Jazz live
Publié le 31 Juil 2012

L'Aurore d'un duo : Sara et Ran

Première apparition parisienne de la juvénile Sara Serpa (et non « Sherpa », comme elle fut annoncée, même si les cimes les plus risquées de l’art vocal lui sont familières), accompagnée-parrainée par un Ran Blake dont visuellement elle souligne inévitablement et admirativement la stature patriarcale.

 

American Jazz Festiv’halles : Ran Blake (piano) & Sara Serpa (vocal).

Paris, Sunside, 60, rue des Lombards. Vendredi 27 juillet.

Bien que, sur le marché français, deux CD aient précédé ce concert inaugural (“Camera Obscura”, en duo avec le pianiste, et “Mobile”, sous sa seule responsabilité – tous deux chroniqués avec enthousiasme par le signataire de ces lignes), un public parigo-estival s’était déplacé, en majorité, autant pour revoir le trop rare improvisateur, à la fois sourcier et mémoire d’innombrables régions et richesses musicales, que pour savourer en direct la nouvelle “découverte” de ce talent scout à qui l’on devait – il y a un demi-siècle ! – celle de l’inoubliable Jeanne Lee. Irrésistible contraste d’emblée, ou plutôt parfaite osmose, quasi picturale, des deux extrêmes : fraîcheur à la softitude fascinante et profondeur presque vertigineuse, fluidité au gré des registres (cette « magie » à quoi le pianiste rend hommage – jusqu’à des aigus au ciselage coloraturesque) et d’un lyrisme sans emphase et jeux de silences où thèmes et trames harmoniques se limitent à d’intenses et décisifs fragments, entre esquisses et filigranes, soit une collection de dialogues aussi brefs et intenses que des pièces weberniennes ou des échanges de trapézistes. Et tout cela en un chapelet de standards (Fine And Dandy, When Sunny Gets Blue, Get Out of Town, I Should Care…) à la fois déniaisés (notamment Girl From Ipanema – jadis reprise avec Jeanne Lee puis en piano solo : Garota d’Ipanema) et gravés par la grâce de puissants traits pianistiques ponctuant-cernant des volutes phoniques aussi concises que fidèles à l’essence thématique. Autre vertu remarquable d’un tel duo, qui en rappelle la genèse : l’intégration par la vocaliste des références cinéphiliques du pianiste-compositeur, dont elle semble explorer le répertoire avec délice (qui se souvient de la bande-son, pourtant signée Dimitri Tiomkin, de l’Inconnu du Nord Express de Hitchcock ?). Et pour varier des plaisirs déjà exquis, Ran Blake nous offrira un de ces solos qui en moins de deux minutes témoignera de sa virtuosité d’alchimiste harmonique et de sa maîtrise du suspense, tandis qu’accoudé sur le piano il contemplera avec ravissement (regard qui n’était pas sans rappeler celui hypnotisé de Basie par le piano de Monk dans le film “The Sound of jazz”) Sara Serpa osant nous dévoiler a cappella un fado aux résonances impressionnantes même pour les moins lusophones ou, avec une audace et une conviction apparemment sereines, dénuées de tout pathos, le poème (« un protest song » précisera-t-elle à l’intention des plus jeunes et/ou amnésiques) Strange Fruit écrit en 1937 par Abel Meeropol (“Lewis Allan”) et marqué à jamais par l’interprétation de Billie Holiday (sans négliger celle de Nina Simone)… Entre autres surprises qu’allait réserver le second set : un Driftwood en duo avec l’assistant de Ran, Aaron Hartley, au trombone, Tender as a Rose en solo et, pour souligner encore la cinéphilie singulière du compositeur-improvisateur Ran Blake, une nouvelle lecture de son Doktor Mabuse… 

