Jazz live
Publié le 26 Avr 2014

Un ONJ habité

Le nouvel ONJ d’Olivier Benoît se produisait hier sous la halle du Carreau du Temple où il a trouvé demeure et qui s’ouvrait hier au public.

 

Carreau du Temple, Paris (75), le 26 avril 2014.

 

ONJ : Olivier Benoît (composition, direction, guitare électrique), Théo Ceccaldi (violon), Fabrice Martinez (trompette, bugle), Fidel Fourneyron (trombone, tuba), Hugues Mayot (sax alto), Jean Dousteyssier (clarinettes), Alexandra Grimal (sax ténor), Sophie Agnel (piano), Paul Brousseau (piano électrique et bidouilles électroniques), Bruno Chevillon (contrebasse, guitare basse électrique), Eric Echampard (batterie).

 

Quel nouvel ONJ n’a pas fait polémique ? Celui-ci, lorsque la nomination d’Olivier Benoît a été connue, peut-être plus qu’aucun autre. Dans ce domaine, je me suis toujours senti quelque solidarité avec les râleurs et cette fois-ci tout particulièrement. Pas seulement parce que les détracteurs faisaient circuler sur le web des images d’un concert dirigé par Olivier Benoît qui pouvaient laisser perplexe… Mais, pour faire bonne mesure, je me souvenais aussi du dernier concert de l’ONJ de Paolo Damiani au New Morning. L’exercice en avait été écourté après un démarrage difficile (suivi de quelques claquements de portes), et un suite compliquée avec un seconde équipe. Le concert avait commencé avec une pièce de Paolo Damiani qui faisait du Damiani, une autre de Gianluigi Trovesi qui faisait du Trovesi et une troisième de François Jeanneau qui faisait du Jeanneau… ce qui est dans la nature des choses, même si tout cela était d’un intérêt très inégal. Et puis… au moment où je m’apprêtais à rentrer chez moi ou à filer faire un tour rue des Lombards, pour voir si ce soir-là l’on y réinventait pas la roue carrée , il avait eu deux autres pièces qui m’avaient assis. Signées respectivement par Olivier Benoît et Régis Huby, elles faisaient entendre qu’en coulisse d’un disque enregistré chez ECM dans des conditions qui laissent des souvenirs très disparates parmi les différents protagonistes, la jeune garde avait pris le pouvoir en un noyau plein d’avenir.


Un avenir qui se concrétise un peu avec cette nomination d’Olivier Benoît au coude à coude avec Régis Huby. Et pour tout dire, j’attendais plutôt Régis Huby pour ce mélange d’exigence sans concession et de versalité (anglicisme, mais tellement pratique, tant, à 1h du matin pressé d’aller me coucher, un mot me semble manquer dans notre langue) qui aurait pu donner une accroche “grand public” à l’ONJ, sans tomber dans les tartes à la crème des musiques actuelles, métissées, etc. Impression laissée par ce parcours qui  mène Huby de son premier disque “Le Sentiment des brutes” dans un très bel enracinement en terre bretonne à l’âpre Quatuor IXI en passant par sa splendide direction musicale pour le spectacle “à la Broadway” de Lambert Wilson La Nuit américaine. Mais c’est la ligne “dure” qui l’a emporté, celle d’Olivier Benoît (ce qui est peut-être une simple vue de l’esprit).


Concert-événement, concert “debout” pour l’ouverture du Carreau du temple, donné sous la grande Halle. Qui se souvient de l’ambiance sonore des marchés couverts parisiens se doutera qu’il a fallu tout le talent de l’ingénieur du son Boris Darley pour éviter l’inaudible. La ligne dure ? Olivier Benoît fait entendre une musique dont les radios ne voudront pas, pas même France Culture où un bon jazzman est un jazzman mort (à moins qu’il ne soit chanteur de charme) et peut-être pas même à France Musique où la programmation d’un extrait de Miles Davis au Fillmore en 1970 peut passer pour du terrorisme et où la proposition d’une Nuit “Wayne Shorter-Joe Zawinul” peut se trouver refusée par un directeur des programmes parce que les nuits de France Musique sont réservées à des musiciens connus. De la première partie de concert (je n’ai pas entendu la seconde), je retiens une très belle écriture, où l’influence des répétitifs américains débarrassée de tout dogmatisme est portée par une énergie qui n’a pas de rock que le nom et un art du développement, de la couleur orchestrale et du contrepoint qui puise dans un vaste patrimoine allant du premier baroque aux compositeurs du XXème siècle, tout en donnant un large place aux solistes.


