Jazz live
Publié le 13 Juil 2012

Nice Jazz Festival. Un air de famille

Le jazz manouche est souvent une affaire de parentèle. De fratrie, de cousinage. De dynastie. L’exemple vient de loin, et de haut, avec les Reinhardt, Django, son frère Joseph et leur descendance. A l’heure actuelle, le trio Rosenberg en est l’exemple emblématique.


Trio Rosenberg. Stochelo Rosenberg (g), Nous’che Rosenberg (g), Nonnie Rosenberg (b).

Thomas Dutronc (g, voc).

Ron Carter Golden Stricker Trio. Ron Carter (b), Russell Malone (g), Donald Vega (p).

Ahmad Jamal (p), Reginald Veal (b), Herlin Riley (dm), Manolo Badrena (perc).  

 

Deux frères, Nous’che le guitariste rythmique et Nonnie le contrebassiste, avec leur cousin Stochelo, soliste virtuose, toujours stupéfiant d’aisance et d’inventivité. Leur prestation connaît, à juste titre le succès attendu, même si la foule est venue, en grande partie, pour Thomas Dutronc qui leur succède, mercredi 11, sur la scène Masséna.

Ce dernier a certes pris ses distances avec le jazz manouche. Il vole de ses propres ailes qui l’ont conduit vers d’autres cieux, mais il reste le frère, ou au moins le cousin, d’adoption. Interrogé à son propos, Stochelo, qui l’a connu du temps du Gipsy Project de Biréli Lagrène, ne tarit pas d’éloge. Le même, questionné à l’issue du concert sur les projets du trio Rosenberg, répond en une phrase : « Jouer le plus possible ». On ne saurait être plus laconique. Ni plus réaliste.

Autre famille, au sens métaphorique cette fois, celle que forment Ron Carter et son trio. Au demeurant recomposée, puisque le new-yorkais Donald Vega a pris la place du titulaire habituel Mulgrew Miller. La bonne entente n’en est pas altérée pour autant. Le guitariste et le bassiste entretiennent des liens de complicité – complémentarité des discours, soutien harmonique mutuel – auxquels le pianiste vient à son tour mêler sa voix.

Comme tous trois se révèlent, de surcroît, remarquables solistes, leur conversation, émaillée de formules brillantes, reste séduisante de bout en bout. Feutrée, sans éclats intempestifs. Emaillée parfois de clins d’oeil (Carter introduisant dans une de ses improvisations quelques mesures de la première Suite pour violoncelle de Jean-Sébastien Bach, Russell Malone convoquant, pour sa part, tel refrain de standard au détour d’un de ces chorus denses, nourris, vertigineux d’aisance dont il a le secret). Le pianiste, donc, n’est pas en reste. Accompagnateur plutôt discret, mais soliste souvent passionnant. Du jazz de chambre dont on goûte l’élégance, le raffinement. La nuance préférée à la couleur criarde. Le Funny Valentine longuement développé, paraphrasé, commenté par Donald Vega reste pour moi le meilleur jour du festival. Comme aurait dire mon arrière grand-oncle Joseph Prudhomme.

Enfin, Ahmad Jamal, en père de famille peut-être moins impérieux qu’à l’accoutumée. Obéi toutefois au doigt et à l’oeil par des partenaires qu’il sollicite tour à tour, Herlin Riley, toujours impérial, et Reginald Veal qui s’est substitué à James Cammack sans que le groupe en soit perturbé. Pas davantage l’esthétique du pianiste, ses brisures rythmiques, ses ruptures harmoniques, ses déconstructions plus méthodiques qu’il n’y paraît de prime abord.

Les standards ainsi triturés en ressortent méconnaissables, sinon à quelques bribes de thèmes repris de loin en loin. Manolo Badrena leur apporte, du geste et de la voix, une touche incongrue. J’avoue ne toujours pas comprendre cette dilection de Jamal pour les percussionnistes, quand son trio a toujours compté, depuis Vernell Fournier jusqu’à Riley en passant par Idriss Muhammad et quelques autres, de remarquables rythmiciens largement capables de se suffire à eux-mêmes. Peut-être le syndrome compulsif de l’adoption…

 

Jacques Aboucaya

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Le jazz manouche est souvent une affaire de parentèle. De fratrie, de cousinage. De dynastie. L’exemple vient de loin, et de haut, avec les Reinhardt, Django, son frère Joseph et leur descendance. A l’heure actuelle, le trio Rosenberg en est l’exemple emblématique.