 Pour qui suit la biodiscographie de Ran Blake et celle, naturellement plus brève, de Sara Serpa, il suffirait de préciser le titre choisi pour l’ensemble de ce spectacle (qui est aussi celui d’un CD Clean Feed – le très prolifique label portugais) à paraître bientôt : “Aurora”, dont l’aujourd’hui terrible polysémie ne saurait laisser indifférent, surtout quand on sait que le pianiste a toujours fait montre à travers son œuvre d’une mémoire formidablement active (multipliant hommages et références à des personnages disparus – ce soir-là, par exemple à la Short Life of Barbara Monk). Tout cela – bien insuffisant (une raison extra-musicale m’ayant contraint d’écourter en catastrophe ma soirée rue des Lombards) pour rendre à peine compte d’instants aussi émouvants – afin d’offrir un écho minimal et, surtout, d’aiguiser votre envie d’entendre sans trop attendre ces deux artistes, ensemble et/ou séparément (peu de temps avant ce concert, nous souffle un producteur entre les deux sets, Ran Blake venait d’enregistrer la matière de deux albums : une série de duos et un nouvel exemple de sa passion cinéphilique). Patience, donc, mais, comme dirait l’ami Quenum, à quoi pensent les organisateurs de concerts et festivals français qui n’ont pas déjà noté sur leurs tablettes les noms de Sara Serpa et Ran Blake, en duo, solo ou n’importe quel contexte de leur choix ?

Philippe Carles


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Première apparition parisienne de la juvénile Sara Serpa (et non « Sherpa », comme elle fut annoncée, même si les cimes les plus risquées de l’art vocal lui sont familières), accompagnée-parrainée par un Ran Blake dont visuellement elle souligne inévitablement et admirativement la stature patriarcale.

 

American Jazz Festiv’halles : Ran Blake (piano) & Sara Serpa (vocal).

Paris, Sunside, 60, rue des Lombards. Vendredi 27 juillet.

Bien que, sur le marché français, deux CD aient précédé ce concert inaugural (“Camera Obscura”, en duo avec le pianiste, et “Mobile”, sous sa seule responsabilité – tous deux chroniqués avec enthousiasme par le signataire de ces lignes), un public parigo-estival s’était déplacé, en majorité, autant pour revoir le trop rare improvisateur, à la fois sourcier et mémoire d’innombrables régions et richesses musicales, que pour savourer en direct la nouvelle “découverte” de ce talent scout à qui l’on devait – il y a un demi-siècle ! – celle de l’inoubliable Jeanne Lee. Irrésistible contraste d’emblée, ou plutôt parfaite osmose, quasi picturale, des deux extrêmes : fraîcheur à la softitude fascinante et profondeur presque vertigineuse, fluidité au gré des registres (cette « magie » à quoi le pianiste rend hommage – jusqu’à des aigus au ciselage coloraturesque) et d’un lyrisme sans emphase et jeux de silences où thèmes et trames harmoniques se limitent à d’intenses et décisifs fragments, entre esquisses et filigranes, soit une collection de dialogues aussi brefs et intenses que des pièces weberniennes ou des échanges de trapézistes. Et tout cela en un chapelet de standards (Fine And Dandy, When Sunny Gets Blue, Get Out of Town, I Should Care…) à la fois déniaisés (notamment Girl From Ipanema – jadis reprise avec Jeanne Lee puis en piano solo : Garota d’Ipanema) et gravés par la grâce de puissants traits pianistiques ponctuant-cernant des volutes phoniques aussi concises que fidèles à l’essence thématique. Autre vertu remarquable d’un tel duo, qui en rappelle la genèse : l’intégration par la vocaliste des références cinéphiliques du pianiste-compositeur, dont elle semble explorer le répertoire avec délice (qui se souvient de la bande-son, pourtant signée Dimitri Tiomkin, de l’Inconnu du Nord Express de Hitchcock ?). Et pour varier des plaisirs déjà exquis, Ran Blake nous offrira un de ces solos qui en moins de deux minutes témoignera de sa virtuosité d’alchimiste harmonique et de sa maîtrise du suspense, tandis qu’accoudé sur le piano il contemplera avec ravissement (regard qui n’était pas sans rappeler celui hypnotisé de Basie par le piano de Monk dans le film “The Sound of jazz”) Sara Serpa osant nous dévoiler a cappella un fado aux résonances impressionnantes même pour les moins lusophones ou, avec une audace et une conviction apparemment sereines, dénuées de tout pathos, le poème (« un protest song » précisera-t-elle à l’intention des plus jeunes et/ou amnésiques) Strange Fruit écrit en 1937 par Abel Meeropol (“Lewis Allan”) et marqué à jamais par l’interprétation de Billie Holiday (sans négliger celle de Nina Simone)… Entre autres surprises qu’allait réserver le second set : un Driftwood en duo avec l’assistant de Ran, Aaron Hartley, au trombone, Tender as a Rose en solo et, pour souligner encore la cinéphilie singulière du compositeur-improvisateur Ran Blake, une nouvelle lecture de son Doktor Mabuse… 

