Jazz live
Publié le 16 Sep 2014

Talos Festival 2014, Han Bennink, Keith Tippett, Julie Tippets, Louis Moholo, "For Mandela" et final

Le « Talos Festival » contient – au moins – deux festivals en un seul, et probablement bien plus que ça encore. Le premier regroupe un certain nombre de musiciens et d’orchestres, qui se produisent en de nombreux lieux de la cité des Pouilles. Des fanfares, des harmonies, des big-bands de près de 40 unités comme le dernier soir, des orchestres réunis pour l’occasion comme le « Minafric » pour le spectacle « For Mandela », supervisé par Keith Tippett, des solos, des duos, et j’en passe. Les uns sont d’ailleurs présentés en début de semaine sous le titre « Anteprima », les autres regroupés en fin de semaine et s’adressent davantage aux amateurs de jazz. Quoique… Car le deuxième festival, non moins essentiel, se joue sur la scène « politique », entendue au meilleur sens du terme. Il se joue quasiment en chaque occasion, chacun (élu, responsable administratif, directeur artistique, partenaire, etc.) prenant à son tour la parole pour souligner, qui la grandeur de la manifestation, qui son aura médiatique, mais aussi bien les obstacles qu’il aura fallu surmonter, voire les fâcheries qu’on aura évité, ou affronté. A ce jeu, Pino Minafra n’est pas en reste, et ne cache jamais sa détermination, qui l’a conduit plus d’une fois à suspendre son festival. Comme le public se presse chaque soir sur les lieux des concerts, c’est à une véritable campagne quasi électorale que nous sommes invités. Ma connaissance limitée de l’italien ne m’a pas permis de tout comprendre, mais il m’a semblé que la langue de bois était moins utilisée que chez nous, et qu’une forme de vrai dialogue pouvait s’instaurer. 

 

Quant au programme lui-même, il comporte aussi sa dimension socio-politique : on ne convoque pas par hasard des musiciens rompus à l’improvisation (Keith Tippett), des batteurs emblématiques de la lutte contre l’apartheid (Louis Moholo) ou des bataves habitués à secouer le cocotier comme Han Bennink. C’est avec ce dernier que la soirée du 13 septembre a commencé. Drumming solide, puis déjanté au sens propre (souliers sur les caisses, en voie de se promener sur la scène, baguettes en bouche et en folie), étalage un peu répétitif de tout ce qui se présente comme subversion, la plus étonnante restant finalement que l’école à laquelle se rattache le batteur hollandais me semble être celle de.. Sidney Catlett !!! Et pourquoi pas d’ailleurs !!! On passe un bon moment, mais on attend la suite.

 

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                       Han Bennink

 

Elle vient, sous la forme d’un concert associant le « Minafric Orchestra », Keith Tippett, Julie Tippets, Louis Moholo, faisant suite à un travail d’écriture et de nombreuses répétions sur place. La suite « For Mandela » regroupait donc : 

 

Louis Moholo – drums

Keith Tippett – piano

Julie Tippetts, Gianna Montecalvo, Cinzia Eramo et Lisa Manosperti – voix

 

MinAfric Orchestra 

Pino Minafra (trumpet, flugelhorn) 

Vito Francesco Mitoli, Marco Sannini, Giorgio Distante (tp)

Roberto Ottaviano, Sandro Satta, Pasquale Innarella, Carlo Actis Dato, Nicola Pisani (saxes) 

Michele Marzella, Sebi Tramontana et Beppe Caruso (tb) 

Giorgio Vendola (b)

Vincenzo Mazzone (dm)

Livio Minafra (claviers)

Michele Sinisi (narrateur)

 

Dans la lignée du spectacle « Viva la Black, entendu il y a quelques années au Mans (Europa Jazz Festival), la suite fait entendre les pièces suivantes, dont les auteurs sont indiqués entre parenthèses : 

 

Mra – (Dudu Pukwana)

Ithi Gqi – (Johnny Dyani)

B my dear – (Dudu Pukwana)

Dancing Damon – (Keith Tippett)

A song – (Keith Tippett)

Sondela – (Mongezi Feza)

Mongezi Feza – (Keith Tippett)

Canto General – Pino Minafra

South African National Anthen – Enoche Sontonga

Septober Energy – (Keith Tippett)

You ain’t Gonna Know Me ‘Cause You think You know me – (Mongezi Feza)

 

