Jazz live
Publié le 24 Déc 2012

¨ÎloJazz, carrefour des musiques créoles en Guadeloupe

Vendredi 13 décembre autour de midi. Vous vous retrouvez à Orly sous une pluie verglaçante. Responsable du Centre d’Information du Jazz (depuis 1985 !), vous avez la conscience tranquille d’avoir (enfin !) achevé, après deux années de réactualisations obstinées et obsessionnelles, la septième édition de « Jazz de France », le guide-annuaire qui a mobilisé pendant si longtemps votre attention et passion. Embarquement pour Pointe-à-Pitre. Départ à 15h, 8h de vol, 5h de décalage horaire. Quand vous arrivez en Guadeloupe à 18h (heure locale), vous êtes d’abord accueilli par cette douce moiteur tropicale qui vous fait oublier immédiatement l’hiver et vous fouette sans prévenir d’une énergie vitale insoupçonnée. On vous conduit à Gosier dans un hôtel 4 étoiles au bord de la mer pour y déposer vos valises pour repartir aussitôt direction le Pavillon de la Culture à Pointe-à-Pitre pour la soirée officielle d’ouverture de la quatrième édition d’ÎloJazz. Deux petits punch et vous oubliez très vite votre jet flag. Auréolée d’un superbe chapeau blanc, Jocelyne Daril, coorganisatrice du festival et directrice des Actions & Politiques culturelles de la Communauté d’agglomération Cap Excellence, vous accueille avec chaleur et vous fait la fête comme si on se connaissait depuis longtemps. Vous vous dites alors comme une évidence : « Quel bonheur d’être en Guadeloupe ! »

D’autant plus qu’au menu de cette soirée inaugurale, sur scène, vous découvrez pour la première fois le « Caribbean Jazz Group » du saxophoniste Jocelyn Ménard, entouré de la jeune garde du jazz antillais, à savoir Grégory Privat au piano et Sonny Troupé, fantastique batteur magnifiquement enraciné dans la tradition Gawka guadeloupéenne. Attention : retenez bien son nom. Voilà un Ka à part à ne pas oublier. Un disque sous son nom devrait enfin sortir prochainement. Quant à Jocelyn Ménard, canadien qui parle le créole avec un délicieux accent québécois et qui dirige depuis 1997 une école de jazz en Guadeloupe, Men Art Music, il propose un jazz caribéen tonique et voluptueux. A preuve, l’excellent album « Terre Mère » qu’il vient d’autoproduite et pour lequel il recherche un distributeur en Métropole. Avis à la population !

A peine remis de mes premières émotions musicales, Jocelyne Daril me prévient. «Vous n’allez pas vous coucher tout de suite » et m’invite avec une force de conviction irrésistiblement speedée à l’accompagner au centre culturel Sonis pour assister à la répétition du concert que va donner le lendemain Cheick Tidiane Seck, grand maître du « MandinGroove ». Quand ce merveilleux musicien vous déclare « je suis mossi, je suis toucouleur, je suis sénoufo, je suis malinké, je suis touareg, je suis malien, je suis africain », il faut le croire. Car ce claviériste au sourire radieux est vraiment panafricaniste dans l’âme. A preuve, ses musiciens, comme le chanteur Kabiné Kouyaté, griot inné, fils du Guinéen El Hadj Sory Kandia Kouyaté, légendaire voix d’or du mandingue. Mais aussi le batteur américain rasta Marque Gilmore qui, derrière son avalanche de tambours et sa pyramide de cymbales s’affirme comme l’un des percussionnistes les plus extraordinaires de l’époque. Un vrai choc !

La soirée n’est pas finie. Nous partons avec les musiciens et l’équipe du festival diner au TamTam sur la route de Gosier. J’y rencontre enfin le deuxième personnage essentiel de ce festival, Gérard Poumaroux, directeur du centre culturel Sonis, mais aussi bassiste de profession et ancien directeur musical de l’orchestre de Mory Kanté. Accras, poisson et petit punch, la fin de soirée est chaude et conviviale. Je rentre à l’hôtel à 3h, 8h du matin pour moi (heure de Paris). Je suis aux anges, pas fatigué et persuadé que plein de merveilleuses surprises m’attendent encore pendant ce trop court séjour antillais.

Je n’ai pas tort. Le lendemain, devant le centre culturel Sonis, est offert gratuitement un plateau « afro caribéen » superbe et généreux avec Cheick Tidiane Seck en finale (triomphe public mérité !) et l’inconnu Yann Négrit en première partie. Ce jeune guitariste guadeloupéen et scatteur à la mode Benson est né en Métropole. Il vient pour la première fois, face à un public antillais, se ressourcer au pays pour nous inviter à découvrir sa vision neuve et musclée du zouk, mélange explosif de jazz, de ka et de métal. A preuve son premier album autoproduit « Wild Ka » (www.yannnegrit.com). A ses côtés, une rythmique inédite d’enfer composée de Michel Alibo (Sixun) à la basse et de Damien Schmitt à la batterie. Celui qu’on a surnommé à juste titre « Le Paco Sery blanc » impressionne d’emblée par sa frappe sèche et violente, son ardeur polyrythmique hors du commun et sa science métronomique du tempo. Ce jeune homme est vraiment un surdoué. Est-ce pour cela qu’il a choisi de quitter bien vite la France pour tenter l’aventure en Californie ? Il vit aujourd’hui à Montréal, accompagne Jean-Luc Ponty et tourne régulièrement en Russie avec un groupe de jazz rock Impact Fuze. Il faut suivre de très près l’avenir de ce batteur plein d’abattage joyeux et d’énergie positive ;

