saurez encore comment trouver l’inspiration en regardant le ciel, les étoiles, la matière mystérieuse de l’univers. Les sept compositions et arrangements du flûtiste Christophe dal Sasso  se partagent entre forme écrite et improvisation, principes sériels et jazz post-coltranien ( avec les frères Belmondo, il a donné, de « A Love Supreme », une reprise orchestrale très réussie). Si son écriture savante va voir du côté de Messiaen, de Boulez, Christophe Dal Sasso est un compositeur fécond, un arrangeur diabolique, généreux chef de meute, improvisateur ingénieux.

Nous embarquons à bord d’un étrange vaisseau spatial, avec un équipage fin prêt pour une aventure incroyable, une « space odyssey » où chacun joue sa partition, offrant à l’ensemble sa ligne propre dans des directions comme éclatées. Les énergies libérées se déploient dans l’espace et le temps. La musique, généreusement expansionniste, parce qu’elle ne prend pas le pouvoir, se développe au contraire, à perte de l’ouïe.  Il y a  aussi du suspense, des effets prenants, accentués par le déferlement d’une batterie qui gronde, tonne, explose. La musique ne s’arrête jamais, ne nous laissant pas de répit : cela commence très vite, très fort, par deux amples compositions que le quintet enchaîne  « V838 » et « NGC 2440 ».  La flûte régule pourtant l’ensemble de sa ferme douceur, impulsant un élan créateur aux autres membres du groupe.

Gérard Tissier

Gérard Tissier

Gérard Tissier

Gérard Tissier

On se laisse prendre par le phrasé du flûtiste et son habileté dans les chorus qu’il partage avec David El Malek à ses côtés : le saxophone ténor, effusif, lyrique, voluptueux et tendre, crée un espace comme en expansion et  la traversière, bien sonorisée, résiste. Leurs unissons nous entraînent loin, très loin.  Quant  à « La nébuleuse d’Orion » qui m’avait déjà accrochée , elle me séduit encore… au moment où j’écris ces lignes, puisque je l’écoute, comme sous emprise.

Puis on passe encore à un autre état, une autre phase de cette musique qui se transforme à chaque thème, le pianiste dispense une sacrée énergie dont s’empare le ténor, déroulant ses volutes à l’infini alors que le batteur en souligne les effets, accompagnant en coloriste le chant de la basse : d’ effusions en collisions,  tous ces « accidents » s’organisent dans cet espace qui nous absorbe, nous enveloppe de ces nappes de sons organiques. Une musique intense, planante, pas vraiment au sens des Pink Floyd, encore que revient en mémoire «A saucerful of secrets». Elle prend des contours différents imitant les nébuleuses, s’ enroulant dans une écharpe  irisée, de vent et de poussière d’étoiles. Chacun des thèmes illustre un aspect différent, une nouvelle approche de composition, sans tomber pour autant dans l’exercice de style. En cela, Dal Sasso suit une lignée de compositeurs inspirés par ce jazz interstellaire, de  John Coltrane à George Russell (Jazz in the Space Age), en ®accord avec son temps, les années soixante.IMGP6025_DxO

« Les Piliers de la Création » qui évoque trois colonnes de poussières,  illustre le travail exceptionnel de cette rythmique à 3 : le contrebassiste Manuel Marchès, plaqué sur le fond de la scène étroite, le batteur cubain très inspiré, Lukmil Perez, d’une  grande finesse  sur les nuances et les couleurs. Pierre de Bethmann fait monter la tension, comme dans un film d’Hitchcock guidé par la musique de Bernard Herrmann. Sans pathos mais avec exaltation. Si le pianiste est aux anges, cette musique semble rendre heureux ceux qui la font … sans parler de ceux qui l’écoutent. Le public est littéralement subjugué.

Le final enchaîne une berceuse (trop courte) très émouvante et puis ce stupéfiant « La Nébuleuse de l’œil du chat » sur les traces d’Olivier Messiaen qui, synesthésique, transposait les couleurs de la nature environnante en  sons, associant les notes à des couleurs de l’arc-en-ciel. Ainsi découvre-t-on des couleurs, des images qui s’additionnent aux diverses émotions ressenties en écoutant sa musique. Et par un effet extraordinaire des lumières, que je remarque plus particulièrement à ce moment, le rideau de velours de scène s’embrase de la pourpre cramoisie à l’émeraude fine, du bleu cobalt à l’outremer.