Trio Rosenberg. Stochelo Rosenberg (g), Nous’che Rosenberg (g), Nonnie Rosenberg (b).

Thomas Dutronc (g, voc).

Ron Carter Golden Stricker Trio. Ron Carter (b), Russell Malone (g), Donald Vega (p).

Ahmad Jamal (p), Reginald Veal (b), Herlin Riley (dm), Manolo Badrena (perc).  

 

Deux frères, Nous’che le guitariste rythmique et Nonnie le contrebassiste, avec leur cousin Stochelo, soliste virtuose, toujours stupéfiant d’aisance et d’inventivité. Leur prestation connaît, à juste titre le succès attendu, même si la foule est venue, en grande partie, pour Thomas Dutronc qui leur succède, mercredi 11, sur la scène Masséna.

Ce dernier a certes pris ses distances avec le jazz manouche. Il vole de ses propres ailes qui l’ont conduit vers d’autres cieux, mais il reste le frère, ou au moins le cousin, d’adoption. Interrogé à son propos, Stochelo, qui l’a connu du temps du Gipsy Project de Biréli Lagrène, ne tarit pas d’éloge. Le même, questionné à l’issue du concert sur les projets du trio Rosenberg, répond en une phrase : « Jouer le plus possible ». On ne saurait être plus laconique. Ni plus réaliste.

Autre famille, au sens métaphorique cette fois, celle que forment Ron Carter et son trio. Au demeurant recomposée, puisque le new-yorkais Donald Vega a pris la place du titulaire habituel Mulgrew Miller. La bonne entente n’en est pas altérée pour autant. Le guitariste et le bassiste entretiennent des liens de complicité – complémentarité des discours, soutien harmonique mutuel – auxquels le pianiste vient à son tour mêler sa voix.

Comme tous trois se révèlent, de surcroît, remarquables solistes, leur conversation, émaillée de formules brillantes, reste séduisante de bout en bout. Feutrée, sans éclats intempestifs. Emaillée parfois de clins d’oeil (Carter introduisant dans une de ses improvisations quelques mesures de la première Suite pour violoncelle de Jean-Sébastien Bach, Russell Malone convoquant, pour sa part, tel refrain de standard au détour d’un de ces chorus denses, nourris, vertigineux d’aisance dont il a le secret). Le pianiste, donc, n’est pas en reste. Accompagnateur plutôt discret, mais soliste souvent passionnant. Du jazz de chambre dont on goûte l’élégance, le raffinement. La nuance préférée à la couleur criarde. Le Funny Valentine longuement développé, paraphrasé, commenté par Donald Vega reste pour moi le meilleur jour du festival. Comme aurait dire mon arrière grand-oncle Joseph Prudhomme.

Enfin, Ahmad Jamal, en père de famille peut-être moins impérieux qu’à l’accoutumée. Obéi toutefois au doigt et à l’oeil par des partenaires qu’il sollicite tour à tour, Herlin Riley, toujours impérial, et Reginald Veal qui s’est substitué à James Cammack sans que le groupe en soit perturbé. Pas davantage l’esthétique du pianiste, ses brisures rythmiques, ses ruptures harmoniques, ses déconstructions plus méthodiques qu’il n’y paraît de prime abord.

Les standards ainsi triturés en ressortent méconnaissables, sinon à quelques bribes de thèmes repris de loin en loin. Manolo Badrena leur apporte, du geste et de la voix, une touche incongrue. J’avoue ne toujours pas comprendre cette dilection de Jamal pour les percussionnistes, quand son trio a toujours compté, depuis Vernell Fournier jusqu’à Riley en passant par Idriss Muhammad et quelques autres, de remarquables rythmiciens largement capables de se suffire à eux-mêmes. Peut-être le syndrome compulsif de l’adoption…

 

Jacques Aboucaya

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Le jazz manouche est souvent une affaire de parentèle. De fratrie, de cousinage. De dynastie. L’exemple vient de loin, et de haut, avec les Reinhardt, Django, son frère Joseph et leur descendance. A l’heure actuelle, le trio Rosenberg en est l’exemple emblématique.