Entre Yann Négrit et Cheick Tidiane Seck, notre coup de foudre d’ÎloJazz aura été sans conteste pour « Wèspè pour Ayiti ». A savoir, l’histoire d’une rencontre improbable et totalement convaincante pour exprimer musicalement ensemble un profond sentiment de solidarité et de respect envers le peuple haïtien. Ce projet est né à l’initiative du « Rézo Karayib», fédération créée en 2010 par des festivals créolophones en vue d’agir d’une meilleure circulation des œuvres et des musiciens dans la Caraïbe. Cette fédération jeune et encore hésitante rassemble aujourd’hui le festival de jazz de Port-au-Prince (Joël Widmaïer), le festival Jazz’n’Creole de la Dominique, (Sobers Esprit), Jazz in The South de Sainte Lucie, le Centre culturel de Rencontres de Fonds Saint-Jacques (Martinique) dirigé depuis quelques mois par Coline Tousom, le Lamentin Jazz Festival, Martinique Jazz Festival (Georges-Louis Lebon et Frédéric Thalys, ses nouveaux responsables) et, bien sûr, ÎloJazz avec Jocelyne Daril et Gérard Poumaroux comme représentants.

Créé en 2011 à Sainte Lucie, repris au Lamentin Jazz festival en Martinique au printemps dernier, le projet « Wèspè pou Ayiti » a été imaginé et réalisé par trois musiciens antillais. A savoir, le pianiste saint-lucien Richard Payne, le batteur guadeloupéen Sonny Troupé et le trompettiste haïtien Jean Caze qui joue aujourd’hui dans l’orchestre du chanteur crooner Michael Bublé. Le résultat est enthousiasmant. Je lance un appel pour que cette création groovy, originale et festive trouve rapidement un écho favorable auprès des responsables de
festival de jazz « métropolitain ». Je m’engage ici à leur assurer un succès immédiat auprès de leur public tant la musique afro caribéenne que délivre avec bonheur ce groupe très soudé est riche et généreuse. A bons entendeurs…

Après la soirée du vendredi consacrée aux « musiques urbaines » où l’on a pu apprécier le rap sensuel et naturel de là jeune américaine d’origine ghanéenne Akua Naru, flanquée d’une jeune escouade teutonne quelque peu raide pour l’accompagner (elle vit aujourd’hui à Cologne), le point d’orgue de cette quatrième édition d’ÎloJazz fut le double concert du dimanche 16 décembre place de la Victoire à Pointe-à-Pitre. En première partie, la star locale, Tanya Sant-Val déconcerta au début, puis conquit finalement le public venu nombreux l’applaudir en se révélant « autrement » (comme l’affirmait le programme).Il faut préciser qu’elle avait courageusement choisi, lors ce concert « carte blanche », de jazzifier son zouk avec flamme et énergie en s’entourant pour l’occasion de musiciens de jazz comme Maître Alain-Jean Marie (tout heureux de jouer sur la place où il a vécu toute son enfance), Thierry Fanfant à la basse, Franck Nicolas à la trompette, Grégory Louis à la batterie et, enfin, Jean-Christophe Maillard à la guitare. Ce Guadeloupéen blanc qui vit aujourd’hui à New York (où il accompagne Richard Bona), a été pour moi une vraie révélation humaine et musicale. J’attends avec impatience son deuxième opus qui fait suite à son très original « Grand Baton ». (www.myspace.com/grandbaton)

Il revint enfin au « Parrain » de cette édition d’ÎloJazz de conclure en beauté les festivités. Il s’agit du tambour major du jazz fusion, le grand Billy Cobham, explosif derrière son impressionnant set de batterie. Pendant près de deux heures, ce jeune homme de 69 ans a enchainé toute une joyeuse ribambelle de thèmes toniques, riches d’une savante complexité rythmique, à partir desquels ont pu en toute liberté et sécurité s’éclater ses musiciens. Parmi eux, deux Français : Jean-Marie-Ecay à la guitare (que l’on ne présente plus), mais aussi une jeune clavieriste étrangement encore inconnue des médias et pourtant formidable, Camelia Ben Naceur. Née à Lourdes d’un père tunisienne et d’une mère espagnole, cette pianiste vif-argent que l’on peut entendre sur le tout dernier album du saxophoniste Frédéric Borey (« The Option » Fresh Sound New Talent) manifeste une volonté rythmique rieuse et une joie de jouer vraiment communicative. Philippe Meziat, il ya trois ans dans Jazz magazine, a été le premier à nous alerter sur son talent naissant. Elle lui confiait : « Sur scène, on est dans l’arène, on se met en en position d’être vue et entendue, on se met en danger. Il faut l’accepter et même en profiter ». Et en faire généreusement profiter les autres. Mission accomplie, Camelia !

