Jazz live
Publié le 19 Oct 2025 • Par Xavier Prévost

Tim Berne trio ‘Capatosta’ au Sunset

Tim Berne trio ‘Capatosta’

Tim Berne (saxophone alto), Tom Rainey (batterie), Gregg Belisle-Chi (guitare)

Paris, Sunset, 18 octobre 2025, 20h30

En tournée européenne, le nouveau trio du saxophoniste le plus constamment virulent et singulier de ces dernières décennies. Il est en compagnie de son complice de longue date, Tom Rainey, et d’un jeune guitariste avec lequel on l’entend depuis 4 ou 5 ans, Gregg Belisie-Chi. Ensemble ils ont enregistré le disque ‘Yikes Too’, publié au début de l’année (Sceewgun – Out Of Your Head OOYH 002, https://timberne.bandcamp.com/album/yikes-too )

Impossible de ne pas penser au trio ‘Big Satan’, dont le guitariste était Marc Ducret, associé au saxophoniste et au batteur, voici plus de deux décennies. Mais allons au présent. La musique se déroule toujours dans un flot de lignes brisées, d’impulsions hyper-expressives, de lyrisme souvent désamorcé, comme pour introduire une sorte de distance critique avec toute référence trop explicite. Les exposés sont un jeu permanent d’interactions. D’un unisson surgit côté guitare un contrepoint mélodique, voire rythmique, ou un effet de canon. La batterie est partie prenante dans cette mécanique aussi formelle que libertaire. C’est précis, incisif, et quand l’unisson flotte parfois, on se demande si ce n’est pas délibéré, comme au bon vieux temps du free jazz, pour lequel les unissons flottants étaient une sorte de revendication esthétique, comme un point de vue critique sur l’académisme de l’exécution ‘au cordeau’. Les improvisations de Tim Berne conjuguent en permanence les traits incisifs et les inflexions lyriques. C’est à soi seul un cas d’école qui mériterait un débat esthético-philosophique sur la triade lyrisme-expression-expressivité…. Au premier morceau le solo du guitariste fleure bon le néo-académisme façon Berklee College de Boston. Mais ça ne dure pas. Pas la suite son langage, dans l’expression individuelle comme dans l’interaction, affirmera une belle singularité, offensive de surcroît. Quant à Tom Rainey, toujours attentif, pertinent, mais aussi parfaitement autonome, il s’impose souvent comme le pivot essentiel à l’intelligibilité de l’ensemble. En résumé un grand moment de musique à écouter avec l’intensité qu’elle mérite. J’avais devant moi deux gars qui parlaient parfois un peu bruyamment de la musique, et derrière un quatuor dont le concert ne paraissait pas être le souci majeur. Mais ils ne sont pas parvenus à entamer mon (très vif) plaisir.

Xavier Prévost (texte & photos)

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Le trio est à La Malterie de Lille le lundi 20 octobre, puis à Anderlecht près de Bruxelles le 22, etc….