Pas mal de pièces anciennes on le voit, associées à des nouveautés. A partir du Mongezi Feza de Keith Tippett, la tension est montée d’un cran, pour culminer avec la reprise de l’anthen d’Afrique du Sud, après que Pino Minafra soit venu diriger lui-même son Canto General. Finale à tiroirs, reprises en choeur, avec un Louis Moholo ravi d’être là, en effet, survivant d’une époque de combats et de musiques dont il reste encore quelques musiciens en activité. On allait pouvoir en parler le lendemain…

 

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IMG 8941

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

C’est en effet avec Hazel Miller, la veuve de Harry Miller et co-fondatrice du label Ogun que nous avons commencé la journée du dimanche. Présentation de l’histoire et de l’actualité du label Ogun, questions récurrentes sur la difficulté pour les CD d’exister encore, le tout présenté par Riccardo Bergerone dont on connaît l’engagement vis à vis du jazz sud-africain. Un moment complètement éclairé par la carté avec laquelle Hazel répond aux questions, n’éludant rien de ses oublis, et rien non plus de la façon dont la vie va, et nous avec. Une leçon de maintien, et de sourire.

 

La soirée a tenu ses promesses, jusqu’au lâcher de ballons final, avec un duo plein de belles musicalités tendres, du tango à la musique klezmer, formé par Klaus Paier (accordéon et bandonéon) et Asja Valcic (cello). Le déchaînement était inévitable, il a eu lieu sous la houlette d’une sorte d’orchestre fou, dirigé par un trompettiste de la même origine, Cesare Dell’Anna. De la musique traditionnelle arrangée à la sauce d’aujourd’hui, de provenance de Lecce paraît-il (?), avec des reprises étonnantes comme ce Padam que tout le monde a repris en choeur sans trop savoir que ça venait aussi de chez nous, par Piaf interposée. À relire les paroles de près, on se prend à trouver cette reng
aine fort astucieuse, puisqu’elle traite de ce qu’elle est. Jugez-en plutôt : 

 

Cet air qui m’obsède jour et nuit

Cet air n’est pas né d’aujourd’hui

Il vient d’aussi loin que je viens

Trainé par cent mille musiciens

Un jour cet air me rendra folle

Cent fois j’ai voulu dire pourquoi

Mais il m’a coupé la parole

Il parle toujours avant moi

Et sa voix couvre ma voix.

 

Je ne sais pourquoi, mais je trouve ça excellent. Et si juste.

 

Philippe Méziat

 

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Le « Talos Festival » contient – au moins – deux festivals en un seul, et probablement bien plus que ça encore. Le premier regroupe un certain nombre de musiciens et d’orchestres, qui se produisent en de nombreux lieux de la cité des Pouilles. Des fanfares, des harmonies, des big-bands de près de 40 unités comme le dernier soir, des orchestres réunis pour l’occasion comme le « Minafric » pour le spectacle « For Mandela », supervisé par Keith Tippett, des solos, des duos, et j’en passe. Les uns sont d’ailleurs présentés en début de semaine sous le titre « Anteprima », les autres regroupés en fin de semaine et s’adressent davantage aux amateurs de jazz. Quoique… Car le deuxième festival, non moins essentiel, se joue sur la scène « politique », entendue au meilleur sens du terme. Il se joue quasiment en chaque occasion, chacun (élu, responsable administratif, directeur artistique, partenaire, etc.) prenant à son tour la parole pour souligner, qui la grandeur de la manifestation, qui son aura médiatique, mais aussi bien les obstacles qu’il aura fallu surmonter, voire les fâcheries qu’on aura évité, ou affronté. A ce jeu, Pino Minafra n’est pas en reste, et ne cache jamais sa détermination, qui l’a conduit plus d’une fois à suspendre son festival. Comme le public se presse chaque soir sur les lieux des concerts, c’est à une véritable campagne quasi électorale que nous sommes invités. Ma connaissance limitée de l’italien ne m’a pas permis de tout comprendre, mais il m’a semblé que la langue de bois était moins utilisée que chez nous, et qu’une forme de vrai dialogue pouvait s’instaurer. 

 

Quant au programme lui-même, il comporte aussi sa dimension socio-politique : on ne convoque pas par hasard des musiciens rompus à l’improvisation (Keith Tippett), des batteurs emblématiques de la lutte contre l’apartheid (Louis Moholo) ou des bataves habitués à secouer le cocotier comme Han Bennink. C’est avec ce dernier que la soirée du 13 septembre a commencé. Drumming solide, puis déjanté au sens propre (souliers sur les caisses, en voie de se promener sur la scène, baguettes en bouche et en folie), étalage un peu répétitif de tout ce qui se présente comme subversion, la plus étonnante restant finalement que l’école à laquelle se rattache le batteur hollandais me semble être celle de.. Sidney Catlett !!! Et pourquoi pas d’ailleurs !!! On passe un bon moment, mais on attend la suite.

