Jazz live
Publié le 27 Juin 2023

Wolfi Jazz Festival, III, pt. 1 : Franck Wolf & Mieko Miyazaki 6tet

Au Wolfi Jazz festival, la dernière soirée est toujours la plus courte, mais souvent aussi la plus intense. À la fin de cette édition All Stars, et presque Best-Off, puisqu’elle aura rassemblé de nombreux musiciens qui y ont déjà joué plusieurs fois (Dee Dee Bridgewater, l’Amazing Keystone Big Band, Marcus Miller…), on se retrouve pour une soirée dédiée au groove, le meilleur comme le plus éclectique. Si la chose semble assez évidente à l’évocation du nom de Marcus Miller, elle peut moins l’être quand on parle du koto de Mieko Miyazaki, cet instrument japonais qui, avec ses 13 cordes allongées sur une table de bois massif, est comme un lointain, très lointain parent de la pedal steel guitar… Et même pour Marcus Miller, qui est aujourd’hui bien installé dans nos oreilles, il est toujours bon de rappeler que les métissages dont résulte sa musique ne tombent pas sous le sens. Bien heureusement pour moi, les deux concerts de ce soir ne m’ont pas posé plus de questions : ils m’ont donné les réponses. Première partie : Franck Wolf & Mieko Miyazaki 6tet. Marcus Miller à retrouver dans un prochain article...

FRANCK WOLF & MIEKO MIYAZAKI 6TET

Ce projet unique au monde est, figurez-vous, une création vosgienne. Créé il y a un an pour le festival Au Grés Du Jazz, à La Petite Pierre (67), par le saxophoniste strasbourgeois Franck Wolf, ce sextette est rassemblé ce soir pour la deuxième fois. L’histoire de Wolf avec la japonaise Mieko Miyazaki et son koto est bien plus ancienne toutefois. Cela fait maintenant 9 ans qu’ils jouent ensemble, dans un duo nommé ‘Dankin’. Cette rencontre était initialement portée par l’idée d’un échange culturel, et sans doute par le défi d’intégrer un instrument de musique traditionnelle au sein d’un groupe qui promeut le swing. Mieko, elle, n’est pas tout à fait nouvelle à la scène jazz, et on l’a découverte en trio avec Nguyên Lê et Prabhu Edouard chez Act, pour l’album « Saiyuki ». Le reste de la formation est proche de Franck Wolf, ce sont des jeunes musiciens parisiens ou alsaciens que le saxophoniste a pris sous son aile : Arthur Henn à la contrebasse, Philippe Maniez à la batterie, Grégory Ott au piano. Le clarinettiste Stéphane Chausse, lui, est le second souffleur, la joue droite du saxophoniste.

Au concert de commencer. Si le public semble d’abord curieux ou intrigué, bien vite il ne se soucie plus de l’étrange instrument, dès lors que Mieko se met à en jouer, pour en révéler la beauté familière. Nos oreilles veulent les accompagner dans leur voyage aux ambiances multiples, aux nombreux rebondissements.

Ce n’est plus à démontrer, mais ce voyage est audacieux. Le troisième morceau en est la preuve. Franck Wolf explique que cette pièce traditionnelle alsacienne, Hilf O Himmel qu’il tient de Roger Siffer, contient des influences celtiques, et que, par conséquent, Mieko a voulu lui donner des paroles en japonais.

Soudain, le son du koto nous rappelle la harpe celtique de Kirsten Noguès, dans les motifs modaux propre à la musique celtique, mais aussi dans ces arpèges assurés, et la profondeur d’interprétation qui relie ces deux musiciennes, maîtresses de leur instrument. Avec le contrebassiste qui joue à l’archet, les cordes s’assemblent, tandis que le sax alto et la clarinette dialoguent dans une très grande complicité.

Les musiciens multiplient les références en s’attaquant à Joe Zawinul, puis la place est faite à la rhythmique dans un morceau intitulé Drums, qui reprend le thème des formations de percussions traditionnelles japonaises, en imitant des motifs typiques, illustrant le glissement de la tradition à l’émancipation par l’improvisation.

 

Walden Gauthier