Une musique qui s’intègre avec le reste de l’univers, plongeant au cœur d’une origine que l’on ne connaît pas, en un espace qui enchaîne  des transformations incessantes. Tout comme le jazz qui a un goût pour l’inachèvement.

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Sophie Chambon

 |Une semaine après la sortie de l’album Les Nébuleuses sur le label participatif  Jazz &People, le concert du quintet de Christophe Dal Sasso ouvre la saison du Moulin à Jazz de  Vitrolles où il est toujours agréable de retrouver la fine équipe de l’association.

 

Samedi 1er Octobre : Les Nébuleuses , Moulin à Jazz, Vitrolles (13)

Christophe Dal Sasso ( flûtes), David El-Malek (saxophone ténor), Pierre de Bethmann (Fender Rhodes), Manuel Marchès (contrebasse), Lukmil Perez Herrera ( batterie).

Un concert dont je ne sais pas grand-chose, hormis l’extrait présenté dans Open Jazz,  le 22 septembre dernier, intitulé « La nébuleuse d’Orion », un morceau tout à fait hypnotique, d’une beauté sidérale évidemment, qui se construit sur un crescendo que démarre au Fender Pierre de Bethmann (membre de Prysm, puis leader du quintet Ilium … qui a souvent accompagné le flûtiste et en l’occurrence, dans son album Ressac dont nous entendrons « Terre de Naissance » qui souligne les origines méridionales du leader, varois, de la Londe très précisément.)

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L’accroche radiophonique était suffisante pour venir découvrir la beauté des nébuleuses, un samedi soir orageux. Un programme ambitieux, orchestral qui tourne, dans le CD, autour d’un quintet de jazz et d’un trio de cordes pour « refléter le caractère instable et diffus de ces objets célestes ». En tournée, l’orchestre est réduit au quintet jazz, ce qui suffit au bonheur de l’écoute, tant les phénomènes d’interaction et de tension propres à la dynamique de groupe sont perceptibles,  dans le Moulin à Jazz, plein comme un œuf. Il fait chaud, étouffant même en ce premier octobre.

Mais  au fait, qu’est-ce qu’une nébuleuse? Du latin «nebula» (nuage),  c’est un objet céleste composé de gaz raréfiés et de poussières interstellaires. Ces formes instables, à l’origine de la formation des étoiles, ont des contours et des couleurs impressionnantes, la NASA en ayant capturé les plus belles images grâce à ses télescopes dont le célèbre Hubble. Et si vous cherchez à savoir comment passer de la théorie du big band à celle du big bang, allez sur le site https://www.kisskissbankbank.com/christophe-dal-sasso-les-nebuleuses

Vous saurez encore comment trouver l’inspiration en regardant le ciel, les étoiles, la matière mystérieuse de l’univers. Les sept compositions et arrangements du flûtiste Christophe dal Sasso  se partagent entre forme écrite et improvisation, principes sériels et jazz post-coltranien ( avec les frères Belmondo, il a donné, de « A Love Supreme », une reprise orchestrale très réussie). Si son écriture savante va voir du côté de Messiaen, de Boulez, Christophe Dal Sasso est un compositeur fécond, un arrangeur diabolique, généreux chef de meute, improvisateur ingénieux.

Nous embarquons à bord d’un étrange vaisseau spatial, avec un équipage fin prêt pour une aventure incroyable, une « space odyssey » où chacun joue sa partition, offrant à l’ensemble sa ligne propre dans des directions comme éclatées. Les énergies libérées se déploient dans l’espace et le temps. La musique, généreusement expansionniste, parce qu’elle ne prend pas le pouvoir, se développe au contraire, à perte de l’ouïe.  Il y a  aussi du suspense, des effets prenants, accentués par le déferlement d’une batterie qui gronde, tonne, explose. La musique ne s’arrête jamais, ne nous laissant pas de répit : cela commence très vite, très fort, par deux amples compositions que le quintet enchaîne  « V838 » et « NGC 2440 ».  La flûte régule pourtant l’ensemble de sa ferme douceur, impulsant un élan créateur aux autres membres du groupe.

