Jazz live
Publié le 27 Juil 2017

San Sebastian (5): Herbie, chasseur de tētes black music

A San Sebastian le noir de la salle se trouve transpercé de flashs jaillis de mille téléphones portables. Un concert aujourd’hui se shoote autant qu’il s’écoute. Alors quand il faut faire respecter une interdiction de cliché parmi 2500 spectateurs les trois ou quatre jeunes gardes désignés vigiles se trouvent pris dans un sacré jeu du chat et de la souris !…

Herbie Hancock (p, key, voc), Vinine Colaiuta (dm), James Genius (b), Lionel Loueke(g), Terrace Martin (s)

Auditorium Kursaal

Jazzaldia, San Sebastian Donostia (España/Euskadi), 25 juillet

Herbie Hancok, Lionel Louke

Herbie Hancok, Lionel Loueke

Herbie a-t-il pris ce soir à un coup de nostalgie ? Sur scène il nous ressert du Headhunters, groupe mythique  du début des seventies. Et pour le coup (Chameleon) Lionel Loueke reprend les accords grattés en aller et retour main droite sur les cordes de sa guitare avec le son et l’effet sur la pédale comme en son temps (LP paru en 1973) le bien nommé Wah-Wah Watson. La musique programmée pour le quintet prend un écho très compact, très syncopé. Seul problème, depuis le morceau introductif (Overture) le son se trouve un peu broyé dans un maelström confus édité à très haut volume. Il y a certes des traces audibles du Hancock d’autrefois. On trouve au fur et à mesure du concert l’enseigne du musicien qui a toujours cherché à s’adapter, coller à l’évolution de la musique au temps présent. Pour ce faire d’ailleurs il s’en est allé -il le dit, l’explique, le justifie jusque sur scène- chercher du côté de la génération dorée de la musique noire actuelle. Il a en quelque sorte kidnappé au passage Terrace Martin, musicien et producteur des disques de Kendrick Lamar comme To Pimp a butterfly. Entre deux titres il annonce même carrément « Je vous le dis, Terrace sera aussi le producteur de mon prochain album… » (Un opus dans lequel soit dit en passant devraient figurer également Robert Glasper et Kamasi Washington…) Résultat au présent sur la scène donostiarra : une prégnance de claviers et sonorités enveloppées électroniques (Terrace Martin n’utilisera son sax alto que sur un titre seulement) En revanche les voix (Y compris celle du leader que l’on entend résonner désormais), en nature ou retraitées, filtrées, compressées en mode « vocoder » impriment dans le contenu musical une couleur dominante. Celle de Lionel Loueke, mâtinée de traces africaines reste la plus singulière, intéressante. Les longues pièces composées par Hancock, sortent toujours très construites. Les développements solos (dans ce contexte ceux joués à la guitare, n’offre plus autant de démarquage, d’originalité sur cet instrument) très contingentés électriques, en plages de clavier répétitives, souffrent d’un manque de  différenciation. Donc de personnalité. Il faut se contenter de quelques éclairs du maître au piano (en trio pour illustrer Actual Proof), du savoir faire de James Genius voire de quelques trouvailles en pointe 2.0 de la part du chanteur-sax-clavier-producteur. Le septuagénaire Herbie Hancock a toujours su évoluer à l’épreuve, à l’égal des réalités musicales du temps présent.

Terrace Martin (Photo Lolo Vasco_Jazzaldia Heineken)

Terrace Martin
(Photo Lolo Vasco_Jazzaldia Heineken)

Sonnez hauts vents, Picorez musique!