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Vendredi 13 décembre autour de midi. Vous vous retrouvez à Orly sous une pluie verglaçante. Responsable du Centre d’Information du Jazz (depuis 1985 !), vous avez la conscience tranquille d’avoir (enfin !) achevé, après deux années de réactualisations obstinées et obsessionnelles, la septième édition de « Jazz de France », le guide-annuaire qui a mobilisé pendant si longtemps votre attention et passion. Embarquement pour Pointe-à-Pitre. Départ à 15h, 8h de vol, 5h de décalage horaire. Quand vous arrivez en Guadeloupe à 18h (heure locale), vous êtes d’abord accueilli par cette douce moiteur tropicale qui vous fait oublier immédiatement l’hiver et vous fouette sans prévenir d’une énergie vitale insoupçonnée. On vous conduit à Gosier dans un hôtel 4 étoiles au bord de la mer pour y déposer vos valises pour repartir aussitôt direction le Pavillon de la Culture à Pointe-à-Pitre pour la soirée officielle d’ouverture de la quatrième édition d’ÎloJazz. Deux petits punch et vous oubliez très vite votre jet flag. Auréolée d’un superbe chapeau blanc, Jocelyne Daril, coorganisatrice du festival et directrice des Actions & Politiques culturelles de la Communauté d’agglomération Cap Excellence, vous accueille avec chaleur et vous fait la fête comme si on se connaissait depuis longtemps. Vous vous dites alors comme une évidence : « Quel bonheur d’être en Guadeloupe ! »

D’autant plus qu’au menu de cette soirée inaugurale, sur scène, vous découvrez pour la première fois le « Caribbean Jazz Group » du saxophoniste Jocelyn Ménard, entouré de la jeune garde du jazz antillais, à savoir Grégory Privat au piano et Sonny Troupé, fantastique batteur magnifiquement enraciné dans la tradition Gawka guadeloupéenne. Attention : retenez bien son nom. Voilà un Ka à part à ne pas oublier. Un disque sous son nom devrait enfin sortir prochainement. Quant à Jocelyn Ménard, canadien qui parle le créole avec un délicieux accent québécois et qui dirige depuis 1997 une école de jazz en Guadeloupe, Men Art Music, il propose un jazz caribéen tonique et voluptueux. A preuve, l’excellent album « Terre Mère » qu’il vient d’autoproduite et pour lequel il recherche un distributeur en Métropole. Avis à la population !

A peine remis de mes premières émotions musicales, Jocelyne Daril me prévient. «Vous n’allez pas vous coucher tout de suite » et m’invite avec une force de conviction irrésistiblement speedée à l’accompagner au centre culturel Sonis pour assister à la répétition du concert que va donner le lendemain Cheick Tidiane Seck, grand maître du « MandinGroove ». Quand ce merveilleux musicien vous déclare « je suis mossi, je suis toucouleur, je suis sénoufo, je suis malinké, je suis touareg, je suis malien, je suis africain », il faut le croire. Car ce claviériste au sourire radieux est vraiment panafricaniste dans l’âme. A preuve, ses musiciens, comme le chanteur Kabiné Kouyaté, griot inné, fils du Guinéen El Hadj Sory Kandia Kouyaté, légendaire voix d’or du mandingue. Mais aussi le batteur américain rasta Marque Gilmore qui, derrière son avalanche de tambours et sa pyramide de cymbales s’affirme comme l’un des percussionnistes les plus extraordinaires de l’époque. Un vrai choc !

La soirée n’est pas finie. Nous partons avec les musiciens et l’équipe du festival diner au TamTam sur la route de Gosier. J’y rencontre enfin le deuxième personnage essentiel de ce festival, Gérard Poumaroux, directeur du centre culturel Sonis, mais aussi bassiste de profession et ancien directeur musical de l’orchestre de Mory Kanté. Accras, poisson et petit punch, la fin de soirée est chaude et conviviale. Je rentre à l’hôtel à 3h, 8h du matin pour moi (heure de Paris). Je suis aux anges, pas fatigué et persuadé que plein de merveilleuses surprises m’attendent encore pendant ce trop court séjour antillais.

Je n’ai pas tort. Le lendemain, devant le centre culturel Sonis, est offert gratuitement un plateau « afro caribéen » superbe et généreux avec Cheick Tidiane Seck en finale (triomphe public mérité !) et l’inconnu Yann Négrit en première partie. Ce jeune guitariste guadeloupéen et scatteur à la mode Benson est né en Métropole. Il vient pour la première fois, face à un public antillais, se ressourcer au pays pour nous inviter à découvrir sa vision neuve et musclée du zouk, mélange explosif de jazz, de ka et de métal. A preuve son premier album autoproduit « Wild Ka » (www.yannnegrit.com). A ses côtés, une rythmique inédite d’enfer composée de Michel Alibo (Sixun) à la basse et de Damien Schmitt à la batterie. Celui qu’on a surnommé à juste titre « Le Paco Sery blanc » impressionne d’emblée par sa frappe sèche et violente, son ardeur polyrythmique hors du commun et sa science métronomique du tempo. Ce jeune homme est vraiment un surdoué. Est-ce pour cela qu’il a choisi de quitter bien vite la France pour tenter l’aventure en Californie ? Il vit aujourd’hui à Montréal, accompagne Jean-Luc Ponty et tourne régulièrement en Russie avec un groupe de jazz rock Impact Fuze. Il faut suivre de très près l’avenir de ce batteur plein d’abattage joyeux et d’énergie positive ;