Gérard Tissier

Gérard Tissier

Gérard Tissier

Gérard Tissier

On se laisse prendre par le phrasé du flûtiste et son habileté dans les chorus qu’il partage avec David El Malek à ses côtés : le saxophone ténor, effusif, lyrique, voluptueux et tendre, crée un espace comme en expansion et  la traversière, bien sonorisée, résiste. Leurs unissons nous entraînent loin, très loin.  Quant  à « La nébuleuse d’Orion » qui m’avait déjà accrochée , elle me séduit encore… au moment où j’écris ces lignes, puisque je l’écoute, comme sous emprise.

Puis on passe encore à un autre état, une autre phase de cette musique qui se transforme à chaque thème, le pianiste dispense une sacrée énergie dont s’empare le ténor, déroulant ses volutes à l’infini alors que le batteur en souligne les effets, accompagnant en coloriste le chant de la basse : d’ effusions en collisions,  tous ces « accidents » s’organisent dans cet espace qui nous absorbe, nous enveloppe de ces nappes de sons organiques. Une musique intense, planante, pas vraiment au sens des Pink Floyd, encore que revient en mémoire «A saucerful of secrets». Elle prend des contours différents imitant les nébuleuses, s’ enroulant dans une écharpe  irisée, de vent et de poussière d’étoiles. Chacun des thèmes illustre un aspect différent, une nouvelle approche de composition, sans tomber pour autant dans l’exercice de style. En cela, Dal Sasso suit une lignée de compositeurs inspirés par ce jazz interstellaire, de  John Coltrane à George Russell (Jazz in the Space Age), en ®accord avec son temps, les années soixante.IMGP6025_DxO

« Les Piliers de la Création » qui évoque trois colonnes de poussières,  illustre le travail exceptionnel de cette rythmique à 3 : le contrebassiste Manuel Marchès, plaqué sur le fond de la scène étroite, le batteur cubain très inspiré, Lukmil Perez, d’une  grande finesse  sur les nuances et les couleurs. Pierre de Bethmann fait monter la tension, comme dans un film d’Hitchcock guidé par la musique de Bernard Herrmann. Sans pathos mais avec exaltation. Si le pianiste est aux anges, cette musique semble rendre heureux ceux qui la font … sans parler de ceux qui l’écoutent. Le public est littéralement subjugué.

Le final enchaîne une berceuse (trop courte) très émouvante et puis ce stupéfiant « La Nébuleuse de l’œil du chat » sur les traces d’Olivier Messiaen qui, synesthésique, transposait les couleurs de la nature environnante en  sons, associant les notes à des couleurs de l’arc-en-ciel. Ainsi découvre-t-on des couleurs, des images qui s’additionnent aux diverses émotions ressenties en écoutant sa musique. Et par un effet extraordinaire des lumières, que je remarque plus particulièrement à ce moment, le rideau de velours de scène s’embrase de la pourpre cramoisie à l’émeraude fine, du bleu cobalt à l’outremer.

Une musique qui s’intègre avec le reste de l’univers, plongeant au cœur d’une origine que l’on ne connaît pas, en un espace qui enchaîne  des transformations incessantes. Tout comme le jazz qui a un goût pour l’inachèvement.

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Sophie Chambon

 |Une semaine après la sortie de l’album Les Nébuleuses sur le label participatif  Jazz &People, le concert du quintet de Christophe Dal Sasso ouvre la saison du Moulin à Jazz de  Vitrolles où il est toujours agréable de retrouver la fine équipe de l’association.

 

Samedi 1er Octobre : Les Nébuleuses , Moulin à Jazz, Vitrolles (13)

Christophe Dal Sasso ( flûtes), David El-Malek (saxophone ténor), Pierre de Bethmann (Fender Rhodes), Manuel Marchès (contrebasse), Lukmil Perez Herrera ( batterie).

Un concert dont je ne sais pas grand-chose, hormis l’extrait présenté dans Open Jazz,  le 22 septembre dernier, intitulé « La nébuleuse d’Orion », un morceau tout à fait hypnotique, d’une beauté sidérale évidemment, qui se construit sur un crescendo que démarre au Fender Pierre de Bethmann (membre de Prysm, puis leader du quintet Ilium … qui a souvent accompagné le flûtiste et en l’occurrence, dans son album Ressac dont nous entendrons « Terre de Naissance » qui souligne les origines méridionales du leader, varois, de la Londe très précisément.)