A San Sebastian, faut-il le répéter, dans le décor naturel entre la « Concha », magnifique baie en forme de coquillage ancrée sur le fond du Golfe de Gascogne -et sanctuarisé par l’UNESCO- et le « Casco viejo« , le vieux quartier du port aux mille bars plantées le long de cent ruelles, la tradition reste de tapear, « picorer » en quelque sorte de comptoir en comptoir.  Dans cette zone maritime singulière d’amers (artistiques) remarquables, cette même atmosphère de plaisirs à partager, Jazzaldia, le festival invite également à se servir en musiques diverses et variées au hasard des scènes (16 en tout et pour tout) Arrêt sur images plus sons sur une terrasse de café, au beau milieu de la dite « Concha ». Il fait un vent frisquet en bord de mer. Pourtant Kevin Mahogany y chante des standards de sa voix chaude , très décontract, fort de l’appui d’un french quartet (Hervé Sellin au piano, Pierrick Pedron très tranchant au sax alto) Cinq cents mètres plus loin à deux pas du très huppé Royal Yacht Club, sous une tente caïdale dressée devant la mairie, l’anglaise blonde Anna Meredith joue cash, joue trash en boucles et échos ,avec son synthé et son lap top sur une rythmique de guitare au son explosif de bombardiers en plein largage. Free-Jazz-électro-punk à la sauce british. Sur la scène collée aux pierres magnifiques d’un musée aux contours d’église, d’autres « britts », plus fadas encore, enclenchent des rythmes affolants entre cuivres et tambours type « street » et/ou « marching band« . Pour le plus grand plaisir d’un public à qui le sponsor brasseur de bières hollandaises devenues mondiales vient de distribuer des ponchos nylon transparents devant la menace de nuages sombres.

Le show Lucky Shops

Le show Lucky Shops

Les  gars du Lucky Shops eux n’en ont cure. Tous torse nus ou vêtus de tee-shirts, shorts et baskets couleurs fluos, ils sautent, dansent, moulinent des bras avec sax, trombone ou tuba. Sur cette même place, Macy Gray viendra porter la bonne parole alternativement soul, blues et funk à la limite. Drapée dans une robe ultra moulante en lamé gris, poussant quelques intonations hot à la façon de Tina (Turner). Avec au bout de la soirée un final surprise sur un rythme de calypso passé dans les mémoire du répertoire jazz grâce à un certain colosse du sax (St Thomas écrit par Sonny Rollins histoire de célébrer sur un air de carnaval son île natale dans les Virgin Islands US) Et là re-surprise: une fillette se trouve soudain hissée sur la scène. Elle y danse et chante sous la férule de Macy Gray métamorphosée en maman attentive. Foule basque en délire. La petite repartira avec, enroulées autour du cou la longue étole noire de la chanteuse américaine. Plus le rêve de monter un jour sur une scène pareille, elle aussi un jour sans doute…

Robert Latxague

|

A San Sebastian le noir de la salle se trouve transpercé de flashs jaillis de mille téléphones portables. Un concert aujourd’hui se shoote autant qu’il s’écoute. Alors quand il faut faire respecter une interdiction de cliché parmi 2500 spectateurs les trois ou quatre jeunes gardes désignés vigiles se trouvent pris dans un sacré jeu du chat et de la souris !…

Herbie Hancock (p, key, voc), Vinine Colaiuta (dm), James Genius (b), Lionel Loueke(g), Terrace Martin (s)

Auditorium Kursaal

Jazzaldia, San Sebastian Donostia (España/Euskadi), 25 juillet

Herbie Hancok, Lionel Louke

Herbie Hancok, Lionel Loueke

Herbie a-t-il pris ce soir à un coup de nostalgie ? Sur scène il nous ressert du Headhunters, groupe mythique  du début des seventies. Et pour le coup (Chameleon) Lionel Loueke reprend les accords grattés en aller et retour main droite sur les cordes de sa guitare avec le son et l’effet sur la pédale comme en son temps (LP paru en 1973) le bien nommé Wah-Wah Watson. La musique programmée pour le quintet prend un écho très compact, très syncopé. Seul problème, depuis le morceau introductif (Overture) le son se trouve un peu broyé dans un maelström confus édité à très haut volume. Il y a certes des traces audibles du Hancock d’autrefois. On trouve au fur et à mesure du concert l’enseigne du musicien qui a toujours cherché à s’adapter, coller à l’évolution de la musique au temps présent. Pour ce faire d’ailleurs il s’en est allé -il le dit, l’explique, le justifie jusque sur scène- chercher du côté de la génération dorée de la musique noire actuelle. Il a en quelque sorte kidnappé au passage Terrace Martin, musicien et producteur des disques de Kendrick Lamar comme To Pimp a butterfly. Entre deux titres il annonce même carrément « Je vous le dis, Terrace sera aussi le producteur de mon prochain album… » (Un opus dans lequel soit dit en passant devraient figurer également Robert Glasper et Kamasi Washington…) Résultat au présent sur la scène donostiarra : une prégnance de claviers et sonorités enveloppées électroniques (Terrace Martin n’utilisera son sax alto que sur un titre seulement) En revanche les voix (Y compris celle du leader que l’on entend résonner désormais), en nature ou retraitées, filtrées, compressées en mode « vocoder » impriment dans le contenu musical une couleur dominante. Celle de Lionel Loueke, mâtinée de traces africaines reste la plus singulière, intéressante. Les longues pièces composées par Hancock, sortent toujours très construites. Les développements solos (dans ce contexte ceux joués à la guitare, n’offre plus autant de démarquage, d’originalité sur cet instrument) très contingentés électriques, en plages de clavier répétitives, souffrent d’un manque de  différenciation. Donc de personnalité. Il faut se contenter de quelques éclairs du maître au piano (en trio pour illustrer Actual Proof), du savoir faire de James Genius voire de quelques trouvailles en pointe 2.0 de la part du chanteur-sax-clavier-producteur. Le septuagénaire Herbie Hancock a toujours su évoluer à l’épreuve, à l’égal des réalités musicales du temps présent.