 

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                       Han Bennink

 

Elle vient, sous la forme d’un concert associant le « Minafric Orchestra », Keith Tippett, Julie Tippets, Louis Moholo, faisant suite à un travail d’écriture et de nombreuses répétions sur place. La suite « For Mandela » regroupait donc : 

 

Louis Moholo – drums

Keith Tippett – piano

Julie Tippetts, Gianna Montecalvo, Cinzia Eramo et Lisa Manosperti – voix

 

MinAfric Orchestra 

Pino Minafra (trumpet, flugelhorn) 

Vito Francesco Mitoli, Marco Sannini, Giorgio Distante (tp)

Roberto Ottaviano, Sandro Satta, Pasquale Innarella, Carlo Actis Dato, Nicola Pisani (saxes) 

Michele Marzella, Sebi Tramontana et Beppe Caruso (tb) 

Giorgio Vendola (b)

Vincenzo Mazzone (dm)

Livio Minafra (claviers)

Michele Sinisi (narrateur)

 

Dans la lignée du spectacle « Viva la Black, entendu il y a quelques années au Mans (Europa Jazz Festival), la suite fait entendre les pièces suivantes, dont les auteurs sont indiqués entre parenthèses : 

 

Mra – (Dudu Pukwana)

Ithi Gqi – (Johnny Dyani)

B my dear – (Dudu Pukwana)

Dancing Damon – (Keith Tippett)

A song – (Keith Tippett)

Sondela – (Mongezi Feza)

Mongezi Feza – (Keith Tippett)

Canto General – Pino Minafra

South African National Anthen – Enoche Sontonga

Septober Energy – (Keith Tippett)

You ain’t Gonna Know Me ‘Cause You think You know me – (Mongezi Feza)

 

Pas mal de pièces anciennes on le voit, associées à des nouveautés. A partir du Mongezi Feza de Keith Tippett, la tension est montée d’un cran, pour culminer avec la reprise de l’anthen d’Afrique du Sud, après que Pino Minafra soit venu diriger lui-même son Canto General. Finale à tiroirs, reprises en choeur, avec un Louis Moholo ravi d’être là, en effet, survivant d’une époque de combats et de musiques dont il reste encore quelques musiciens en activité. On allait pouvoir en parler le lendemain…

 

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C’est en effet avec Hazel Miller, la veuve de Harry Miller et co-fondatrice du label Ogun que nous avons commencé la journée du dimanche. Présentation de l’histoire et de l’actualité du label Ogun, questions récurrentes sur la difficulté pour les CD d’exister encore, le tout présenté par Riccardo Bergerone dont on connaît l’engagement vis à vis du jazz sud-africain. Un moment complètement éclairé par la carté avec laquelle Hazel répond aux questions, n’éludant rien de ses oublis, et rien non plus de la façon dont la vie va, et nous avec. Une leçon de maintien, et de sourire.

 

La soirée a tenu ses promesses, jusqu’au lâcher de ballons final, avec un duo plein de belles musicalités tendres, du tango à la musique klezmer, formé par Klaus Paier (accordéon et bandonéon) et Asja Valcic (cello). Le déchaînement était inévitable, il a eu lieu sous la houlette d’une sorte d’orchestre fou, dirigé par un trompettiste de la même origine, Cesare Dell’Anna. De la musique traditionnelle arrangée à la sauce d’aujourd’hui, de provenance de Lecce paraît-il (?), avec des reprises étonnantes comme ce Padam que tout le monde a repris en choeur sans trop savoir que ça venait aussi de chez nous, par Piaf interposée. À relire les paroles de près, on se prend à trouver cette reng
aine fort astucieuse, puisqu’elle traite de ce qu’elle est. Jugez-en plutôt : 

 

Cet air qui m’obsède jour et nuit

Cet air n’est pas né d’aujourd’hui

Il vient d’aussi loin que je viens

Trainé par cent mille musiciens

Un jour cet air me rendra folle

Cent fois j’ai voulu dire pourquoi

Mais il m’a coupé la parole

Il parle toujours avant moi

Et sa voix couvre ma voix.