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L’accroche radiophonique était suffisante pour venir découvrir la beauté des nébuleuses, un samedi soir orageux. Un programme ambitieux, orchestral qui tourne, dans le CD, autour d’un quintet de jazz et d’un trio de cordes pour « refléter le caractère instable et diffus de ces objets célestes ». En tournée, l’orchestre est réduit au quintet jazz, ce qui suffit au bonheur de l’écoute, tant les phénomènes d’interaction et de tension propres à la dynamique de groupe sont perceptibles,  dans le Moulin à Jazz, plein comme un œuf. Il fait chaud, étouffant même en ce premier octobre.

Mais  au fait, qu’est-ce qu’une nébuleuse? Du latin «nebula» (nuage),  c’est un objet céleste composé de gaz raréfiés et de poussières interstellaires. Ces formes instables, à l’origine de la formation des étoiles, ont des contours et des couleurs impressionnantes, la NASA en ayant capturé les plus belles images grâce à ses télescopes dont le célèbre Hubble. Et si vous cherchez à savoir comment passer de la théorie du big band à celle du big bang, allez sur le site https://www.kisskissbankbank.com/christophe-dal-sasso-les-nebuleuses

Vous saurez encore comment trouver l’inspiration en regardant le ciel, les étoiles, la matière mystérieuse de l’univers. Les sept compositions et arrangements du flûtiste Christophe dal Sasso  se partagent entre forme écrite et improvisation, principes sériels et jazz post-coltranien ( avec les frères Belmondo, il a donné, de « A Love Supreme », une reprise orchestrale très réussie). Si son écriture savante va voir du côté de Messiaen, de Boulez, Christophe Dal Sasso est un compositeur fécond, un arrangeur diabolique, généreux chef de meute, improvisateur ingénieux.

Nous embarquons à bord d’un étrange vaisseau spatial, avec un équipage fin prêt pour une aventure incroyable, une « space odyssey » où chacun joue sa partition, offrant à l’ensemble sa ligne propre dans des directions comme éclatées. Les énergies libérées se déploient dans l’espace et le temps. La musique, généreusement expansionniste, parce qu’elle ne prend pas le pouvoir, se développe au contraire, à perte de l’ouïe.  Il y a  aussi du suspense, des effets prenants, accentués par le déferlement d’une batterie qui gronde, tonne, explose. La musique ne s’arrête jamais, ne nous laissant pas de répit : cela commence très vite, très fort, par deux amples compositions que le quintet enchaîne  « V838 » et « NGC 2440 ».  La flûte régule pourtant l’ensemble de sa ferme douceur, impulsant un élan créateur aux autres membres du groupe.

Gérard Tissier

Gérard Tissier

Gérard Tissier

Gérard Tissier

On se laisse prendre par le phrasé du flûtiste et son habileté dans les chorus qu’il partage avec David El Malek à ses côtés : le saxophone ténor, effusif, lyrique, voluptueux et tendre, crée un espace comme en expansion et  la traversière, bien sonorisée, résiste. Leurs unissons nous entraînent loin, très loin.  Quant  à « La nébuleuse d’Orion » qui m’avait déjà accrochée , elle me séduit encore… au moment où j’écris ces lignes, puisque je l’écoute, comme sous emprise.

Puis on passe encore à un autre état, une autre phase de cette musique qui se transforme à chaque thème, le pianiste dispense une sacrée énergie dont s’empare le ténor, déroulant ses volutes à l’infini alors que le batteur en souligne les effets, accompagnant en coloriste le chant de la basse : d’ effusions en collisions,  tous ces « accidents » s’organisent dans cet espace qui nous absorbe, nous enveloppe de ces nappes de sons organiques. Une musique intense, planante, pas vraiment au sens des Pink Floyd, encore que revient en mémoire «A saucerful of secrets». Elle prend des contours différents imitant les nébuleuses, s’ enroulant dans une écharpe  irisée, de vent et de poussière d’étoiles. Chacun des thèmes illustre un aspect différent, une nouvelle approche de composition, sans tomber pour autant dans l’exercice de style. En cela, Dal Sasso suit une lignée de compositeurs inspirés par ce jazz interstellaire, de  John Coltrane à George Russell (Jazz in the Space Age), en ®accord avec son temps, les années soixante.IMGP6025_DxO

« Les Piliers de la Création » qui évoque trois colonnes de poussières,  illustre le travail exceptionnel de cette rythmique à 3 : le contrebassiste Manuel Marchès, plaqué sur le fond de la scène étroite, le batteur cubain très inspiré, Lukmil Perez, d’une  grande finesse  sur les nuances et les couleurs. Pierre de Bethmann fait monter la tension, comme dans un film d’Hitchcock guidé par la musique de Bernard Herrmann. Sans pathos mais avec exaltation. Si le pianiste est aux anges, cette musique semble rendre heureux ceux qui la font … sans parler de ceux qui l’écoutent. Le public est littéralement subjugué.