Trio Rosenberg. Stochelo Rosenberg (g), Nous’che Rosenberg (g), Nonnie Rosenberg (b).

Thomas Dutronc (g, voc).

Ron Carter Golden Stricker Trio. Ron Carter (b), Russell Malone (g), Donald Vega (p).

Ahmad Jamal (p), Reginald Veal (b), Herlin Riley (dm), Manolo Badrena (perc).  

 

Deux frères, Nous’che le guitariste rythmique et Nonnie le contrebassiste, avec leur cousin Stochelo, soliste virtuose, toujours stupéfiant d’aisance et d’inventivité. Leur prestation connaît, à juste titre le succès attendu, même si la foule est venue, en grande partie, pour Thomas Dutronc qui leur succède, mercredi 11, sur la scène Masséna.

Ce dernier a certes pris ses distances avec le jazz manouche. Il vole de ses propres ailes qui l’ont conduit vers d’autres cieux, mais il reste le frère, ou au moins le cousin, d’adoption. Interrogé à son propos, Stochelo, qui l’a connu du temps du Gipsy Project de Biréli Lagrène, ne tarit pas d’éloge. Le même, questionné à l’issue du concert sur les projets du trio Rosenberg, répond en une phrase : « Jouer le plus possible ». On ne saurait être plus laconique. Ni plus réaliste.

Autre famille, au sens métaphorique cette fois, celle que forment Ron Carter et son trio. Au demeurant recomposée, puisque le new-yorkais Donald Vega a pris la place du titulaire habituel Mulgrew Miller. La bonne entente n’en est pas altérée pour autant. Le guitariste et le bassiste entretiennent des liens de complicité – complémentarité des discours, soutien harmonique mutuel – auxquels le pianiste vient à son tour mêler sa voix.

Comme tous trois se révèlent, de surcroît, remarquables solistes, leur conversation, émaillée de formules brillantes, reste séduisante de bout en bout. Feutrée, sans éclats intempestifs. Emaillée parfois de clins d’oeil (Carter introduisant dans une de ses improvisations quelques mesures de la première Suite pour violoncelle de Jean-Sébastien Bach, Russell Malone convoquant, pour sa part, tel refrain de standard au détour d’un de ces chorus denses, nourris, vertigineux d’aisance dont il a le secret). Le pianiste, donc, n’est pas en reste. Accompagnateur plutôt discret, mais soliste souvent passionnant. Du jazz de chambre dont on goûte l’élégance, le raffinement. La nuance préférée à la couleur criarde. Le Funny Valentine longuement développé, paraphrasé, commenté par Donald Vega reste pour moi le meilleur jour du festival. Comme aurait dire mon arrière grand-oncle Joseph Prudhomme.

Enfin, Ahmad Jamal, en père de famille peut-être moins impérieux qu’à l’accoutumée. Obéi toutefois au doigt et à l’oeil par des partenaires qu’il sollicite tour à tour, Herlin Riley, toujours impérial, et Reginald Veal qui s’est substitué à James Cammack sans que le groupe en soit perturbé. Pas davantage l’esthétique du pianiste, ses brisures rythmiques, ses ruptures harmoniques, ses déconstructions plus méthodiques qu’il n’y paraît de prime abord.

Les standards ainsi triturés en ressortent méconnaissables, sinon à quelques bribes de thèmes repris de loin en loin. Manolo Badrena leur apporte, du geste et de la voix, une touche incongrue. J’avoue ne toujours pas comprendre cette dilection de Jamal pour les percussionnistes, quand son trio a toujours compté, depuis Vernell Fournier jusqu’à Riley en passant par Idriss Muhammad et quelques autres, de remarquables rythmiciens largement capables de se suffire à eux-mêmes. Peut-être le syndrome compulsif de l’adoption…

 

Jacques Aboucaya

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Le jazz manouche est souvent une affaire de parentèle. De fratrie, de cousinage. De dynastie. L’exemple vient de loin, et de haut, avec les Reinhardt, Django, son frère Joseph et leur descendance. A l’heure actuelle, le trio Rosenberg en est l’exemple emblématique.