 

Je ne sais pourquoi, mais je trouve ça excellent. Et si juste.

 

Philippe Méziat

 

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Le « Talos Festival » contient – au moins – deux festivals en un seul, et probablement bien plus que ça encore. Le premier regroupe un certain nombre de musiciens et d’orchestres, qui se produisent en de nombreux lieux de la cité des Pouilles. Des fanfares, des harmonies, des big-bands de près de 40 unités comme le dernier soir, des orchestres réunis pour l’occasion comme le « Minafric » pour le spectacle « For Mandela », supervisé par Keith Tippett, des solos, des duos, et j’en passe. Les uns sont d’ailleurs présentés en début de semaine sous le titre « Anteprima », les autres regroupés en fin de semaine et s’adressent davantage aux amateurs de jazz. Quoique… Car le deuxième festival, non moins essentiel, se joue sur la scène « politique », entendue au meilleur sens du terme. Il se joue quasiment en chaque occasion, chacun (élu, responsable administratif, directeur artistique, partenaire, etc.) prenant à son tour la parole pour souligner, qui la grandeur de la manifestation, qui son aura médiatique, mais aussi bien les obstacles qu’il aura fallu surmonter, voire les fâcheries qu’on aura évité, ou affronté. A ce jeu, Pino Minafra n’est pas en reste, et ne cache jamais sa détermination, qui l’a conduit plus d’une fois à suspendre son festival. Comme le public se presse chaque soir sur les lieux des concerts, c’est à une véritable campagne quasi électorale que nous sommes invités. Ma connaissance limitée de l’italien ne m’a pas permis de tout comprendre, mais il m’a semblé que la langue de bois était moins utilisée que chez nous, et qu’une forme de vrai dialogue pouvait s’instaurer. 

 

Quant au programme lui-même, il comporte aussi sa dimension socio-politique : on ne convoque pas par hasard des musiciens rompus à l’improvisation (Keith Tippett), des batteurs emblématiques de la lutte contre l’apartheid (Louis Moholo) ou des bataves habitués à secouer le cocotier comme Han Bennink. C’est avec ce dernier que la soirée du 13 septembre a commencé. Drumming solide, puis déjanté au sens propre (souliers sur les caisses, en voie de se promener sur la scène, baguettes en bouche et en folie), étalage un peu répétitif de tout ce qui se présente comme subversion, la plus étonnante restant finalement que l’école à laquelle se rattache le batteur hollandais me semble être celle de.. Sidney Catlett !!! Et pourquoi pas d’ailleurs !!! On passe un bon moment, mais on attend la suite.

 

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                       Han Bennink

 

Elle vient, sous la forme d’un concert associant le « Minafric Orchestra », Keith Tippett, Julie Tippets, Louis Moholo, faisant suite à un travail d’écriture et de nombreuses répétions sur place. La suite « For Mandela » regroupait donc : 

 

Louis Moholo – drums

Keith Tippett – piano

Julie Tippetts, Gianna Montecalvo, Cinzia Eramo et Lisa Manosperti – voix

 

MinAfric Orchestra 

Pino Minafra (trumpet, flugelhorn) 

Vito Francesco Mitoli, Marco Sannini, Giorgio Distante (tp)

Roberto Ottaviano, Sandro Satta, Pasquale Innarella, Carlo Actis Dato, Nicola Pisani (saxes) 

Michele Marzella, Sebi Tramontana et Beppe Caruso (tb) 

Giorgio Vendola (b)

Vincenzo Mazzone (dm)

Livio Minafra (claviers)

Michele Sinisi (narrateur)

 

Dans la lignée du spectacle « Viva la Black, entendu il y a quelques années au Mans (Europa Jazz Festival), la suite fait entendre les pièces suivantes, dont les auteurs sont indiqués entre parenthèses : 

 

Mra – (Dudu Pukwana)

Ithi Gqi – (Johnny Dyani)

B my dear – (Dudu Pukwana)

Dancing Damon – (Keith Tippett)

A song – (Keith Tippett)

Sondela – (Mongezi Feza)

Mongezi Feza – (Keith Tippett)

Canto General – Pino Minafra

South African National Anthen – Enoche Sontonga

Septober Energy – (Keith Tippett)

You ain’t Gonna Know Me ‘Cause You think You know me – (Mongezi Feza)

 