Terrace Martin (Photo Lolo Vasco_Jazzaldia Heineken)

Terrace Martin
(Photo Lolo Vasco_Jazzaldia Heineken)

Sonnez hauts vents, Picorez musique!

A San Sebastian, faut-il le répéter, dans le décor naturel entre la « Concha », magnifique baie en forme de coquillage ancrée sur le fond du Golfe de Gascogne -et sanctuarisé par l’UNESCO- et le « Casco viejo« , le vieux quartier du port aux mille bars plantées le long de cent ruelles, la tradition reste de tapear, « picorer » en quelque sorte de comptoir en comptoir.  Dans cette zone maritime singulière d’amers (artistiques) remarquables, cette même atmosphère de plaisirs à partager, Jazzaldia, le festival invite également à se servir en musiques diverses et variées au hasard des scènes (16 en tout et pour tout) Arrêt sur images plus sons sur une terrasse de café, au beau milieu de la dite « Concha ». Il fait un vent frisquet en bord de mer. Pourtant Kevin Mahogany y chante des standards de sa voix chaude , très décontract, fort de l’appui d’un french quartet (Hervé Sellin au piano, Pierrick Pedron très tranchant au sax alto) Cinq cents mètres plus loin à deux pas du très huppé Royal Yacht Club, sous une tente caïdale dressée devant la mairie, l’anglaise blonde Anna Meredith joue cash, joue trash en boucles et échos ,avec son synthé et son lap top sur une rythmique de guitare au son explosif de bombardiers en plein largage. Free-Jazz-électro-punk à la sauce british. Sur la scène collée aux pierres magnifiques d’un musée aux contours d’église, d’autres « britts », plus fadas encore, enclenchent des rythmes affolants entre cuivres et tambours type « street » et/ou « marching band« . Pour le plus grand plaisir d’un public à qui le sponsor brasseur de bières hollandaises devenues mondiales vient de distribuer des ponchos nylon transparents devant la menace de nuages sombres.

Le show Lucky Shops

Le show Lucky Shops

Les  gars du Lucky Shops eux n’en ont cure. Tous torse nus ou vêtus de tee-shirts, shorts et baskets couleurs fluos, ils sautent, dansent, moulinent des bras avec sax, trombone ou tuba. Sur cette même place, Macy Gray viendra porter la bonne parole alternativement soul, blues et funk à la limite. Drapée dans une robe ultra moulante en lamé gris, poussant quelques intonations hot à la façon de Tina (Turner). Avec au bout de la soirée un final surprise sur un rythme de calypso passé dans les mémoire du répertoire jazz grâce à un certain colosse du sax (St Thomas écrit par Sonny Rollins histoire de célébrer sur un air de carnaval son île natale dans les Virgin Islands US) Et là re-surprise: une fillette se trouve soudain hissée sur la scène. Elle y danse et chante sous la férule de Macy Gray métamorphosée en maman attentive. Foule basque en délire. La petite repartira avec, enroulées autour du cou la longue étole noire de la chanteuse américaine. Plus le rêve de monter un jour sur une scène pareille, elle aussi un jour sans doute…