Ce qui va nous changer de l’ONJ précédent où les solistes se trouvaient écrasés par des “projets”, souvent brillants, pas toujours réalisables sur scène, la plupart du temps glacés par un manque d’espace laissé à l’initiative improvisée. Certes, l’acoustique de la halle du Carreau déservait les solistes. Fabrice Martinez et Bruno Chevillon (à mes oreilles les grand solos de la soirée), dans des situations  orchestrales leur pemettant de se faire entendre, Paul Brousseau a capella dans une merveilleuse coda à la première partie et Théo Ceccaldi parce qu’il donne à voir ce qu’il joue comme les acteurs de la Grèce Antique exagéraient leurs gestes pour les derniers gradins, tirèrent leur épingle du jeu. Ce qu’on perçut des solos d’Alexandra Grimal et Hugues Mayot, confirmait un art du solo partagé par leurs comparses qui pourra encore s’épanouir avec le temps dans ce pari qu’ils semblent se donner de jouer avec l’écriture de Benoît, comme un bopper joue avec sa grille, mais selon une “chronologie” toute différente.  Bref, pour résumer ce galimatias, ça faisait longtemps que je n’avais entendu un ONJ aussi immédiatement habité. Dès juin sur un premier disque qui sera présenté dans l’acoustique plus décente de l’auditorium du Carreau du Temple.


Evidemment, on dira : « Quel rapport avec le jazz ? » Aurait-on confié l’ONJ à l’un de ses détracteurs, quel rapport ça aurait eu avec ça ?


Capture decran 2014-04-27 a 09.01.30

 

 

Qui croque son époque à pleine dents ?


Franck Bergerot

|

Le nouvel ONJ d’Olivier Benoît se produisait hier sous la halle du Carreau du Temple où il a trouvé demeure et qui s’ouvrait hier au public.

 

Carreau du Temple, Paris (75), le 26 avril 2014.

 

ONJ : Olivier Benoît (composition, direction, guitare électrique), Théo Ceccaldi (violon), Fabrice Martinez (trompette, bugle), Fidel Fourneyron (trombone, tuba), Hugues Mayot (sax alto), Jean Dousteyssier (clarinettes), Alexandra Grimal (sax ténor), Sophie Agnel (piano), Paul Brousseau (piano électrique et bidouilles électroniques), Bruno Chevillon (contrebasse, guitare basse électrique), Eric Echampard (batterie).

 

Quel nouvel ONJ n’a pas fait polémique ? Celui-ci, lorsque la nomination d’Olivier Benoît a été connue, peut-être plus qu’aucun autre. Dans ce domaine, je me suis toujours senti quelque solidarité avec les râleurs et cette fois-ci tout particulièrement. Pas seulement parce que les détracteurs faisaient circuler sur le web des images d’un concert dirigé par Olivier Benoît qui pouvaient laisser perplexe… Mais, pour faire bonne mesure, je me souvenais aussi du dernier concert de l’ONJ de Paolo Damiani au New Morning. L’exercice en avait été écourté après un démarrage difficile (suivi de quelques claquements de portes), et un suite compliquée avec un seconde équipe. Le concert avait commencé avec une pièce de Paolo Damiani qui faisait du Damiani, une autre de Gianluigi Trovesi qui faisait du Trovesi et une troisième de François Jeanneau qui faisait du Jeanneau… ce qui est dans la nature des choses, même si tout cela était d’un intérêt très inégal. Et puis… au moment où je m’apprêtais à rentrer chez moi ou à filer faire un tour rue des Lombards, pour voir si ce soir-là l’on y réinventait pas la roue carrée , il avait eu deux autres pièces qui m’avaient assis. Signées respectivement par Olivier Benoît et Régis Huby, elles faisaient entendre qu’en coulisse d’un disque enregistré chez ECM dans des conditions qui laissent des souvenirs très disparates parmi les différents protagonistes, la jeune garde avait pris le pouvoir en un noyau plein d’avenir.