Pas mal de pièces anciennes on le voit, associées à des nouveautés. A partir du Mongezi Feza de Keith Tippett, la tension est montée d’un cran, pour culminer avec la reprise de l’anthen d’Afrique du Sud, après que Pino Minafra soit venu diriger lui-même son Canto General. Finale à tiroirs, reprises en choeur, avec un Louis Moholo ravi d’être là, en effet, survivant d’une époque de combats et de musiques dont il reste encore quelques musiciens en activité. On allait pouvoir en parler le lendemain…

 

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C’est en effet avec Hazel Miller, la veuve de Harry Miller et co-fondatrice du label Ogun que nous avons commencé la journée du dimanche. Présentation de l’histoire et de l’actualité du label Ogun, questions récurrentes sur la difficulté pour les CD d’exister encore, le tout présenté par Riccardo Bergerone dont on connaît l’engagement vis à vis du jazz sud-africain. Un moment complètement éclairé par la carté avec laquelle Hazel répond aux questions, n’éludant rien de ses oublis, et rien non plus de la façon dont la vie va, et nous avec. Une leçon de maintien, et de sourire.

 

La soirée a tenu ses promesses, jusqu’au lâcher de ballons final, avec un duo plein de belles musicalités tendres, du tango à la musique klezmer, formé par Klaus Paier (accordéon et bandonéon) et Asja Valcic (cello). Le déchaînement était inévitable, il a eu lieu sous la houlette d’une sorte d’orchestre fou, dirigé par un trompettiste de la même origine, Cesare Dell’Anna. De la musique traditionnelle arrangée à la sauce d’aujourd’hui, de provenance de Lecce paraît-il (?), avec des reprises étonnantes comme ce Padam que tout le monde a repris en choeur sans trop savoir que ça venait aussi de chez nous, par Piaf interposée. À relire les paroles de près, on se prend à trouver cette reng
aine fort astucieuse, puisqu’elle traite de ce qu’elle est. Jugez-en plutôt : 

 

Cet air qui m’obsède jour et nuit

Cet air n’est pas né d’aujourd’hui

Il vient d’aussi loin que je viens

Trainé par cent mille musiciens

Un jour cet air me rendra folle

Cent fois j’ai voulu dire pourquoi

Mais il m’a coupé la parole

Il parle toujours avant moi

Et sa voix couvre ma voix.

 

Je ne sais pourquoi, mais je trouve ça excellent. Et si juste.

 

Philippe Méziat

 

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Le « Talos Festival » contient – au moins – deux festivals en un seul, et probablement bien plus que ça encore. Le premier regroupe un certain nombre de musiciens et d’orchestres, qui se produisent en de nombreux lieux de la cité des Pouilles. Des fanfares, des harmonies, des big-bands de près de 40 unités comme le dernier soir, des orchestres réunis pour l’occasion comme le « Minafric » pour le spectacle « For Mandela », supervisé par Keith Tippett, des solos, des duos, et j’en passe. Les uns sont d’ailleurs présentés en début de semaine sous le titre « Anteprima », les autres regroupés en fin de semaine et s’adressent davantage aux amateurs de jazz. Quoique… Car le deuxième festival, non moins essentiel, se joue sur la scène « politique », entendue au meilleur sens du terme. Il se joue quasiment en chaque occasion, chacun (élu, responsable administratif, directeur artistique, partenaire, etc.) prenant à son tour la parole pour souligner, qui la grandeur de la manifestation, qui son aura médiatique, mais aussi bien les obstacles qu’il aura fallu surmonter, voire les fâcheries qu’on aura évité, ou affronté. A ce jeu, Pino Minafra n’est pas en reste, et ne cache jamais sa détermination, qui l’a conduit plus d’une fois à suspendre son festival. Comme le public se presse chaque soir sur les lieux des concerts, c’est à une véritable campagne quasi électorale que nous sommes invités. Ma connaissance limitée de l’italien ne m’a pas permis de tout comprendre, mais il m’a semblé que la langue de bois était moins utilisée que chez nous, et qu’une forme de vrai dialogue pouvait s’instaurer. 

 

Quant au programme lui-même, il comporte aussi sa dimension socio-politique : on ne convoque pas par hasard des musiciens rompus à l’improvisation (Keith Tippett), des batteurs emblématiques de la lutte contre l’apartheid (Louis Moholo) ou des bataves habitués à secouer le cocotier comme Han Bennink. C’est avec ce dernier que la soirée du 13 septembre a commencé. Drumming solide, puis déjanté au sens propre (souliers sur les caisses, en voie de se promener sur la scène, baguettes en bouche et en folie), étalage un peu répétitif de tout ce qui se présente comme subversion, la plus étonnante restant finalement que l’école à laquelle se rattache le batteur hollandais me semble être celle de.. Sidney Catlett !!! Et pourquoi pas d’ailleurs !!! On passe un bon moment, mais on attend la suite.