Entre Yann Négrit et Cheick Tidiane Seck, notre coup de foudre d’ÎloJazz aura été sans conteste pour « Wèspè pour Ayiti ». A savoir, l’histoire d’une rencontre improbable et totalement convaincante pour exprimer musicalement ensemble un profond sentiment de solidarité et de respect envers le peuple haïtien. Ce projet est né à l’initiative du « Rézo Karayib», fédération créée en 2010 par des festivals créolophones en vue d’agir d’une meilleure circulation des œuvres et des musiciens dans la Caraïbe. Cette fédération jeune et encore hésitante rassemble aujourd’hui le festival de jazz de Port-au-Prince (Joël Widmaïer), le festival Jazz’n’Creole de la Dominique, (Sobers Esprit), Jazz in The South de Sainte Lucie, le Centre culturel de Rencontres de Fonds Saint-Jacques (Martinique) dirigé depuis quelques mois par Coline Tousom, le Lamentin Jazz Festival, Martinique Jazz Festival (Georges-Louis Lebon et Frédéric Thalys, ses nouveaux responsables) et, bien sûr, ÎloJazz avec Jocelyne Daril et Gérard Poumaroux comme représentants.

Créé en 2011 à Sainte Lucie, repris au Lamentin Jazz festival en Martinique au printemps dernier, le projet « Wèspè pou Ayiti » a été imaginé et réalisé par trois musiciens antillais. A savoir, le pianiste saint-lucien Richard Payne, le batteur guadeloupéen Sonny Troupé et le trompettiste haïtien Jean Caze qui joue aujourd’hui dans l’orchestre du chanteur crooner Michael Bublé. Le résultat est enthousiasmant. Je lance un appel pour que cette création groovy, originale et festive trouve rapidement un écho favorable auprès des responsables de
festival de jazz « métropolitain ». Je m’engage ici à leur assurer un succès immédiat auprès de leur public tant la musique afro caribéenne que délivre avec bonheur ce groupe très soudé est riche et généreuse. A bons entendeurs…

Après la soirée du vendredi consacrée aux « musiques urbaines » où l’on a pu apprécier le rap sensuel et naturel de là jeune américaine d’origine ghanéenne Akua Naru, flanquée d’une jeune escouade teutonne quelque peu raide pour l’accompagner (elle vit aujourd’hui à Cologne), le point d’orgue de cette quatrième édition d’ÎloJazz fut le double concert du dimanche 16 décembre place de la Victoire à Pointe-à-Pitre. En première partie, la star locale, Tanya Sant-Val déconcerta au début, puis conquit finalement le public venu nombreux l’applaudir en se révélant « autrement » (comme l’affirmait le programme).Il faut préciser qu’elle avait courageusement choisi, lors ce concert « carte blanche », de jazzifier son zouk avec flamme et énergie en s’entourant pour l’occasion de musiciens de jazz comme Maître Alain-Jean Marie (tout heureux de jouer sur la place où il a vécu toute son enfance), Thierry Fanfant à la basse, Franck Nicolas à la trompette, Grégory Louis à la batterie et, enfin, Jean-Christophe Maillard à la guitare. Ce Guadeloupéen blanc qui vit aujourd’hui à New York (où il accompagne Richard Bona), a été pour moi une vraie révélation humaine et musicale. J’attends avec impatience son deuxième opus qui fait suite à son très original « Grand Baton ». (www.myspace.com/grandbaton)

Il revint enfin au « Parrain » de cette édition d’ÎloJazz de conclure en beauté les festivités. Il s’agit du tambour major du jazz fusion, le grand Billy Cobham, explosif derrière son impressionnant set de batterie. Pendant près de deux heures, ce jeune homme de 69 ans a enchainé toute une joyeuse ribambelle de thèmes toniques, riches d’une savante complexité rythmique, à partir desquels ont pu en toute liberté et sécurité s’éclater ses musiciens. Parmi eux, deux Français : Jean-Marie-Ecay à la guitare (que l’on ne présente plus), mais aussi une jeune clavieriste étrangement encore inconnue des médias et pourtant formidable, Camelia Ben Naceur. Née à Lourdes d’un père tunisienne et d’une mère espagnole, cette pianiste vif-argent que l’on peut entendre sur le tout dernier album du saxophoniste Frédéric Borey (« The Option » Fresh Sound New Talent) manifeste une volonté rythmique rieuse et une joie de jouer vraiment communicative. Philippe Meziat, il ya trois ans dans Jazz magazine, a été le premier à nous alerter sur son talent naissant. Elle lui confiait : « Sur scène, on est dans l’arène, on se met en en position d’être vue et entendue, on se met en danger. Il faut l’accepter et même en profiter ». Et en faire généreusement profiter les autres. Mission accomplie, Camelia !