Un avenir qui se concrétise un peu avec cette nomination d’Olivier Benoît au coude à coude avec Régis Huby. Et pour tout dire, j’attendais plutôt Régis Huby pour ce mélange d’exigence sans concession et de versalité (anglicisme, mais tellement pratique, tant, à 1h du matin pressé d’aller me coucher, un mot me semble manquer dans notre langue) qui aurait pu donner une accroche “grand public” à l’ONJ, sans tomber dans les tartes à la crème des musiques actuelles, métissées, etc. Impression laissée par ce parcours qui  mène Huby de son premier disque “Le Sentiment des brutes” dans un très bel enracinement en terre bretonne à l’âpre Quatuor IXI en passant par sa splendide direction musicale pour le spectacle “à la Broadway” de Lambert Wilson La Nuit américaine. Mais c’est la ligne “dure” qui l’a emporté, celle d’Olivier Benoît (ce qui est peut-être une simple vue de l’esprit).


Concert-événement, concert “debout” pour l’ouverture du Carreau du temple, donné sous la grande Halle. Qui se souvient de l’ambiance sonore des marchés couverts parisiens se doutera qu’il a fallu tout le talent de l’ingénieur du son Boris Darley pour éviter l’inaudible. La ligne dure ? Olivier Benoît fait entendre une musique dont les radios ne voudront pas, pas même France Culture où un bon jazzman est un jazzman mort (à moins qu’il ne soit chanteur de charme) et peut-être pas même à France Musique où la programmation d’un extrait de Miles Davis au Fillmore en 1970 peut passer pour du terrorisme et où la proposition d’une Nuit “Wayne Shorter-Joe Zawinul” peut se trouver refusée par un directeur des programmes parce que les nuits de France Musique sont réservées à des musiciens connus. De la première partie de concert (je n’ai pas entendu la seconde), je retiens une très belle écriture, où l’influence des répétitifs américains débarrassée de tout dogmatisme est portée par une énergie qui n’a pas de rock que le nom et un art du développement, de la couleur orchestrale et du contrepoint qui puise dans un vaste patrimoine allant du premier baroque aux compositeurs du XXème siècle, tout en donnant un large place aux solistes.


Ce qui va nous changer de l’ONJ précédent où les solistes se trouvaient écrasés par des “projets”, souvent brillants, pas toujours réalisables sur scène, la plupart du temps glacés par un manque d’espace laissé à l’initiative improvisée. Certes, l’acoustique de la halle du Carreau déservait les solistes. Fabrice Martinez et Bruno Chevillon (à mes oreilles les grand solos de la soirée), dans des situations  orchestrales leur pemettant de se faire entendre, Paul Brousseau a capella dans une merveilleuse coda à la première partie et Théo Ceccaldi parce qu’il donne à voir ce qu’il joue comme les acteurs de la Grèce Antique exagéraient leurs gestes pour les derniers gradins, tirèrent leur épingle du jeu. Ce qu’on perçut des solos d’Alexandra Grimal et Hugues Mayot, confirmait un art du solo partagé par leurs comparses qui pourra encore s’épanouir avec le temps dans ce pari qu’ils semblent se donner de jouer avec l’écriture de Benoît, comme un bopper joue avec sa grille, mais selon une “chronologie” toute différente.  Bref, pour résumer ce galimatias, ça faisait longtemps que je n’avais entendu un ONJ aussi immédiatement habité. Dès juin sur un premier disque qui sera présenté dans l’acoustique plus décente de l’auditorium du Carreau du Temple.


Evidemment, on dira : « Quel rapport avec le jazz ? » Aurait-on confié l’ONJ à l’un de ses détracteurs, quel rapport ça aurait eu avec ça ?


Capture decran 2014-04-27 a 09.01.30

 

 

Qui croque son époque à pleine dents ?