Trio Rosenberg. Stochelo Rosenberg (g), Nous’che Rosenberg (g), Nonnie Rosenberg (b).

Thomas Dutronc (g, voc).

Ron Carter Golden Stricker Trio. Ron Carter (b), Russell Malone (g), Donald Vega (p).

Ahmad Jamal (p), Reginald Veal (b), Herlin Riley (dm), Manolo Badrena (perc).  

 

Deux frères, Nous’che le guitariste rythmique et Nonnie le contrebassiste, avec leur cousin Stochelo, soliste virtuose, toujours stupéfiant d’aisance et d’inventivité. Leur prestation connaît, à juste titre le succès attendu, même si la foule est venue, en grande partie, pour Thomas Dutronc qui leur succède, mercredi 11, sur la scène Masséna.

Ce dernier a certes pris ses distances avec le jazz manouche. Il vole de ses propres ailes qui l’ont conduit vers d’autres cieux, mais il reste le frère, ou au moins le cousin, d’adoption. Interrogé à son propos, Stochelo, qui l’a connu du temps du Gipsy Project de Biréli Lagrène, ne tarit pas d’éloge. Le même, questionné à l’issue du concert sur les projets du trio Rosenberg, répond en une phrase : « Jouer le plus possible ». On ne saurait être plus laconique. Ni plus réaliste.

Autre famille, au sens métaphorique cette fois, celle que forment Ron Carter et son trio. Au demeurant recomposée, puisque le new-yorkais Donald Vega a pris la place du titulaire habituel Mulgrew Miller. La bonne entente n’en est pas altérée pour autant. Le guitariste et le bassiste entretiennent des liens de complicité – complémentarité des discours, soutien harmonique mutuel – auxquels le pianiste vient à son tour mêler sa voix.

Comme tous trois se révèlent, de surcroît, remarquables solistes, leur conversation, émaillée de formules brillantes, reste séduisante de bout en bout. Feutrée, sans éclats intempestifs. Emaillée parfois de clins d’oeil (Carter introduisant dans une de ses improvisations quelques mesures de la première Suite pour violoncelle de Jean-Sébastien Bach, Russell Malone convoquant, pour sa part, tel refrain de standard au détour d’un de ces chorus denses, nourris, vertigineux d’aisance dont il a le secret). Le pianiste, donc, n’est pas en reste. Accompagnateur plutôt discret, mais soliste souvent passionnant. Du jazz de chambre dont on goûte l’élégance, le raffinement. La nuance préférée à la couleur criarde. Le Funny Valentine longuement développé, paraphrasé, commenté par Donald Vega reste pour moi le meilleur jour du festival. Comme aurait dire mon arrière grand-oncle Joseph Prudhomme.

Enfin, Ahmad Jamal, en père de famille peut-être moins impérieux qu’à l’accoutumée. Obéi toutefois au doigt et à l’oeil par des partenaires qu’il sollicite tour à tour, Herlin Riley, toujours impérial, et Reginald Veal qui s’est substitué à James Cammack sans que le groupe en soit perturbé. Pas davantage l’esthétique du pianiste, ses brisures rythmiques, ses ruptures harmoniques, ses déconstructions plus méthodiques qu’il n’y paraît de prime abord.

Les standards ainsi triturés en ressortent méconnaissables, sinon à quelques bribes de thèmes repris de loin en loin. Manolo Badrena leur apporte, du geste et de la voix, une touche incongrue. J’avoue ne toujours pas comprendre cette dilection de Jamal pour les percussionnistes, quand son trio a toujours compté, depuis Vernell Fournier jusqu’à Riley en passant par Idriss Muhammad et quelques autres, de remarquables rythmiciens largement capables de se suffire à eux-mêmes. Peut-être le syndrome compulsif de l’adoption…

 

Jacques Aboucaya