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Vendredi 13 décembre autour de midi. Vous vous retrouvez à Orly sous une pluie verglaçante. Responsable du Centre d’Information du Jazz (depuis 1985 !), vous avez la conscience tranquille d’avoir (enfin !) achevé, après deux années de réactualisations obstinées et obsessionnelles, la septième édition de « Jazz de France », le guide-annuaire qui a mobilisé pendant si longtemps votre attention et passion. Embarquement pour Pointe-à-Pitre. Départ à 15h, 8h de vol, 5h de décalage horaire. Quand vous arrivez en Guadeloupe à 18h (heure locale), vous êtes d’abord accueilli par cette douce moiteur tropicale qui vous fait oublier immédiatement l’hiver et vous fouette sans prévenir d’une énergie vitale insoupçonnée. On vous conduit à Gosier dans un hôtel 4 étoiles au bord de la mer pour y déposer vos valises pour repartir aussitôt direction le Pavillon de la Culture à Pointe-à-Pitre pour la soirée officielle d’ouverture de la quatrième édition d’ÎloJazz. Deux petits punch et vous oubliez très vite votre jet flag. Auréolée d’un superbe chapeau blanc, Jocelyne Daril, coorganisatrice du festival et directrice des Actions & Politiques culturelles de la Communauté d’agglomération Cap Excellence, vous accueille avec chaleur et vous fait la fête comme si on se connaissait depuis longtemps. Vous vous dites alors comme une évidence : « Quel bonheur d’être en Guadeloupe ! »

D’autant plus qu’au menu de cette soirée inaugurale, sur scène, vous découvrez pour la première fois le « Caribbean Jazz Group » du saxophoniste Jocelyn Ménard, entouré de la jeune garde du jazz antillais, à savoir Grégory Privat au piano et Sonny Troupé, fantastique batteur magnifiquement enraciné dans la tradition Gawka guadeloupéenne. Attention : retenez bien son nom. Voilà un Ka à part à ne pas oublier. Un disque sous son nom devrait enfin sortir prochainement. Quant à Jocelyn Ménard, canadien qui parle le créole avec un délicieux accent québécois et qui dirige depuis 1997 une école de jazz en Guadeloupe, Men Art Music, il propose un jazz caribéen tonique et voluptueux. A preuve, l’excellent album « Terre Mère » qu’il vient d’autoproduite et pour lequel il recherche un distributeur en Métropole. Avis à la population !

A peine remis de mes premières émotions musicales, Jocelyne Daril me prévient. «Vous n’allez pas vous coucher tout de suite » et m’invite avec une force de conviction irrésistiblement speedée à l’accompagner au centre culturel Sonis pour assister à la répétition du concert que va donner le lendemain Cheick Tidiane Seck, grand maître du « MandinGroove ». Quand ce merveilleux musicien vous déclare « je suis mossi, je suis toucouleur, je suis sénoufo, je suis malinké, je suis touareg, je suis malien, je suis africain », il faut le croire. Car ce claviériste au sourire radieux est vraiment panafricaniste dans l’âme. A preuve, ses musiciens, comme le chanteur Kabiné Kouyaté, griot inné, fils du Guinéen El Hadj Sory Kandia Kouyaté, légendaire voix d’or du mandingue. Mais aussi le batteur américain rasta Marque Gilmore qui, derrière son avalanche de tambours et sa pyramide de cymbales s’affirme comme l’un des percussionnistes les plus extraordinaires de l’époque. Un vrai choc !

La soirée n’est pas finie. Nous partons avec les musiciens et l’équipe du festival diner au TamTam sur la route de Gosier. J’y rencontre enfin le deuxième personnage essentiel de ce festival, Gérard Poumaroux, directeur du centre culturel Sonis, mais aussi bassiste de profession et ancien directeur musical de l’orchestre de Mory Kanté. Accras, poisson et petit punch, la fin de soirée est chaude et conviviale. Je rentre à l’hôtel à 3h, 8h du matin pour moi (heure de Paris). Je suis aux anges, pas fatigué et persuadé que plein de merveilleuses surprises m’attendent encore pendant ce trop court séjour antillais.

Je n’ai pas tort. Le lendemain, devant le centre culturel Sonis, est offert gratuitement un plateau « afro caribéen » superbe et généreux avec Cheick Tidiane Seck en finale (triomphe public mérité !) et l’inconnu Yann Négrit en première partie. Ce jeune guitariste guadeloupéen et scatteur à la mode Benson est né en Métropole. Il vient pour la première fois, face à un public antillais, se ressourcer au pays pour nous inviter à découvrir sa vision neuve et musclée du zouk, mélange explosif de jazz, de ka et de métal. A preuve son premier album autoproduit « Wild Ka » (www.yannnegrit.com). A ses côtés, une rythmique inédite d’enfer composée de Michel Alibo (Sixun) à la basse et de Damien Schmitt à la batterie. Celui qu’on a surnommé à juste titre « Le Paco Sery blanc » impressionne d’emblée par sa frappe sèche et violente, son ardeur polyrythmique hors du commun et sa science métronomique du tempo. Ce jeune homme est vraiment un surdoué. Est-ce pour cela qu’il a choisi de quitter bien vite la France pour tenter l’aventure en Californie ? Il vit aujourd’hui à Montréal, accompagne Jean-Luc Ponty et tourne régulièrement en Russie avec un groupe de jazz rock Impact Fuze. Il faut suivre de très près l’avenir de ce batteur plein d’abattage joyeux et d’énergie positive ;