Franck Bergerot

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Le nouvel ONJ d’Olivier Benoît se produisait hier sous la halle du Carreau du Temple où il a trouvé demeure et qui s’ouvrait hier au public.

 

Carreau du Temple, Paris (75), le 26 avril 2014.

 

ONJ : Olivier Benoît (composition, direction, guitare électrique), Théo Ceccaldi (violon), Fabrice Martinez (trompette, bugle), Fidel Fourneyron (trombone, tuba), Hugues Mayot (sax alto), Jean Dousteyssier (clarinettes), Alexandra Grimal (sax ténor), Sophie Agnel (piano), Paul Brousseau (piano électrique et bidouilles électroniques), Bruno Chevillon (contrebasse, guitare basse électrique), Eric Echampard (batterie).

 

Quel nouvel ONJ n’a pas fait polémique ? Celui-ci, lorsque la nomination d’Olivier Benoît a été connue, peut-être plus qu’aucun autre. Dans ce domaine, je me suis toujours senti quelque solidarité avec les râleurs et cette fois-ci tout particulièrement. Pas seulement parce que les détracteurs faisaient circuler sur le web des images d’un concert dirigé par Olivier Benoît qui pouvaient laisser perplexe… Mais, pour faire bonne mesure, je me souvenais aussi du dernier concert de l’ONJ de Paolo Damiani au New Morning. L’exercice en avait été écourté après un démarrage difficile (suivi de quelques claquements de portes), et un suite compliquée avec un seconde équipe. Le concert avait commencé avec une pièce de Paolo Damiani qui faisait du Damiani, une autre de Gianluigi Trovesi qui faisait du Trovesi et une troisième de François Jeanneau qui faisait du Jeanneau… ce qui est dans la nature des choses, même si tout cela était d’un intérêt très inégal. Et puis… au moment où je m’apprêtais à rentrer chez moi ou à filer faire un tour rue des Lombards, pour voir si ce soir-là l’on y réinventait pas la roue carrée , il avait eu deux autres pièces qui m’avaient assis. Signées respectivement par Olivier Benoît et Régis Huby, elles faisaient entendre qu’en coulisse d’un disque enregistré chez ECM dans des conditions qui laissent des souvenirs très disparates parmi les différents protagonistes, la jeune garde avait pris le pouvoir en un noyau plein d’avenir.


Un avenir qui se concrétise un peu avec cette nomination d’Olivier Benoît au coude à coude avec Régis Huby. Et pour tout dire, j’attendais plutôt Régis Huby pour ce mélange d’exigence sans concession et de versalité (anglicisme, mais tellement pratique, tant, à 1h du matin pressé d’aller me coucher, un mot me semble manquer dans notre langue) qui aurait pu donner une accroche “grand public” à l’ONJ, sans tomber dans les tartes à la crème des musiques actuelles, métissées, etc. Impression laissée par ce parcours qui  mène Huby de son premier disque “Le Sentiment des brutes” dans un très bel enracinement en terre bretonne à l’âpre Quatuor IXI en passant par sa splendide direction musicale pour le spectacle “à la Broadway” de Lambert Wilson La Nuit américaine. Mais c’est la ligne “dure” qui l’a emporté, celle d’Olivier Benoît (ce qui est peut-être une simple vue de l’esprit).


Concert-événement, concert “debout” pour l’ouverture du Carreau du temple, donné sous la grande Halle. Qui se souvient de l’ambiance sonore des marchés couverts parisiens se doutera qu’il a fallu tout le talent de l’ingénieur du son Boris Darley pour éviter l’inaudible. La ligne dure ? Olivier Benoît fait entendre une musique dont les radios ne voudront pas, pas même France Culture où un bon jazzman est un jazzman mort (à moins qu’il ne soit chanteur de charme) et peut-être pas même à France Musique où la programmation d’un extrait de Miles Davis au Fillmore en 1970 peut passer pour du terrorisme et où la proposition d’une Nuit “Wayne Shorter-Joe Zawinul” peut se trouver refusée par un directeur des programmes parce que les nuits de France Musique sont réservées à des musiciens connus. De la première partie de concert (je n’ai pas entendu la seconde), je retiens une très belle écriture, où l’influence des répétitifs américains débarrassée de tout dogmatisme est portée par une énergie qui n’a pas de rock que le nom et un art du développement, de la couleur orchestrale et du contrepoint qui puise dans un vaste patrimoine allant du premier baroque aux compositeurs du XXème siècle, tout en donnant un large place aux solistes.