Le final enchaîne une berceuse (trop courte) très émouvante et puis ce stupéfiant « La Nébuleuse de l’œil du chat » sur les traces d’Olivier Messiaen qui, synesthésique, transposait les couleurs de la nature environnante en  sons, associant les notes à des couleurs de l’arc-en-ciel. Ainsi découvre-t-on des couleurs, des images qui s’additionnent aux diverses émotions ressenties en écoutant sa musique. Et par un effet extraordinaire des lumières, que je remarque plus particulièrement à ce moment, le rideau de velours de scène s’embrase de la pourpre cramoisie à l’émeraude fine, du bleu cobalt à l’outremer.

Une musique qui s’intègre avec le reste de l’univers, plongeant au cœur d’une origine que l’on ne connaît pas, en un espace qui enchaîne  des transformations incessantes. Tout comme le jazz qui a un goût pour l’inachèvement.

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Sophie Chambon

 |Une semaine après la sortie de l’album Les Nébuleuses sur le label participatif  Jazz &People, le concert du quintet de Christophe Dal Sasso ouvre la saison du Moulin à Jazz de  Vitrolles où il est toujours agréable de retrouver la fine équipe de l’association.

 

Samedi 1er Octobre : Les Nébuleuses , Moulin à Jazz, Vitrolles (13)

Christophe Dal Sasso ( flûtes), David El-Malek (saxophone ténor), Pierre de Bethmann (Fender Rhodes), Manuel Marchès (contrebasse), Lukmil Perez Herrera ( batterie).

Un concert dont je ne sais pas grand-chose, hormis l’extrait présenté dans Open Jazz,  le 22 septembre dernier, intitulé « La nébuleuse d’Orion », un morceau tout à fait hypnotique, d’une beauté sidérale évidemment, qui se construit sur un crescendo que démarre au Fender Pierre de Bethmann (membre de Prysm, puis leader du quintet Ilium … qui a souvent accompagné le flûtiste et en l’occurrence, dans son album Ressac dont nous entendrons « Terre de Naissance » qui souligne les origines méridionales du leader, varois, de la Londe très précisément.)

neb 3

L’accroche radiophonique était suffisante pour venir découvrir la beauté des nébuleuses, un samedi soir orageux. Un programme ambitieux, orchestral qui tourne, dans le CD, autour d’un quintet de jazz et d’un trio de cordes pour « refléter le caractère instable et diffus de ces objets célestes ». En tournée, l’orchestre est réduit au quintet jazz, ce qui suffit au bonheur de l’écoute, tant les phénomènes d’interaction et de tension propres à la dynamique de groupe sont perceptibles,  dans le Moulin à Jazz, plein comme un œuf. Il fait chaud, étouffant même en ce premier octobre.

Mais  au fait, qu’est-ce qu’une nébuleuse? Du latin «nebula» (nuage),  c’est un objet céleste composé de gaz raréfiés et de poussières interstellaires. Ces formes instables, à l’origine de la formation des étoiles, ont des contours et des couleurs impressionnantes, la NASA en ayant capturé les plus belles images grâce à ses télescopes dont le célèbre Hubble. Et si vous cherchez à savoir comment passer de la théorie du big band à celle du big bang, allez sur le site https://www.kisskissbankbank.com/christophe-dal-sasso-les-nebuleuses

Vous saurez encore comment trouver l’inspiration en regardant le ciel, les étoiles, la matière mystérieuse de l’univers. Les sept compositions et arrangements du flûtiste Christophe dal Sasso  se partagent entre forme écrite et improvisation, principes sériels et jazz post-coltranien ( avec les frères Belmondo, il a donné, de « A Love Supreme », une reprise orchestrale très réussie). Si son écriture savante va voir du côté de Messiaen, de Boulez, Christophe Dal Sasso est un compositeur fécond, un arrangeur diabolique, généreux chef de meute, improvisateur ingénieux.