 Pour qui suit la biodiscographie de Ran Blake et celle, naturellement plus brève, de Sara Serpa, il suffirait de préciser le titre choisi pour l’ensemble de ce spectacle (qui est aussi celui d’un CD Clean Feed – le très prolifique label portugais) à paraître bientôt : “Aurora”, dont l’aujourd’hui terrible polysémie ne saurait laisser indifférent, surtout quand on sait que le pianiste a toujours fait montre à travers son œuvre d’une mémoire formidablement active (multipliant hommages et références à des personnages disparus – ce soir-là, par exemple à la Short Life of Barbara Monk). Tout cela – bien insuffisant (une raison extra-musicale m’ayant contraint d’écourter en catastrophe ma soirée rue des Lombards) pour rendre à peine compte d’instants aussi émouvants – afin d’offrir un écho minimal et, surtout, d’aiguiser votre envie d’entendre sans trop attendre ces deux artistes, ensemble et/ou séparément (peu de temps avant ce concert, nous souffle un producteur entre les deux sets, Ran Blake venait d’enregistrer la matière de deux albums : une série de duos et un nouvel exemple de sa passion cinéphilique). Patience, donc, mais, comme dirait l’ami Quenum, à quoi pensent les organisateurs de concerts et festivals français qui n’ont pas déjà noté sur leurs tablettes les noms de Sara Serpa et Ran Blake, en duo, solo ou n’importe quel contexte de leur choix ?

Philippe Carles


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Première apparition parisienne de la juvénile Sara Serpa (et non « Sherpa », comme elle fut annoncée, même si les cimes les plus risquées de l’art vocal lui sont familières), accompagnée-parrainée par un Ran Blake dont visuellement elle souligne inévitablement et admirativement la stature patriarcale.

 

American Jazz Festiv’halles : Ran Blake (piano) & Sara Serpa (vocal).

Paris, Sunside, 60, rue des Lombards. Vendredi 27 juillet.