Ce qui va nous changer de l’ONJ précédent où les solistes se trouvaient écrasés par des “projets”, souvent brillants, pas toujours réalisables sur scène, la plupart du temps glacés par un manque d’espace laissé à l’initiative improvisée. Certes, l’acoustique de la halle du Carreau déservait les solistes. Fabrice Martinez et Bruno Chevillon (à mes oreilles les grand solos de la soirée), dans des situations  orchestrales leur pemettant de se faire entendre, Paul Brousseau a capella dans une merveilleuse coda à la première partie et Théo Ceccaldi parce qu’il donne à voir ce qu’il joue comme les acteurs de la Grèce Antique exagéraient leurs gestes pour les derniers gradins, tirèrent leur épingle du jeu. Ce qu’on perçut des solos d’Alexandra Grimal et Hugues Mayot, confirmait un art du solo partagé par leurs comparses qui pourra encore s’épanouir avec le temps dans ce pari qu’ils semblent se donner de jouer avec l’écriture de Benoît, comme un bopper joue avec sa grille, mais selon une “chronologie” toute différente.  Bref, pour résumer ce galimatias, ça faisait longtemps que je n’avais entendu un ONJ aussi immédiatement habité. Dès juin sur un premier disque qui sera présenté dans l’acoustique plus décente de l’auditorium du Carreau du Temple.


Evidemment, on dira : « Quel rapport avec le jazz ? » Aurait-on confié l’ONJ à l’un de ses détracteurs, quel rapport ça aurait eu avec ça ?


Capture decran 2014-04-27 a 09.01.30

 

 

Qui croque son époque à pleine dents ?


Franck Bergerot

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Le nouvel ONJ d’Olivier Benoît se produisait hier sous la halle du Carreau du Temple où il a trouvé demeure et qui s’ouvrait hier au public.

 

Carreau du Temple, Paris (75), le 26 avril 2014.

 

ONJ : Olivier Benoît (composition, direction, guitare électrique), Théo Ceccaldi (violon), Fabrice Martinez (trompette, bugle), Fidel Fourneyron (trombone, tuba), Hugues Mayot (sax alto), Jean Dousteyssier (clarinettes), Alexandra Grimal (sax ténor), Sophie Agnel (piano), Paul Brousseau (piano électrique et bidouilles électroniques), Bruno Chevillon (contrebasse, guitare basse électrique), Eric Echampard (batterie).

 

Quel nouvel ONJ n’a pas fait polémique ? Celui-ci, lorsque la nomination d’Olivier Benoît a été connue, peut-être plus qu’aucun autre. Dans ce domaine, je me suis toujours senti quelque solidarité avec les râleurs et cette fois-ci tout particulièrement. Pas seulement parce que les détracteurs faisaient circuler sur le web des images d’un concert dirigé par Olivier Benoît qui pouvaient laisser perplexe… Mais, pour faire bonne mesure, je me souvenais aussi du dernier concert de l’ONJ de Paolo Damiani au New Morning. L’exercice en avait été écourté après un démarrage difficile (suivi de quelques claquements de portes), et un suite compliquée avec un seconde équipe. Le concert avait commencé avec une pièce de Paolo Damiani qui faisait du Damiani, une autre de Gianluigi Trovesi qui faisait du Trovesi et une troisième de François Jeanneau qui faisait du Jeanneau… ce qui est dans la nature des choses, même si tout cela était d’un intérêt très inégal. Et puis… au moment où je m’apprêtais à rentrer chez moi ou à filer faire un tour rue des Lombards, pour voir si ce soir-là l’on y réinventait pas la roue carrée , il avait eu deux autres pièces qui m’avaient assis. Signées respectivement par Olivier Benoît et Régis Huby, elles faisaient entendre qu’en coulisse d’un disque enregistré chez ECM dans des conditions qui laissent des souvenirs très disparates parmi les différents protagonistes, la jeune garde avait pris le pouvoir en un noyau plein d’avenir.