Entre Yann Négrit et Cheick Tidiane Seck, notre coup de foudre d’ÎloJazz aura été sans conteste pour « Wèspè pour Ayiti ». A savoir, l’histoire d’une rencontre improbable et totalement convaincante pour exprimer musicalement ensemble un profond sentiment de solidarité et de respect envers le peuple haïtien. Ce projet est né à l’initiative du « Rézo Karayib», fédération créée en 2010 par des festivals créolophones en vue d’agir d’une meilleure circulation des œuvres et des musiciens dans la Caraïbe. Cette fédération jeune et encore hésitante rassemble aujourd’hui le festival de jazz de Port-au-Prince (Joël Widmaïer), le festival Jazz’n’Creole de la Dominique, (Sobers Esprit), Jazz in The South de Sainte Lucie, le Centre culturel de Rencontres de Fonds Saint-Jacques (Martinique) dirigé depuis quelques mois par Coline Tousom, le Lamentin Jazz Festival, Martinique Jazz Festival (Georges-Louis Lebon et Frédéric Thalys, ses nouveaux responsables) et, bien sûr, ÎloJazz avec Jocelyne Daril et Gérard Poumaroux comme représentants.

Créé en 2011 à Sainte Lucie, repris au Lamentin Jazz festival en Martinique au printemps dernier, le projet « Wèspè pou Ayiti » a été imaginé et réalisé par trois musiciens antillais. A savoir, le pianiste saint-lucien Richard Payne, le batteur guadeloupéen Sonny Troupé et le trompettiste haïtien Jean Caze qui joue aujourd’hui dans l’orchestre du chanteur crooner Michael Bublé. Le résultat est enthousiasmant. Je lance un appel pour que cette création groovy, originale et festive trouve rapidement un écho favorable auprès des responsables de
festival de jazz « métropolitain ». Je m’engage ici à leur assurer un succès immédiat auprès de leur public tant la musique afro caribéenne que délivre avec bonheur ce groupe très soudé est riche et généreuse. A bons entendeurs…

Après la soirée du vendredi consacrée aux « musiques urbaines » où l’on a pu apprécier le rap sensuel et naturel de là jeune américaine d’origine ghanéenne Akua Naru, flanquée d’une jeune escouade teutonne quelque peu raide pour l’accompagner (elle vit aujourd’hui à Cologne), le point d’orgue de cette quatrième édition d’ÎloJazz fut le double concert du dimanche 16 décembre place de la Victoire à Pointe-à-Pitre. En première partie, la star locale, Tanya Sant-Val déconcerta au début, puis conquit finalement le public venu nombreux l’applaudir en se révélant « autrement » (comme l’affirmait le programme).Il faut préciser qu’elle avait courageusement choisi, lors ce concert « carte blanche », de jazzifier son zouk avec flamme et énergie en s’entourant pour l’occasion de musiciens de jazz comme Maître Alain-Jean Marie (tout heureux de jouer sur la place où il a vécu toute son enfance), Thierry Fanfant à la basse, Franck Nicolas à la trompette, Grégory Louis à la batterie et, enfin, Jean-Christophe Maillard à la guitare. Ce Guadeloupéen blanc qui vit aujourd’hui à New York (où il accompagne Richard Bona), a été pour moi une vraie révélation humaine et musicale. J’attends avec impatience son deuxième opus qui fait suite à son très original « Grand Baton ». (www.myspace.com/grandbaton)

Il revint enfin au « Parrain » de cette édition d’ÎloJazz de conclure en beauté les festivités. Il s’agit du tambour major du jazz fusion, le grand Billy Cobham, explosif derrière son impressionnant set de batterie. Pendant près de deux heures, ce jeune homme de 69 ans a enchainé toute une joyeuse ribambelle de thèmes toniques, riches d’une savante complexité rythmique, à partir desquels ont pu en toute liberté et sécurité s’éclater ses musiciens. Parmi eux, deux Français : Jean-Marie-Ecay à la guitare (que l’on ne présente plus), mais aussi une jeune clavieriste étrangement encore inconnue des médias et pourtant formidable, Camelia Ben Naceur. Née à Lourdes d’un père tunisienne et d’une mère espagnole, cette pianiste vif-argent que l’on peut entendre sur le tout dernier album du saxophoniste Frédéric Borey (« The Option » Fresh Sound New Talent) manifeste une volonté rythmique rieuse et une joie de jouer vraiment communicative. Philippe Meziat, il ya trois ans dans Jazz magazine, a été le premier à nous alerter sur son talent naissant. Elle lui confiait : « Sur scène, on est dans l’arène, on se met en en position d’être vue et entendue, on se met en danger. Il faut l’accepter et même en profiter ». Et en faire généreusement profiter les autres. Mission accomplie, Camelia !