Robert Latxague

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A San Sebastian le noir de la salle se trouve transpercé de flashs jaillis de mille téléphones portables. Un concert aujourd’hui se shoote autant qu’il s’écoute. Alors quand il faut faire respecter une interdiction de cliché parmi 2500 spectateurs les trois ou quatre jeunes gardes désignés vigiles se trouvent pris dans un sacré jeu du chat et de la souris !…

Herbie Hancock (p, key, voc), Vinine Colaiuta (dm), James Genius (b), Lionel Loueke(g), Terrace Martin (s)

Auditorium Kursaal

Jazzaldia, San Sebastian Donostia (España/Euskadi), 25 juillet

Herbie Hancok, Lionel Louke

Herbie Hancok, Lionel Loueke

Herbie a-t-il pris ce soir à un coup de nostalgie ? Sur scène il nous ressert du Headhunters, groupe mythique  du début des seventies. Et pour le coup (Chameleon) Lionel Loueke reprend les accords grattés en aller et retour main droite sur les cordes de sa guitare avec le son et l’effet sur la pédale comme en son temps (LP paru en 1973) le bien nommé Wah-Wah Watson. La musique programmée pour le quintet prend un écho très compact, très syncopé. Seul problème, depuis le morceau introductif (Overture) le son se trouve un peu broyé dans un maelström confus édité à très haut volume. Il y a certes des traces audibles du Hancock d’autrefois. On trouve au fur et à mesure du concert l’enseigne du musicien qui a toujours cherché à s’adapter, coller à l’évolution de la musique au temps présent. Pour ce faire d’ailleurs il s’en est allé -il le dit, l’explique, le justifie jusque sur scène- chercher du côté de la génération dorée de la musique noire actuelle. Il a en quelque sorte kidnappé au passage Terrace Martin, musicien et producteur des disques de Kendrick Lamar comme To Pimp a butterfly. Entre deux titres il annonce même carrément « Je vous le dis, Terrace sera aussi le producteur de mon prochain album… » (Un opus dans lequel soit dit en passant devraient figurer également Robert Glasper et Kamasi Washington…) Résultat au présent sur la scène donostiarra : une prégnance de claviers et sonorités enveloppées électroniques (Terrace Martin n’utilisera son sax alto que sur un titre seulement) En revanche les voix (Y compris celle du leader que l’on entend résonner désormais), en nature ou retraitées, filtrées, compressées en mode « vocoder » impriment dans le contenu musical une couleur dominante. Celle de Lionel Loueke, mâtinée de traces africaines reste la plus singulière, intéressante. Les longues pièces composées par Hancock, sortent toujours très construites. Les développements solos (dans ce contexte ceux joués à la guitare, n’offre plus autant de démarquage, d’originalité sur cet instrument) très contingentés électriques, en plages de clavier répétitives, souffrent d’un manque de  différenciation. Donc de personnalité. Il faut se contenter de quelques éclairs du maître au piano (en trio pour illustrer Actual Proof), du savoir faire de James Genius voire de quelques trouvailles en pointe 2.0 de la part du chanteur-sax-clavier-producteur. Le septuagénaire Herbie Hancock a toujours su évoluer à l’épreuve, à l’égal des réalités musicales du temps présent.

Terrace Martin (Photo Lolo Vasco_Jazzaldia Heineken)

Terrace Martin
(Photo Lolo Vasco_Jazzaldia Heineken)

Sonnez hauts vents, Picorez musique!