Bien que, sur le marché français, deux CD aient précédé ce concert inaugural (“Camera Obscura”, en duo avec le pianiste, et “Mobile”, sous sa seule responsabilité – tous deux chroniqués avec enthousiasme par le signataire de ces lignes), un public parigo-estival s’était déplacé, en majorité, autant pour revoir le trop rare improvisateur, à la fois sourcier et mémoire d’innombrables régions et richesses musicales, que pour savourer en direct la nouvelle “découverte” de ce talent scout à qui l’on devait – il y a un demi-siècle ! – celle de l’inoubliable Jeanne Lee. Irrésistible contraste d’emblée, ou plutôt parfaite osmose, quasi picturale, des deux extrêmes : fraîcheur à la softitude fascinante et profondeur presque vertigineuse, fluidité au gré des registres (cette « magie » à quoi le pianiste rend hommage – jusqu’à des aigus au ciselage coloraturesque) et d’un lyrisme sans emphase et jeux de silences où thèmes et trames harmoniques se limitent à d’intenses et décisifs fragments, entre esquisses et filigranes, soit une collection de dialogues aussi brefs et intenses que des pièces weberniennes ou des échanges de trapézistes. Et tout cela en un chapelet de standards (Fine And Dandy, When Sunny Gets Blue, Get Out of Town, I Should Care…) à la fois déniaisés (notamment Girl From Ipanema – jadis reprise avec Jeanne Lee puis en piano solo : Garota d’Ipanema) et gravés par la grâce de puissants traits pianistiques ponctuant-cernant des volutes phoniques aussi concises que fidèles à l’essence thématique. Autre vertu remarquable d’un tel duo, qui en rappelle la genèse : l’intégration par la vocaliste des références cinéphiliques du pianiste-compositeur, dont elle semble explorer le répertoire avec délice (qui se souvient de la bande-son, pourtant signée Dimitri Tiomkin, de l’Inconnu du Nord Express de Hitchcock ?). Et pour varier des plaisirs déjà exquis, Ran Blake nous offrira un de ces solos qui en moins de deux minutes témoignera de sa virtuosité d’alchimiste harmonique et de sa maîtrise du suspense, tandis qu’accoudé sur le piano il contemplera avec ravissement (regard qui n’était pas sans rappeler celui hypnotisé de Basie par le piano de Monk dans le film “The Sound of jazz”) Sara Serpa osant nous dévoiler a cappella un fado aux résonances impressionnantes même pour les moins lusophones ou, avec une audace et une conviction apparemment sereines, dénuées de tout pathos, le poème (« un protest song » précisera-t-elle à l’intention des plus jeunes et/ou amnésiques) Strange Fruit écrit en 1937 par Abel Meeropol (“Lewis Allan”) et marqué à jamais par l’interprétation de Billie Holiday (sans négliger celle de Nina Simone)… Entre autres surprises qu’allait réserver le second set : un Driftwood en duo avec l’assistant de Ran, Aaron Hartley, au trombone, Tender as a Rose en solo et, pour souligner encore la cinéphilie singulière du compositeur-improvisateur Ran Blake, une nouvelle lecture de son Doktor Mabuse… 

 Pour qui suit la biodiscographie de Ran Blake et celle, naturellement plus brève, de Sara Serpa, il suffirait de préciser le titre choisi pour l’ensemble de ce spectacle (qui est aussi celui d’un CD Clean Feed – le très prolifique label portugais) à paraître bientôt : “Aurora”, dont l’aujourd’hui terrible polysémie ne saurait laisser indifférent, surtout quand on sait que le pianiste a toujours fait montre à travers son œuvre d’une mémoire formidablement active (multipliant hommages et références à des personnages disparus – ce soir-là, par exemple à la Short Life of Barbara Monk). Tout cela – bien insuffisant (une raison extra-musicale m’ayant contraint d’écourter en catastrophe ma soirée rue des Lombards) pour rendre à peine compte d’instants aussi émouvants – afin d’offrir un écho minimal et, surtout, d’aiguiser votre envie d’entendre sans trop attendre ces deux artistes, ensemble et/ou séparément (peu de temps avant ce concert, nous souffle un producteur entre les deux sets, Ran Blake venait d’enregistrer la matière de deux albums : une série de duos et un nouvel exemple de sa passion cinéphilique). Patience, donc, mais, comme dirait l’ami Quenum, à quoi pensent les organisateurs de concerts et festivals français qui n’ont pas déjà noté sur leurs tablettes les noms de Sara Serpa et Ran Blake, en duo, solo ou n’importe quel contexte de leur choix ?

Philippe Carles


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Première apparition parisienne de la juvénile Sara Serpa (et non « Sherpa », comme elle fut annoncée, même si les cimes les plus risquées de l’art vocal lui sont familières), accompagnée-parrainée par un Ran Blake dont visuellement elle souligne inévitablement et admirativement la stature patriarcale.

 

American Jazz Festiv’halles : Ran Blake (piano) & Sara Serpa (vocal).

Paris, Sunside, 60, rue des Lombards. Vendredi 27 juillet.