 

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Elle vient, sous la forme d’un concert associant le « Minafric Orchestra », Keith Tippett, Julie Tippets, Louis Moholo, faisant suite à un travail d’écriture et de nombreuses répétions sur place. La suite « For Mandela » regroupait donc : 

 

Louis Moholo – drums

Keith Tippett – piano

Julie Tippetts, Gianna Montecalvo, Cinzia Eramo et Lisa Manosperti – voix

 

MinAfric Orchestra 

Pino Minafra (trumpet, flugelhorn) 

Vito Francesco Mitoli, Marco Sannini, Giorgio Distante (tp)

Roberto Ottaviano, Sandro Satta, Pasquale Innarella, Carlo Actis Dato, Nicola Pisani (saxes) 

Michele Marzella, Sebi Tramontana et Beppe Caruso (tb) 

Giorgio Vendola (b)

Vincenzo Mazzone (dm)

Livio Minafra (claviers)

Michele Sinisi (narrateur)

 

Dans la lignée du spectacle « Viva la Black, entendu il y a quelques années au Mans (Europa Jazz Festival), la suite fait entendre les pièces suivantes, dont les auteurs sont indiqués entre parenthèses : 

 

Mra – (Dudu Pukwana)

Ithi Gqi – (Johnny Dyani)

B my dear – (Dudu Pukwana)

Dancing Damon – (Keith Tippett)

A song – (Keith Tippett)

Sondela – (Mongezi Feza)

Mongezi Feza – (Keith Tippett)

Canto General – Pino Minafra

South African National Anthen – Enoche Sontonga

Septober Energy – (Keith Tippett)

You ain’t Gonna Know Me ‘Cause You think You know me – (Mongezi Feza)

 

Pas mal de pièces anciennes on le voit, associées à des nouveautés. A partir du Mongezi Feza de Keith Tippett, la tension est montée d’un cran, pour culminer avec la reprise de l’anthen d’Afrique du Sud, après que Pino Minafra soit venu diriger lui-même son Canto General. Finale à tiroirs, reprises en choeur, avec un Louis Moholo ravi d’être là, en effet, survivant d’une époque de combats et de musiques dont il reste encore quelques musiciens en activité. On allait pouvoir en parler le lendemain…

 

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C’est en effet avec Hazel Miller, la veuve de Harry Miller et co-fondatrice du label Ogun que nous avons commencé la journée du dimanche. Présentation de l’histoire et de l’actualité du label Ogun, questions récurrentes sur la difficulté pour les CD d’exister encore, le tout présenté par Riccardo Bergerone dont on connaît l’engagement vis à vis du jazz sud-africain. Un moment complètement éclairé par la carté avec laquelle Hazel répond aux questions, n’éludant rien de ses oublis, et rien non plus de la façon dont la vie va, et nous avec. Une leçon de maintien, et de sourire.

 

La soirée a tenu ses promesses, jusqu’au lâcher de ballons final, avec un duo plein de belles musicalités tendres, du tango à la musique klezmer, formé par Klaus Paier (accordéon et bandonéon) et Asja Valcic (cello). Le déchaînement était inévitable, il a eu lieu sous la houlette d’une sorte d’orchestre fou, dirigé par un trompettiste de la même origine, Cesare Dell’Anna. De la musique traditionnelle arrangée à la sauce d’aujourd’hui, de provenance de Lecce paraît-il (?), avec des reprises étonnantes comme ce Padam que tout le monde a repris en choeur sans trop savoir que ça venait aussi de chez nous, par Piaf interposée. À relire les paroles de près, on se prend à trouver cette reng
aine fort astucieuse, puisqu’elle traite de ce qu’elle est. Jugez-en plutôt : 

 

Cet air qui m’obsède jour et nuit

Cet air n’est pas né d’aujourd’hui

Il vient d’aussi loin que je viens

Trainé par cent mille musiciens

Un jour cet air me rendra folle

Cent fois j’ai voulu dire pourquoi

Mais il m’a coupé la parole

Il parle toujours avant moi

Et sa voix couvre ma voix.

 

Je ne sais pourquoi, mais je trouve ça excellent. Et si juste.

 

Philippe Méziat