A San Sebastian, faut-il le répéter, dans le décor naturel entre la « Concha », magnifique baie en forme de coquillage ancrée sur le fond du Golfe de Gascogne -et sanctuarisé par l’UNESCO- et le « Casco viejo« , le vieux quartier du port aux mille bars plantées le long de cent ruelles, la tradition reste de tapear, « picorer » en quelque sorte de comptoir en comptoir.  Dans cette zone maritime singulière d’amers (artistiques) remarquables, cette même atmosphère de plaisirs à partager, Jazzaldia, le festival invite également à se servir en musiques diverses et variées au hasard des scènes (16 en tout et pour tout) Arrêt sur images plus sons sur une terrasse de café, au beau milieu de la dite « Concha ». Il fait un vent frisquet en bord de mer. Pourtant Kevin Mahogany y chante des standards de sa voix chaude , très décontract, fort de l’appui d’un french quartet (Hervé Sellin au piano, Pierrick Pedron très tranchant au sax alto) Cinq cents mètres plus loin à deux pas du très huppé Royal Yacht Club, sous une tente caïdale dressée devant la mairie, l’anglaise blonde Anna Meredith joue cash, joue trash en boucles et échos ,avec son synthé et son lap top sur une rythmique de guitare au son explosif de bombardiers en plein largage. Free-Jazz-électro-punk à la sauce british. Sur la scène collée aux pierres magnifiques d’un musée aux contours d’église, d’autres « britts », plus fadas encore, enclenchent des rythmes affolants entre cuivres et tambours type « street » et/ou « marching band« . Pour le plus grand plaisir d’un public à qui le sponsor brasseur de bières hollandaises devenues mondiales vient de distribuer des ponchos nylon transparents devant la menace de nuages sombres.

Le show Lucky Shops

Le show Lucky Shops

Les  gars du Lucky Shops eux n’en ont cure. Tous torse nus ou vêtus de tee-shirts, shorts et baskets couleurs fluos, ils sautent, dansent, moulinent des bras avec sax, trombone ou tuba. Sur cette même place, Macy Gray viendra porter la bonne parole alternativement soul, blues et funk à la limite. Drapée dans une robe ultra moulante en lamé gris, poussant quelques intonations hot à la façon de Tina (Turner). Avec au bout de la soirée un final surprise sur un rythme de calypso passé dans les mémoire du répertoire jazz grâce à un certain colosse du sax (St Thomas écrit par Sonny Rollins histoire de célébrer sur un air de carnaval son île natale dans les Virgin Islands US) Et là re-surprise: une fillette se trouve soudain hissée sur la scène. Elle y danse et chante sous la férule de Macy Gray métamorphosée en maman attentive. Foule basque en délire. La petite repartira avec, enroulées autour du cou la longue étole noire de la chanteuse américaine. Plus le rêve de monter un jour sur une scène pareille, elle aussi un jour sans doute…

Robert Latxague

|

A San Sebastian le noir de la salle se trouve transpercé de flashs jaillis de mille téléphones portables. Un concert aujourd’hui se shoote autant qu’il s’écoute. Alors quand il faut faire respecter une interdiction de cliché parmi 2500 spectateurs les trois ou quatre jeunes gardes désignés vigiles se trouvent pris dans un sacré jeu du chat et de la souris !…

Herbie Hancock (p, key, voc), Vinine Colaiuta (dm), James Genius (b), Lionel Loueke(g), Terrace Martin (s)

Auditorium Kursaal

Jazzaldia, San Sebastian Donostia (España/Euskadi), 25 juillet

Herbie Hancok, Lionel Louke

Herbie Hancok, Lionel Loueke

Herbie a-t-il pris ce soir à un coup de nostalgie ? Sur scène il nous ressert du Headhunters, groupe mythique  du début des seventies. Et pour le coup (Chameleon) Lionel Loueke reprend les accords grattés en aller et retour main droite sur les cordes de sa guitare avec le son et l’effet sur la pédale comme en son temps (LP paru en 1973) le bien nommé Wah-Wah Watson. La musique programmée pour le quintet prend un écho très compact, très syncopé. Seul problème, depuis le morceau introductif (Overture) le son se trouve un peu broyé dans un maelström confus édité à très haut volume. Il y a certes des traces audibles du Hancock d’autrefois. On trouve au fur et à mesure du concert l’enseigne du musicien qui a toujours cherché à s’adapter, coller à l’évolution de la musique au temps présent. Pour ce faire d’ailleurs il s’en est allé -il le dit, l’explique, le justifie jusque sur scène- chercher du côté de la génération dorée de la musique noire actuelle. Il a en quelque sorte kidnappé au passage Terrace Martin, musicien et producteur des disques de Kendrick Lamar comme To Pimp a butterfly. Entre deux titres il annonce même carrément « Je vous le dis, Terrace sera aussi le producteur de mon prochain album… » (Un opus dans lequel soit dit en passant devraient figurer également Robert Glasper et Kamasi Washington…) Résultat au présent sur la scène donostiarra : une prégnance de claviers et sonorités enveloppées électroniques (Terrace Martin n’utilisera son sax alto que sur un titre seulement) En revanche les voix (Y compris celle du leader que l’on entend résonner désormais), en nature ou retraitées, filtrées, compressées en mode « vocoder » impriment dans le contenu musical une couleur dominante. Celle de Lionel Loueke, mâtinée de traces africaines reste la plus singulière, intéressante. Les longues pièces composées par Hancock, sortent toujours très construites. Les développements solos (dans ce contexte ceux joués à la guitare, n’offre plus autant de démarquage, d’originalité sur cet instrument) très contingentés électriques, en plages de clavier répétitives, souffrent d’un manque de  différenciation. Donc de personnalité. Il faut se contenter de quelques éclairs du maître au piano (en trio pour illustrer Actual Proof), du savoir faire de James Genius voire de quelques trouvailles en pointe 2.0 de la part du chanteur-sax-clavier-producteur. Le septuagénaire Herbie Hancock a toujours su évoluer à l’épreuve, à l’égal des réalités musicales du temps présent.

