Deux Escales dans le monde de Michel Legrand

Trois ans (et un jour) après la mort du compositeur, et alors qu’approche le 90ème anniversaire de sa naissance, la Maison de la Radio (et de la Musique) célébrait son œuvre en trois concerts, autour de ses chansons, de ses partitions pour le cinéma, et du jazz (cette série de concerts, initialement prévue en janvier 2020, avait été ajournée pour cause de grève, et l’année suivante pour cause de pandémie). Le chroniqueur assistait aux premier et dernier volets, car le deuxième soir, il était ailleurs (lire la chronique de la soirée d’ouverture du festival Sons d’Hiver ici).

Michel Legrand ‘La musique enchantée’

Natalie Dessay, Camille Bertault, Macha Méril (voix), Claude Egea (trompette & bugle), Denis Leloup (trombone), Hervé Sellin (piano), Pierre Boussaguet (contrebasse), François Laizeau (batterie), Jean-Claude Vannier (célesta)

Les cordes de l’Orchestre Philharmonique de Radio France

Direction Mathieu Herzog

Paris, Maison de la Radio, grand auditorium, 27 janvier 2022, 20h

Le premier concert va puiser dans les chansons, celles chantées par le compositeur, ou écrites pour d’autres, et quelques-unes issues du cinéma, celui de Jacques Demy bien sûr, mais d’autres aussi. En ouverture, Macha Méril parle au public de celui dont elle fut la dernière compagne, et chante Celui-là, texte que Michel Legrand avait enregistré en 1964. Ensuite la comédienne évoque la mémoire du compositeur et présente les interprètes. Puis l’orchestre joue Family Fugue, savant mélange d’un certain art de la fugue et d’une certaine vision du jazz. Camille Bertault fait son entrée sur scène pour chanter What are you doing the rest of your life ? , naguère immortalisé par Sarah Vaughan. Et elle chante à hauteur de l’enjeu. Elle enchaînera avec un thème des Demoiselles de Rochefort, puis avec la recette du cake d’Amour de Peau d’Âne. Voici venir Natalie Dessay pour ‘Les conseils de la Fée des Lilas’ (Peau d’Âne ) puis Le Cinéma, composé pour Nougaro, ici chanté en version partiellement féminisée, avant une très belle version de La Valse des Lilas. Beaucoup de beaux moments à découvrir en réécoute, sur le site de France Musique ici ; en particulier Mon dernier concert, texte posthume de Nougaro mis en musique par Legrand, et l’hommage (texte et musique) de Jean-Claude Vannier, Pour Michel, qui verra le compositeur-auteur-arrangeur jouer deux brefs interludes au célesta. Les deux chanteuses s’associeront pour les trois chansons conclusives. L’orchestre philharmonique et le groupe de jazz ont été impeccables ; et le chroniqueur, venu en curieux, n’a pas boudé son plaisir !

Michel Legrand ‘Jazz’

Fred Pallem & Le Sacre du Tympan

Fred Pallem (guitare basse, arrangements, direction artistique), Vincent Taeger (batterie), Guillaume Magne (guitare), Fred Escoffier (piano, claviers), Guillaume Lantonnet (percussions, claviers), Brice Pichard (trompette), Fabrice Martinez (trompette & bugle), Michaël Joussein (trombone, voix), Rémi Sciutto (saxophones alto & soprano), Frédéric Couderc (saxophone baryton, clarinette), Sylvain Rifflet (saxophone ténor), Alice Lewis (voix). Cordes sous la direction de Mathieu Herzog

Paris, Maison de la Radio, studio 104, 29 janvier 2022, 19h30

Pour ce concert accueilli par la série ‘Jazz sur le Vif’, c’est Le Sacre du Tympan qui officie, avec un répertoire qui n’est pas exclusivement dédié au versant jazz de Michel Legrand. Quand on connaît le goût de Fred Pallem pour puiser dans d’autres répertoires, cela semble d’évidence. Et pour interpréter la musique de Michel Legrand, c’est un choix des plus pertinents. Quelques autres arrangements que ceux du leader, signés notamment par Fred Escoffier et Jean-Claude Vannier. En chantant La Chanson de Delphine, extraite des Demoiselles de Rochefort, la chanteuse m’a fait regretter que l’on n’ait pas convié Jeanne Added, qui dans un disque de Stéphane Kerecki avait donné une version absolument bouleversante de son versant masculin, La Chanson de Maxence, sur la même mélodie. Mais Alice Lewis fut ensuite plus à l’aise sur On The Road, naguère chanté par Petula Clark pour un film d’Anatole Litvak. De très beaux moments de jazz, avec le sax ténor de Sylvain Rifflet (sur des thèmes composés par Legrand pour Stan Getz, avec dans Gossiping de vertigineux unissons en scat de Michaël Joussein). Et les improvisations de Fabrice Martinez ; sans oublier l’intensité de Rémi Sciutto à l’alto pour un exposé mélodique, et au soprano dans une folle improvisation. Bref le chroniqueur, qui est un Jazz Fan, a souvent trouvé son bonheur.

Xavier Prévost

Le concert du Sacre du Tympan n’était pas en direct, mais il sera diffusé sur France Musique, probablement le samedi 12 mars à 19h dans l’émission ‘Jazz Club’ d’Yvan Amar