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Vendredi 13 décembre autour de midi. Vous vous retrouvez à Orly sous une pluie verglaçante. Responsable du Centre d’Information du Jazz (depuis 1985 !), vous avez la conscience tranquille d’avoir (enfin !) achevé, après deux années de réactualisations obstinées et obsessionnelles, la septième édition de « Jazz de France », le guide-annuaire qui a mobilisé pendant si longtemps votre attention et passion. Embarquement pour Pointe-à-Pitre. Départ à 15h, 8h de vol, 5h de décalage horaire. Quand vous arrivez en Guadeloupe à 18h (heure locale), vous êtes d’abord accueilli par cette douce moiteur tropicale qui vous fait oublier immédiatement l’hiver et vous fouette sans prévenir d’une énergie vitale insoupçonnée. On vous conduit à Gosier dans un hôtel 4 étoiles au bord de la mer pour y déposer vos valises pour repartir aussitôt direction le Pavillon de la Culture à Pointe-à-Pitre pour la soirée officielle d’ouverture de la quatrième édition d’ÎloJazz. Deux petits punch et vous oubliez très vite votre jet flag. Auréolée d’un superbe chapeau blanc, Jocelyne Daril, coorganisatrice du festival et directrice des Actions & Politiques culturelles de la Communauté d’agglomération Cap Excellence, vous accueille avec chaleur et vous fait la fête comme si on se connaissait depuis longtemps. Vous vous dites alors comme une évidence : « Quel bonheur d’être en Guadeloupe ! »

D’autant plus qu’au menu de cette soirée inaugurale, sur scène, vous découvrez pour la première fois le « Caribbean Jazz Group » du saxophoniste Jocelyn Ménard, entouré de la jeune garde du jazz antillais, à savoir Grégory Privat au piano et Sonny Troupé, fantastique batteur magnifiquement enraciné dans la tradition Gawka guadeloupéenne. Attention : retenez bien son nom. Voilà un Ka à part à ne pas oublier. Un disque sous son nom devrait enfin sortir prochainement. Quant à Jocelyn Ménard, canadien qui parle le créole avec un délicieux accent québécois et qui dirige depuis 1997 une école de jazz en Guadeloupe, Men Art Music, il propose un jazz caribéen tonique et voluptueux. A preuve, l’excellent album « Terre Mère » qu’il vient d’autoproduite et pour lequel il recherche un distributeur en Métropole. Avis à la population !

A peine remis de mes premières émotions musicales, Jocelyne Daril me prévient. «Vous n’allez pas vous coucher tout de suite » et m’invite avec une force de conviction irrésistiblement speedée à l’accompagner au centre culturel Sonis pour assister à la répétition du concert que va donner le lendemain Cheick Tidiane Seck, grand maître du « MandinGroove ». Quand ce merveilleux musicien vous déclare « je suis mossi, je suis toucouleur, je suis sénoufo, je suis malinké, je suis touareg, je suis malien, je suis africain », il faut le croire. Car ce claviériste au sourire radieux est vraiment panafricaniste dans l’âme. A preuve, ses musiciens, comme le chanteur Kabiné Kouyaté, griot inné, fils du Guinéen El Hadj Sory Kandia Kouyaté, légendaire voix d’or du mandingue. Mais aussi le batteur américain rasta Marque Gilmore qui, derrière son avalanche de tambours et sa pyramide de cymbales s’affirme comme l’un des percussionnistes les plus extraordinaires de l’époque. Un vrai choc !

La soirée n’est pas finie. Nous partons avec les musiciens et l’équipe du festival diner au TamTam sur la route de Gosier. J’y rencontre enfin le deuxième personnage essentiel de ce festival, Gérard Poumaroux, directeur du centre culturel Sonis, mais aussi bassiste de profession et ancien directeur musical de l’orchestre de Mory Kanté. Accras, poisson et petit punch, la fin de soirée est chaude et conviviale. Je rentre à l’hôtel à 3h, 8h du matin pour moi (heure de Paris). Je suis aux anges, pas fatigué et persuadé que plein de merveilleuses surprises m’attendent encore pendant ce trop court séjour antillais.

Je n’ai pas tort. Le lendemain, devant le centre culturel Sonis, est offert gratuitement un plateau « afro caribéen » superbe et généreux avec Cheick Tidiane Seck en finale (triomphe public mérité !) et l’inconnu Yann Négrit en première partie. Ce jeune guitariste guadeloupéen et scatteur à la mode Benson est né en Métropole. Il vient pour la première fois, face à un public antillais, se ressourcer au pays pour nous inviter à découvrir sa vision neuve et musclée du zouk, mélange explosif de jazz, de ka et de métal. A preuve son premier album autoproduit « Wild Ka » (www.yannnegrit.com). A ses côtés, une rythmique inédite d’enfer composée de Michel Alibo (Sixun) à la basse et de Damien Schmitt à la batterie. Celui qu’on a surnommé à juste titre « Le Paco Sery blanc » impressionne d’emblée par sa frappe sèche et violente, son ardeur polyrythmique hors du commun et sa science métronomique du tempo. Ce jeune homme est vraiment un surdoué. Est-ce pour cela qu’il a choisi de quitter bien vite la France pour tenter l’aventure en Californie ? Il vit aujourd’hui à Montréal, accompagne Jean-Luc Ponty et tourne régulièrement en Russie avec un groupe de jazz rock Impact Fuze. Il faut suivre de très près l’avenir de ce batteur plein d’abattage joyeux et d’énergie positive ;