Nous embarquons à bord d’un étrange vaisseau spatial, avec un équipage fin prêt pour une aventure incroyable, une « space odyssey » où chacun joue sa partition, offrant à l’ensemble sa ligne propre dans des directions comme éclatées. Les énergies libérées se déploient dans l’espace et le temps. La musique, généreusement expansionniste, parce qu’elle ne prend pas le pouvoir, se développe au contraire, à perte de l’ouïe.  Il y a  aussi du suspense, des effets prenants, accentués par le déferlement d’une batterie qui gronde, tonne, explose. La musique ne s’arrête jamais, ne nous laissant pas de répit : cela commence très vite, très fort, par deux amples compositions que le quintet enchaîne  « V838 » et « NGC 2440 ».  La flûte régule pourtant l’ensemble de sa ferme douceur, impulsant un élan créateur aux autres membres du groupe.

Gérard Tissier

Gérard Tissier

Gérard Tissier

Gérard Tissier

On se laisse prendre par le phrasé du flûtiste et son habileté dans les chorus qu’il partage avec David El Malek à ses côtés : le saxophone ténor, effusif, lyrique, voluptueux et tendre, crée un espace comme en expansion et  la traversière, bien sonorisée, résiste. Leurs unissons nous entraînent loin, très loin.  Quant  à « La nébuleuse d’Orion » qui m’avait déjà accrochée , elle me séduit encore… au moment où j’écris ces lignes, puisque je l’écoute, comme sous emprise.

Puis on passe encore à un autre état, une autre phase de cette musique qui se transforme à chaque thème, le pianiste dispense une sacrée énergie dont s’empare le ténor, déroulant ses volutes à l’infini alors que le batteur en souligne les effets, accompagnant en coloriste le chant de la basse : d’ effusions en collisions,  tous ces « accidents » s’organisent dans cet espace qui nous absorbe, nous enveloppe de ces nappes de sons organiques. Une musique intense, planante, pas vraiment au sens des Pink Floyd, encore que revient en mémoire «A saucerful of secrets». Elle prend des contours différents imitant les nébuleuses, s’ enroulant dans une écharpe  irisée, de vent et de poussière d’étoiles. Chacun des thèmes illustre un aspect différent, une nouvelle approche de composition, sans tomber pour autant dans l’exercice de style. En cela, Dal Sasso suit une lignée de compositeurs inspirés par ce jazz interstellaire, de  John Coltrane à George Russell (Jazz in the Space Age), en ®accord avec son temps, les années soixante.IMGP6025_DxO

« Les Piliers de la Création » qui évoque trois colonnes de poussières,  illustre le travail exceptionnel de cette rythmique à 3 : le contrebassiste Manuel Marchès, plaqué sur le fond de la scène étroite, le batteur cubain très inspiré, Lukmil Perez, d’une  grande finesse  sur les nuances et les couleurs. Pierre de Bethmann fait monter la tension, comme dans un film d’Hitchcock guidé par la musique de Bernard Herrmann. Sans pathos mais avec exaltation. Si le pianiste est aux anges, cette musique semble rendre heureux ceux qui la font … sans parler de ceux qui l’écoutent. Le public est littéralement subjugué.

Le final enchaîne une berceuse (trop courte) très émouvante et puis ce stupéfiant « La Nébuleuse de l’œil du chat » sur les traces d’Olivier Messiaen qui, synesthésique, transposait les couleurs de la nature environnante en  sons, associant les notes à des couleurs de l’arc-en-ciel. Ainsi découvre-t-on des couleurs, des images qui s’additionnent aux diverses émotions ressenties en écoutant sa musique. Et par un effet extraordinaire des lumières, que je remarque plus particulièrement à ce moment, le rideau de velours de scène s’embrase de la pourpre cramoisie à l’émeraude fine, du bleu cobalt à l’outremer.

Une musique qui s’intègre avec le reste de l’univers, plongeant au cœur d’une origine que l’on ne connaît pas, en un espace qui enchaîne  des transformations incessantes. Tout comme le jazz qui a un goût pour l’inachèvement.

IMGP5887_DxO

Sophie Chambon