Un avenir qui se concrétise un peu avec cette nomination d’Olivier Benoît au coude à coude avec Régis Huby. Et pour tout dire, j’attendais plutôt Régis Huby pour ce mélange d’exigence sans concession et de versalité (anglicisme, mais tellement pratique, tant, à 1h du matin pressé d’aller me coucher, un mot me semble manquer dans notre langue) qui aurait pu donner une accroche “grand public” à l’ONJ, sans tomber dans les tartes à la crème des musiques actuelles, métissées, etc. Impression laissée par ce parcours qui  mène Huby de son premier disque “Le Sentiment des brutes” dans un très bel enracinement en terre bretonne à l’âpre Quatuor IXI en passant par sa splendide direction musicale pour le spectacle “à la Broadway” de Lambert Wilson La Nuit américaine. Mais c’est la ligne “dure” qui l’a emporté, celle d’Olivier Benoît (ce qui est peut-être une simple vue de l’esprit).


Concert-événement, concert “debout” pour l’ouverture du Carreau du temple, donné sous la grande Halle. Qui se souvient de l’ambiance sonore des marchés couverts parisiens se doutera qu’il a fallu tout le talent de l’ingénieur du son Boris Darley pour éviter l’inaudible. La ligne dure ? Olivier Benoît fait entendre une musique dont les radios ne voudront pas, pas même France Culture où un bon jazzman est un jazzman mort (à moins qu’il ne soit chanteur de charme) et peut-être pas même à France Musique où la programmation d’un extrait de Miles Davis au Fillmore en 1970 peut passer pour du terrorisme et où la proposition d’une Nuit “Wayne Shorter-Joe Zawinul” peut se trouver refusée par un directeur des programmes parce que les nuits de France Musique sont réservées à des musiciens connus. De la première partie de concert (je n’ai pas entendu la seconde), je retiens une très belle écriture, où l’influence des répétitifs américains débarrassée de tout dogmatisme est portée par une énergie qui n’a pas de rock que le nom et un art du développement, de la couleur orchestrale et du contrepoint qui puise dans un vaste patrimoine allant du premier baroque aux compositeurs du XXème siècle, tout en donnant un large place aux solistes.


Ce qui va nous changer de l’ONJ précédent où les solistes se trouvaient écrasés par des “projets”, souvent brillants, pas toujours réalisables sur scène, la plupart du temps glacés par un manque d’espace laissé à l’initiative improvisée. Certes, l’acoustique de la halle du Carreau déservait les solistes. Fabrice Martinez et Bruno Chevillon (à mes oreilles les grand solos de la soirée), dans des situations  orchestrales leur pemettant de se faire entendre, Paul Brousseau a capella dans une merveilleuse coda à la première partie et Théo Ceccaldi parce qu’il donne à voir ce qu’il joue comme les acteurs de la Grèce Antique exagéraient leurs gestes pour les derniers gradins, tirèrent leur épingle du jeu. Ce qu’on perçut des solos d’Alexandra Grimal et Hugues Mayot, confirmait un art du solo partagé par leurs comparses qui pourra encore s’épanouir avec le temps dans ce pari qu’ils semblent se donner de jouer avec l’écriture de Benoît, comme un bopper joue avec sa grille, mais selon une “chronologie” toute différente.  Bref, pour résumer ce galimatias, ça faisait longtemps que je n’avais entendu un ONJ aussi immédiatement habité. Dès juin sur un premier disque qui sera présenté dans l’acoustique plus décente de l’auditorium du Carreau du Temple.


Evidemment, on dira : « Quel rapport avec le jazz ? » Aurait-on confié l’ONJ à l’un de ses détracteurs, quel rapport ça aurait eu avec ça ?


Capture decran 2014-04-27 a 09.01.30

 

 

Qui croque son époque à pleine dents ?


Franck Bergerot