Entre Yann Négrit et Cheick Tidiane Seck, notre coup de foudre d’ÎloJazz aura été sans conteste pour « Wèspè pour Ayiti ». A savoir, l’histoire d’une rencontre improbable et totalement convaincante pour exprimer musicalement ensemble un profond sentiment de solidarité et de respect envers le peuple haïtien. Ce projet est né à l’initiative du « Rézo Karayib», fédération créée en 2010 par des festivals créolophones en vue d’agir d’une meilleure circulation des œuvres et des musiciens dans la Caraïbe. Cette fédération jeune et encore hésitante rassemble aujourd’hui le festival de jazz de Port-au-Prince (Joël Widmaïer), le festival Jazz’n’Creole de la Dominique, (Sobers Esprit), Jazz in The South de Sainte Lucie, le Centre culturel de Rencontres de Fonds Saint-Jacques (Martinique) dirigé depuis quelques mois par Coline Tousom, le Lamentin Jazz Festival, Martinique Jazz Festival (Georges-Louis Lebon et Frédéric Thalys, ses nouveaux responsables) et, bien sûr, ÎloJazz avec Jocelyne Daril et Gérard Poumaroux comme représentants.

Créé en 2011 à Sainte Lucie, repris au Lamentin Jazz festival en Martinique au printemps dernier, le projet « Wèspè pou Ayiti » a été imaginé et réalisé par trois musiciens antillais. A savoir, le pianiste saint-lucien Richard Payne, le batteur guadeloupéen Sonny Troupé et le trompettiste haïtien Jean Caze qui joue aujourd’hui dans l’orchestre du chanteur crooner Michael Bublé. Le résultat est enthousiasmant. Je lance un appel pour que cette création groovy, originale et festive trouve rapidement un écho favorable auprès des responsables de
festival de jazz « métropolitain ». Je m’engage ici à leur assurer un succès immédiat auprès de leur public tant la musique afro caribéenne que délivre avec bonheur ce groupe très soudé est riche et généreuse. A bons entendeurs…

Après la soirée du vendredi consacrée aux « musiques urbaines » où l’on a pu apprécier le rap sensuel et naturel de là jeune américaine d’origine ghanéenne Akua Naru, flanquée d’une jeune escouade teutonne quelque peu raide pour l’accompagner (elle vit aujourd’hui à Cologne), le point d’orgue de cette quatrième édition d’ÎloJazz fut le double concert du dimanche 16 décembre place de la Victoire à Pointe-à-Pitre. En première partie, la star locale, Tanya Sant-Val déconcerta au début, puis conquit finalement le public venu nombreux l’applaudir en se révélant « autrement » (comme l’affirmait le programme).Il faut préciser qu’elle avait courageusement choisi, lors ce concert « carte blanche », de jazzifier son zouk avec flamme et énergie en s’entourant pour l’occasion de musiciens de jazz comme Maître Alain-Jean Marie (tout heureux de jouer sur la place où il a vécu toute son enfance), Thierry Fanfant à la basse, Franck Nicolas à la trompette, Grégory Louis à la batterie et, enfin, Jean-Christophe Maillard à la guitare. Ce Guadeloupéen blanc qui vit aujourd’hui à New York (où il accompagne Richard Bona), a été pour moi une vraie révélation humaine et musicale. J’attends avec impatience son deuxième opus qui fait suite à son très original « Grand Baton ». (www.myspace.com/grandbaton)

Il revint enfin au « Parrain » de cette édition d’ÎloJazz de conclure en beauté les festivités. Il s’agit du tambour major du jazz fusion, le grand Billy Cobham, explosif derrière son impressionnant set de batterie. Pendant près de deux heures, ce jeune homme de 69 ans a enchainé toute une joyeuse ribambelle de thèmes toniques, riches d’une savante complexité rythmique, à partir desquels ont pu en toute liberté et sécurité s’éclater ses musiciens. Parmi eux, deux Français : Jean-Marie-Ecay à la guitare (que l’on ne présente plus), mais aussi une jeune clavieriste étrangement encore inconnue des médias et pourtant formidable, Camelia Ben Naceur. Née à Lourdes d’un père tunisienne et d’une mère espagnole, cette pianiste vif-argent que l’on peut entendre sur le tout dernier album du saxophoniste Frédéric Borey (« The Option » Fresh Sound New Talent) manifeste une volonté rythmique rieuse et une joie de jouer vraiment communicative. Philippe Meziat, il ya trois ans dans Jazz magazine, a été le premier à nous alerter sur son talent naissant. Elle lui confiait : « Sur scène, on est dans l’arène, on se met en en position d’être vue et entendue, on se met en danger. Il faut l’accepter et même en profiter ». Et en faire généreusement profiter les autres. Mission accomplie, Camelia !