Bien que, sur le marché français, deux CD aient précédé ce concert inaugural (“Camera Obscura”, en duo avec le pianiste, et “Mobile”, sous sa seule responsabilité – tous deux chroniqués avec enthousiasme par le signataire de ces lignes), un public parigo-estival s’était déplacé, en majorité, autant pour revoir le trop rare improvisateur, à la fois sourcier et mémoire d’innombrables régions et richesses musicales, que pour savourer en direct la nouvelle “découverte” de ce talent scout à qui l’on devait – il y a un demi-siècle ! – celle de l’inoubliable Jeanne Lee. Irrésistible contraste d’emblée, ou plutôt parfaite osmose, quasi picturale, des deux extrêmes : fraîcheur à la softitude fascinante et profondeur presque vertigineuse, fluidité au gré des registres (cette « magie » à quoi le pianiste rend hommage – jusqu’à des aigus au ciselage coloraturesque) et d’un lyrisme sans emphase et jeux de silences où thèmes et trames harmoniques se limitent à d’intenses et décisifs fragments, entre esquisses et filigranes, soit une collection de dialogues aussi brefs et intenses que des pièces weberniennes ou des échanges de trapézistes. Et tout cela en un chapelet de standards (Fine And Dandy, When Sunny Gets Blue, Get Out of Town, I Should Care…) à la fois déniaisés (notamment Girl From Ipanema – jadis reprise avec Jeanne Lee puis en piano solo : Garota d’Ipanema) et gravés par la grâce de puissants traits pianistiques ponctuant-cernant des volutes phoniques aussi concises que fidèles à l’essence thématique. Autre vertu remarquable d’un tel duo, qui en rappelle la genèse : l’intégration par la vocaliste des références cinéphiliques du pianiste-compositeur, dont elle semble explorer le répertoire avec délice (qui se souvient de la bande-son, pourtant signée Dimitri Tiomkin, de l’Inconnu du Nord Express de Hitchcock ?). Et pour varier des plaisirs déjà exquis, Ran Blake nous offrira un de ces solos qui en moins de deux minutes témoignera de sa virtuosité d’alchimiste harmonique et de sa maîtrise du suspense, tandis qu’accoudé sur le piano il contemplera avec ravissement (regard qui n’était pas sans rappeler celui hypnotisé de Basie par le piano de Monk dans le film “The Sound of jazz”) Sara Serpa osant nous dévoiler a cappella un fado aux résonances impressionnantes même pour les moins lusophones ou, avec une audace et une conviction apparemment sereines, dénuées de tout pathos, le poème (« un protest song » précisera-t-elle à l’intention des plus jeunes et/ou amnésiques) Strange Fruit écrit en 1937 par Abel Meeropol (“Lewis Allan”) et marqué à jamais par l’interprétation de Billie Holiday (sans négliger celle de Nina Simone)… Entre autres surprises qu’allait réserver le second set : un Driftwood en duo avec l’assistant de Ran, Aaron Hartley, au trombone, Tender as a Rose en solo et, pour souligner encore la cinéphilie singulière du compositeur-improvisateur Ran Blake, une nouvelle lecture de son Doktor Mabuse… 

 Pour qui suit la biodiscographie de Ran Blake et celle, naturellement plus brève, de Sara Serpa, il suffirait de préciser le titre choisi pour l’ensemble de ce spectacle (qui est aussi celui d’un CD Clean Feed – le très prolifique label portugais) à paraître bientôt : “Aurora”, dont l’aujourd’hui terrible polysémie ne saurait laisser indifférent, surtout quand on sait que le pianiste a toujours fait montre à travers son œuvre d’une mémoire formidablement active (multipliant hommages et références à des personnages disparus – ce soir-là, par exemple à la Short Life of Barbara Monk). Tout cela – bien insuffisant (une raison extra-musicale m’ayant contraint d’écourter en catastrophe ma soirée rue des Lombards) pour rendre à peine compte d’instants aussi émouvants – afin d’offrir un écho minimal et, surtout, d’aiguiser votre envie d’entendre sans trop attendre ces deux artistes, ensemble et/ou séparément (peu de temps avant ce concert, nous souffle un producteur entre les deux sets, Ran Blake venait d’enregistrer la matière de deux albums : une série de duos et un nouvel exemple de sa passion cinéphilique). Patience, donc, mais, comme dirait l’ami Quenum, à quoi pensent les organisateurs de concerts et festivals français qui n’ont pas déjà noté sur leurs tablettes les noms de Sara Serpa et Ran Blake, en duo, solo ou n’importe quel contexte de leur choix ?

Philippe Carles