Terrace Martin (Photo Lolo Vasco_Jazzaldia Heineken)

Terrace Martin
(Photo Lolo Vasco_Jazzaldia Heineken)

Sonnez hauts vents, Picorez musique!

A San Sebastian, faut-il le répéter, dans le décor naturel entre la « Concha », magnifique baie en forme de coquillage ancrée sur le fond du Golfe de Gascogne -et sanctuarisé par l’UNESCO- et le « Casco viejo« , le vieux quartier du port aux mille bars plantées le long de cent ruelles, la tradition reste de tapear, « picorer » en quelque sorte de comptoir en comptoir.  Dans cette zone maritime singulière d’amers (artistiques) remarquables, cette même atmosphère de plaisirs à partager, Jazzaldia, le festival invite également à se servir en musiques diverses et variées au hasard des scènes (16 en tout et pour tout) Arrêt sur images plus sons sur une terrasse de café, au beau milieu de la dite « Concha ». Il fait un vent frisquet en bord de mer. Pourtant Kevin Mahogany y chante des standards de sa voix chaude , très décontract, fort de l’appui d’un french quartet (Hervé Sellin au piano, Pierrick Pedron très tranchant au sax alto) Cinq cents mètres plus loin à deux pas du très huppé Royal Yacht Club, sous une tente caïdale dressée devant la mairie, l’anglaise blonde Anna Meredith joue cash, joue trash en boucles et échos ,avec son synthé et son lap top sur une rythmique de guitare au son explosif de bombardiers en plein largage. Free-Jazz-électro-punk à la sauce british. Sur la scène collée aux pierres magnifiques d’un musée aux contours d’église, d’autres « britts », plus fadas encore, enclenchent des rythmes affolants entre cuivres et tambours type « street » et/ou « marching band« . Pour le plus grand plaisir d’un public à qui le sponsor brasseur de bières hollandaises devenues mondiales vient de distribuer des ponchos nylon transparents devant la menace de nuages sombres.

Le show Lucky Shops

Le show Lucky Shops

Les  gars du Lucky Shops eux n’en ont cure. Tous torse nus ou vêtus de tee-shirts, shorts et baskets couleurs fluos, ils sautent, dansent, moulinent des bras avec sax, trombone ou tuba. Sur cette même place, Macy Gray viendra porter la bonne parole alternativement soul, blues et funk à la limite. Drapée dans une robe ultra moulante en lamé gris, poussant quelques intonations hot à la façon de Tina (Turner). Avec au bout de la soirée un final surprise sur un rythme de calypso passé dans les mémoire du répertoire jazz grâce à un certain colosse du sax (St Thomas écrit par Sonny Rollins histoire de célébrer sur un air de carnaval son île natale dans les Virgin Islands US) Et là re-surprise: une fillette se trouve soudain hissée sur la scène. Elle y danse et chante sous la férule de Macy Gray métamorphosée en maman attentive. Foule basque en délire. La petite repartira avec, enroulées autour du cou la longue étole noire de la chanteuse américaine. Plus le rêve de monter un jour sur une scène pareille, elle aussi un jour sans doute…

Robert Latxague